L'évangile de Matthieu ???

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L'évangile de Matthieu ???

Ecrit le 20 juil.17, 16:19

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Plusieurs théologiens anglais ont déjà soupçonné que les célèbres Logia commentés par Papias (évêque de Hiérapolis en Phrygie vers l'an 110) n’étaient pas des discours de Jésus, mais des passages de l'Ancien Testament classés suivant certains chefs et destinés à réfuter les objections des juifs à la prédication chrétienne.
Ces passages étaient réputés prophétiques, dans le sens où l’ancienne écriture est la préfiguration de la nouvelle; d’où le nom d’oracles dominicaux qui leur était attribué. D‘autre part, dans une série d’articles aussi admirables par la vigueur de l‘argumentation que par l'érudition, M. Rendel Harris, assisté de M. Vacher Burch, a démontré l'existence d'un vieux recueil de témoignages contre les juifs, tirés de l'Ancien Testament et de livres apocryphés, recueil maintes fois étendu, corrigé ou modifié, mais dont le fonds est plus ancien que nos évangiles et les épîtres pauliniennes qui en font usage.
Le bon sens indique que les premiers prédicateurs du christianisme ne pouvaient transporter avec eux la masse énorme des livres juifs, mais devaient se contenter d'extraits disposés en manuel; ce manuel leur servait à confondre les juifs et à leur prouver que toutes les affirmations dogmatiques des chrétiens reposaient sur des textes prophétiques de l’Ancien Testament. On suit la trace de ce manuel jusqu'au XIIe siècle ; Justin, Cyprien, Grégoire de Nysse en ont fait un continuel usage; Athanase y a eu recours dans les controverses du Concile de Nicée. Sous sa forme la plus ample, ce livre de témoignages contenait aussi de courts récits historiques dont l‘exactitude était démontrée par la même méthode, consistant non pas à alléguer des preuves tirées des auteurs profanes, des documents d’archives, mais des textes réputés prophétiques qui trouvaient ainsi leur application.
Cela posé, il est presque certain que ce livre de témoignages pré-évangélique est identique aux Logia du Seigneur, attribués par Papias, qui les commenta en cinq livres, à l'apôtre Matthieu. Or, le catalogue des manuscrits du Mont-Athos publié par Lambros signale le manuscrit en cinq livres d'un recueil composé contre les juifs lequel est attribué au moine Matthieu, d‘ailleurs inconnu. Cette attribution est fondée sur six vers grecs iambiques placés en tête du manuscrit.
Comme la doctrine qui fait du judaïsme et des sectes juives l'origine des hérésies chrétiennes remonte au IIe siècle il semble bien qu'il ne puisse être question du moine Matthieu; c‘est bien de l‘apôtre qu’il s'agit, et le livre de l’Athos nous rend à la fois, sous une forme plus ou moins correcte, les Logia commentés par Papias et le premier manuel chrétien de prédication apostolique.
Il est vrai que, suivant Papias. Matthieu avait rédigé les Logia en hébreu (araméen) et que chacun interprétait ces textes comme il pouvait; nous n'aurions donc pas retrouvé la compilation originale attribuée à l'apôtre, mais une traduction grecque, celle même, peut-être, dont Papias fit la base de son commentaire perdu. Ceux qui connaissent l'importance, pour l'histoire du christianisme primitif, des fragments de Papias et de ce qu’Eusèbe rapporte sur leur auteur, comprendront que la découverte, brièvement annoncée ici, est une de celles qui font époque dans la science.
S. B.
Les données actuelles indiquent que les évangiles sont restés sans auteur jusqu’à la seconde moitié du 2ème siècle... Les évangiles tels que nous les connaissons ont été cités dans la première moitié du deuxième siècle, mais toujours de façon anonyme. Les noms apparaissent soudainement dans les années 180. Ensuite, il y a eu de nombreux évangiles, en plus des quatre, et les Chrétiens ont décidé de choisir ceux qui étaient les plus autoritaires.
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Le canon de Muratori est une liste de livres saints, découverte à Milan par Ludovico Muratori (1672-1750) ; cette liste est en latin mais elle est certainement traduite d'une liste grecque remontant aux alentours de l'an 180.
Le canon de Muratori comprend : les évangiles de Luc et de Jean, les Actes des apôtres, 13 épîtres de Paul (2 Corinthiens, Éphésiens, Philippiens, Colossiens, Galates, 2 Thessaloniciens, Romains, Philémon, Tite, 2 Timothée) 1 épître de Jude, 2 Épîtres de Jean et l'apocalypse de Jean. L’épitre de Paul aux Laodicéens et celle aux Alexandrins, l’apocalypse de Pierre, et enfin le Pasteur d‘Hermas. Les deux épîtres aux Laodicéens et aux Alexandrins sont rejetées comme hérétiques, tandis que le Pasteur d’Hermas doit être lu pour l’édification personnelle, mais non dans le culte public.
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L’évangile de Matthieu est une histoire de Jésus, contenant un enseignement apologétique judéo-chrétien. Le caractère apologétique de Matthieu suppose que l'auteur écrit en vue de Juifs chrétiens, éprouvant le besoin de concilier avec leur foi en Jésus comme Messie leur état de minorité dans la nation, et le fait que la nation, comme telle, refuse de croire en lui, son apologétique est à la fois judéo-chrétienne et anti judaïque.
Les ébionites étaient des esséniens de Samarie, pratiquant des rites qui semblent communs aux Juifs esséniens et aux chrétiens primitifs : circoncisions, baptême, ascèse, Sabbat, eucharistie... Ils pratiquaient la pauvreté, la chasteté, la loyauté.
Ils furent considérés comme hérétiques par les Juifs orthodoxes et aussi par des églises chrétiennes des débuts. Cette assemblée émigra à Pella en 67 afin que ses membres ne soient exposés que le moins possible aux désagréments de la guerre qui venait d'éclater en Palestine en 66 et, dit Hégésippe, c'est Syméon qui fut élu à la tête de la secte., laquelle prendra dans la suite le nom d'ébionite" (de l'hébreu ébiônîm, les pauvres).
Tous les livres ébionites ainsi que beaucoup d’ouvrages historiques du premier siècle - ont disparu mystérieusement.
Irénée de Lyon (130-202) affirme que les ébionites reconnaissent l'évangile selon Matthieu (Contre les hérésies III 11, 7).
Ceux qu’on appelle ébionites admettent que le monde a été fait par le vrai Dieu, mais, pour ce qui concerne le Seigneur, ils professent les mêmes opinions que Cérinthe et Carpocrate. Ils n’utilisent que l’Évangile selon Matthieu, rejettent l’apôtre Paul qu’ils accusent d’apostasie à l’égard de la Loi. Ils s’appliquent à commenter les prophéties avec une minutie excessive. Ils pratiquent la circoncision et persévèrent dans les coutumes légales et dans les pratiques juives, au point d’aller jusqu’à adorer Jérusalem, comme étant la maison de Dieu.
Eusèbe de Césarée (265-340) désigne l’évangile de Matthieu des ébionites sous le nom d'évangile des Hébreux» et selon lui, «il s'agit de l'original hébreu de l'évangile selon Matthieu (Histoire ecclésiastique III, 27, 4).»
Eusèbe de Césarée confirme le propos d’Origène (185-253) : '' il [leur] fallait complètement rejeter les épîtres de l’apôtre Paul, qu’ils appelaient un apostat de la Loi, ils se servaient uniquement de l’évangile dit selon les Hébreux et tenaient peu compte des autres '' (H.E. 3,27,4). […]
Un peu avant Origène, Tertullien (165-225) n’était pas étonné par l’opposition des ébionites à Paul. Pour lui, l’épître aux Galates réfute merveilleusement les ébionites : quand Paul écrit aux Galates, il s’élève contre ceux qui pratiquent ou défendent la circoncision et la Loi : c’est l’hérésie d’Ébion (De la Prescription 33,5). L’apologiste met ainsi un lien entre les judaïsant de Galatie et les ébionites ; Paul ne visait pas cette hérésie, mais l’épître aux Galates contient tout ce qui est utile à sa réfutation.
Eusèbe de Césarée confirme l’intuition de Tertullien. Certes les ébionites sont divisés au moins en deux groupes, car tous n’ont pas la même confession christologique, mais ils sont profondément unis par leur attachement à la loi de Moïse, sans que tous confèrent la même signification à cet attachement. Pour les uns, la seule foi au Christ ne suffit pas au salut, pour les autres, la Loi qu’ils observent soigneusement n’est pas indispensable au salut.
Épiphane de Salamine (315-403) précise aussi que les ébionites emploient l'évangile selon Matthieu.
Jérôme de Stridon indique que — d'après lui — l'évangile des ébionites est le même que l'évangile selon Matthieu (Contre les Pélagiens 3, 2). Tous les témoignages soulignent une relation entre l'évangile selon Matthieu et l'évangile des ébionites. Son nom dans les communautés ébionites pourrait avoir été évangile selon les douze apôtres et à l'extérieur évangile selon les Hébreux.
