ÉTUDES SUR LA PAROLE DE DIEU
DEUXIÈME ÉPITRE AUX CORINTHIENS
L’apôtre écrit la seconde épître aux Corinthiens sous l’influence des consolations de Christ, consolations éprouvées au fort de sa détresse en Asie, et renouvelées, au moment où il écrit sa lettre, par les bonnes nouvelles apportées de Corinthe par Tite. Maintenant qu’il est heureux à leur égard, l’apôtre fait part de ces mêmes consolations aux Corinthiens qui, en dernier lieu, par la grâce, en avaient été la source.
La première lettre de Paul avait réveillé la conscience des Corinthiens et avait rétabli la crainte de Dieu dans leur coeur et l’intégrité dans leur marche. Le coeur angoissé de l’apôtre se ravivait à l’ouïe de ces bonnes nouvelles. L’état dans lequel les Corinthiens se trouvaient précédemment l’avait abattu, et avait un peu éloigné de son coeur les sentiments produits par les consolations dont Jésus le remplissait durant ses épreuves à Éphèse. Combien variés et compliqués sont les exercices de coeur de celui qui sert Christ et qui veille sur les âmes! La restauration spirituelle des Corinthiens, en dissipant l’angoisse de Paul, avait renouvelé en lui la joie de ces consolations que la nouvelle de leur inconduite avait interrompues. Il revient ensuite au sujet de ses souffrances à Éphèse, et développe d’une manière remarquable la puissance de la vie dont il vivait en Christ.
1. 1 Chapitre 1
L’apôtre s’adresse à tous les saints de l’Achaïe, aussi bien qu’à ceux de la ville de Corinthe qui était la capitale de cette contrée ; et, conduit par l’Esprit Saint à écrire selon les vrais sentiments que cet Esprit produisait en lui, il se place immédiatement au milieu des consolations qui remplissaient son coeur, pour reconnaître en elles le Dieu qui les versait dans son âme éprouvée et exercée.
Rien de plus touchant que l’oeuvre de l’Esprit dans le coeur de l’apôtre. Le mélange de reconnaissance et d’adoration envers Dieu, de joie dans les consolations de Christ et d’affection pour ceux à l’égard desquels il se réjouissait maintenant, est d’une beauté que l’esprit de l’homme ne saurait absolument pas imiter. Sa simplicité et sa vérité ne font que rehausser l’excellence et l’élévation de cette oeuvre divine dans un coeur humain.
«Béni soit le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus Christ, le Père des miséricordes et le Dieu de toute consolation, qui nous console à l’égard de toute notre affliction, afin que nous soyons capables de consoler ceux qui sont dans quelque affliction que ce soit, par la consolation dont nous sommes nous-mêmes consolés de Dieu. Car comme les souffrances du Christ abondent à notre égard, ainsi, par le Christ, notre consolation aussi abonde. Et soit que nous soyons affligés, c’est pour votre consolation et votre salut, qui est opéré en ce que vous endurez les mêmes souffrances que nous aussi nous souffrons (et notre espérance à votre égard est ferme) ; soit que nous soyons consolés, c’est pour votre consolation et votre salut.» Bénissant Dieu pour les consolations qu’il avait reçues, content de souffrir, parce que sa participation aux souffrances, en leur montrant le chemin ordonné de Dieu pour les plus excellents, encourageait la foi des Corinthiens qui souffraient, Paul verse dans leur coeur ses propres consolations dès que l’encouragement lui vient de Dieu. Sa première pensée — et c’est ce qui a toujours lieu dans une âme qui réalise sa dépendance de Dieu et qui se tient dans sa présence (voyez Gen. 24) — est de bénir Dieu et de le reconnaître comme la source de toute consolation. Le Christ, qu’il a trouvé, et dans les souffrances, et dans les consolations, tourne aussitôt son coeur vers les bien-aimés membres de son corps.
Remarquez en même temps la perversité du coeur de l’homme et la patience de Dieu. Au milieu de leurs souffrances pour le nom de Christ, les Corinthiens pouvaient prendre leur part du péché qui déshonorait ce nom, d’un péché inconnu parmi les gentils. Malgré ce péché, Dieu ne voulait pas les priver du témoignage que ces souffrances leur rendaient de la vérité de leur christianisme, souffrances qui assuraient l’apôtre que les Corinthiens jouiraient des consolations de Christ qui accompagnent les souffrances endurées pour le nom du Sauveur. Il est beau de voir comment la grâce s’empare du bien, afin d’en conclure que le mal sera sûrement corrigé au lieu de discréditer le bien à cause du mal. Paul était près de Christ, la source de la force.
L’apôtre, après ces paroles encourageantes, présente d’une manière expérimentale la doctrine de la puissance de la vie en Christ (*), qui avait son déploiement et sa force dans la mort à tout ce qui est temporel, à tout ce qui nous lie à l’ancienne création, à la vie mortelle elle-même. Ensuite il touche presque tous les sujets qui l’avaient occupé dans sa première épître ; mais il y revient avec un coeur soulagé, bien qu’avec une fermeté qui voulait le bien des fidèles de Corinthe et la gloire de Dieu, quoi qu’il lui en coûtât à lui-même.
(*) Le commencement de cette épître présente la puissance expérimentale de ce qui est enseigné doctrinalement en Rom. ch.5:12 à ch.8, et est ainsi très instructif sous ce rapport. Cela ne va pas si loin que dans les Éphésiens et les Colossiens ; là le fruit pratique de la doctrine est la manifestation du caractère de Dieu. Cependant, dans une mesure, nous avons l’application de ce qui est enseigné dans les Colossiens.
