Des religieux à la chambre de commerce de Limoges
LE MONDE | 05.03.07 | 14h25 • Mis à jour le 05.03.07 | 14h25
(Limoges, correspondante)
L'initiative est diversement appréciée. Mi-février, le président de la chambre de commerce et d'industrie (CCI) de Limoges et de la Haute-Vienne, Jean-Pierre Limousin, a décidé d'accueillir comme conseillers techniques des représentants des quatre principales communautés religieuses du département.
L'avis de ces experts catholique, israélite, musulman et protestant serait sollicité sur des sujets socio-économiques. "Nous leur avons demandé d'assister à nos travaux pour connaître leurs préoccupations, d'apporter leur expertise dans certains domaines et de créer les conditions du dialogue, pour qu'en cas de problème nous puissions rapidement trouver des solutions", a déclaré M. Limousin au Populaire du Centre, le 19 février.
Aujourd'hui, le président de la CCI ne souhaite plus s'exprimer pour ne pas attiser la controverse. Car les réactions sont vives. Une "expérience incongrue", écrit la Ligue des droits de l'homme de Limoges. "Dangereuse", selon le tout nouveau collectif Alerte laïcité, constitué d'une cinquantaine de personnes (enseignants, chefs d'entreprise, agriculteurs, étudiants, syndicalistes). Dans une lettre ouverte, son porte-parole, Bernard Desbals, président fondateur de l'université de Limoges, en appelle au préfet pour "casser cette décision" prise par "un établissement public administratif de l'Etat soumis au respect de la loi de 1905".
La décision a été votée à l'unanimité des élus de la CCI présents lors de l'assemblée générale du 16 février et saluée par les intéressés. "C'est la première fois que le monde du travail s'ouvre aux religions", se félicite le vice-président du conseil régional du culte musulman (CRCM) du Limousin, Okacha Ben Ahmed Daho. Et de citer des situations où le conseiller musulman pourrait "avoir un rôle de conciliateur" : jeûne du ramadan aux heures de travail, jour de l'Aïd el-Kébir. Le CRCM n'a pas encore choisi son expert.
Jacques Nadam, président du consistoire israélite de Limoges, a en revanche déjà nommé un médecin retraité à ce poste : "Il s'agit d'être consulté, pas de faire pression, ça ne va pas plus loin. La décision revient entièrement à la CCI." Chez les catholiques, c'est un prêtre qui a été désigné par Christophe Dufour, évêque du diocèse de Limoges. "Cette initiative reconnaît les religions comme des réalités sociales, se réjouit-il, et favorise la rencontre en direct dans une société qui se cloisonne et se communautarise."
Pour M. Desbals, cette reconnaissance des cultes relève au contraire d'une "dérive communautariste". Loin de clore le débat, le collectif Alerte laïcité envisage de renforcer son action dans les prochains jours.
Hélène Pommier
Article paru dans l'édition du 06.03.07
http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0 ... 156,0.html
Atteinte à la laïcité ou laïcité bien comprise ?