Saint Jérôme (347-420) affirme qu'un exemplaire de l’évangile des Hébreux lui fut prêté par des judéo-chrétiens à Antioche et qu'il en existait un autre dans la bibliothèque de Pamphile à Césarée, et que lui-même en fit une traduction grecque et latine.
Il admit bien que l’évangile des Hébreux était l’évangile original dont dépendait Matthieu mais ensuite il le relégua parmi les apocryphes.
L’évangile des Hébreux est presque aussi long que l'évangile de Matthieu, dit Nicéphore de Constantinople (758-828).
Cet évangile des Hébreux est cité par Clément d’Alexandrie (150-216), Origène (185-254) et d’autres auteurs anciens. Il est très proche de Matthieu quant au style comme au contenu.
Justin cite les évangiles sous le nom collectif de «mémoire des apôtres», ce nom indique très certainement une première harmonie évangélique, analogue au Diatessaron de Tatien (né vers 120) un disciple de Justin, plus tardif de deux ou trois décennies.
Le Diatessaron ouvrage qui a fait la célébrité de Tatien est une fusion harmonieuse des évangiles séparés en un récit suivi de la vie et des enseignements de Jésus. Il combine phrases et péricopes des quatre évangiles selon un ordre inspiré de Matthieu.
Avec Justin l’apologiste (apologiste chrétien né en Palestine vers l'an 100 et mort martyre à Rome vers 166), nous abordons un terrain solide. L’authenticité de ses principaux ouvrages n’est pas douteuse; leur date est acquise; il a écrit sous Antonin le Pieux, c’est-à-dire entre 138 à 161. Quand il cite des discours et (les faits de la vie de Jésus), il indique les sources écrites où il puise, ce que ne font presque jamais les pères apostoliques. Toutefois, lui non plus ne nous apprend pas si ces sources sont ou ne sont pas nos évangiles à nous. Il les nomme ordinairement «mémoire des apôtres».
Une seule fois, il dit que ces «mémoire» portent aussi le nom d’évangiles. Ailleurs, il parle de l’évangile au singulier, ce qui fait penser qu’il n’en connaissait qu’un seul.
Pour ce qui est du récit, les documents utilises par Justin font émerger du brouillard originel à peu près les mêmes contours historiques que nos évangiles, mais quand Justin répète au moins à trois reprises que Jean-Baptiste était établi au bord du Jourdain; cette persistance suggère l’idée d’une source inconnue, hypothèse que confirment ensuite la grotte de Bethléem et la flamme du baptême. Nous savons par Épiphane que l’évangile des Hébreux, dont se servaient les ébionites, parlait aussi d’une grande lumière qui aurait illuminé la scène au moment du baptême de Jésus, et faisait aussi dire à la voix d'en haut des paroles empruntées au deuxième psaume, et que cite Justin. Il est permis de conjecturer que Justin a eu à sa disposition une rédaction de l’évangile des Hébreux.
Les discours de Jésus, cités par Justin, concordent avec nos évangiles mieux que les récits mais l’accord est rarement tout à fait littéral. Dans Matthieu 11, 27 et dans Luc 10, 22 Jésus dit «Nul ne sait qui est le Fils, sinon le Père; ni qui est le Père, sinon le Fils ; et celui auquel le Fils voudra le révéler.» Justin reproduit ces paroles avec une double variante: la connaissance que le fils a du père précède chez lui celle que le père a du fils, et le verbe est mis au passé. Ce pourrait n'être qu’une citation libre de nos textes évangéliques ; mais les mêmes variantes se retrouvent exactement et à plusieurs reprises dans les homélies Clémentines, apocryphe du cycle ébionite.
En serrant de plus près les rapports des citations de Justin avec chacun de nos évangiles on découvre que c'est avec Matthieu qu'il concorde le plus souvent. C'est toujours dans la rédaction de Matthieu ou à peu près que sont rapportées ses sentences et l'on retrouve aussi dans Justin des discours et des incidents particuliers à Matthieu. Mais pour être moins constante, la concordance avec Luc n'en est pas moins visible et en partie dans les mêmes termes que chez Luc. Les points de rencontre des citations de Justin avec l’évangile Johannique sont au plus des allusions mais ils sont nombreux. Et les citations ne concordent que très rarement avec l’évangile de Marc.
Pour Justin, ces écrits évangéliques possèdent l’autorité des rapports écrits. Mais ils n’égalent pas les Saintes Écritures ou «la Loi et les Prophètes».
L‘autorité de ces écrits évangéliques est accrue par l’inspiration des prophéties qu'ils rapportent (cf. 1 Apol. 32) mais Justin n'a jamais explicitement considéré les «évangiles» ou les «mémoires des apôtres» comme étant inspirés.
Dans son livre : L’évangile selon Matthieu d’après un papyrus copte de la collection Schøyen. Analyse littéraire (CRB 55). Paris: Gabalda, 2003.
M.-É. Boismard en analysant le texte du Codex Schøyen 2650, témoin copte du texte grec ancien de l'évangile de Matthieu, s’est aperçût que le texte n’était pas homogène mais qu’il comportait deux niveaux de rédaction. Un niveau plus archaïque et un autre niveau systématiquement complété et harmonisé d’après le texte du Matthieu canonique.
En dégageant le texte de son deuxième niveau de rédaction il découvrit une harmonie évangélique dont les textes de Matthieu avaient été assez souvent remplacé par des textes plus ou moins parallèles repris des traditions johanniques et lucaniennes.
Selon Boismard les caractéristiques essentielles d’un Matthieu sous sa forme la plus primitive se trouve dans ce texte, il offre un meilleur texte que celui de l’évangile du Matthieu grec canonique, il suppose un substrat araméen et on ne lui constate aucune dépendance à l’égard de l’évangile de Marc.
Et cette harmonie évangélique serait, d’après Boismard, le même texte que celui dont parlait Justin l’apologiste par «mémoire des apôtres» et composé au plus tard vers 140.
Les toutes premières traces de l’existence de l’évangile de Matthieu sont dans les Homélies Clémentines (150—160) et dans les écrits de Justin Martyr (mort vers l66).
Quelle est la part qui vient de Matthieu, celle qui vient de Jésus? Qui est-il, ce Jésus si, à chaque ligne, c’est l’Ancien Testament, les textes esséniens ou apocalyptiques, voire la littérature grecque ou iranienne, qui guident la plume de l’écrivain? En voyant Matthieu se saisir du livre de Marc pour y coller les logia, y entrelarder ses propres mots, y tisser, explicitement ou en filigrane, des bribes de la Torah, des Psaumes, des Prophètes, on en vient à se demander s’il ne puise pas son inspiration en ces autres écrits qui le précèdent plutôt que de la tradition orale transmise par les disciples immédiats. On cherche Jésus: on trouve l’humilité d’Isaac, la marche de David poursuivi par Absalom, la sagesse de Salomon, la solidarité et la compassion du Serviteur selon Isaïe, la force de discernement de Job, l’aventure de Jonas envoyé à Ninive, le banquet de Mithra. Les rencontres personnelles avec le lépreux, l’aveugle, le publicain, la femme de Béthanie, les dialogues avec Judas ou Pilate, et l’on pressent qu’il s’agit vraisemblablement de rencontres emblématiques, dont bien des modèles sont empruntés à l’Ancien Testament, et, plus généralement, à la littérature antique. On se représentait Jésus sur la montagne, assis sur une barque, allant de Galilée à Tyr et à Sidon: on comprend que la montagne est symbole de révélation, la barque métaphore de l’église, que la Galilée est le carrefour des nations, que Tyr et Sidon sont choisies par l’écrivain pour leur portée biblique. On imaginait Jésus multipliant le pain à foison ou marchant sur les eaux: on apprend que l’écrivain a construit ces séquences à partir de schémas littéraires réinterprétés. On entendait, toute proche, la voix du Galiléen: on réalise que la rhétorique grecque omniprésente ne laisse pas approcher, ou si peu, de la pensée araméenne, qui était nécessairement celle de Jésus. On le pensait né à Bethléem, vivant au Jourdain une rencontre fulgurante avec Jean le Baptiste, s’affrontant au bloc haineux des pharisiens et des sadducéens. Bethléem semble une chose discutée d’un point de vue théologique plus que par une réalité historique; quant à l’acharnement des pharisiens, il risque de n’être qu’une projection des relations hostiles qu’entretient la communauté de Matthieu avec le judaïsme rabbinique de son temps. On aimerait refuser les pistes proposées par l’analyse littéraire et historique, Jésus est mort, et Matthieu contribue à effacer sa figure derrière son travail littéraire, voire à la défigurer par son discours militant.

