Il faut que tu relises l'intro.florence_yvonne a écrit :au fait, une morale supérieure à qui ? ou à quoi ?
pour une morale supérieure
morale supérieure
Ecrit le 31 juil.06, 23:15- florence.yvonne
- [ Aucun rang ]
- [ Aucun rang ]
- Messages : 8941
- Enregistré le : 15 sept.05, 21:09
- Localisation : montpellier
pour une morale supérieure
Ecrit le 01 août06, 05:22Non, évidemment, les animaux n'ont pas de morale. . . Sinon, oui, par rapport aux animaux. Il faut être plus précis lorsque tu poses des questions ou que tu fais des réflexions, cela facilite l'échange. Ou alors dis simplement ce que tu penses sur la question, pour plus de clarté.
J,avais écrit: Car cela aurait donné aux gens l’idée „fausse“ que l’on aurait des devoirs envers les animaux, alors qu’on ne saurait avoir des devoirs qu’envers l’Homme. Il y a, aujourd’hui encore, des courants conservateurs qui pensent qu’il est très important de maintenir un fossé entre les animaux humains et non humains. »
J'ai souligné pour toi, les passages explicites au sujet de la question que tu me posais. QU'est-ce qu'on dit à papa Akiles?
J,avais écrit: Car cela aurait donné aux gens l’idée „fausse“ que l’on aurait des devoirs envers les animaux, alors qu’on ne saurait avoir des devoirs qu’envers l’Homme. Il y a, aujourd’hui encore, des courants conservateurs qui pensent qu’il est très important de maintenir un fossé entre les animaux humains et non humains. »
J'ai souligné pour toi, les passages explicites au sujet de la question que tu me posais. QU'est-ce qu'on dit à papa Akiles?
- florence.yvonne
- [ Aucun rang ]
- [ Aucun rang ]
- Messages : 8941
- Enregistré le : 15 sept.05, 21:09
- Localisation : montpellier
Frère loup
Ecrit le 03 août06, 01:21Jacques Julliard : Frère loup (du Nouvel Observateur, il y a quelques années ?)
A supposer que l’homme ait le monopole de la pensée — et nous ne le croyons plus —,
pourquoi faudrait-il que cela lui confère le monopole de la dignité?
Dans le grand souffle de repentance qui est en train de balayer cette fin de siècle et de lui donner figure, il manque encore un mea culpa: celui de l’homme à l’égard de l’animal. Mais il viendra, soyez-en assuré. Si vous en doutez, regardez seulement vos enfants. Ils ne croient plus que les animaux sont des machines, ni que l’homme est maître et possesseur de la nature. Nous non plus, quand nous étions enfants, nous ne le pensions pas. J’ai encore dans les oreilles les cris déchirants du cochon qu’on égorgeait pour le mettre au saloir. Pour ceux qui l’ignoreraient, il n’y a rien de plus affectueux, de plus sociable que le cochon. Mais tandis que nous grandissions, on nous faisait honte de notre sensiblerie. Comment s’attendrir sur le sort des cochons quand les petits Chinois mouraient de faim? Et surtout, comment s’indigner des abattoirs de la Villette, quand les hommes ont fait Auschwitz, la Kolyrna, Tuol Sleng ? Comme si la compassion était dans le coeur de l’homme une denrée en quantité limitée et que tout ce qui est donné à l’un était nécessairement retiré à l’autre. Comme si le lait de la tendresse humaine devait seulement bénéficier aux petits des hommes. Comme si, enfin, la considération des grands crimes dont l’humanité se rend coupable devait nous rendre insensibles aux autres souffrances.
Arrivé à ce point, chacun est requis de dire ses convictions. Voici les miennes. J’ai toujours pensé, contre le christianisme, contre le cartésiamime, que le statut d’exception qu’ils se sont efforcés de donner à l’homme au sein des autres créatures cachait une sorte de narcissisme de l’espèce. Cet espécisme est le fait de toutes les créatures; mais précisément parce que l’homme est la plus élevée d’entre elles, je crois que c’est a lui de le dépasser. Pour tenter de fonder en droit l’éminente dignité de l’homme, et d’introduire un fossé infranchissable entre lui et le reste de la création, le christianisme et Descartes ont cherché ce qui le distinguait radicalement: le premier a trouvé qu’il a été créé à l’image de Dieu, le second qu’il est un être pensant. Toute la civilisation technique et matérialiste qui est la nôtre repose sur le postulat que l’homme est le seul être qui doit être regardé comme une fin, alors que tous les autres seraient –des- moyens.