Remarquez ici la liaison admirable qu’il y a entre les circonstances personnelles des ouvriers de Dieu et le travail auquel ils sont appelés, et même les circonstances de ce travail. La première épître avait produit l’effet salutaire auquel l’apôtre, sous la conduite du Saint Esprit, l’avait destinée. La conscience des Corinthiens avait été réveillée, et ils s’étaient montrés animés contre le mal d’un zèle proportionné à la profondeur de leur chute. C’est toujours là l’effet de l’oeuvre de l’Esprit, lorsque la conscience du chrétien qui a été en chute, est vraiment atteinte. Le coeur de l’apôtre peut maintenant s’ouvrir avec joie à leur obéissance complète et sincère. En attendant il avait passé lui-même par des épreuves terribles, des épreuves telles, qu’il avait désespéré de sa vie ; mais il avait su réaliser par la grâce la puissance de cette vie en Christ qui a remporté la victoire sur la mort, et il pouvait verser à pleines mains dans le coeur des Corinthiens les consolations et la vie qui devaient les relever. Il y a un Dieu qui conduit toutes choses dans le service de ses saints — les douleurs par lesquelles ils passent, comme tout le reste.
Remarquez aussi que Paul n’a pas besoin, comme dans la première épître, de commencer par rappeler aux Corinthiens leur appel et leurs privilèges comme sanctifiés en Christ. Il éclate en actions de grâces envers le Dieu de toute consolation. On présente la sainteté lorsqu’elle manque en pratique parmi les saints ; s’ils y marchent, ils jouissent de Dieu et on parle de Lui. La manière dont les différentes parties de l’oeuvre de Dieu sont liées ensemble dans l’apôtre et par son moyen, se voit dans les expressions qui jaillissent de son coeur reconnaissant. Dieu le console dans ses souffrances, et la consolation est telle, qu’elle est propre à consoler les autres dans quelque affliction que ce soit, car c’est Dieu lui-même qui est la consolation, en versant dans le coeur son amour et sa communion, comme on en jouit en Christ.
Si l’apôtre est affligé, c’est pour consoler les autres par la vue de souffrances semblables dans ceux qui sont honorés de Dieu, et par la conscience qu’ils sont à l’unisson dans la même cause bénie, et dans celle de leur relation avec Dieu (le coeur étant touché et ramené à ces affections par ce moyen). S’il est consolé, c’est pour consoler les autres par les consolations dont il jouit dans les souffrances. Et les souffrances des Corinthiens lui sont un témoignage, quelque grande qu’ait été d’ailleurs leur faiblesse morale, qu’ils ont part à ces consolations dont il jouit lui-même, et qu’il sait si profondes, si réelles, qu’il sait être de Dieu et un gage de sa faveur. Précieux lien de la grâce! — et combien il est vrai que, dans notre petite mesure, les souffrances des ouvriers de Dieu, d’un côté raniment l’amour à leur égard, et d’un autre assurent l’ouvrier de la sincérité des objets de son affection chrétienne, en les lui présentant de nouveau dans l’amour de Christ. L’affliction de l’apôtre lui avait aidé à écrire aux Corinthiens avec la douleur qui convenait à leur état ; mais quelle foi que celle qui s’occupe du triste état des autres avec une pareille énergie et un oubli de soi-même si entier, au milieu de circonstances comme celles dans lesquelles l’apôtre se trouvait! Sa force était en Christ.
Le coeur de Paul s’épanche envers les Corinthiens ; on voit qu’il y a chez lui ce libre jeu des affections qui est d’un grand prix. L’apôtre compte sur l’intérêt qu’ils mettront au récit de ses souffrances ; il est sûr qu’ils se réjouiront de ce que Dieu lui a donné, de même qu’il se réjouit en eux comme fruit de ses travaux, et qu’ils reconnaîtront ce qu’il est ; et il est content, à l’égard des dons qui se déployaient en lui, d’être débiteur à leurs prières, de sorte que son succès dans l’Évangile fût pour leur coeur comme un intérêt personnel dans une chose qui leur serait propre. Il pouvait en vérité demander leurs prières, car il s’était conduit avec une sincérité sans mélange, spécialement parmi eux. Cela le conduit à expliquer aux Corinthiens les motifs de ses mouvements, ce dont il ne leur avait pas parlé auparavant, rapportant ces mouvements à ses propres plans et à ses propres motifs dans la soumission au Seigneur. Paul est toujours maître (sous l’autorité de Christ) de ses mouvements, mais il peut maintenant parler librement de ce qui l’avait décidé, et des motifs qu’auparavant l’état des Corinthiens ne lui permettait pas de leur communiquer. Paul veut les satisfaire, leur expliquer les choses de manière à démontrer son amour parfait pour eux et à maintenir en même temps son entière liberté en Christ ; il ne voulait pas se rendre responsable envers eux de ce qu’il faisait. Il est leur serviteur en affection, mais libre de l’être, parce qu’il ne relève que de Christ, quoiqu’il veuille, parce qu’il sert Christ, satisfaire à leur conscience si leur conscience est droite. Au reste, sa conscience à lui était droite, et il ne leur écrivait que ce qu’ils savaient et reconnaissaient, et, comme il l’espérait, reconnaîtraient jusqu’à la fin : de sorte qu’ils pussent se glorifier en lui, comme lui en eux.
Or y avait-il eu de la légèreté dans ses décisions, parce que, comme il en informait maintenant les Corinthiens, il avait eu l’intention de les visiter d’abord en allant en Macédoine (où il se trouvait au moment où il écrivait cette lettre), et ensuite une seconde fois à son retour de ce pays? Nullement : ses intentions n’avaient pas été formées à la légère, selon la chair, et ensuite abandonnées ; c’était son affection qui l’avait fait tarder, c’était pour les épargner qu’il n’était pas allé à Corinthe. Il ne pouvait pas supporter l’idée d’aller, avec une verge, visiter ceux qu’il aimait. Remarquez de quelle manière, tout en montrant son affection et sa tendresse, l’apôtre maintient son autorité ; et comment, en rappelant cette autorité aux fidèles de Corinthe, il déploie toute sa tendresse. Ils avaient besoin de l’exercice de cette autorité. Ils n’étaient pas des Crétois, peut-être, qu’il fallait reprendre sévèrement ; mais il y avait chez eux un relâchement de moralité qui exigeait de la délicatesse et des soins afin qu’ils ne se cabrassent pas, mais qui demandait aussi de l’autorité et une bride, de peur qu’en leur laissant la liberté, ils ne tombassent dans toutes sortes de mauvaises voies. Mais Paul revient immédiatement à la certitude qui est en Christ, base de toute son assurance : il ne fallait pas trop tendre la corde qu’il avait touchée tout au commencement. L’apôtre fait sentir son autorité comme ayant pu être exercée : et il ne s’en sert pas. Il fallait le fondement du christianisme pour mettre l’esprit des Corinthiens dans un état où ils fussent capables de se juger eux-mêmes sainement. Ils étaient tout disposés, à la suite des menées des faux docteurs et par leurs habitudes d’écoles de philosophie, à se séparer de l’apôtre et, en esprit, de Christ. Paul les ramène au fondement, à la doctrine sûre, commune à tous ceux qui avaient travaillé au commencement au milieu d’eux. Il ne voulait donner à Satan aucune occasion de les détacher de lui (voyez chap. 2: 11).