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Re: L'évangile de Matthieu ???

Ecrit le 23 juil.17, 23:09

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Il importait donc de récrire à son tour ce dernier texte conformément à l'orthodoxie romaine, à laquelle Irénée, tout oriental qu'il fût, semble bien s'être rallié à peu près sans réserve. Il paraît fort probable que ce soit à l'instigation de ce dernier que cela fut fait. Plusieurs des rédacteurs du premier évangile sont certainement, comme Irénée, des orientaux, Alfaric l'a montré dans ses "Origines sociales du Christianisme" et ils sont aussi, comme lui, foncièrement antignostiques, leur façon d'adapter leurs sources le montre clairement. Cependant, contrairement à ce que suppose Alfaric, il est peu probable qu'Hégésippe figurât parmi les rédacteurs de l'évangile selon Mathieu, et celui-ci ne fut certainement pas écrit à Pella. Hégésippe accordait plus d'importance à Jacques, frère du Seigneur, qu'à Symeon Pierre, fils de Clopas. Or, dans le Ier évangile, c'est Pierre qui est le personnage central après Jésus, conformément à la conception qui avait cours à Rome au moins depuis Pie Ier.
Ce texte doit donc bien avoir été écrit à Rome, même si plusieurs de ses rédacteurs sont des orientaux, qui y avaient sans doute été appelés par Irénée. Marc avait été l'évangile de la tradition nazaréenne, à laquelle avaient été incorporés certains éléments d'origine marcionite et donc paulinienne ; Luc, au contraire, avait été celui de la tradition paulinienne, amendée conformément aux idées nazaréennes; Jean, celui de la johannite, adaptée aux conceptions romaines. Matthieu sera la synthèse de ces trois traditions et d'autres encore, comme celles de plusieurs des évangiles déclarés dans la suite "apocryphes", y compris des évangiles et autres écrits gnostiques, où Matthieu joue d'ailleurs souvent un rôle important, et aussi celle des disciples de Néron, lequel avait voulu amalgamer le christianisme paulinien et le mithraïsme, ces néroniens, à la suite des persécutions de Galba et de Vespasien, s'étant rapprochés des nazaréens. C'est pourquoi notamment Jésus, dont la naissance est saluée par des mages orientaux, y est presque identifié à Mithra. Les "êtres vivants" d'Ézéquiel et de l’Apocalypse, qui furent attribués comme emblèmes aux quatre évangiles canoniques correspondent aux signes fixes du zodiaque. Marc est le Lion, signe de feu; c'est l'évangile de l'action. Jean est l'aigle, qui correspond au Verseau, signe d'air selon Ptolémée: c'est l'évangile de l'intellection. Luc est le Taureau, signe de terre : c'est l'évangile du réalisme sensible. Matthieu est l'homme, ou l'ange, ou encore le dragon, correspondant au Scorpion, signe d'eau: ce sera l'évangile de la réflexion et du sentiment.
Il combine de façon très systématique de multiples sources, dont il incorpore les éléments dans son texte en suivant de très près, à partir de son chapitre III, le plan de Marc, auquel les rédacteurs de Matthieu ne retrancheront presque rien, en améliorant seulement le texte à leur idée.
Parmi ces sources, il y a divers évangiles considérés aujourd'hui comme apocryphes (Hébreux ou Ébiomites), y compris des textes de tendance gnostique, mais que les rédacteurs de Matthieu modifieront pour oblitérer cette tendance: des emprunts à l'évangile selon Thomas, entre autres, seront totalement détournés de leur sens.
D'autres écrits esséniens encore seront utilisés. Les œuvres de Flavius Josèphe fourniront quelques détails historiques. Les rédacteurs de Matthieu ne manqueront pas de s'inspirer de diverses légendes païennes, tant grecques qu'orientales. Et, bien entendu, les trois autres évangiles qui seront finalement admis avec lui dans le canon des écritures chrétiennes, ils seront largement utilisés pour la rédaction de l'évangile selon Matthieu.
C'est cette multiplicité des sources de celui-ci qui explique sans doute les nombreux doublets que l'on y trouve : la même péricope revenant parfois dans deux sources différentes qui ne présentaient pas les faits dans le même ordre, tous les doublets de Marc se retrouvent intégralement dans Matthieu.
D'une manière générale, les rédacteurs de Matthieu ne recopient que rarement de façon textuelle les passages qu'ils tirent de leurs sources. Presque toujours, ils arrangent, ils corrigent (à leur idée), ils édulcorent, ils amplifient ou, au contraire (mais plus rarement), résument; souvent ils embellissent, ils commentent, ils ajoutent ou retranchent des détails.
De nombreux commentateurs ont donné divers exemples de ces adaptations matthéennes de textes antérieurs, et il est maintenant bien établi que Matthieu est postérieur notamment à Marc et à Luc.
D'habitude pourtant, on estime que Matthieu est antérieur à Jean, et beaucoup d'exégètes pensent même que le quatrième évangile est effectivement le dernier en date.
Jean Hadot a constaté avec pertinence : "Le quatrième évangile, que l'on a tendance à considérer comme le plus récent, alors que beaucoup d'arguments permettent de le considérer comme un texte ancien dans le christianisme". Cela n'est guère douteux. On observera notamment que c'est dans Jean (VIII 51) que l'on trouve les fidèles qui ne verront pas la mort (Mat. XVI 26), ainsi que la flagellation de Jésus (Jean XIX 38; Mat. XXVII 57).
À l'inverse, Jean ne contient pas l'institution de l'eucharistie, ce qui est difficilement explicable s'il est postérieur à Matthieu. Dans le quatrième évangile, le prophète Jean n'est jamais qualifié de Baptiseur : il n'était pas encore nécessaire, quand sa première version fut rédigée, de le distinguer de l'"apôtre" du même nom, qui n'y paraît que tout à la fin, dans un passage ajouté, et même pas sous son nom, mais comme "fils de Zébédée", preuves évidentes que cet évangile est, au contraire, antérieur à tous les autres, du moins en sa version originale, donc aussi à Matthieu.
Le prophète Jean y déclare d'ailleurs avec force qu'il n'est pas Élie (I 21), alors que, dans Matthieu, Jésus affirme non moins nettement que Jean est Élie revenu sur Terre. Inversement, dans Jean, dans Marc et dans Luc, Jean dit qu'il n'est pas digne de "dénouer la courroie des sandales de Celui qui doit venir après lui, tandis que Matthieu est le seul à employer un autre expression : "enlever ses chaussures" (III 11). Ayant donc repris beaucoup de choses à certains des évangiles qui l'avait précédé, tout en n'ayant-repris à d'autres que quelques traits, le premier évangile canonique en constitue bien la synthèse, et il est même probablement le dernier en date de tous les évangiles, canoniques et apocryphes, sauf peut-être seulement le protévangile de Jacques, qui lui est postérieur.
