Pour savoir qui sont les Alaouites
Pour les Alaouites, Ali est l'incarnation de Dieu. Il est éternel en sa nature divine et s'est manifesté comme imam du temps.
Ils professent la croyance du passage de l'Esprit saint dans la succession des Imams chiites et sont antinomistes : ils rejetent la charia et les obligations cultuelles de l'islam (pélerinage). Leur propre livre saint (le Kitâb al-madjmû') s'ajoute au Coran.
La cosmogonie alaouite est dialectique : au début des temps, les âmes des croyants sont des lumières autour de Dieu et le louent, puis se révoltent en doutant de Sa divinité. Elles sont alors précipitées sur terre où elles sont enfermées dans des corps matériels condamnés à la métempsycose. Mais elles ont une chance de se racheter : en effet, Dieu leur apparaît dans l'histoire pour les contraindre à l'obéissance. A chaque théophanie, Il est l'essence (ma'nâ), et est accompagné de deux hypostases qui lui sont subordonnées : le nom (ism) ou voile (hijâb) et la porte (bâb) . Le ma'nâ a été Abel, Seth, Joseph, Josué, saint Pierre, et Ali, puis tous les imams jusqu'au onzième, al-Hasan al-'Askarî. Le hijâb, qui voile la vraie nature de Dieu et accomplit Sa volonté, a été Adam, Noé, Jacob, Moïse, Salomon, Jésus, Mohamed, et chacun est accompagné d'un bâb, qui révèle la vraie nature de Dieu, intermédiaire entre la divinité cachée et les croyants initiés . La trinité centrale est toutefois celle qui a Ali pour ma'nâ, Mohamed pour hijâb et Salmân al-Fârisî pour bâb. Les onze imams sont les incarnations suivantes du mâ'na, leurs hujub sont les califes, et des abwâb révèlent leur nature divine. Ainsi, Muhammad b. Nusayr est-il le bâb du dernier imam . Celui qui reconnaît le mâ'na est sauvé, libérée du cycle, son âme redevient étoile, et retourne à travers les sept cieux vers le ġâya, le but ultime, c'est-à-dire la contemplation (mu'âyana) de la lumière divine. Mais la réincarnation peut être une punition. Car l'âme qui a transgressé les commandements de Ali doit être réincarnée jusqu'à sa purification chez un juif, un sunnite ou un chrétien, ou encore pire, un animal . La religion alaouite est fondée sur le sens caché (bâtin), la masse des fidèles ignorant le sens profond du message divin, réservé aux seuls initiés. Aussi est-il difficile d'avoir des certitudes quant aux croyances des alaouites. Apparemment, en plus d'être dans l'histoire, on retrouve la Trinité principale dans les astres. Ici, les interprétations divergent. Selon René Dussaud , on trouve quatre points de vue différents, qui sont autant de sectes : les Haidariés, qui identifient Mohamed au soleil et Salman à la lune, les Chamaliés, qui identifient Ali au ciel, il a pour demeure le soleil que représente Mohamed, les Ghaibiés, qui pensent que les hypostases, s'étant manifestées, sont maintenant invisibles dans l'atmosphère, et les Kalaziés, qui ont conservé des vestiges des anciens cultes lunaires. En revanche, l'anthropologue anglais Sir Edward Evans-Pritchard fait, comme le père Henry Lammens en 1915 , disparaître les Chamaliés , confondus avec les Haidariés.
Les alaouites sont circoncis vers un an, et s’ils sont d’une famille de cheikh, leur initiation se fait à 14 ans et dure environ un an. Deux pères spirituels sont désignés pour le jeune homme, puis un cheikh l'instruit. Le ramadan n'est habituellement pas observé, mais on célèbre quand même le aid al-saghîr. De plus, comme les chrétiens, les alaouites célèbrent l'Epiphanie et Noël, et comme les autres chiites, ils célèbrent l'Achoura, qui commémore le martyr de Hussein à Karbala. Seulement, à la différence de ceux-ci, ils remplacent l'auto flagellation par des libations, au vin ou à l'arak.
De tout cela, les femmes sont exclues, et n'ont pas le droit de participer aux rites des hommes. Leur religion populaire garde alors des traces païennes (vénération des hauts lieux, des sources, des arbres verts...). Le culte des saints, comme souvent, est une autre trace païenne, commune aux deux sexes. Le pays est en effet couvert de qibâb (singulier qubba), qui sont des coupoles abritant les tombes de ces saints .
Comme pour les Druzes, il n'y a pas d'unanimité parmi les théologiens musulmans quant à l'appartenance à l'islam des Alaouites: le juriste hanbalite Ibn Taymiyyah appelait à les massacrer purement et simplement comme apostats, mais le défunt dictateur syrien Hafez el-Assad maria un de ses fils avec une femme sunnite issue de la famille régnante séoudienne, pourtant connue pour son attachement au wahhabisme, une doctrine pour laquelle Ibn Taymiyyah fut une importante source d'inspiration. Le même Hafez el-Assad obtint de juristes libanais tant sunnites que chiites des fatwas reconnaissant les Alaouites comme musulmans, la présidence de la République de Syrie ne pouvant constitutionnellement être assumée que par un musulman. La légitimité de ces fatwas a été contestée.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Alaouites