L’apôtre pose donc ici les grands principes de la joie et de l’assurance chrétienne. Je ne parle pas du sang, seule source de la paix de la conscience devant Dieu comme juge, mais de la manière selon laquelle nous sommes placés par la puissance de Dieu en sa présence, dans la position et dans l’état dans lesquels cette puissance nous introduit d’après les conseils de sa grâce. La simple certitude était en Jésus, selon ce qui avait été dit. Il n’y avait pas là un oui, et puis un non ; le oui restait toujours oui : principe d’une immense importance, mais pour l’établissement duquel il faut la puissance et la fermeté et même la perfection et la sagesse de Dieu, car assurer et rendre stable ce qui n’eût pas été sage et parfait, n’aurait certes pas été digne de Lui.
On. remarquera qu’il s’agissait de savoir si Paul avait à la légère changé de propos. L’apôtre dit que non, mais il laisse ce qui le regardait personnellement, pour parler de ce qui préoccupait ses pensées, savoir de Christ : et, en effet, pour lui, vivre, c’était Christ. Mais il y avait une difficulté à résoudre à propos de l’immutabilité des promesses de Dieu : c’est que nous ne sommes pas en état de profiter de ce qui est immuable, à cause de notre faiblesse et de notre inconstance. L’apôtre résout cette difficulté en montrant la puissante opération de Dieu en grâce.
Deux points se présentent donc ici : l’établissement de toutes les promesses en Christ, et notre jouissance de l’effet de ces promesses. Il s’agit, comme nous l’avons vu, non pas seulement de dire, de promettre quelque chose, mais de ne pas changer ses intentions, de ne pas manquer à ce qui a été dit, et de tenir sa parole. Or, il y avait eu des promesses. Dieu en avait donné, soit à Abraham sans condition, soit à Israël en Sinaï sous condition d’obéissance ; mais en Christ il y avait, non des promesses, mais l’amen aux promesses de Dieu, leur vérité et leur réalisation. Tout autant qu’il y avait eu de promesses de la part de Dieu, le oui était en Christ et l’amen en Lui. Dieu a établi, déposé, pour ainsi dire, l’accomplissement de toutes ses promesses dans la personne de Christ : la vie, la gloire, la justice, le pardon, le don de l’Esprit, tout est en Lui. C’est en Lui que tout est vrai, «oui et amen». Nous ne pouvons avoir l’effet d’aucune. promesse, quelle qu’elle soit, hors de Lui. Mais ce n’est pas tout- nous croyants, nous sommes les objets de ces conseils de Dieu. Ils sont à la gloire de Dieu par nous.
Mais, en premier lieu, la gloire de Dieu est celle de Celui qui se glorifie toujours Lui-même dans ses voies de grâce souveraine envers nous ; car c’est dans ces voies qu’il déploie et montre ce qu’il est. Par conséquent, «le oui et l’amen» des promesses de Dieu, l’accomplissement et la réalisation des promesses de Dieu, pour sa propre gloire par nous, tout cela est en Christ.
Or comment pouvons-nous y participer si tout est à Christ et en Christ ? C’est ici que l’Esprit Saint présente la seconde partie des voies de la grâce. Nous sommes en Christ, et nous sommes en Lui, non selon l’instabilité de la volonté de l’homme et la faiblesse qui le caractérise dans ses oeuvres passagères et muables : Celui qui nous a établis fermement en Christ, c’est Dieu lui-même. L’accomplissement de toutes les promesses est en Lui. Sous la loi et sous des conditions dont l’accomplissement dépendait de la stabilité de l’homme, l’effet de la promesse n’a jamais été atteint ; la chose promise échappait à la poursuite de l’homme, parce que l’homme devait être dans un état capable de l’atteindre par la justice, et il n’était pas dans cet état. L’accomplissement de la promesse restait donc toujours en suspens ; elle aurait eu son effet si ! — mais le si ne s’accomplissait pas, et le oui et l’amen n’arrivaient pas. Mais tout ce que Dieu a promis est en Christ. Le second point, c’est que cette gloire est «par nous», et jusqu’à quel point nous en jouissons. Dieu nous a établis fermement en Christ, en qui toutes les promesses subsistent, de sorte que tout ce qui est promis, nous le possédons sûrement en Lui. Mais nous n’en jouissons pas comme si nous le tenions entre nos propres mains.
Mais de plus, Dieu lui-même nous a oints. Nous avons, par Jésus, reçu l’Esprit Saint. Dieu a pris soin que nous comprenions par l’Esprit ce qui nous est gratuitement donné en Christ. Mais l’Esprit nous est donné, selon les conseils de Dieu, pour d’autres choses que simplement comprendre ses dons en Christ. Celui qui l’a reçu est scellé. Dieu l’a marqué de son sceau comme il a marqué Jésus de son sceau quand il l’a oint après son baptême par Jean. En outre l’Esprit devient dans nos coeurs les arrhes de ce que nous posséderons pleinement en Christ plus tard. Nous comprenons donc les choses qui nous sont données dans la gloire ; nous sommes marqués du sceau de Dieu pour en jouir ; nous en avons les arrhes dans nos coeurs, nos affections y sont engagées. Établis en Christ, nous avons l’Esprit Saint qui nous scelle quand nous croyons, pour nous faire jouir déjà ici-bas de ce qui est en Christ.
