Vous avez raison, ἀλληλούϊα est une translittération d'une expression hébraïque ; ce n'est donc pas le sens qui est traduit, mais les lettres ; non pas ce qui est signifié, mais ce qui est écrit. Autrement dit, là où celui qui parle hébreu comprend "Louez Yah", l'hellénophone n'a plus qu'un seul mot : Alléluia.
Horapollon a écrit :Et alors ? Il s'agit aussi d'un seul mot en hébreu.
D'un seul mot hébreu qui a une signification en hébreu.
Alors que, dans le ἀλληλούϊα grec, il n'y a pas le terme grec signifiant "Louez" suivi du nom d'une divinité. Autrement, on aurait aussi des Alléluapollon ou Alléluzeus.
Horapollon a écrit :L'hellénophone connaît aussi:
Thoutmosis, le Pharaon né de Thot
Ramsès, Le pharaon né de Ra
Shamash-shum-ukîn gouverneur de Babylone et prêtre du dieu Shamash
Amarsuen "Taurillon de Sîn" Roi de la Cité d'Ur
Horapollon "Horus-Apollon"
Entend-il forcément le nom du dieu concerné derrière ces appellations ? Par exemple, dans "Amarsuen", où voit-il Sîn ?
Horapollon a écrit :Il connaît aussi :
Ierem-i.ah (Jérémie)
Yédid-i.ah (Didier)
Y.oh-Nathan (Jonathan)
Que signifient, pour un hellénophone, les termes qui précédent le i.ah dans ces prénoms ? Un Grec sait-il ce que Ierem veut dire ? De même pour le Allélu (ἀλληλού) de Alléluia ?
Horapollon a écrit :C'est quelque chose de très commun dans tout le bassin méditerranéen, je ne vois pas pourquoi un grec serait perdu face à un simple Alléluia sachant que toute cette région est province de l'empire où encore une fois, on parle majoritairement grec et araméen (mais encore un peu hébreu, akkadien, égyptien, etc).Il y avait encore des paiens et d'ailleurs, peut être que les grecs connaissaient même les mythes d'Ugarit.Tout cela avait bien plus de sens qu'aujourd'hui...
Je ne dis pas qu'un Grec "serait perdu face à un simple Alléluia", je dis qu'il n'est pas obligatoire qu'un hellénophone entende "Louez Yah" dans Alléluia pour pouvoir utiliser cette expression liturgique de joie.
Votre phrase me semble bien contradictoire : la plupart des Grecs instruits sauraient, d'après vous, qui est le Dieu des Juifs, à savoir, selon eux : Jupiter/Zeus/Serapis ???
Comme si je vous disais qu'aujourd'hui, la plupart des catholiques savent qui est le Dieu des musulmans, qu'ils assimilent allègrement à Jésus Christ
Horapollon a écrit :Ce n'est contradictoire que dans une pensée monothéiste.
Pour les païens, cela ne l'est pas. Le D.ieu des juifs est une divinité parmi tant d'autre, comme chaque peuple à sa propre divinité. Le D.ieu biblique à toutes les caractéristiques de Jupiter, l'assimilation est facile à faire pour eux. D'ailleurs à l'époque, il y a un temple, tout est très similaire au fonctionnement païen. Et d'ailleurs là ou vont se jouer les confrontations.
J'ai du mal à saisir votre argumentation : vous semblez soutenir que, dans un contexte païen qui poussait à l'assimilation entre le Dieu des Juifs et Jupiter, les 4 seules références d'Alléluia dans un unique chapitre du Nouveau Testament, sont la preuve que les chrétiens (d'origine juive ou gentile) invoquaient forcément Dieu par son nom hébreu abrégé de Yah ?!?
Ne serait-il pas plus simple de penser que l'expression d'origine hébraïque Alléluia, signifiant étymologiquement "Louez Yah" a été reprise par la congrégation chrétienne, en grec, sans forcément que Yah soit le nom que les chrétiens donnaient à leur Dieu ?
Mais combien savent reconnaître, derrière le terme Bodhisattva, le nom de Bouddha ?
Horapollon a écrit :Attention, Bouddha n'est pas un nom, il s'agit d'un état (éveille). Son nom est Shakyamuni.
Bodhisattva désigne aussi un état mais qui diffère du statut de Bouddha.
J'ai repris votre exemple : "Comme en France, tout le monde a déjà entendu parler de Bouddha même si on l'assimile un peu a tous nos fantasmes ou les vieux et vieilles analphabètes connaissaient pourtant la liturgie latine sur le bout des doigts, c'est le même principe." C'est vous qui avez commencé par faire de Bouddha un nom et non pas un état.
D'ailleurs, d'après Wikipédia, le "titre de bouddha (terme sanskrit बुद्ध buddha « éveillé » (...)
désigne une personne (...) L'appellation de bouddha peut donc référer à plusieurs personnes.
Le bouddha le plus connu demeure le fondateur du bouddhisme,
Siddhārtha Gautama, archétype du « bouddha pur et parfait » "
Et vous n'avez pas répondu à ma question, que je reformule pour l'occasion : "combien savent reconnaître, derrière le terme Bodhisattva, le titre de bouddha ?"
Juifs hellénisés et les chrétiens d'origine gentile à qui ce texte est destiné avaient-ils besoin de connaître l'étymologie hébraïque du mot ἀλληλούϊα pour savoir qu'il s'agissait d'une expression liturgique de joie ?