Cela ressort encore du fait que Matthieu, comme Marc, dont il suit le plan dans ses grandes lignes, constitue un ensemble bien structuré, montrant un effort de composition visible jusque dans les détails. On y distingue aisément un prologue, qui se compose de deux chapitres ; cinq sections commençant chacune par un récit, suivi d'un ou de plusieurs discours de Jésus; et un épilogue comprenant deux chapitres pour la Passion et un chapitre pour la résurrection.
Cette œuvre ne constitue d'ailleurs pas seulement une synthèse assez bien construite. Plus encore que de refondre en un seul texte la substance de tous les évangiles qui avaient cours à leur époque, les rédacteurs de Matthieu eurent pour objectif, semble-t-il, de combattre les tendances encore trop gnosticisantes à leur gré de Luc et de Jean, sans compter les nombreux textes ouvertement gnostiques qui circulaient. Aussi, lorsqu'ils reprennent l’évangile des Hébreux ou à quelque autre texte d'inspiration semblable, ce sera en restant dans la ligne de ceux-ci, tandis que lorsqu'ils en reprennent à Luc, à Jean ou à quelque autre texte gnostique, ce sera, la plupart du temps, en les modifiant considérablement, parfois même en en infléchissant sensiblement le sens.
Leur but essentiel toutefois est d'affirmer fortement les origines hébraïques du christianisme. Leur souci constant, en rédigeant leur compilation, est de montrer, comme l'avait déjà tenté Justin, que tout, dans la mission du personnage qu'ils nomment Jésus-Christ, s'est accompli "conformément aux Écritures", entendu par-là la bible hébraïque (y compris d'ailleurs certains écrits lnter-testamentaires "Je ne suis pas venu abolir la Loi, mais l'accomplir", font-ils dire à Jésus (V 17). Aussi le texte abonde-t-il en citations de l'Ancien Testament, pas toujours exactes d'ailleurs et même parfois carrément détournées de leur sens réel pour les faire concorder avec les conceptions de l'église romaine. Matthieu reprend notamment presque toutes les prophéties invoquées par Justin dans sa première Apologie en les interprétant comme il l'avait fait, sauf pourtant - et c'est assez curieux, car ce détail figure aussi dans l’évangile de Pierre - le fait que Jésus-Christ aurait, sur la croix, eu les mains et les pieds cloués (1ère Apol. XXXV, 5-7), ce qui permettait de rappeler le texte grec du Psaume 22 : "Ils ont percé mes mains et mes pieds”. Le psaume qui a fourni tant d'autres détails encore aux récits évangéliques de la Passion.
Matthieu est même presque toujours très proche du texte de Justin, tant des Apologies que du Dialogue avec le juif Tryphon, ce qui donne à penser que certains de ses rédacteurs l'avaient connu personnellement, peut-être même très bien, qu'en tout cas, ils avaient ses œuvres sous les yeux, ainsi sans doute que quelques-uns des textes qu'avait utilisés Justin lui-même.
Tout ce chapitre II de l'évangile selon Matthieu paraît bien rédigé dans le dessein, tant de convaincre les adoptes de Mithra que Jésus était le Grand Roi réincarné dont ils attendaient la venue, que de persuader les juifs qu'il était le Messie annoncé par leurs prophètes. Les rapports entre juifs et iraniens s'étaient fortement resserrés à l'époque. Les uns et les autres avaient notamment plus ou moins assimilé le Messie hébreux avec le Saushyant chaldéen ou le Mithra perse, qui est à la fois le Dieu Soleil et l'Intercesseur, le Mésitès. Or, la venue au monde de Jésus répond, dans Matthieu, assez exactement à la prophétie des "Chroniques de Zuonim", écrites en syriaque d'après les oracles d'Hystaspès, qui datent du IIe siècle avant notre ère : cette prophétie décrit la future apparition d'un grand roi, incarnation du dieu Mithra; à la fois fils d'un dieu et monarque, il doit naître d'une vierge dans une grotte et, la nuit où naîtra ce rédempteur, une étoile tombera du ciel; viendront ensuite des adorateurs qui lui offriront des présents, notamment une couronne d'or, offrande typique des mages iraniens.
Quoi qu'il en soit, les intentions des rédacteurs du récit de Matthieu sont assez évidentes. Mais ce récit ne présente pas seulement des côtés astrologiques, il a aussi une signification alchimique. L'apparition d'une étoile à six branches signifie, pour les alchimistes, que leur travail est près de son heureuse conclusion et elle annonce l'apparition de ce qu'ils nomment "l'enfant". Selon de nombreux commentateurs enfin, le massacre des enfants de moins de deux ans sur l'ordre du roi Hérode (Mat. II, 16-18) aurait également une signification alchimique. Il a d'ailleurs probablement, lui aussi, pour origine des traditions orientales.
Ensuite, comme déjà dit, les rédacteurs de Matthieu, à partir de la tentation au désert (IV, 1-11), suivent assez exactement le plan de Marc, tout en y introduisant de nombreux éléments provenant d'autres sources. Mais Jésus-Christ, pour eux, n'est pas venu supplanter la Loi juive, il l’accompli conformément à ce qu'avaient prédit les prophètes au sujet du Messie. Ils ne répugnent toutefois pas à se mettre au goût du jour et à mêler aux enseignements hébraïques traditionnels des préceptes tirés des philosophes grecs et romains, notamment des stoïciens.
Quant au fameux sermon sur la montagne, pièce centrale de l'exposé de la morale chrétienne selon Matthieu il ne contient vraiment rien d'original et l'on peut même se demander si ce n'est pas par analogie avec l'hindou Krishna, qui enseigna sur le Mont Mérou, que les rédacteurs du premier évangile font prononcer par Jésus ce discours sur une montagne, ils ne précisent d'ailleurs pas laquelle.
Non seulement le Sermon reprend en les regroupant autrement divers passages de Luc, dont la plupart se trouvaient d'ailleurs déjà dans l'évangile selon Thomas ou dans l'évangélion marcionite, mais il y ajoute des éléments de provenances diverses, utilisant notamment le Livre des Secrets d’Hénoch, la Didachè, les Testaments des douze patriarches et même des principes qui avaient cours du temps de Jésus parmi les Juifs, et qui seront codifiés dans le Talmud.
Quant aux paraboles, dont la plupart proviennent de l'évangelion marcionite, on a fait observer que les rédacteurs de Matthieu les utilisent parfois avec quelque maladresse. Elles non plus, de la façon dont elles sont présentées, ne concordent pas toujours avec la douceur et l'amour lui sont censées être à la base de l'enseignement du Jésus du premier évangile, comme cela est affirmé pourtant en un passage qui figure déjà aussi dans l'évangile selon Thomas. Il en va ainsi notamment du serviteur qui n'a pas su faire fructifier l’argent que son maître lui avait confié avant de partir en voyage et de l'invité qui est venu au festin sans avoir revêtu des habits propres.