2. 2 Chapitre 2
Ayant de nouveau rappelé les soins qui manifestaient son affection pour eux, l’apôtre exprime sa conviction que ce qui l’avait peiné, avait aussi peiné les Corinthiens ; ils l’avaient montré par la manière dont ils avaient traité le transgresseur. Paul les exhorte à recevoir de nouveau et à encourager le pauvre coupable en danger d’être entièrement accablé par la discipline exercée à son égard par la masse des chrétiens, ajoutant que si les chrétiens lui pardonnaient sa faute, lui aussi la lui pardonnait. Il ne voulait pas que Satan tirât aucun avantage de ce cas de discipline pour mettre du désaccord entre lui, Paul, et les Corinthiens, car il savait bien à quoi l’Ennemi voulait en venir, il connaissait le but pour lequel l’Ennemi voulait se servir de cette affaire.
Cela donne à Paul l’occasion de montrer combien il portait toujours sur son coeur les saints de Corinthe. Étant venu dans la Troade pour l’Évangile et une large porte lui étant ouverte, il n’avait cependant pas pu y rester parce qu’il n’avait pas trouvé Tite, et il avait quitté la Troade et poursuivi sa route pour se rendre en Macédoine. On se souviendra qu’au lieu de passer par les côtes occidentales de l’Archipel pour visiter la Macédoine, traversant ainsi Corinthe pour revenir plus tard par le même chemin, l’apôtre avait envoyé Tite à Corinthe avec sa première lettre, prenant lui-même le chemin de l’Asie mineure : cette route qui lui faisait longer les côtes orientales de l’Archipel le conduisait dans la Troade où Tite devait venir à sa rencontre. Mais ne l’y ayant pas trouvé, et inquiet au sujet des Corinthiens, il n’avait pas pu se livrer d’un coeur tranquille à l’oeuvre qui s’offrait là, et avait passé outre pour rencontrer Tite. Il s’était donc rendu en Macédoine, où il l’avait enfin trouvé, comme nous le verrons plus tard. Mais la pensée d’avoir quitté la Troade affecte Paul, car, en effet, c’est une chose sérieuse et pénible pour le coeur d’avoir manqué une occasion d’annoncer Christ, et cela d’autant plus que les hommes sont disposés à le recevoir, ou du moins à entendre parler de Lui. Avoir quitté la Troade était bien une preuve de l’affection de Paul pour les Corinthiens, et l’apôtre leur rappelle cette circonstance comme une forte preuve de cette affection. Il se console d’avoir manqué cette oeuvre d’évangélisation par la pensée qu’après tout Dieu le menait comme en triomphe (non pas comme on a traduit : «le faisant triompher»). L’Évangile que l’apôtre portait avec lui, le témoignage de Christ, était comme le parfum des drogues aromatiques qu’on brûlait dans les processions triomphales, signe de mort pour quelques-uns des captifs, signe de vie pour d’autres : et ce parfum de la bonne nouvelle de Christ était pur dans ses mains. L’apôtre n’était pas comme quelques-uns qui frelataient le vin qu’ils fournissaient ; il travaillait dans l’intégrité chrétienne devant Dieu.
3. 3 Chapitre 3
Ces paroles amènent l’apôtre à faire un exposé de l’Évangile, en contraste avec la loi que les faux docteurs mêlaient avec l’Évangile. Paul introduit cet exposé par le plus touchant appel au coeur des Corinthiens convertis par son moyen. Commencera-t-il par parler de son ministère pour se recommander lui-même de nouveau, ou a-t-il besoin, comme d’autres, de lettres de recommandation pour eux ou de leur part? Ils sont, eux, sa lettre de recommandation, la preuve frappante de la puissance de son ministère, preuve qu’il porte toujours dans son coeur, prêt à la mettre en avant en toute occasion. Maintenant il peut le dire, heureux qu’il était de l’obéissance des Corinthiens. Et pourquoi servent-ils de lettre en sa faveur? Parce qu’ils sont, dans leur foi, l’expression vivante de sa doctrine. Ils sont la lettre de recommandation de Christ, qui, par le moyen du ministère de l’apôtre, a été écrite sur les tables de chair du coeur par la puissance du Saint Esprit, comme la loi avait été gravée sur des tables de pierre par Dieu lui-même.
C’était là la confiance de Paul à l’égard de son ministère ; sa capacité pour le ministère de la nouvelle alliance venait de Dieu, ministère non pas de la lettre (pas plus de la lettre de cette alliance que de la lettre d’autre chose), mais de l’Esprit, la vraie force du dessein de Dieu, tel que l’Esprit le donnait : car la lettre, comme règle imposée à l’homme, tue ; mais l’Esprit vivifie, comme puissance de Dieu en grâce ; c’est le dessein de Dieu communiqué au coeur de l’homme par la puissance de Dieu, qui lui en fait part afin qu’il en jouisse. Or le sujet de ce ministère manifestait encore plus fortement sa différence d’avec le ministère de la loi. La loi gravée sur des pierres avait été introduite avec gloire, quoique cette loi fût une chose qui, comme moyen de relation entre Dieu et les hommes, devait passer. La loi gravée sur des pierres était «un ministère de mort», car on ne pouvait vivre qu’en l’observant, et elle ne pouvait être ordonnée que sur ce principe. Une loi doit être gardée, mais l’homme étant déjà pécheur par nature et par sa volonté, ayant des convoitises que la loi défendait, cette loi ainsi ne pouvait être que la mort pour lui ; c’était un ministère de mort. C’était aussi «un ministère de condamnation», parce que l’autorité de Dieu intervenait pour donner à la loi la sanction de la condamnation contre toute âme qui la violerait. C’était un ministère de mort et de condamnation, parce que l’homme était pécheur.
