Gilles a écrit :impossible pour l'homme .non impossible pour Dieu .
Pas d'accord ! Cela serait admettre que Dieu modifie sa parole selon les circonstances et qu'on ne peut se fier à sa parole. Or la question de la résurrection est intégralement traitée et notamment dans le NT. Si Dieu a fait la création, il l'a réalisée une fois pour toutes, il ne peut donc pas la re-faire, car Dieu est intemporel tout autant que sa parole que Jean assimile à Dieu lui-même.
Par ailleurs, la chair désigne chez Paul le corps physique ou encore le corps charnel ou encore le corps psychique (psyché = âme) et c'est le corps animal. Or ce corps constitue les vêtements de peau qu'Adam et Eve reçoivent de Dieu après la faute. Si la résurrection est liée à la remise des péchés, à quoi sert donc au royaume des cieux, un corps physique résultat de la faute ? Le seul corps incorruptible est le corps spirituel de Paul, ou le vêtement nouveau dont parle Jésus. Or il est écrit en Luc 23,34 :
ils se partagèrent ses vêtements en tirant au sort et donc le corps physique doit être décomposé et détruit. Il est écrit aussi en 2 Cor 5,3
nous désirons fort revêtir, par dessus l'autre, notre demeure des cieux (corps spirituel), si du moins nous sommes trouvés revêtus et non pas nus. Cela signifie que le corps mystique se constitue et cohabite avec le corps physique durant la vie terrestre (avec une différence de matérialité cependant). Car à la mort du corps physique, celui qui a un corps mystique n'est pas trouvé nu.
De quoi se compose ce corps spirituel ? Il se compose de la
chair du Christ différente de la chair animale : Jn 6,55
car ma chair est vraie nourriture et mon sang est le vrai breuvage. D'où provient cette chair du Christ ? Jn 6,63
C'est l'Esprit qui fait vivre. La chair ne sert à rien. Ce corps provient de l'Esprit saint et il constitue une sorte de manne à la fois matérielle, énergétique et transformante, qui résulte de l'adhésion au Christ, à sa parole et au partage du pain et du vin. Mais la voie chrétienne ne fait pas que réaliser le corps mystique. Elle guérit aussi le corps physique et Jésus, après le baptême, réalise des guérisons. C'est pourquoi les adeptes du christianisme sont en général en bonne santé.
Il reste à considérer la mort. Il y a là plusieurs cas de figure :
1- l'homme atteint directement la mort physique. Alors son cas dépend de la seconde résurrection, et en fonction de la façon dont les deux corps se répartissent en proportion et en qualité (partage du pain), il y aura résurrection ou non en vue du royaume céleste. Ce partage des corps est d'une grande importance : 1 Cor 11,29
Celui qui mange et qui boit sans discerner le corps (mystique, du corps physique), mange et boit un jugement contre lui-même. Il s'agit donc de réitérer la scène en concordance mystique avec le Christ. De toute façon, le corps physique n'existe plus, puis que l'être humain est mort. Alors, en l'absence de corps mystique, l'être replonge dans le lac de feu, où, hormis un petit reste placé dans une arche et où l'épisode Noé se renouvelle (Luc 17,26, 1P 3,20, 2P 2,5), il ne reste plus rien. La mort de l'être n'est donc pas une annulation de sa création, mais seulement de sa conscience. N'ayant plus de corps et ayant rendu l'esprit, l'être n'existe plus, sauf le contenu de l'arche qui préserve son état créé. Le déluge est alors représentatif de la destruction (préfiguration du baptême qui est la mort du vieil homme) et l'arche est ce qui est sauvé de l'être individuel (1P 3,20 et 2P 2,5) (préfiguration du baptême et naissance de l'homme nouveau). C'est ce contenu qui pourra regénérer un autre être dans un cycle ultérieur qui débute après les mille ans. Le déluge est alors comme un baptême forcé dans l'inconscience, auquel répond durant l'existence le baptême consenti. Le déluge est lié à la mort réelle, le baptême à la mort mystique et symbolique de la crucifixion.
2- L'homme imite Jésus dans l'expérience de la crucifixion, par un abandon mystique de sa conscience individuelle, et alors, il atteint la première mort, alors même que son corps physique continue de vivre. Il s'agit d'une mort des sens, des pensées et des actions. C'est un niveau de conscience que cultivent les mystiques par la prière et la méditation dans une parfaite immobilité, et qui s'apparente à l'état de samadhi des traditions hindoue et bouddhiste. Alors, cette crucifixion aboutit à la première résurrection. L'être est régénéré en Christ, par le Souffle sacré, et il continue sa vie sur terre, éclairé (illuminé) de l'Esprit Saint. A sa mort physique (seconde mort), il subit directement la seconde résurrection. Disposant d'un corps mystique, il n'est pas trouvé nu. C'est pourquoi, dans ce cas, il n'y a pas de mort, car celle-ci a déjà eu lieu lors de l'expérience de la crucifixion suivie de la première résurrection. Cette crucifixion mystique est généralement précédée d'états particuliers de la conscience où le Christ se révèle au méditant. Céphas reconnaît alors le fils du Dieu vivant. C'est à partir de cet état que débute la consolidation du corps spirituel (ekklesia = concentration, assemblage) à partir de la chair du Christ accumulée, ce qui peut s'accompagner de certaines douleurs passagères (douleurs de l'enfantement) dont témoignent les mystiques. Hebreux 1,11-12
Tous, comme un manteau, ils vieilliront et comme un habit, tu les rouleras ; comme un manteau, ils seront aussi changés. C'est que le corps mystique, dans sa formation, bouge (roule) constamment jusqu'à sa maturation.
Voilà le scénario du NT dans les grandes lignes. Il faut faire parler les écritures. Sans dénigrer une interprétation collective des textes généralement prisée des congrégations, nos existences sont d'abord individuelles. Donc les textes doivent donner à l'individu les explications qui lui sont nécessaires à un instant donné, même si ces explications changent dans le temps, au fur et à mesure de l'avancement du disciple. Dans cette lecture de la parole, chacun y trouve ce qu'il a besoin et nous n'avons pas tous les mêmes besoins en même temps. De même, certains Pères de l'Eglise et les grands mystiques sont un témoignage des plus précieux de l'exercice de la voie chrétienne. Enfin, les textes jouent avec le temps. Les vérités des évangiles étaient applicables aux contemporains de Jésus, mais également aux hommes qui l'ont précédé et enfin à ceux qui lui succèdent. Car la parole est vraie dans l'éternité, donc elle est vraie dans toutes les dimensions du triple temps (passé, présent et futur).