Mormon

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Re: L'évangile de Matthieu ???

Ecrit le 23 juil.17, 23:27

Message par Mormon »

Bonjour,

Je ne comprends pas que l'on ait pu approuver ces posts.

Combien de livres vas-tu copier-coller pour détruire de la bande passante ?
Le Livre de Mormon online :
UN AUTRE TEMOIGNAGE DE JESUS-CHRIST
http://www.lds.org/scriptures/bofm?lang=fra
EGLISE de JESUS-CHRIST des SAINTS des DERNIERS JOURS

Gaetan

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Re: L'évangile de Matthieu ???

Ecrit le 25 juil.17, 17:01

Message par Gaetan »

Ce texte est trop long à lire, peux tu nous faire un résumé tout simplement?

cote

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Re: L'évangile de Matthieu ???

Ecrit le 25 juil.17, 22:02

Message par cote »

Dans son livre : L’évangile selon Matthieu d’après un papyrus copte de la collection Schøyen. Analyse littéraire (CRB 55). Paris: Gabalda, 2003.
M.-É. Boismard en analysant le texte du Codex Schøyen 2650, témoin copte du texte grec ancien de l'évangile de Matthieu, s’est aperçût que le texte n’était pas homogène mais qu’il comportait deux niveaux de rédaction. Un niveau plus archaïque et un autre niveau systématiquement complété et harmonisé d’après le texte du Matthieu canonique.
En dégageant le texte de son deuxième niveau de rédaction il découvrit une harmonie évangélique dont les textes de Matthieu avaient été assez souvent remplacé par des textes plus ou moins parallèles repris des traditions johanniques et lucaniennes.
Selon Boismard les caractéristiques essentielles d’un Matthieu sous sa forme la plus primitive se trouve dans ce texte, il offre un meilleur texte que celui de l’évangile du Matthieu grec canonique, il suppose un substrat araméen et on ne lui constate aucune dépendance à l’égard de l’évangile de Marc.
Et cette harmonie évangélique serait, d’après Boismard, le même texte que celui dont parlait Justin l’apologiste par «mémoire des apôtres» et composé au plus tard vers 140.
Les toutes premières traces de l’existence de l’évangile de Matthieu sont dans les Homélies Clémentines (150—160) et dans les écrits de Justin Martyr (mort vers l66).

Saint Glinglin

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Re: L'évangile de Matthieu ???

Ecrit le 25 juil.17, 22:45

Message par Saint Glinglin »

Et où trouve-ton la reconstitution de ce proto-Matthieu ?

cote

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Re: L'évangile de Matthieu ???

Ecrit le 25 juil.17, 23:23

Message par cote »

L’évangile selon Matthieu d’après un papyrus copte de la collection Schøyen. Analyse littéraire (CRB 55). Paris: Gabalda, 2003

Saint Glinglin

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Re: L'évangile de Matthieu ???

Ecrit le 26 juil.17, 20:33

Message par Saint Glinglin »

Il faut mettre cet évangile en ligne.

omar13

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Re: L'évangile de Matthieu ???

Ecrit le 27 juil.17, 22:13

Message par omar13 »