Et remarquez ici que mêler la grâce avec la loi ne change rien à l’effet de celle-ci, sinon pour aggraver la pénalité qui en résulte, en aggravant la culpabilité de celui qui la viole, d’autant plus qu’il la viole en dépit de la bonté et de la grâce- car c’est toujours la loi, et l’homme était appelé à satisfaire à la responsabilité sous laquelle la loi le plaçait. «Celui qui aura péché contre moi», dit l’Éternel à Moïse, «je l’effacerai de mon livre.» La figure employée par l’apôtre (v. 7 et suivants) montre qu’il parle de la seconde descente de Moïse de la montagne de Sinaï, lorsqu’il entendit proclamer le nom de l’Éternel, miséricordieux et faisant grâce (voyez Ex. 34). La première fois que Moïse était descendu du Sinaï, sa figure n’avait pas été rayonnante ; il avait brisé les tables avant d’entrer dans le camp (Ex. 32). La seconde fois, Dieu avait fait passer toute sa bonté devant lui, et le visage de Moïse avait reflété la gloire qu’il avait vue, quelque partielle qu’elle eût été. Mais ce reflet même, Israël ne pouvait le supporter, car comment supporter cette gloire quand, après tout, elle jugeait les secrets du coeur? Car, bien que la grâce se fût montrée en épargnant le peuple en réponse à l’intercession de Moïse, l’exigence de la loi était toujours maintenue, et chacun devait subir pour lui-même les conséquences de sa désobéissance. Ainsi le caractère de la loi empêchait Israël de comprendre la gloire même qui se trouvait dans les ordonnances, comme figure de ce qui était meilleur et permanent, et tout le système ordonné par l’intermédiaire de Moïse était voilé aux yeux du peuple qui tombait sous la lettre, dans cette partie même de la loi qui était un témoignage des choses qui devaient se dire plus tard. C’était selon la sagesse de Dieu qu’il en fût ainsi, car de cette manière tout l’effet de la loi comme introduite pour agir sur le coeur et la conscience de l’homme, a été pleinement développé.
Il y a bien des chrétiens qui font de Christ lui-même une loi, et qui en pensant à l’amour du Sauveur comme à un nouveau motif pour les obliger à l’aimer, n’y pensent que comme à une obligation, à un accroissement très grand de la mesure de l’obligation qui pèse sur eux — obligation à laquelle ils se sentent tenus de satisfaire. Ils sont ainsi toujours sous la loi, et par conséquent sous la condamnation.
Or, le ministère que l’apôtre accomplissait était tout autre ; c’était le ministère de la justice et de l’Esprit, non pas un ministère exigeant de l’homme la justice pour qu’il pût se tenir devant Dieu, mais un ministère qui révélait la justice. Or Christ était cette justice, fait tel de la part de Dieu pour nous ; et nous sommes faits justice de Dieu en Lui. L’évangile proclamait la justice de la part de Dieu, au lieu de l’exiger de 1«homme selon la loi. Or le Saint Esprit pouvait être le sceau de cette justice là : il pouvait descendre sur Christ homme, parce qu’il était parfaitement approuvé de Dieu, parce qu’il était juste — le Juste. Le même Esprit peut descendre sur nous, parce que nous sommes faits la justice de Dieu en Christ. Ainsi le ministère de l’apôtre était le ministère de l’Esprit : la puissance de l’Esprit y agissait. L’Esprit était donné lorsqu’on recevait par la foi ce qui était annoncé : et avec l’Esprit on recevait l’intelligence des pensées et des desseins de Dieu, comme ils étaient révélés dans la personne d’un Christ glorifié, en qui la justice de Dieu était révélée et subsistait éternellement devant Lui.
L’apôtre donc, dans ce passage, réunit dans une même notion complexe, la pensée de Dieu dans la parole comprise selon l’Esprit, la gloire de Christ qui y avait été cachée sous la lettre, et l’Esprit Saint lui-même qui lui donnait sa force, qui révélait cette gloire, et qui, en demeurant et agissant dans le croyant, le rendait capable d’en jouir. C’est pourquoi, là où il y avait l’Esprit, il y avait la liberté : on n’était plus sous le joug de la loi, de la crainte de la mort et de la condamnation. On était en Christ devant Dieu, en paix devant Lui, selon l’amour parfait et cette faveur qui est meilleure que la vie, et dont on jouissait comme elle luisait sur Christ, sans voile ; on était là selon la grâce qui règne par la justice.
Quand il est dit au v. 17 : «Or le Seigneur est l’esprit», il est fait allusion au v. 6 ; les v. 7-16 forment une parenthèse. Christ glorifié est la vraie pensée de l’Esprit laquelle Dieu avait précédemment cachée sous des figures, et en voici la conséquence pratique : on contemple le Seigneur à face découverte ; on peut le contempler ainsi. La gloire de la face de Moïse jugeait les pensées et les intentions du coeur, causait la frayeur, en menaçant de mort et de condamnation le désobéissant et le pécheur. Qui pouvait se tenir dans la présence de Dieu ? Mais la gloire de la face de Jésus, d’un homme dans le ciel, est la preuve que tous les péchés de celui qui voit cette gloire sont effacés, car Celui qui est dans cette gloire, les a tous portés avant de monter en haut, et il a dû les ôter tous pour entrer dans cette gloire. Nous contemplons cette gloire par l’Esprit qui nous a été donné en vertu de ce que Christ y est entré. Christ ne dit pas comme Moïse : «Je monterai.... peut-être ferai-je propitiation» (Ex. 32: 30) ? mais il a fait la propitiation, puis il est monté. C’est pourquoi nous contemplons cette gloire avec joie ; nous aimons à la voir, chaque rayon que nous en voyons briller est la preuve qu’aux yeux de Dieu nos péchés ne sont plus. Christ a été fait péché pour nous : il est dans la gloire. Or en contemplant ainsi la gloire avec affection, avec intelligence, en y trouvant nos délices, nous sommes changés en la même image, de gloire en gloire, comme par la puissance de l’Esprit qui nous rend capables de réaliser ces choses et d’en jouir. En cela est le progrès du chrétien. Ainsi l’Assemblée aussi devient l’épître de Christ.