Mais si le monopole de la pensée par l’homme est ébranlé, comme le montre notre dossier (N. Obs), c’est tout le système qui s’écroule. C'est l’exception humaine qui est battue en brèche, le fondement de son éminente dignité et son droit d’instrumentaliser le reste de la création. Au sein même du christianisme, certains ont tiré d’autres conséquences du fait que le Christ soit venu sauver les hommes et non les cochons.
Saint François d’Assise a interprété dans un sens non possessif le mot de saint Paul: " Le monde est à vous, vous êtes au Christ, le Christ est à Dieu ... " Si le Christ ne nous " possède " pas mais nous fait participer à sa dignité, pourquoi n’en irait-il pas de même de l’homme avec son frère loup?
Allons plus loin : le fondement de l’humanisme cartésien et postcartésien, c’est qu’il n’y a pas de dignité sans pensée, ni de pensée sans langage. Au terme de la distillation fractionnée de l’univers à laquelle on procède, il faut que l’homme reste seul au fond de l’éprouvette? Mais à supposer que l’homme ait le monopole de la pensée — encore une fois nous ne le croyons plus —, pourquoi faudrait-il que cela lui confère le monopole de la dignité, c’est-à-dire le droit d’être traité comme une fin ?
Une comparaison me permettra de me faire comprendre. Le racisme est fondé le plus souvent sur la proclamation de l’inégalité des races. Le racisme des demi-habiles proclame en réplique leur égalité. Il me semble que le véritable antiracisme consiste à déclarer qu’égales ou inégales les races -ou plutôt les groupes humains - doivent être traitées avec une égale dignité. Si donc la question de l’animal provoque des réactions aussi contrastées et aussi passionnelles, c’est qu’elle pose en définitive la question philosophique du fondement de la dignité humaine, et que l’époque invite l’homme à abandonner une partie de sa superbe et de son arrogance.
Ne faisons pas d’angélisme. Si l’homme dévore et détruit les animaux, il ne suffira pas qu’il y renonce pour que, comme dans Isaïe, le loup et l’agnelet paissent ensemble, le lion comme le boeuf mangent de la paille et le serpent se nourrisse de poussière. Quoi qu’on fasse, le monde restera une lutte cruelle pour la vie. Mais l’homme ne serait pas grand-chose s’il n’était pas la Créature qui, au-delà de la nature, a inventé la Pitié suprême.
J’emploie à dessein le mot de Victor Hugo parce qu’avec Hugo, avec Micbelet, avec Nerval, avec Kundera, je pense que l’homme est aujourd’hui requis de mettre fin au malentendu atroce, à la haine millénaire qui oppose l’homme à l’animal. Et qu’à défaut de fonder en droit sa dignité, ce serait au moins le moyen de la rendre plausible.
A supposer que l’homme ait le monopole de la pensée — et nous ne le croyons plus —,
pourquoi faudrait-il que cela lui confère le monopole de la dignité?
Dans le grand souffle de repentance qui est en train de balayer cette fin de siècle et de lui donner figure, il manque encore un mea culpa: celui de l’homme à l’égard de l’animal. Mais il viendra, soyez-en assuré. Si vous en doutez, regardez seulement vos enfants. Ils ne croient plus que les animaux sont des machines, ni que l’homme est maître et possesseur de la nature. Nous non plus, quand nous étions enfants, nous ne le pensions pas. J’ai encore dans les oreilles les cris déchirants du cochon qu’on égorgeait pour le mettre au saloir. Pour ceux qui l’ignoreraient, il n’y a rien de plus affectueux, de plus sociable que le cochon. Mais tandis que nous grandissions, on nous faisait honte de notre sensiblerie. Comment s’attendrir sur le sort des cochons quand les petits Chinois mouraient de faim? Et surtout, comment s’indigner des abattoirs de la Villette, quand les hommes ont fait Auschwitz, la Kolyrna, Tuol Sleng ? Comme si la compassion était dans le coeur de l’homme une denrée en quantité limitée et que tout ce qui est donné à l’un était nécessairement retiré à l’autre. Comme si le lait de la tendresse humaine devait seulement bénéficier aux petits des hommes. Comme si, enfin, la considération des grands crimes dont l’humanité se rend coupable devait nous rendre insensibles aux autres souffrances.
