Comment se libérer de la colère
suivi de deux histoires bouddhistes
Vénérable K. Piyatissa Thera1, 1994
Traduit par Jeanne Schut
http://www.dhammadelaforet.org/
Le but ultime du bouddhisme est un état au-delà de la mort, le nibbāna, la seule réalité. Par conséquent, celui qui aspire à cet état est censé renoncer à la poursuite du succès et des attachements éphémères du monde pour se consacrer à cette réalité. Cependant, rares sont les personnes suffisamment mûres pour travailler sur elles-mêmes et atteindre cet état dans cette vie. C’est pourquoi le Bouddha ne pousse pas au renoncement ceux qui n’ont pas la capacité spirituelle de s’engager dans une vie plus élevée.
Dans ce cas, on suit la voie du monde ordinaire qui présente deux types d’avantages : les bienfaits que l’on peut obtenir dans cette vie et ceux que l’on peut obtenir dans les vies futures, comme des étapes sur la voie spirituelle. Tout en appréciant les plaisirs de la vie, on doit toutefois considérer son corps comme un instrument servant à pratiquer la vertu pour son propre bien et pour celui d’autrui. En bref, il s’agit de mener une vie d’intégrité morale et de simplicité, et de savoir se contenter de peu. Concernant les biens matériels, le Bouddha a dit qu’il fallait être « diligent et énergique » pour les acquérir, et « attentif et économe » pour les protéger.
Cependant, même en se comportant ainsi, il n’est pas impossible que l’on soit, d’une manière ou d’une autre, perturbé ou tourmenté à cause des faits et gestes de personnes désagréables ou mauvaises. Il peut arriver que, dans une telle situation, on soit tenté d’abandonner le chemin vertueux que l’on a choisi. Pourtant, c’est dans des moments pareils qu’il faut se souvenir des enseignements qui permettent de retrouver la paix. Voici ce que nous dit le Bouddha à ce propos : « Les autres feront peut-être du mal mais moi, je ne causerai aucun mal. C’est ainsi que je m’entraîne ». Nous ne devons pas oublier que l’esprit tout entier du bouddhisme est orienté vers la pacification. Dans le climat calme et serein de l’enseignement du Bouddha, nous avons toutes les chances, toutes les possibilités, d’effacer de notre esprit haine, jalousie et violence.
Il n’y a rien d’étonnant au fait que, dans notre quotidien, il nous arrive d’être en colère contre quelqu’un à propos d’une chose ou d’une autre. Cependant, nous ne devons pas permettre à ce sentiment de demeurer en nous. Nous devons essayer de le juguler dès l’instant où il apparaît. Généralement, on dit qu’il y a huit manières de brider ou de maîtriser la colère.
(1) La première méthode consiste à se remémorer les enseignements du Bouddha qui, à de nombreuses occasions, a exposé les désavantages d’un tempérament colérique. Voici l’une de ses leçons : « Supposez que des bandits attrapent l’un de vous et lui coupent bras et jambes avec une scie à deux manches. Si, de ce fait, il ressent de la colère, même à ce moment-là, il ne fait pas partie de mes disciples ». (Kakacupama Sutta, Majjhima Nikaya 21).
Et, à une autre occasion : « Un homme en colère est comme une bûche brûlée des deux côtés et souillée au milieu après avoir été utilisée dans un bûcher funéraire ; elle ne peut servir ni de bois de chauffage au village ni de bois de construction dans la forêt. » (Anguttara Nikaya II, 95).