L’allusion faite aux Juifs à la fin de la parenthèse, où l’apôtre compare les deux systèmes, est des plus touchantes. Le voile, dit-il, est ôté en Christ. Maintenant plus rien n’est voilé. La substance glorieuse de ce qui était caché sous les figures existe. Le voile est sur le coeur des Juifs, lorsqu’ils lisent l’Ancien Testament. Or toutes les fois que Moïse entrait dans le tabernacle pour parler à Dieu ou pour l’écouter, il ôtait le voile : ainsi, dit l’apôtre, quand Israël se tournera vers le Seigneur, le voile sera ôté.
Il ne reste qu’une remarque à faire. «Ce qui demeure» est le sujet dont traite l’Évangile, et non le ministère qui l’annonce ; la gloire de la personne de Jésus Christ, la substance de ce dont les ordonnances juives n’étaient que des figures, ne passeront pas.
4. 4 Chapitre 4
L’apôtre en revient maintenant à son ministère en rapport avec ses souffrances, en montrant que cette doctrine d’un Christ vainqueur de la mort, quand elle est vraiment reçue dans le coeur, nous rend victorieux de toute crainte de la mort et de toutes les souffrances qui se rattachent au vase de terre dans lequel ce trésor est porté.
Ayant reçu le ministère de la justice et de l’Esprit, dont Christ glorifié, contemplé à face découverte, est le fondement, l’apôtre non seulement usait de grande hardiesse de langage, mais il ne se relâchait pas ; sa foi ne fléchissait pas devant les difficultés. De plus, avec le courage que cette doctrine lui donnait par la grâce, il ne cachait rien de cette gloire, il n’en affaiblissait rien ; il ne corrompait pas la doctrine ; il la manifestait aussi pure, aussi brillante de clarté qu’il l’avait reçue. C’était la parole de Dieu ; on la recevait de l’apôtre telle qu’il l’avait reçue lui-même, la parole de Dieu inaltérée, l’apôtre se rendant ainsi approuvé et se recommandant à toute conscience d’homme devant Dieu. Tous ne pouvaient pas dire cela. La gloire du Seigneur Jésus ressortait de la prédication de l’apôtre dans toute la clarté et la splendeur dans lesquelles cette gloire lui avait été révélée. Si donc la bonne nouvelle qu’il annonçait était cachée, ce n’était pas comme dans le cas de Moïse : non seulement la gloire du Seigneur était pleinement révélée à face découverte en Christ, mais elle était aussi manifestée sans voile dans la prédication pure de l’apôtre. C’est là la liaison établie entre la gloire accomplie dans la personne de Christ comme résultat de l’oeuvre de la rédemption, et le ministère qui, par la puissance de l’Esprit Saint agissant dans l’instrument choisi du Seigneur, annonçait cette gloire au monde. Ce ministère rendait les hommes responsables de la réception de la vérité, de la soumission à ce Christ glorieux qui, du ciel, s’annonçait en grâce comme ayant accompli la justice pour le pécheur, et l’invitait à venir librement pour jouir de l’amour et de la bénédiction de Dieu.
Or il n’y a pas d’autre moyen de s’approcher de Dieu : en établir un autre serait mettre de côté et déclarer insuffisant, imparfait, ce que Christ a fait et ce qu’il est, et vouloir produire quelque chose de meilleur que Lui. Or cela est impossible : car ce que l’apôtre annonçait, était la manifestation de la gloire de Dieu dans la personne du Fils, en rapport avec la révélation de l’amour parfait et de l’accomplissement de la justice parfaite et divine, de sorte que la pure lumière était l’heureux séjour de ceux qui y entraient par le moyen annoncé par l’apôtre. Il ne pouvait y avoir quelque chose de plus, à moins qu’il n’y eût quelque chose de plus que Dieu dans la plénitude de sa grâce et de sa perfection. Si donc cette révélation était cachée, elle l’était pour ceux qui étaient perdus, desquels le dieu de ce monde avait aveuglé l’entendement pour que la lumière de la bonne nouvelle de la gloire de Christ, qui est l’image de Dieu, ne resplendît pas dans leurs coeurs.
Au lieu de «l’évangile de la gloire du Christ» ; on traduit quelquefois : «le glorieux évangile», mais cela n’est pas le sens. Nous avons vu que le fait que Christ est dans la gloire, que la gloire de Dieu est vue dans sa face, était le sujet spécial du chapitre précédent. L’apôtre ici y fait allusion comme étant ce qui caractérisait l’Évangile qu’il prêchait. C’était la preuve que le péché que Christ avait porté était entièrement ôté, la preuve de la victoire remportée sur la mort, et de l’introduction de l’homme dans la présence de Dieu en gloire selon les conseils de l’amour de Dieu. C’était en même temps le complet déploiement de la gloire de Dieu dans l’homme selon la grâce, que l’Esprit Saint nous montre, afin de nous transformer à la même ressemblance. C’était le glorieux ministère de la justice et de l’Esprit, qui ouvrait à l’homme un chemin libre vers Dieu, un chemin pour entrer même dans les lieux saints en toute liberté.
