Confluences Méditerranée 2012/4 (N° 83) .
Des premières conquêtes de l’Empire ottoman qui l’ont hissé au rang de véritable puissance européenne jusqu’au déclin du XIXe siècle qui ont conduit certains acteurs à le qualifier d’« homme malade de l’Europe », de la fondation de la république à l’affirmation du statut de puissance régionale membre du G20, ce sont ainsi plusieurs séquences qui ont rythmé la transformation de la Turquie et la construction de son identité. Si l’héritage de ces dynamiques se retrouve aujourd’hui, il semble nécessiter une (re)mise en perspective historique afin de proposer les clés de compréhension indispensables au décryptage de l’avenir du pays.~ page 9 . Avant-propos, Bastien Alex, Didier Billion
Si la Turquie a récemment fait couler beaucoup d’encre et sur nombre de sujets, des glissements autoritaires actuels aux facteurs de sa réussite économique en passant par l’hypothétique modèle qu’elle peut véhiculer pour ses voisins du Moyen-Orient ou encore ses complexes relations avec son partenaire européen, ce travail d’analyse et de mise en perspective est souvent incomplet, voire absent.
Soucieux d’observer la Turquie moderne sans jamais perdre de vue l’éclairage essentiel qu’apporte l’examen du passé, nous avons souhaité, dans le cadre de la présente livraison de Confluences Méditerranée, revenir sur quelques-uns des sujets qui interpellent le pays aujourd’hui et l’ensemble des observateurs. Ce dossier thématique n’a pas prétention à l’exhaustivité. Puisse-t-il simplement apporter quelques grilles de lecture et susciter l’intérêt des lecteurs pour faciliter la compréhension d’une des puissances de demain, avec laquelle, et quelle que soit son évolution, il faudra compter.
Istanbul est la plus grande mégapole européenne si l’on inclut sa partie asiatique. Il est clair que le pouvoir AKP veut en faire un phare à la gloire de la nouvelle puissance turque. Cet article revient sur l’urbanisme récent en décryptant les desseins qui le sous-tendent. Il le resitue également dans le temps plus long pour démontrer que l’activisme urbanistique n’est pas uniquement une oeuvre de l’AKP.~ pp.11-18 . Istanbul, du « seuil de la félicité brisé » à la mégapole internationale, Jean-François Pérouse
~ Un souci précoce d’embellissement : les années Menderes et la décennie 1960
~ Le développement contraint : la pression migratoire et le tout automobile (1973-2001)
~ Depuis 2001 : internationalisation tous azimuts et « transformation urbaine »
~ Istanbul face à son passé : les affres de la patrimonialisation
~ 5 notes bibiographiques dans le texte
Parangon de la fatigue de l’élargissement de l’UE, les pourparlers d’adhésion de la Turquie sont désormais au point mort. Si les dirigeants politiques turcs et européens portent une part de responsabilité dans cet échec, les perceptions européennes de la Turquie, fruits de l’Histoire et des dynamiques qui ont rythmé les différentes séquences socio-politiques n’y sont pas non plus étrangères. Il semble ainsi nécessaire de se pencher aujourd’hui sur les raisons de cette impasse qui peuvent trouver leur racine dans ce ressenti qui est venu se fracasser contre une conjoncture des plus défavorables. De même, pour aller plus loin, il s’agit de s’interroger sur la véritable question qui est posée, en filigrane, à l’UE et que la Turquie lui renvoie continuellement : celle de la définition de son identité.~ pp.19-29 . L'euroscepticisme, le turcoscepticisme et la Turquie : une affaire de perceptions ? Bastien Alex
~ Un éclairage par l’Histoire
~ Naissance et affirmation des euroscepticisme et turcoscepticisme européens
~ La perception, l’impuissance et la lassitude : clés de l’impasse actuelle ?