Nous pouvons aussi bénéficier des nombreux conseils du Bouddha dispensés dans le Dhammapada :
« ‘On m’a insulté, on m’a frappé ! On m’a battu, on m’a volé !’ Ceux qui entretiennent de telles pensées ne verront jamais la fin de l’hostilité. » (Dhp, verset 4)
« Jamais les rancœurs ne seront apaisées par l’hostilité. Ce n’est qu’en s’abstenant de toute hostilité que les rancœurs seront apaisées. C’est une loi de tous les temps. » (Dhp, verset 5)
« Ne parle à personne avec violence car on pourrait te répondre de même. Ceux que tes paroles ont blessés peuvent te blesser à leur tour. » (Dhp, verset 133)
« Savoir tout supporter patiemment et maintenir le cap sur la libération, telles sont les vertus suprêmes selon les Êtres Éveillés. » (Dhp, verset 184)
« Abandonne la colère, finis-en avec l’orgueil, dépasse tous les obstacles et les empêchements. Quand tu es libre de tout attachement au corps et à l’esprit, entièrement libre, aucune souffrance ne jaillit. » (Dhp, verset 221)
« Vaincs les colériques par le calme, les méchants par la bonté, les avares par la générosité, les menteurs par la vérité. » (Dhp, verset 223)
« Veille à ce que la colère ne s’exprime pas en pensées, sache maîtriser tes pensées. Ayant cessé toute mauvaise conduite mentale, pratique une bonne conduite mentale. » (Dhp, verset 233)
(2) Si la contemplation de ces conseils du Bouddha ne réussit pas à apaiser la colère, on devra essayer la seconde méthode. Bien évidemment, toute personne, aussi mauvaise soit-elle, possède certaines qualités. Certains sont mauvais en esprit mais leurs paroles sont trompeuses ; ils agissent mal mais de manière sournoise, sans que l’on s’en doute. D’autres s’expriment de manière dure ou grossière mais ce n’est pas ainsi qu’ils agissent et qu’ils pensent. Certains sont grossiers et cruels en action mais leurs paroles et leurs pensées sont différentes. D’autres encore sont doux et bons en esprit, en parole et en action.
Lorsque nous sommes en colère contre quelqu’un, nous devons essayer de voir ce qui est bon en lui, que ce soit dans sa façon de penser, de parler ou d’agir. Si nous trouvons une qualité rédemptrice en lui, nous devons l’apprécier à sa juste valeur et ignorer ses défauts en les considérant comme des faiblesses naturelles que l’on peut trouver en chacun. Tandis que nous réfléchissons ainsi, notre esprit va s’adoucir et nous pourrons même ressentir de la bienveillance envers cette personne. Si nous développons cette façon de penser, nous parviendrons à réduire ou à éliminer notre colère envers elle.
Il arrive que cette méthode ne fonctionne pas. Nous devrons alors essayer un autre type de réflexion comme :
(3) « Il m’a fait du tort et, ce faisant, il a pollué son esprit. Alors pourquoi devrais-je polluer ou nuire à mon propre esprit à cause de la mauvaise action d’un autre ? Il a agi ainsi sous l’effet de la colère. Dois-je moi aussi le suivre sur cette voie en soulevant la colère dans mon propre esprit ? N’est-il pas stupide de l’imiter ? En nourrissant sa colère, il se détruit intérieurement. Pourquoi, à cause de lui, devrais-je détruire ma réputation ? »
(4) « Il m’arrive d’ignorer le soutien ou l’aide que m’offrent mes proches ; il m’arrive même de les faire pleurer à cause de ce que j’ai dit ou fait. Étant moi-même cette sorte de personne, pourquoi ne pourrais-je pas ignorer ce que cet homme m’a fait ? »
(5) « Tout change tout le temps. L’esprit et le corps changent sans arrêt eux aussi. Les pensées et le corps avec lesquelles ce tort m’a été fait n’existent plus en cet instant. Ce que je prends pour le même homme est en réalité un amalgame de pensées et de parties physiques différentes de celles qui m’ont fait du mal, même si elles appartiennent au même processus psycho-physique. Ainsi, une pensée associée à une masse de parties physiques m’ont fait du mal puis ont disparu sur-le-champ, laissant la place à d’autres pensées et d’autres parties physiques. Alors, avec lesquelles suis-je fâché ? Avec les pensées et les parties physiques qui sont parties et disparues ou avec les pensées et les parties physiques qui ne me causent aucun tort en cet instant ? Dois-je me mettre en colère contre une chose qui est innocente alors que c’est une autre chose qui m’a causé du tort et qui a maintenant disparu ?
« Le soi-disant ‘moi’ n’est pas le même d’un instant à l’autre. Au moment où le tort a été commis, il y avait une autre pensée et une autre masse de molécules que je considérais comme ‘moi’, tandis que ce que j’appelle ‘moi’ en cet instant, c’est une pensée et un ensemble de molécules différentes, même si elles appartiennent au même processus. C’est donc un autre être qui a causé du tort à quelqu’un d’autre et un autre qui se met en colère contre un autre. N’est-ce pas une situation ridicule ? »
Si nous observons ainsi, de très près, la nature exacte de notre vie et des événements qui se produisent, il est fort possible que notre colère s’apaise ou disparaisse sur-le-champ.