Lorsque Christ était ainsi annoncé, la conséquence en était l’acceptation joyeuse de la bonne nouvelle, la soumission du coeur à l’Évangile, — ou bien l’aveuglement par Satan ; car Paul ne se prêchait pas lui-même (comme d’autres ne manquaient pas de faire), mais il prêchait Jésus Christ le Seigneur, et ne se présentait lui-même à ceux auxquels il s’adressait, que comme leur serviteur pour l’amour de Jésus. En effet, et c’est ici un autre principe important, le resplendissement de l’Évangile de la gloire de Christ est l’oeuvre de la puissance de ce même Dieu qui, par sa seule parole, a fait luire instantanément la lumière du sein des ténèbres. Dieu avait resplendi dans le coeur de l’apôtre pour faire luire la connaissance de sa propre gloire dans la face de Jésus Christ. L’Évangile brillait par une opération divine semblable à celle qui, au commencement, avait fait briller la lumière du sein des ténèbres par une simple parole. Le coeur de l’apôtre en était le vase, la lampe où cette lumière avait été allumée pour luire au milieu du monde devant les yeux des hommes. Ce qui luisait était la révélation de la gloire qui resplendit dans la personne de Christ, et qui, par la puissance de l’Esprit de Dieu, agissait dans le coeur de l’apôtre pour que cette gloire brillât par l’Évangile devant le monde ; la puissance de Dieu opérait pour la faire briller, comme elle l’a fait par la parole : «Que la lumière soit, et la lumière fut.» Mais le trésor de cette révélation de la gloire était déposé dans des vases de terre, afin que la puissance qui agissait dans cette révélation fût de Dieu seul, et non celle des instruments. Dans tous les instruments, la faiblesse qui leur était propre se montrait dans les circonstances d’épreuve par lesquelles Dieu — dans ce but même, entre autres — faisait passer le témoignage. Toutefois la puissance de Dieu se manifestait d’une manière d’autant plus évidente que le vase montrait sa faiblesse au milieu des difficultés qui se rencontraient sur la route. Le témoignage se rendait, l’oeuvre se faisait, le résultat se produisait lors même que l’homme était abattu et se trouvait sans ressource en présence de l’opposition suscitée à la vérité.
L’homme était affligé par la tribulation — c’était le vase — mais pas réduit à l’étroit, car Dieu était avec lui ; l’homme était sans moyen de sortir de la tribulation — c’était le vase — mais pas sans ressource, car Dieu était là ; l’homme était persécuté — c’était le vase — mais pas abandonné, car Dieu était avec lui ; l’homme était jeté par terre — c’était le vase — mais pas détruit, car Dieu le gardait. Paul portait toujours dans son corps la mort de Jésus (il était fait semblable à Jésus en ce que l’homme comme tel était réduit à néant), afin que la vie de Jésus, que la mort ne saurait toucher et qui a triomphé de la mort, fût manifestée dans Son corps, tout mortel qu’il était. Plus l’homme naturel était anéanti, plus il était évident qu’il y avait là une puissance qui n’était pas de l’homme. C’était là le principe, mais il était moralement réalisé dans le coeur par la foi. Comme serviteur du Seigneur, Paul réalisait dans son coeur la mort de tout ce qui était vie humaine, afin que la puissance fût purement de Dieu par Jésus ressuscité ; mais à côté de cela Dieu lui faisait réaliser ces choses par les circonstances par lesquelles il avait à passer ; car, vivant dans ce monde, il était toujours livré à la mort pour l’amour de Jésus, afin que la vie de Jésus fût manifestée dans sa chair mortelle. Ainsi la mort opérait dans l’apôtre ; ce qui était seulement de l’homme, de la nature, et de la vie naturelle, disparaissait, afin que la vie en Christ se déployant en lui de la part de Dieu et par sa puissance, opérât dans les Corinthiens par son moyen. Quel ministère! Quelle épreuve complète du coeur de l’homme, quelle vocation glorieuse pour un homme que d’être ainsi assimilé à Christ, d’être le vase de la puissance de sa vie pure, et par le moyen d’une abnégation absolue de soi-même, et de la vie même, d’être moralement semblable à Jésus! Quelle position par la grâce, quelle conformité à Christ! Et c’était de telle manière qu’elle passait par un coeur d’homme pour atteindre le coeur de l’homme (ce qui en fait est de l’essence du christianisme lui-même), non pas certainement par la force de l’homme, mais par celle de Dieu se manifestant dans la faiblesse de l’homme.
C’est pour cette raison que l’apôtre peut se servir des paroles de l’Esprit de Christ dans les Psaumes : «J’ai cru, c’est pourquoi j’ai parlé.» C’est-à-dire : «À quel prix que ce soit, en dépit de tout danger, de toute opposition, j’ai parlé pour Dieu, j’ai rendu mon témoignage ; j’ai eu assez de confiance en Dieu pour rendre témoignage à Dieu et à sa vérité, quelles qu’en fussent les conséquences, même si je mourais en le faisant.» C’est-à-dire encore : «J’ai agi comme Christ lui-même l’a fait, parce que je sais que Celui qui a ressuscité Jésus en fera autant pour moi et me présentera avec vous devant sa face, dans cette même gloire où Christ se trouve dans le ciel ; et pour le témoignage que j’ai rendu à cette gloire, j’ai souffert la mort comme Lui.» Il faut bien distinguer ici entre les souffrances de Christ pour la justice et pour son oeuvre d’amour, et ses souffrances pour le péché. Quant aux premières, c’est notre privilège de les partager avec Lui ; dans les autres, il est seul.
L’apôtre dit : «Celui qui a ressuscité le Seigneur Jésus nous présentera avec vous», car, ajoute-t-il selon le coeur et la pensée de Christ envers les siens : «Toutes choses sont pour vous, afin que la grâce, abondant par le moyen de plusieurs, multiplie les actions de grâces à la gloire de Dieu.» C’est pourquoi l’apôtre ne se laissait pas décourager ; mais au contraire, si l’homme extérieur dépérissait, l’homme intérieur se renouvelait de jour en jour. Car la légère affliction qui n’était que d’un moment (car il l’estimait telle en vue de la gloire ; et elle n’était pour lui que l’affliction passagère de ce pauvre corps mourant), opérait pour lui un poids éternel de gloire qui dépassait toute expression, même la plus élevée, du langage et des pensées humaines. Et ce renouvellement avait lieu, et le découragement ne s’emparait point de lui, quoi qu’il en fût, en ce qu’il ne regardait pas aux choses qui se voient, qui sont temporelles, mais aux choses qui ne se voient pas, lesquelles sont éternelles. Ainsi, la puissance de la vie divine avec toutes ses conséquences, se déployait dans l’âme de l’apôtre, par la foi : il connaissait le résultat de tout de la part de Dieu.