cote a écrit :Plusieurs théologiens anglais ont déjà soupçonné que les célèbres Logia commentés par Papias (évêque de Hiérapolis en Phrygie vers l'an 110) n’étaient pas des discours de Jésus, mais des passages de l'Ancien Testament classés suivant certains chefs et destinés à réfuter les objections des juifs à la prédication chrétienne.
Ces passages étaient réputés prophétiques, dans le sens où l’ancienne écriture est la préfiguration de la nouvelle; d’où le nom d’oracles dominicaux qui leur était attribué. D‘autre part, dans une série d’articles aussi admirables par la vigueur de l‘argumentation que par l'érudition, M. Rendel Harris, assisté de M. Vacher Burch, a démontré l'existence d'un vieux recueil de témoignages contre les juifs, tirés de l'Ancien Testament et de livres apocryphés, recueil maintes fois étendu, corrigé ou modifié, mais dont le fonds est plus ancien que nos évangiles et les épîtres pauliniennes qui en font usage.
Le bon sens indique que les premiers prédicateurs du christianisme ne pouvaient transporter avec eux la masse énorme des livres juifs, mais devaient se contenter d'extraits disposés en manuel; ce manuel leur servait à confondre les juifs et à leur prouver que toutes les affirmations dogmatiques des chrétiens reposaient sur des textes prophétiques de l’Ancien Testament. On suit la trace de ce manuel jusqu'au XIIe siècle ; Justin, Cyprien, Grégoire de Nysse en ont fait un continuel usage; Athanase y a eu recours dans les controverses du Concile de Nicée. Sous sa forme la plus ample, ce livre de témoignages contenait aussi de courts récits historiques dont l‘exactitude était démontrée par la même méthode, consistant non pas à alléguer des preuves tirées des auteurs profanes, des documents d’archives, mais des textes réputés prophétiques qui trouvaient ainsi leur application.
Cela posé, il est presque certain que ce livre de témoignages pré-évangélique est identique aux Logia du Seigneur, attribués par Papias, qui les commenta en cinq livres, à l'apôtre Matthieu. Or, le catalogue des manuscrits du Mont-Athos publié par Lambros signale le manuscrit en cinq livres d'un recueil composé contre les juifs lequel est attribué au moine Matthieu, d‘ailleurs inconnu. Cette attribution est fondée sur six vers grecs iambiques placés en tête du manuscrit.
Comme la doctrine qui fait du judaïsme et des sectes juives l'origine des hérésies chrétiennes remonte au IIe siècle il semble bien qu'il ne puisse être question du moine Matthieu; c‘est bien de l‘apôtre qu’il s'agit, et le livre de l’Athos nous rend à la fois, sous une forme plus ou moins correcte, les Logia commentés par Papias et le premier manuel chrétien de prédication apostolique.
Il est vrai que, suivant Papias. Matthieu avait rédigé les Logia en hébreu (araméen) et que chacun interprétait ces textes comme il pouvait; nous n'aurions donc pas retrouvé la compilation originale attribuée à l'apôtre, mais une traduction grecque, celle même, peut-être, dont Papias fit la base de son commentaire perdu. Ceux qui connaissent l'importance, pour l'histoire du christianisme primitif, des fragments de Papias et de ce qu’Eusèbe rapporte sur leur auteur, comprendront que la découverte, brièvement annoncée ici, est une de celles qui font époque dans la science.
S. B.
Les données actuelles indiquent que les évangiles sont restés sans auteur jusqu’à la seconde moitié du 2ème siècle... Les évangiles tels que nous les connaissons ont été cités dans la première moitié du deuxième siècle, mais toujours de façon anonyme. Les noms apparaissent soudainement dans les années 180. Ensuite, il y a eu de nombreux évangiles, en plus des quatre, et les Chrétiens ont décidé de choisir ceux qui étaient les plus autoritaires.
________________________________________________________________________
Le canon de Muratori est une liste de livres saints, découverte à Milan par Ludovico Muratori (1672-1750) ; cette liste est en latin mais elle est certainement traduite d'une liste grecque remontant aux alentours de l'an 180.
Le canon de Muratori comprend : les évangiles de Luc et de Jean, les Actes des apôtres, 13 épîtres de Paul (2 Corinthiens, Éphésiens, Philippiens, Colossiens, Galates, 2 Thessaloniciens, Romains, Philémon, Tite, 2 Timothée) 1 épître de Jude, 2 Épîtres de Jean et l'apocalypse de Jean. L’épitre de Paul aux Laodicéens et celle aux Alexandrins, l’apocalypse de Pierre, et enfin le Pasteur d‘Hermas. Les deux épîtres aux Laodicéens et aux Alexandrins sont rejetées comme hérétiques, tandis que le Pasteur d’Hermas doit être lu pour l’édification personnelle, mais non dans le culte public.
________________________________________________________________________
L’évangile de Matthieu est une histoire de Jésus, contenant un enseignement apologétique judéo-chrétien. Le caractère apologétique de Matthieu suppose que l'auteur écrit en vue de Juifs chrétiens, éprouvant le besoin de concilier avec leur foi en Jésus comme Messie leur état de minorité dans la nation, et le fait que la nation, comme telle, refuse de croire en lui, son apologétique est à la fois judéo-chrétienne et anti judaïque.
Les ébionites étaient des esséniens de Samarie, pratiquant des rites qui semblent communs aux Juifs esséniens et aux chrétiens primitifs : circoncisions, baptême, ascèse, Sabbat, eucharistie... Ils pratiquaient la pauvreté, la chasteté, la loyauté.
Ils furent considérés comme hérétiques par les Juifs orthodoxes et aussi par des églises chrétiennes des débuts. Cette assemblée émigra à Pella en 67 afin que ses membres ne soient exposés que le moins possible aux désagréments de la guerre qui venait d'éclater en Palestine en 66 et, dit Hégésippe, c'est Syméon qui fut élu à la tête de la secte., laquelle prendra dans la suite le nom d'ébionite" (de l'hébreu ébiônîm, les pauvres).