(6) Il existe une autre façon d’éliminer une colère montante. Supposons que nous pensions à quelqu’un qui nous a fait du mal. À de telles occasions, nous devons nous souvenir que, lorsque nous souffrons d’un tort que l’on nous a causé ou d’une perte, il s’agit du résultat de nos actions antérieures (karma). Même si des personnes sont en colère contre nous, elles ne pourraient pas nous blesser s’il n’y avait pas une force latente de karma passé négatif commis par nous qui profite de cette occasion pour provoquer notre adversaire. « C’est donc moi qui suis responsable de ce tort ou de cette perte, et personne d’autre. En même temps, tandis que je suis en train de subir le résultat d’un karma passé, si je me mets en colère et que je réponds à mon adversaire, je ne fais qu’accumuler encore plus de karma négatif, ce qui engendrera des résultats négatifs en conséquence. » Si nous nous rappelons cette loi du karma, il est possible que notre colère tombe immédiatement.
(7) Nous pouvons également voir une telle situation sous un autre angle : en tant que disciples du Bouddha, nous savons qu’avant d’atteindre l’Éveil total, tandis qu’il était encore Bodhisatta, il est passé par d’innombrables vies au cours desquelles il a perfectionné la vertu. Il a lui-même raconté l’histoire de certaines de ses vies passées pour illustrer son enseignement sur la pratique de certaines de ces vertus. La vie du prince Dhammapala et celle de l’ascète Khantivadi sont suffisamment marquantes pour attirer notre attention.
À une certaine époque, le Bodhisatta naquit dans ce monde en tant que fils du roi Mahapatapa. Il s’appelait Culla Dhammapala. Un jour, tandis que la reine était assise sur une chaise à caresser son enfant, elle ne remarqua pas le roi qui passait près d’elle. Le roi crut qu’elle était si fière de son enfant qu’elle ne se levait même pas pour le saluer en le voyant passer. Cela le mit en fureur et il fit aussitôt venir le bourreau à qui il ordonna d’arracher l’enfant des bras de la reine et de lui couper les mains, les pieds et la tête – ce que le bourreau fit sur-le-champ. L’enfant subit tout cela avec une patience extrême ; il ne montra aucune colère et ne retira son amour inconditionnel ni à son père cruel, ni à sa mère désespérée, ni au bourreau car il avait déjà parfaitement développé la pratique de l’indulgence et de l’amour inconditionnel.
À une autre époque, le Bodhisatta était un ascète réputé pour sa tolérance et sa patience et, pour cette raison, les gens l’appelaient Khantivadi – « celui qui prêche la patience / l’indulgence / le pardon ». Un jour, il arriva à Bénarès et s’installa dans le jardin des plaisirs du roi. Lorsque celui-ci passa par là avec son harem et qu’il vit l’ascète assis sous un arbre, il lui demanda quelle vertu il pratiquait. Khantivadi répondit qu’il pratiquait la patience. Le roi était un matérialiste pour qui la pratique de la vertu était du charlatanisme. Alors, en entendant la réponse de l’ascète, il envoya chercher son bourreau et lui ordonna de couper les mains et les pieds de l’homme, après quoi il lui demanda : « Peux-tu maintenir ta patience maintenant que l’on t’a coupé mains et pieds ? » L’ascète n’était pas en colère. Même à ce moment-là, couché sur le sol, il étendit sa bienveillance en gardant toute sa sérénité et répondit au roi : « La patience et toutes les autres vertus ne sont pas dans les membres mais dans le cœur et l’esprit ». Le roi, vexé de n’avoir pas pu atteindre l’homme, entra dans une colère encore plus grande. Il lui donna un violent coup de pied dans l’estomac et s’en alla. Le ministre du roi s’approcha de l’ascète mourant et s’inclina devant lui en le suppliant : « Vénérable, aucun de nous n’approuve ce geste cruel du roi ; nous sommes tous très peinés de ce que vous a fait subir cet homme démoniaque. Nous vous demandons de maudire le roi mais pas nous. » L’ascète répondit : « Puisse ce roi qui m’a fait couper les mains et les pieds, de même que vous, vivre longtemps et connaître le bonheur. Ceux qui, comme moi, pratiquent la vertu, ne sont jamais en colère. » Après avoir prononcé ces paroles, il exhala un dernier soupir.