Horapollon a écrit :Ce qui est important ici est l'intention des auteurs de s'inscrire dans une tradition yahwiste puisque c'est le sujet de ce post. Les gentilles, les chrétiens, les juifs tout le monde sait qui est Y.ah qui est le Tétragramme et les auteurs souhaite prolonger cette filiation reprenant une expression tiré du canon Yahwiste.
En quoi 4 Alléluias dans un seul chapitre d'un seul livre du Nouveau Testament pourrait-il être un clair représentant d'une "tradition yahwiste" ? C'est comme si, parce qu'un documentaire sur la flore des Alpes montrait 4 plans rapprochés sur des myosotis, on le classait dans la catégorie "documentaire animalier" en soutenant que, étymologiquement myosotis signifie "oreille de souris" donc il est bien question d'un animal dans ce documentaire.
Pour qu'on puisse parler de "tradition yahwiste" pour le NT, encore faudrait-il que l'on trouve יהוה/YHWH dans le Nouveau Testament. D'ailleurs, comment les Grecs de l'Antiquité ont-ils translittéré les 4 lettres du Tétragramme hébraïque ? On sait l'écrire en hébreu : יהוה, et en français : YHWH ; mais en grec ancien, comment s'écrivait-il ?
Comme ἀλληλούϊα est un mot grec possédant une étymologie hébraïque.
De même qu'un francophone n'affirmera pas que, dans la phrase "il lui offrit des myosotis", il y aurait le terme "oreille", on ne peut pas soutenir non plus que dans les 4 versets de l'Apocalypse où est employé ἀλληλούϊα, il y a Yah, et encore moins le Tétragramme hébraïque.
Horapollon a écrit :Ce n'est pas parce qu'on ne fait pas attention aujourd'hui que l'auteur et les gens dans le contexte historique de l'époque ne comprennent pas la filiation qu'on tente d'effectuer.
Mais bien sûr. Alors, aujourd'hui les gens sont bêtes, ils ne perçoivent plus le sens véritable caché dans l'étymologie des noms, mais ce n'était pas le cas dans l'Antiquité, où tout le monde se piquait d'étymologie, même les chrétiens illettrés qui utilisaient une expression liturgique courante.
Horapollon a écrit :A deux pas, il existe encore des maisons de prières ou on récite des halleluyah en hébreu et en araméen...
Comme il existe des encyclopédies, même en ligne, donnant l'étymologie de myosotis.
De quand datez-vous donc (même approximativement) le passage, dans l'esprit des gens ordinaires, d'une compréhension étymologique des mots à celle de leur signification courante ? Pourquoi les chrétiens d'origine gentile du premier siècle devraient-ils forcément entendre le nom du Dieu hébraïque Yah dans le terme grec ἁλληλουϊά alors que l'individu lambda, connecté à Internet, du XXIe siècle, ne "ferait pas attention" au sens étymologique de myosotis ?
Et pourquoi d'ailleurs étymologie et signification courante d'un terme seraient-elles obligatoirement confondues ? Est-il possible, selon vous, de comprendre et d'utiliser le sens courant de myosotis, sans savoir que l'étymologie de ce terme est "oreille de souris" ? Et est-ce la même chose pour un "alléluia" ?
Et l'on ne peut guère évoquer les 4 Alléluias présents dans le seul chapitre 19 de l'Apocalypse pour soutenir que le Tétragramme serait bien présent dans le texte grec du NT. Parce qu'Alléluia ne comporte "Yah" qu'étymologiquement et non pas littéralement (comme myosotis contient "oreille") et que Yah n'est pas le Tétragramme hébraïque יהוה. D'ailleurs, même la TMN met Yah et non pas Jéhovah dans ces 4 versets de l'Apocalypse.
Horapollon a écrit :Le tétragramme n'est pas présent. La volonté d'inscrire le texte dans une filiation yahwiste, oui.
C'est tout ce que j'ai dit dans ce post. Parce que rien ne dit que le nom originellement employé n'était pas le nom de deux lettres et non le nom de 4 lettres arrivé potentiellement postérieurement.
Merci de confirmer que le Tétragramme hébraïque יהוה n'est pas présent dans le Nouveau Testament. Quant à l'inscription, selon vous, du NT dans une "filiation yahwiste", elle semble un tantinet ridicule, non, si on la base uniquement sur 4 Alléluias dans 1 seul chapitre d'un seul des 27 livres du Nouveau Testament ?
Et qu'est-ce que cela change en rapport avec la façon dont la Septante a traduit (en grec) le Tétragramme hébraïque ?
Horapollon a écrit :Vous le sauriez si vous m'aviez lu en réaction au commentaire de Jean Moulin.
Où ça ?
Horapollon a écrit :Ce qui m'intéresse c'est la critique historique et littéraire, ce que font les TJ, je dois avouer que ça n'a pas beaucoup d'importance à mes yeux.
C'est un peu étrange car le raisonnement qui veut que le nom divin Jéhovah soit présent dans le Nouveau Testament puisque on trouve, en Apocalypse 19, quatre Alléluias, expression liturgique signifiant étymologiquement "Louez Yah", Yah étant une forme abrégée du Tétragramme hébraïque יהוה, dont la prononciation a été perdue mais dont une version reconstruite au Moyen Age et popularisée par les artistes, est "Jéhovah", ce raisonnement donc est essentiellement l'apanage des Témoins de... Jéhovah.
Ne réponds pas à un homme stupide selon sa sottise, de peur que tu ne deviennes pareil à lui, toi aussi.
Réponds à un homme stupide selon sa sottise, de peur qu’il ne devienne un sage à ses yeux.
(Proverbes 26:4,5, TMN)