Tous les livres ébionites ainsi que beaucoup d’ouvrages historiques du premier siècle - ont disparu mystérieusement.
Irénée de Lyon (130-202) affirme que les ébionites reconnaissent l'évangile selon Matthieu (Contre les hérésies III 11, 7).
Ceux qu’on appelle ébionites admettent que le monde a été fait par le vrai Dieu, mais, pour ce qui concerne le Seigneur, ils professent les mêmes opinions que Cérinthe et Carpocrate. Ils n’utilisent que l’Évangile selon Matthieu, rejettent l’apôtre Paul qu’ils accusent d’apostasie à l’égard de la Loi. Ils s’appliquent à commenter les prophéties avec une minutie excessive. Ils pratiquent la circoncision et persévèrent dans les coutumes légales et dans les pratiques juives, au point d’aller jusqu’à adorer Jérusalem, comme étant la maison de Dieu.
Eusèbe de Césarée (265-340) désigne l’évangile de Matthieu des ébionites sous le nom d'évangile des Hébreux» et selon lui, «il s'agit de l'original hébreu de l'évangile selon Matthieu (Histoire ecclésiastique III, 27, 4).»
Eusèbe de Césarée confirme le propos d’Origène (185-253) : '' il [leur] fallait complètement rejeter les épîtres de l’apôtre Paul, qu’ils appelaient un apostat de la Loi, ils se servaient uniquement de l’évangile dit selon les Hébreux et tenaient peu compte des autres '' (H.E. 3,27,4). […]
Un peu avant Origène, Tertullien (165-225) n’était pas étonné par l’opposition des ébionites à Paul. Pour lui, l’épître aux Galates réfute merveilleusement les ébionites : quand Paul écrit aux Galates, il s’élève contre ceux qui pratiquent ou défendent la circoncision et la Loi : c’est l’hérésie d’Ébion (De la Prescription 33,5). L’apologiste met ainsi un lien entre les judaïsant de Galatie et les ébionites ; Paul ne visait pas cette hérésie, mais l’épître aux Galates contient tout ce qui est utile à sa réfutation.
Eusèbe de Césarée confirme l’intuition de Tertullien. Certes les ébionites sont divisés au moins en deux groupes, car tous n’ont pas la même confession christologique, mais ils sont profondément unis par leur attachement à la loi de Moïse, sans que tous confèrent la même signification à cet attachement. Pour les uns, la seule foi au Christ ne suffit pas au salut, pour les autres, la Loi qu’ils observent soigneusement n’est pas indispensable au salut.
Épiphane de Salamine (315-403) précise aussi que les ébionites emploient l'évangile selon Matthieu.
Jérôme de Stridon indique que — d'après lui — l'évangile des ébionites est le même que l'évangile selon Matthieu (Contre les Pélagiens 3, 2). Tous les témoignages soulignent une relation entre l'évangile selon Matthieu et l'évangile des ébionites. Son nom dans les communautés ébionites pourrait avoir été évangile selon les douze apôtres et à l'extérieur évangile selon les Hébreux.
Saint Jérôme (347-420) affirme qu'un exemplaire de l’évangile des Hébreux lui fut prêté par des judéo-chrétiens à Antioche et qu'il en existait un autre dans la bibliothèque de Pamphile à Césarée, et que lui-même en fit une traduction grecque et latine.
Il admit bien que l’évangile des Hébreux était l’évangile original dont dépendait Matthieu mais ensuite il le relégua parmi les apocryphes.
L’évangile des Hébreux est presque aussi long que l'évangile de Matthieu, dit Nicéphore de Constantinople (758-828).
Cet évangile des Hébreux est cité par Clément d’Alexandrie (150-216), Origène (185-254) et d’autres auteurs anciens. Il est très proche de Matthieu quant au style comme au contenu.
Justin cite les évangiles sous le nom collectif de «mémoire des apôtres», ce nom indique très certainement une première harmonie évangélique, analogue au Diatessaron de Tatien (né vers 120) un disciple de Justin, plus tardif de deux ou trois décennies.
Le Diatessaron ouvrage qui a fait la célébrité de Tatien est une fusion harmonieuse des évangiles séparés en un récit suivi de la vie et des enseignements de Jésus. Il combine phrases et péricopes des quatre évangiles selon un ordre inspiré de Matthieu.
Avec Justin l’apologiste (apologiste chrétien né en Palestine vers l'an 100 et mort martyre à Rome vers 166), nous abordons un terrain solide. L’authenticité de ses principaux ouvrages n’est pas douteuse; leur date est acquise; il a écrit sous Antonin le Pieux, c’est-à-dire entre 138 à 161. Quand il cite des discours et (les faits de la vie de Jésus), il indique les sources écrites où il puise, ce que ne font presque jamais les pères apostoliques. Toutefois, lui non plus ne nous apprend pas si ces sources sont ou ne sont pas nos évangiles à nous. Il les nomme ordinairement «mémoire des apôtres».
Une seule fois, il dit que ces «mémoire» portent aussi le nom d’évangiles. Ailleurs, il parle de l’évangile au singulier, ce qui fait penser qu’il n’en connaissait qu’un seul.
Pour ce qui est du récit, les documents utilises par Justin font émerger du brouillard originel à peu près les mêmes contours historiques que nos évangiles, mais quand Justin répète au moins à trois reprises que Jean-Baptiste était établi au bord du Jourdain; cette persistance suggère l’idée d’une source inconnue, hypothèse que confirment ensuite la grotte de Bethléem et la flamme du baptême. Nous savons par Épiphane que l’évangile des Hébreux, dont se servaient les ébionites, parlait aussi d’une grande lumière qui aurait illuminé la scène au moment du baptême de Jésus, et faisait aussi dire à la voix d'en haut des paroles empruntées au deuxième psaume, et que cite Justin. Il est permis de conjecturer que Justin a eu à sa disposition une rédaction de l’évangile des Hébreux.
Les discours de Jésus, cités par Justin, concordent avec nos évangiles mieux que les récits mais l’accord est rarement tout à fait littéral. Dans Matthieu 11, 27 et dans Luc 10, 22 Jésus dit «Nul ne sait qui est le Fils, sinon le Père; ni qui est le Père, sinon le Fils ; et celui auquel le Fils voudra le révéler.» Justin reproduit ces paroles avec une double variante: la connaissance que le fils a du père précède chez lui celle que le père a du fils, et le verbe est mis au passé. Ce pourrait n'être qu’une citation libre de nos textes évangéliques ; mais les mêmes variantes se retrouvent exactement et à plusieurs reprises dans les homélies Clémentines, apocryphe du cycle ébionite.