Puisque le Bouddha, dans ses vies passées, alors qu’il était encore imparfait comme nous, a pratiqué la patience et la bienveillance jusque dans ces situations extrêmes, pourquoi ne pouvons-nous pas suivre son exemple ?
Lorsque nous évoquons et que nous réfléchissons au noble caractère de telles grandes âmes, nous devrions être capables de supporter toutes sortes de situations difficiles sans être touchés par la colère.
(8) Ou bien, si nous considérons la nature du cycle des renaissances dans cet univers sans début ni fin, nous serons capables d’arrêter la colère au moment où elle apparaît en nous car le Bouddha a dit : « Il n’est pas facile de trouver un être qui n’a pas été votre mère, votre père, votre frère ou votre sœur, votre fils ou votre fille. » Par conséquent, lorsque nous évoquons la personne que nous considérons en ce moment comme notre ennemi, nous devons nous dire : « Cette personne, dans le passé, a été ma mère, elle m’a porté pendant neuf mois, m’a donné naissance, m’a nourri et lavé, m’a protégé contre sa poitrine, m’a porté sur ses hanches et m’a élevé. Cet homme a été mon père dans une autre vie, il a dépensé temps et énergie à travailler pour me nourrir, il a même sacrifié sa vie par amour pour moi » et ainsi de suite. Lorsque nous réfléchissons à ces faits, nous pouvons espérer que la colère qui monte contre notre ennemi va s’apaiser.
Et, pour aller plus loin, nous devons réfléchir aux avantages du développement de l’esprit par la pratique de Mettā, la bienveillance pour tous les êtres. En effet, le Bouddha nous a révélé onze avantages pour la personne qui développe pleinement la bienveillance inconditionnelle. Quels sont-ils ?
1 - La personne a un sommeil bienfaisant.
2 - Elle se réveille heureuse.
3 - Elle ne fait pas de cauchemars.
4 - Elle est aimée de tous.
5 - Elle est même aimée des êtres non humains.
6 - Elle est protégée par les dévas.
7 - Elle n’est atteinte ni par le feu, ni par le poison, ni par les armes.
8 - Son esprit s’apaise rapidement.
9 - Son teint est frais.
10 - Au moment de la mort, elle s’éteint en paix.
11 - Si elle n’a pas atteint la pleine réalisation de l’Éveil, elle renaîtra au moins dans la sphère céleste des Brahma Dévas.
Alors, par tous les moyens possibles, nous devons faire de notre mieux pour éteindre notre colère et être enfin capables d’offrir toute notre bienveillance à tous les êtres de ce monde, sans discrimination.
Lorsque nous sommes capables de lâcher la colère et de maîtriser notre esprit, nous rayonnons, à partir du cœur, un amour infini aussi loin que nous pouvons l’imaginer, dans toutes les directions, pour qu’il touche tous les êtres vivants et les imprègne d’amitié bienveillante. Nous devons pratiquer cette méditation tous les jours, sans exception, à heures régulières. Le résultat de cette pratique est qu’un jour nous serons en mesure d’atteindre les jhāna ou absorptions méditatives dont les quatre premiers niveaux incluent la maîtrise des sens, de l’aversion et de nombreuses autres émotions négatives, apportant simultanément pureté, sérénité et paix de l’esprit.
Appendice
deux histoires extraites des textes bouddhistes
L’homme injurieux
Un jour, alors que le Bouddha se trouvait à Rajagaha, au monastère Veluvana, à l’endroit où on nourrit les écureuils, vivait à Rajagaha un Brahmane du clan des Bharadvaja que l’on appela plus tard « l’homme injurieux ». Lorsque cet homme apprit qu’une personne de son clan avait quitté sa famille pour rejoindre la communauté du Bouddha, il fut mécontent et furieux. C’est dans cet état d’esprit qu’il alla voir le Bouddha et, à peine arrivé en sa présence, il l’injuria et l’insulta en l’abreuvant de paroles grossières et dures.
Lorsque le Bouddha put parler à son tour, il demanda à l’homme :
– Dis-moi, Brahmane, t’arrive-t-il de recevoir la visite d’amis, de parents ou d’autres personnes ?
– Oui, maître Gotama, il m’arrive d’avoir des visiteurs.
– Lorsqu’ils viennent, leur offres-tu différentes sortes de mets et des sièges pour se reposer ?
– Oui, cela m’arrive.