~ Un dilemme insoluble sans une introspection européenne
~ 16 notes bibiographiques dans le texte
L’Europe est un concept récent pour les Turcs, symbole plus de changements technologiques et économiques que d’une évolution des valeurs, que d’une intégration de diversités. Les obstacles rencontrés par les Turcs dans les négociations d’une adhésion à l’UE sont attribués à l’incompréhension de la situation du pays par les hommes politiques des Etats-membres. Mais, les Turcs savent-ils vraiment ce que sont les valeurs européennes, ce qu’est l’évolution de l’intégration ? Il ne semble pas que l’enseignement ou les médias fassent passer cette information : dans les sondages, dans les études d’opinion, dans les déclarations publiques, l’Europe reste lointaine.~ pp.31-42 . Quelle Europe pour les Turcs ? Alain Servantie .
~ Où commence l’Europe pour les Turcs ?
~ Un rapprochement de l’Europe à distance
~ Le saut vers l’Union Européenne
~ Y a-t-il une opinion publique turque sur l’Europe ?
~ Une identité européenne en Turquie ?
~ 32 notes bibiographiques dans le texte
L’Europe est un concept récent pour les Turcs, symbole plus de changements technologiques et économiques que d’une évolution des valeurs, que d’une intégration de diversités. Les obstacles rencontrés par les Turcs dans les négociations d’une adhésion à l’UE sont attribués à l’incompréhension de la situation du pays par les hommes politiques des Etats-membres. Mais, les Turcs savent-ils vraiment ce que sont les valeurs européennes, ce qu’est l’évolution de l’intégration ? Il ne semble pas que l’enseignement ou les médias fassent passer cette information : dans les sondages, dans les études d’opinion, dans les déclarations publiques, l’Europe reste lointaine.~ pp.43-57 . Can the Turkish model be relevant for the Arab Awakening ? Kemal Kirisci
~ Which Turkey ?
~ Turkey’s demonstrative effect
~ Policy implications
~ 33 notes bibiographiques dans le texte
Actualité oblige, les commentaires sur la politique extérieure de la Turquie se sont multipliés au cours des dernières années. Les théorisations hâtives et les contresens se sont malheureusement accumulés sur le sujet. C’est pourquoi il est nécessaire de mettre en perspective cette politique pour en comprendre les dynamiques actuelles et en saisir les fondamentaux. Si de réels facteurs de nouveauté se sont cristallisés, il n’en demeure pas moins que les axes traditionnels de la diplomatie mis en œuvre par Ankara continuent à prévaloir.~ pp.59-69 . Tentative de mise en perspective de la politique extérieure de la Turquie, Didier Billion
~ La répétition pavlovienne de formules convenues
~ De réels éléments de « nouveauté » dans la politique extérieure de la Turquie
~ La nécessaire mise en perspective historique
~ En guise de conclusion temporaire…
~ 8 notes bibiographiques dans le texte
La nomination, en mai 2009, d’Ahmet Davutoglu au poste de ministre des Affaires étrangères de la Turquie révéla officiellement une reconfiguration de la diplomatie turque, en fait initiée depuis mars 2003 par lui-même, au poste plus discret de conseiller aux affaires internationales du Premier ministre Erdogan. Sur la base de la thématique de la « profondeur stratégique » qu’il avait élaborée dès les années 1990 en tant qu’universitaire, il entend sortir la diplomatie turque de « l’alignement » observé au cours de la guerre froide, pour l’adapter, dans un environnement géopolitique renouvelé du pays, à une nouvelle période de «désordre international». A partir de la réévaluation de plusieurs paramètres, la Turquie pourrait y figurer un acteur désormais « global », exerçant une stabilisation bénéfique sur un voisinage proche-oriental passablement explosif.~ pp.71-85 . La doctrine Davutoglu : une projection diplomatique de la Turquie sur son environnement, Gérard Groc
~ La méthode
~ Le nouveau paradigme
~ Une spécificité islamique
~ Repenser la place et le rôle de la Turquie
~ Une pratique nouvelle
~ La vision à l’épreuve des faits
~ 11 notes bibiographiques dans le texte
