Eliaqim a écrit : ↑11 févr.22, 23:18
Bonjour et bienvenue.
Tellement ! J'ai été sidérée au moment de réaliser, avoir des amies proches qui vont croire à ses idées que la terre est plate, le contrôle, des robots, des sacrifices, etc. Je ne sais pas ce qui passe dans l'esprit de certaines personnes pour arriver à croire autant de choses en très peu de temps.
Salutations.
Merci pour la bienvenue, Eliaqim!
"Ce qui se passe dans l'esprit de certaines personnes..." M'ouais, ça peut desfois faire figure de mystère, ça. Les philosophes gagnent leur salaire en se penchant sur la question.
Ceci dit, je m'efforcerai toujours d'adopter une attitude sympathique dans un débat intellectuel, en ce sens qu'il soit dans l'intérêt de toute participante dans un tel débat non seulement d'exprimer le plus clairement possibles ses propres idées mais d'aider toute interlocutrice à élucider au mieux les siennes--d'essayer, en somme, de voir son point de vue "de l'intérieur" pour ainsi dire.
Bien entendu, ceci suppose que tout le monde évolue dans une réalité consensuelle. Si deux êtres pensants ne peuvent même pas s'entendre sur les faits, ils auront peine à fouler un sol commun. Poursuivant un bacc en études religieuses à l'université Concordia à Montréal, il y a de cela maintenant vingt-cinq ans, je me souviens que les profs nous sommaient d'accueillir toute pensée, aussi ésotérique et marginale fusse-t-elle, sans jugement à priori. Ces profs prônaient l'écoute neutre et la valorisation d'une certaine curiosité naturelle. C'est bien beau tout ça mais... que de changements culturels entre 1996 et 2022! La démocratisation de l'accès à l'internet a eu comme conséquences, d'une part, la prolifération des médias sociaux (où tout le monde et son "mon oncle" sont maintenant en mesure de diffuser leurs opinions, aussi insensées fussent-elles) et, d'autre part, un corollaire inévitable, l'ensevelissement de toute perspective éclairée. La mort de l'expertise, en somme.
Je sais bien que de tels propos peuvent d'emblée paraître "élitistes" mais j'accepterai toujours de me voir affublé du descriptif par toute personne n'ayant aucunes connaissances ni en sciences, ni en histoire, ni même en psychologie ou en sociologie. Hors un entendement basique du monde et de la nature des choses (au meilleur de nos connaissances, il va sans dire!), tout charabia foisonne et les pensées saugrenues pullulent.
Nous en sommes maintenant là, en cette ère de QAnon. Nous sommes bien loin de l'ésotérisme expérimental d'un Richard Glenn, diffusé sur une chaîne télé communautaire ne rejoignant qu'un petit public.
De plus, la montée en flêche de la mouvance humaine depuis quarante ans a introduit des manières nouvelles, voire déboussolantes, de concevoir le monde et la société aux populations-souches des terres d'accueil. La fait religieux est la norme dans le monde, non pas l'exception. Pour nous qui sommes héritières et héritiers d'une tradition européenne plutôt humaniste (ou du moins "humanisante"), ça peut être une tâche ardue que de composer avec la religiosité du monde. Débats continuels sur la laïcité, les accommodements raisonnables, la prolifération des lieux de cultes autrefois inconnus ou étrangers, et autres sillons sectaires.
En dernier lieu (mais non pas le moindre), on peut citer la montée du radicalisme politique, aussi bien en Amérique qu'en Europe, montée qui trouve sa contrepartie dans le radicalisme religieux des pays d'Asie et du Proche-Orient. Les Évangéliques américains mènent une guerre sans merci contre les adversaires d'un certain hértage judéo-chrétien, mais là où les peuples sans moyens utilisent plutôt la terreur (ou du moins la guérilla), les croyants américains se contentent d'infiltrer l'appareil politique tout en évitant la violence. Jusqu'à tout récemment, en tous cas.
Tout ceci pour dire, Eliaqim, que, bien qu'il soit difficile, voire impossible, de savoir ce qui se passe vraiment dans la tête de quelqu'un d'autre, je n'ai absolument aucun doute que, lorsqu'il est question d'appréhender la nature des choses, les facteurs mentionnés ici jouent le rôle d'une trame de fond.
Je demeure un sceptique naturel (pour ainsi dire), un qui a tout de même vécu ce que plusieurs pourraient concevoir comme étant des expériences religieuses ou spirituelles, mais mon entendement du monde est fondé sur l'émerveillement ressenti lorsque je retourne une roche au ras du sentier dans la forêt ou que je mets l'oeil au téléscope ou au microscope. Toujours, je demeurerai fasciné par les milliards de moyens qu'utilisent les êtres humains pour donner un sens à leur vie et pour rendre le monde plus compréhensible à leurs yeux. Mais, il n'en est pas moins vrai que ce monde existe hors leurs conceptions. La réalité fait souvent fi de l'hommerie.
Bon, je bavarde. Allez hop! Un deuxième café!