– Mais, Brahmane, si tes visiteurs n’acceptent pas tes offrandes, à qui appartiennent-elles ?
– Eh bien, s’ils ne les acceptent pas, ces choses me reviennent.
– Il en va de même ici, Brahmane : tu nous as injuriés, nous qui ne t’avons pas injurié en retour ; tu nous a réprimandés, nous qui ne t’avons pas réprimandé en retour ; tu nous a insultés, nous qui ne t’avons pas insulté en retour. Nous n’acceptons donc pas cela de ta part et, dès lors, toutes ces injures te reviennent, elles t’appartiennent, Brahmane. »
Plus tard, le Bouddha a ajouté :
« D’où peut naître la colère chez celui qui est libre de toute colère,
Qui s’appuie sur la fermeté de son attitude,
Qui s’est maîtrisé, serein, libéré par la plus élevée des révélations ?
« Le pire des deux est celui qui, lorsqu’on l’injurie
Injurie en retour. Celui qui n’injurie pas quand on l’a injurié
Remporte une double victoire.
Il recherche le bien de l’autre et le sien
Car il comprend la colère de l’autre et demeure calme et tranquille.
Celui qui prend soin des deux
– Puisqu’il se guérit lui-même et guérit l’autre aussi –
Est considéré comme stupide par ceux qui ne connaissent pas le Dhamma. »
Samyutta Nikaya, Brahmana Samyutta, No. 2.
Le démon qui se nourrissait de colère
À une certaine époque vivait un démon au régime particulier : il se nourrissait de la colère des autres et, comme son terrain de chasse était le monde humain, il ne manquait pas de nourriture. Il lui était très facile de provoquer des querelles de famille, des haines nationales et raciales. Même causer une guerre était un jeu d’enfant pour lui. Chaque fois qu’il réussissait à déclencher une guerre, il se gavait sans plus d’efforts car, une fois qu’une guerre est déclarée, la haine se multiplie de son propre élan et touche même les personnes aimables en temps ordinaire. C’est ainsi que la nourriture du démon devint si riche qu’il devait parfois se retenir de trop manger et se contenter de grignoter un petit morceau de ressentiment qui se trouvait à portée de main.
Cependant, comme cela arrive souvent lorsqu’on a trop de succès, le démon commença à être blasé et, un jour où il s’ennuyait, il se dit : « Pourquoi ne pas essayer dans la sphère des divinités ? » Après réflexion, il choisit le paradis des 32 déités gouverné par Sakka. Il savait que seules quelques-unes de ces divinités avaient complètement éliminé les entraves de la négativité et de l’aversion, même si elles étaient bien au-dessus des petites querelles mesquines et égoïstes. Alors, de par son pouvoir magique, il se transféra dans ce paradis et eut la chance d’arriver à un moment où le roi Sakka était absent. Il n’y avait personne dans la vaste salle d’audience et, sans hésiter, le démon s’assit sur le trône vide de Sakka, attendant patiemment que quelque chose se produise qui lui apporterait, espérait-il, un bon repas. Bientôt quelques déités entrèrent dans la salle et eurent du mal à en croire leurs yeux lorsqu’elles virent cet horrible démon au sourire moqueur affalé sur le trône. Une fois revenues de leur surprise, elles se mirent à crier et à se lamenter : « Horrible démon, comment oses-tu t’asseoir sur le trône de notre roi ? Quelle audace incroyable ! Quelle offense ! Tu devrais être jeté en enfer, tête la première, tout droit dans un chaudron bouillant ! Tu devrais être écartelé vivant ! Hors d’ici ! Retire-toi ! »
Mais, plus les dieux étaient en colère, plus le démon se réjouissait. À vue d’œil, il grossissait en taille, en force et en puissance. Et puis, la colère qu’il absorbait dans son système commença à ruisseler de son corps sous forme d’une brume fumeuse aux tons rougeoyants. Cette aura de mal maintenait les divinités à distance et leur rayonnement en était affaibli.
Soudain, une vive lumière apparut à l’autre extrémité de la salle et grandit jusqu’à devenir éblouissante. Émergeant de cette lumière, Sakka, le roi des divinités, apparut. Lui qui était fermement entré dans le Courant irréversible qui mène au Nirvana, demeura imperturbable en voyant le démon. L’écran de fumée créé par la colère des divinités s’écarta lorsqu’il s’approcha lentement et poliment de celui qui avait usurpé son trône.