Depuis l’arrivée au pouvoir de l’AKP, la Turquie semblait avoir changé radicalement, en particulier sur le plan de la politique intérieure. Pourtant une décennie après son accession au pouvoir, l’autoritarisme semble empreindre son action. Force est d’admettre que l’AKP se situe donc dans une certaine généalogie de l’autoritarisme en Turquie avec des figures bien connues. Si cet article revient sur cette histoire et sur ces figures, il cherche surtout à analyser la lente montée en puissance de l’autoritarisme de l’AKP.~ pp.87-97 . L'AKP et l'autoritarisme en Turquie : une rupture illusoire, Alican Tayla
~ Le présent vient de l’histoire
~ L’AKP et le retour vers le passé
~ 12 notes bibiographiques dans le texte
74 millions d’habitants, une puissante industrie automobile exportatrice, un PIB par tête qui la place en seconde position des grands émergents derrière la Russie : il y a loin, très loin, de la Turquie d’aujourd’hui, à celle, autarcique, des débuts de la République, qui n’abritait en 1923 que 14 millions d’habitants, dont plus des trois quarts étaient des paysans illettrés. La plongée aux sources de son dynamisme économique et démographique montre que le « modèle turc » résulte d’une lente et tâtonnante construction d’un régime démocratique et d’une économie de marché tout à fait spécifiques.~ pp.99-116 . Aux sources du dynamisme économique turc, Deniz Ünal
~ Quand le Turc était « l’homme malade » de l’Europe
~ 1923-1950 : la mise en place d’une économie étatique
~ 1950-1980 : expérience libérale, dérives financières et coups d’État
~ 1980-2012 : croissance extravertie et réformes des années 2000
~ Liste de titres bibliographiques + 6 graphiques + 6 notes bibographiques dans le texte
Le YÖK, le conseil de l’enseignement supérieur, a été fondé en 1981 par la junte militaire arrivée au pouvoir en 1980 par un coup d’Etat. Les militaires, pressés de remettre le pays dans le « droit chemin », entreprirent rapidement une réforme de l’enseignement supérieur visant à retirer aux universités leur autonomie. Le devoir du YÖK était donc de veiller à l’application de la nouvelle loi sur l’éducation supérieure.~ pp.153-168 . Le YÖK et le Politique : un rapport paralysant la réforme de l'enseignement supérieur en Turquie? Murat Yilmaz
Mais en tant qu’institution étatique supra-parlementaire concentrant tous les pouvoirs de décision dans le domaine de l’enseignement supérieur, il se trouva très vite critiqué par une multitude d’acteurs, notamment par les différents gouvernements qui se succédèrent. Pour ses détracteurs, le YÖK, jugé anti-démocratique et autoritaire, devait absolument disparaître pour céder la place à des universités autonomes capables de se gérer elles-mêmes. Pour cela, il était nécessaire de changer la loi sur l’enseignement supérieur, ce qui relevait de la compétence du parlement turc. Cependant, malgré les promesses des différents partis politiques de réformer radicalement cette loi, il n’y a jamais eu de changement profond.
L’objectif de notre article est d’expliquer, à travers une analyse de l’évolution des rapports entre le pouvoir et le YÖK, la raison pour laquelle celui-ci n’a pas été réformé radicalement. Selon notre hypothèse, le blocage qui caractérise la réforme de l’enseignement supérieur réside dans la rivalité de pouvoir qui s’est instaurée entre le YÖK et l’autorité politique. En d’autres termes, au sein de l’appareil d’Etat, la compétition opposant le YÖK au politique constitue un obstacle majeur à la volonté réelle de réformer en profondeur le YÖK. Néanmoins, la Turquie, engagée depuis le début des années 1990 dans un processus de démocratisation, a besoin plus que jamais de démocratiser le fonctionnement de l’enseignement universitaire.
~ Introduction
~ Comment fonctionne le YÖK ?
~ Les raisons de la fondation du YÖK et ses objectifs
~ Au cœur du fonctionnement du YÖK
~ Les pouvoirs et le YÖK
~ La période ANAP de 1983 à 1991
~ La période DYP-SHP/CHP de 1991 à 1996
~ La période RP-DYP de 1996 à 1997
~ L’AKP et le YOK : un tournant ?
~ L’échec de la première tentative de réforme
~ Vers une réforme constitutionnelle
~ Conclusion
~ 41 notes bibliographiques dans le texte
InfoHay1915
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