Que le sens du terme (muhajir) n'ait jamais fait l'objet de controverse chez les musulmans et dans la Tradition, vous n'en savez rien.Serviteur d'Allah a écrit : ↑20 juil.24, 05:59 Le sens du terme n'a jamais fait l'objet de controverse chez les musulmans, pour la simple raison que les intéressés, Abraham et Noé, ont tous les deux émigré dans la Révélation et la Tradition.
Ce que vous appelez "Tradition" n'est que l'illustration du biais du survivant : il a existé au tout début d'autres traditions islamiques totalement différentes qui ont disparu de la mémoire islamique.
Celle-ci l'a emportée sur celles-là.
Ca ne vous est jamais venu à l'idée que le mot "mumin" ("croyant") pouvait très bien avoir été revendiqué par des parties opposées l'une à l'autre ?Il est question ici du sens de muhâjir, pas de la personne désignée par ce vocable.
Maints passages explicitent le sens initial: partir, s'exiler, s'agissant d'une personne déjà croyante, pour s'établir ailleurs.
Est-ce que vous croyez que les adversaires du prophète se seraient appelés eux-mêmes "kafirs" comme dans le Coran ?
Non, évidemment !
Vous me direz peut-être : si c'était le cas, pourquoi la Tradition ne le rapporte pas (que les "kafirs" se disaient "mumin") ?
Il y a une réponse possible (qui n'est pourtant pas celle que je privilégie) : le biais du survivant : les adversaires du prophète n'ont laissé aucune trace écrite de leurs divergences, laissant le champ libre à la Tradition islamique.
Et puis même sans parler des adversaires directs du prophète à ce moment-là, juifs et chrétiens se revendiquent "croyants" aussi.
Le Coran expose dans ses milliers de pages quelles doivent être les qualités et comportements des gens qui se prétendent "mumin", mais ça ne veut pas dire que ceux qui se désignaient à ce moment-là comme "mumin" appartenaient tous au camp du prophète.
Même le mot "muhajir" peut être revendiqué par un camp ou par l'autre.
Il y a donc un sens à ce qu'il y ait un processus de conversion même quand on se dit "mumin".
Typiquement sur ces versets que vous citez, je n'en ai pas du tout la même compréhension et la même lecture.Quelques exemples qui illustrent ce sens:
3:195: "Ainsi, ceux qui ont émigré [muhâdjiûn], qui ont été expulsés de leurs demeures, qui ont été persécutés dans Mon chemin, qui ont combattu et qui ont été tués, J'effacerai leurs mauvaises actions..."
60:10: "Ô vous qui avez cru, quand les croyantes viennent à vous en émigrées[muhâdjrât], testez-les; et Dieu connaît mieux leur foi. Si vous reconnaissez qu'elles sont croyantes, ne les renvoyez pas aux dénégateurs."
59:8-9: "Ainsi que pour les émigrés [muhâdjiûn] pauvres, ceux qui ont été expulsés de leurs demeures et de leurs biens, tandis qu'ils recherchaient une grâce et un agrément de Dieu, et qu'ils secouraient Dieu et Son messager. Voilà les véridiques."
4: 100: "Quiconque sort de sa maison, émigrant vers Dieu et son messager, puis que la mort atteint, sa récompense incombe à Dieu."
D'abord, une "maison" (dar ou bayt), que ce soit dans le Coran ou même en arabe en général, ce peut être une demeure pour vivre, mais c'est aussi un lieu d'enseignement, par exemple Bayt al-Hikma à Bagdad autrefois.
Ou même la Maison d'Abraham dans le Coran : c'est un lieu pour une retraite, par exemple, pas une demeure pour habiter.
Et précisément dans ces versets, les "maisons" ne sont pas des lieux d'habitation pour vivre, comme on rentre chez soi après le boulot, même si ce n'est pas exclu, mais d'abord des madrassas (ce mot est sûrement anachronique dans le contexte historique, mais il exprime l'idée).
Les "muhajiruns" en question se font expulser de leurs "madrassas", et donc de leur communauté, en raison de leurs divergences avec les autres liées au fait que eux ont accepté la prédication coranique. Ou bien ils la quittent d'eux-mêmes en raison de ces mêmes divergences et cherchent aller ailleurs.
Si je devais écrire une thèse universitaire sur le sujet, je ferais ça en effet.Pour conclure, votre démarche me parait incertaine, pour plusieurs raisons.
Vous vous fondez sur la ressemblance de formes pour conclure que la teneur est forcément la même.
Vous passez outre le processus de l'emprunt du terme -étapes du passage d'une langue à une autre- pour spéculer sur les raisons de l'emploi de celui-ci.
Autrement dit, vous mettez la charrue avant les bœufs.
Une démarche correcte nuance les choses et étudie exhaustivement les différents sens du mot, sans exclure aucun, à commencer par le sens original en langue arabe.
Elle chercherait dans les parlers arabes, la poésie préislamique et les textes des premiers temps de l'islam (où ce terme est utilisé)...
Et ne rejetterait pas en bloc l'avis contraire, parce que celui de musulmans.
Mais ce n'est pas mon objectif ici.
Après, si quelqu'un veut reprendre mes idées pour en faire une thèse universitaire, let's go !