« Bienvenu, ami ! Reste assis, je t’en prie. Je peux prendre un autre siège. Puis-je t’offrir la boisson de l’hospitalité ? Notre amrita n’est pas mauvais, cette année mais tu préfères peut-être quelque chose de plus fort comme le Soma védique ? »
Tandis que Sakka s’exprimait aimablement ainsi, la taille du démon diminua rapidement jusqu’à devenir minuscule puis il disparut complètement, laissant derrière lui un parfum de fumée malodorante qui ne tarda pas non plus à disparaître.
Histoire racontée par Nyanaponika Thera, basée sur le Samyutta Nikaya, Sakka Samyutta, No. 22
Ce récit date de l’époque du Bouddha et pourtant, même aujourd’hui, plus de 2500 ans plus tard, il semble que notre monde soit hanté par des hordes de démons qui se nourrissent copieusement de la colère de millions d’êtres dévoués à leur cause sur toute la terre. Les feux de la haine et de fulgurantes vagues de violence menacent d’engloutir l’humanité. À sa base, au niveau individuel, la société est empoisonnée par le conflit et la discorde qui se manifestent par des pensées et des paroles de colère, et par des actes de violence. N’est-il pas temps de mettre fin à cette attitude autodestructrice des hommes esclaves de leurs impulsions de haine et d’agressivité qui ne servent qu’à nourrir des forces démoniaques ? Cette histoire raconte comment les démons de la haine peuvent être exorcisés par le pouvoir de la gentillesse et de l’amour. Si ce pouvoir de l’amour peut être testé et prouvé au niveau individuel, dans le vaste réseau des relations personnelles, l’ensemble de la société et du monde ne manqueront pas d’en être touchés.
Comment se libérer de la colère
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Le bouddhisme est une pratique, une philosophie de vie fondée par un sage de l'inde antique vers -600 avant JC, ce sage appelé "Bouddha" ce qui veut dire Éveillé, atteint l'Éveil vers 40 ans puis il enseigna durant toute sa vie, il mourut vers 80 ans en ayant établi une communauté de sa doctrine.
Le bouddhisme est une pratique, une philosophie de vie fondée par un sage de l'inde antique vers -600 avant JC, ce sage appelé "Bouddha" ce qui veut dire Éveillé, atteint l'Éveil vers 40 ans puis il enseigna durant toute sa vie, il mourut vers 80 ans en ayant établi une communauté de sa doctrine.
Comment se libérer de la colère
Ecrit le 02 déc.16, 02:33Ne pas railler, ne pas déplorer ni maudire, mais comprendre. Baruch Spinoza
Re: Comment se libérer de la colère
Ecrit le 05 déc.16, 11:00Sujet en doublon posté. Un seul suffit.
Marmhonie, modérateur.
Marmhonie, modérateur.
Re: Comment se libérer de la colère
Ecrit le 05 déc.16, 22:13oui tout a fait et comme je ne savais pas comment le retirer, c'est bien que vous ayez fait votre boulot de modérateur !
Ne pas railler, ne pas déplorer ni maudire, mais comprendre. Baruch Spinoza
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Re: Comment se libérer de la colère
Ecrit le 13 déc.16, 10:07Donc si je suis hostile à la colère , je ne serais pas apaisé .Jamais les rancœurs ne seront apaisées par l’hostilité
Voilà pourquoi Bouddha parlait de voie médiane .
Une religion qui serait une religion de vérité chercherait la vérité sur la vie en se plaçant directement au coeur de la vie , et ne chercherait pas à en fabriquer une par la foi artificiellement .
Re: Comment se libérer de la colère
Ecrit le 30 déc.16, 00:03La colère (bienveillante ) du bouddha ça existe . Tout état de vie à son bon et mauvais coté comme les 2 faces d'une médaille .
"Le sage n’est pas celui qui pratique le bouddhisme en dehors des règles de la société mais plutôt celui qui, grâce à une compréhension profonde du monde, connaît la meilleure manière de s’y comporter."
Re: Comment se libérer de la colère
Ecrit le 05 déc.17, 08:15“Rester en colère, c'est comme saisir un charbon ardent avec l'intention de le jeter sur quelqu'un ; c'est vous qui vous brûlez.”
Ne pas railler, ne pas déplorer ni maudire, mais comprendre. Baruch Spinoza
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