En serrant de plus près les rapports des citations de Justin avec chacun de nos évangiles on découvre que c'est avec Matthieu qu'il concorde le plus souvent. C'est toujours dans la rédaction de Matthieu ou à peu près que sont rapportées ses sentences et l'on retrouve aussi dans Justin des discours et des incidents particuliers à Matthieu. Mais pour être moins constante, la concordance avec Luc n'en est pas moins visible et en partie dans les mêmes termes que chez Luc. Les points de rencontre des citations de Justin avec l’évangile Johannique sont au plus des allusions mais ils sont nombreux. Et les citations ne concordent que très rarement avec l’évangile de Marc.
Pour Justin, ces écrits évangéliques possèdent l’autorité des rapports écrits. Mais ils n’égalent pas les Saintes Écritures ou «la Loi et les Prophètes».
L‘autorité de ces écrits évangéliques est accrue par l’inspiration des prophéties qu'ils rapportent (cf. 1 Apol. 32) mais Justin n'a jamais explicitement considéré les «évangiles» ou les «mémoires des apôtres» comme étant inspirés.
Dans son livre : L’évangile selon Matthieu d’après un papyrus copte de la collection Schøyen. Analyse littéraire (CRB 55). Paris: Gabalda, 2003.
M.-É. Boismard en analysant le texte du Codex Schøyen 2650, témoin copte du texte grec ancien de l'évangile de Matthieu, s’est aperçût que le texte n’était pas homogène mais qu’il comportait deux niveaux de rédaction. Un niveau plus archaïque et un autre niveau systématiquement complété et harmonisé d’après le texte du Matthieu canonique.
En dégageant le texte de son deuxième niveau de rédaction il découvrit une harmonie évangélique dont les textes de Matthieu avaient été assez souvent remplacé par des textes plus ou moins parallèles repris des traditions johanniques et lucaniennes.
Selon Boismard les caractéristiques essentielles d’un Matthieu sous sa forme la plus primitive se trouve dans ce texte, il offre un meilleur texte que celui de l’évangile du Matthieu grec canonique, il suppose un substrat araméen et on ne lui constate aucune dépendance à l’égard de l’évangile de Marc.
Et cette harmonie évangélique serait, d’après Boismard, le même texte que celui dont parlait Justin l’apologiste par «mémoire des apôtres» et composé au plus tard vers 140.
Les toutes premières traces de l’existence de l’évangile de Matthieu sont dans les Homélies Clémentines (150—160) et dans les écrits de Justin Martyr (mort vers l66).
Quelle est la part qui vient de Matthieu, celle qui vient de Jésus? Qui est-il, ce Jésus si, à chaque ligne, c’est l’Ancien Testament, les textes esséniens ou apocalyptiques, voire la littérature grecque ou iranienne, qui guident la plume de l’écrivain? En voyant Matthieu se saisir du livre de Marc pour y coller les logia, y entrelarder ses propres mots, y tisser, explicitement ou en filigrane, des bribes de la Torah, des Psaumes, des Prophètes, on en vient à se demander s’il ne puise pas son inspiration en ces autres écrits qui le précèdent plutôt que de la tradition orale transmise par les disciples immédiats. On cherche Jésus: on trouve l’humilité d’Isaac, la marche de David poursuivi par Absalom, la sagesse de Salomon, la solidarité et la compassion du Serviteur selon Isaïe, la force de discernement de Job, l’aventure de Jonas envoyé à Ninive, le banquet de Mithra. Les rencontres personnelles avec le lépreux, l’aveugle, le publicain, la femme de Béthanie, les dialogues avec Judas ou Pilate, et l’on pressent qu’il s’agit vraisemblablement de rencontres emblématiques, dont bien des modèles sont empruntés à l’Ancien Testament, et, plus généralement, à la littérature antique. On se représentait Jésus sur la montagne, assis sur une barque, allant de Galilée à Tyr et à Sidon: on comprend que la montagne est symbole de révélation, la barque métaphore de l’église, que la Galilée est le carrefour des nations, que Tyr et Sidon sont choisies par l’écrivain pour leur portée biblique. On imaginait Jésus multipliant le pain à foison ou marchant sur les eaux: on apprend que l’écrivain a construit ces séquences à partir de schémas littéraires réinterprétés. On entendait, toute proche, la voix du Galiléen: on réalise que la rhétorique grecque omniprésente ne laisse pas approcher, ou si peu, de la pensée araméenne, qui était nécessairement celle de Jésus. On le pensait né à Bethléem, vivant au Jourdain une rencontre fulgurante avec Jean le Baptiste, s’affrontant au bloc haineux des pharisiens et des sadducéens. Bethléem semble une chose discutée d’un point de vue théologique plus que par une réalité historique; quant à l’acharnement des pharisiens, il risque de n’être qu’une projection des relations hostiles qu’entretient la communauté de Matthieu avec le judaïsme rabbinique de son temps. On aimerait refuser les pistes proposées par l’analyse littéraire et historique, Jésus est mort, et Matthieu contribue à effacer sa figure derrière son travail littéraire, voire à la défigurer par son discours militant.

c'est la pure vérité, depuis trois ans, j'essaye de l'expliquer aux amis du forum:

http://www.forum-religion.org/islamo-ch ... 50806.html
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jipe

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Re: L'évangile de Matthieu ???

Ecrit le 28 juil.17, 08:13

Message par jipe »

@omar

tu vois , toi tout seul sans contrainte tu viens discuter avec les Chrétiens
bienvenue à toi et ta famille
la paix de Jésus Christ sur toi
:hi:

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