Arrivé à ce point, chacun est requis de dire ses convictions. Voici les miennes. J’ai toujours pensé, contre le christianisme, contre le cartésiamime, que le statut d’exception qu’ils se sont efforcés de donner à l’homme au sein des autres créatures cachait une sorte de narcissisme de l’espèce. Cet espécisme est le fait de toutes les créatures; mais précisément parce que l’homme est la plus élevée d’entre elles, je crois que c’est a lui de le dépasser. Pour tenter de fonder en droit l’éminente dignité de l’homme, et d’introduire un fossé infranchissable entre lui et le reste de la création, le christianisme et Descartes ont cherché ce qui le distinguait radicalement: le premier a trouvé qu’il a été créé à l’image de Dieu, le second qu’il est un être pensant. Toute la civilisation technique et matérialiste qui est la nôtre repose sur le postulat que l’homme est le seul être qui doit être regardé comme une fin, alors que tous les autres seraient –des- moyens.
Mais si le monopole de la pensée par l’homme est ébranlé, comme le montre notre dossier (N. Obs), c’est tout le système qui s’écroule. C'est l’exception humaine qui est battue en brèche, le fondement de son éminente dignité et son droit d’instrumentaliser le reste de la création. Au sein même du christianisme, certains ont tiré d’autres conséquences du fait que le Christ soit venu sauver les hommes et non les cochons.
Saint François d’Assise a interprété dans un sens non possessif le mot de saint Paul: " Le monde est à vous, vous êtes au Christ, le Christ est à Dieu ... " Si le Christ ne nous " possède " pas mais nous fait participer à sa dignité, pourquoi n’en irait-il pas de même de l’homme avec son frère loup?
Allons plus loin : le fondement de l’humanisme cartésien et postcartésien, c’est qu’il n’y a pas de dignité sans pensée, ni de pensée sans langage. Au terme de la distillation fractionnée de l’univers à laquelle on procède, il faut que l’homme reste seul au fond de l’éprouvette? Mais à supposer que l’homme ait le monopole de la pensée — encore une fois nous ne le croyons plus —, pourquoi faudrait-il que cela lui confère le monopole de la dignité, c’est-à-dire le droit d’être traité comme une fin ?
Une comparaison me permettra de me faire comprendre. Le racisme est fondé le plus souvent sur la proclamation de l’inégalité des races. Le racisme des demi-habiles proclame en réplique leur égalité. Il me semble que le véritable antiracisme consiste à déclarer qu’égales ou inégales les races -ou plutôt les groupes humains - doivent être traitées avec une égale dignité. Si donc la question de l’animal provoque des réactions aussi contrastées et aussi passionnelles, c’est qu’elle pose en définitive la question philosophique du fondement de la dignité humaine, et que l’époque invite l’homme à abandonner une partie de sa superbe et de son arrogance.
Ne faisons pas d’angélisme. Si l’homme dévore et détruit les animaux, il ne suffira pas qu’il y renonce pour que, comme dans Isaïe, le loup et l’agnelet paissent ensemble, le lion comme le boeuf mangent de la paille et le serpent se nourrisse de poussière. Quoi qu’on fasse, le monde restera une lutte cruelle pour la vie. Mais l’homme ne serait pas grand-chose s’il n’était pas la Créature qui, au-delà de la nature, a inventé la Pitié suprême.
J’emploie à dessein le mot de Victor Hugo parce qu’avec Hugo, avec Micbelet, avec Nerval, avec Kundera, je pense que l’homme est aujourd’hui requis de mettre fin au malentendu atroce, à la haine millénaire qui oppose l’homme à l’animal. Et qu’à défaut de fonder en droit sa dignité, ce serait au moins le moyen de la rendre plausible.
-
- Sujets similaires
- Réponses
- Vues
- Dernier message
Qui est en ligne
Utilisateurs parcourant ce forum : Serviteur d'Allah et 2 invités