5. 5 Chapitre 5
Ce n’est pas seulement qu’il y a des choses invisibles et glorieuses : les chrétiens y ont leur part. Nous savons, dit l’apôtre en leur nom, que si cette maison terrestre — passagère comme elle l’est — est détruite (et peu s’en était fallu qu’il en eût été ainsi pour Paul), nous avons un édifice de la part de Dieu, une maison qui n’est pas faite de main, éternelle, dans les cieux. Précieuse certitude! il le savait. Les chrétiens le savent comme étant une partie de leur foi. Nous savons (*) — certitude qui faisait que cette gloire qu’il savait lui appartenir, était par la puissance de l’Esprit Saint, une espérance réelle et pratique dans son coeur, une réalité présente par la foi. Il voyait cette gloire comme une chose qui lui appartenait, et dont il devait être revêtu. C’est pourquoi aussi il gémissait dans sa tente, non pas comme tant de gens le font, parce que les désirs de sa chair ne pouvaient être accomplis, et que la satisfaction du coeur ne se trouve pas pour l’homme lors même que ces désirs sont accomplis, ni parce qu’il était incertain de son acceptation, et ne savait si la gloire était sienne ou non ; mais parce que le corps était une entrave que tendait à affaiblir la vie divine, et à le priver de la pleine jouissance de cette gloire que la vie nouvelle voyait et désirait, et que Paul voyait et admirait comme étant sienne. C’était pour l’apôtre un fardeau que la nature humaine terrestre. Ce n’était pas pour lui une peine de ne pas pouvoir satisfaire aux désirs de cette nature, mais c’en était une de se trouver encore dans cette nature mortelle, parce qu’il voyait quelque chose de meilleur.
(*) Ce «nous savons» est en fait une expression technique pour dire ce qu’est la portion des chrétiens. «Nous savons que la loi est spirituelle» ; «nous savons que le Fils de Dieu est venu» ; etc.
Ce n’était pas toutefois qu’il désirât d’être dépouillé, car il voyait dans le Christ glorifié une puissance de vie capable d’absorber et d’annuler toute trace de mortalité ; et le fait que Christ était là-haut dans la gloire était le résultat de cette puissance et en même temps la manifestation de la portion céleste qui appartient aux siens. Ainsi l’apôtre désirait, non pas d’être dépouillé, mais d’être revêtu, et que ce qui était mortel en lui fût absorbé par la vie, que la mortalité qui caractérisait sa nature humaine terrestre disparût devant la puissance de vie qu’il voyait en Jésus et qui était sa vie. Cette puissance était telle qu’il n’était pas nécessaire de mourir. Or ce n’était pas une espérance qui n’avait de fondement que celui que le désir, réveillé par la vue de la gloire, pouvait produire : Dieu avait formé les chrétiens pour cela même. Celui qui était chrétien était formé dans ce but et non pour autre chose. C’était Dieu lui-même qui l’avait formé pour cette gloire, dans laquelle Christ, le dernier Adam, était à la droite de Dieu. Précieuse assurance ! Heureuse confiance dans la grâce et dans l’oeuvre puissante de Dieu ! Quelle joie ineffable de pouvoir tout attribuer à Dieu lui-même, d’être ainsi assuré de son amour, de le glorifier comme le Dieu d’amour, notre Bienfaiteur, de savoir que c’est son oeuvre, et que nous reposons sur une oeuvre accomplie, l’oeuvre de Dieu. Ce n’est pas ici se reposer sur une oeuvre faite pour nous ; mais c’est, chose précieuse, la conscience que nous avons que Dieu nous a faits pour cela : «Nous sommes son ouvrage.»
Une autre chose cependant était nécessaire pour jouir de cette espérance quand on n’était pas encore glorifié de fait. Dieu nous l’a donnée : ce sont les arrhes de l’Esprit. Ainsi nous avons la gloire devant nous, nous sommes formés pour elle par Dieu lui-même, et nous avons les arrhes de l’Esprit jusqu’à ce que nous soyons dans la gloire, et nous savons que Christ a si complètement vaincu la mort, que si le temps était venu, nous serions transformés en gloire sans passer par la mort. Ce qui est mortel serait absorbé par la vie. Telle est par grâce notre portion dans le dernier Adam, par la puissance de vie dans laquelle Christ a été ressuscité.
Mais ensuite l’apôtre traite de l’effet de la vie quant à la portion naturelle du premier homme déchu, la mort et le jugement : car le témoignage ici est complet.
Quel est donc l’effet de la possession de la vie en Christ appliqué à la mort et au jugement, les deux objets naturels des craintes de l’homme, le fruit du péché? Si nos corps ne sont pas encore transformés, et si ce qui est mortel n’est pas encore absorbé par la vie, nous sommes également pleins de confiance, parce que, étant formés pour la gloire, et Christ, qui a manifesté la puissance victorieuse qui Lui a ouvert le chemin du ciel, étant notre vie, si nous quittons cette tente et sommes absents du corps avant d’être revêtus de la gloire, cette vie que nous possédons reste intacte ; elle a déjà, en Jésus, triomphé de tous les effets de la puissance de la mort. Ainsi, si nous mourons, nous serons présents avec le Seigneur ; car nous marchons par la foi, non par la vue des choses excellentes que nous espérons. Ainsi nous préférons être absents du corps et être présents avec le Seigneur. C’est pourquoi nous cherchons à Lui être agréables, soit que nous soyons trouvés absents de ce corps, ou présents dans ce corps, lorsque Jésus viendra pour nous prendre à Lui et nous faire partager sa gloire.
Et cela nous conduit au second point — le jugement. Car il faut que nous soyons tous manifestés devant le tribunal du Christ, afin que chacun reçoive selon ce qu’il aura fait dans le corps, soit bien, soit mal (v. 9, 10). Pensée heureuse et précieuse après tout, quelque solennelle qu’elle soit ; car si nous avons réellement compris la grâce, si nous sommes fondés dans la grâce, si nous savons ce que Dieu est, qu’il est tout amour pour nous, toute lumière pour nous, nous aimerons à être dans la pleine lumière. C’est une délivrance précieuse que de s’y trouver. C’est un fardeau, un poids sur le coeur, que quelque chose de caché ; et quoiqu’il y ait eu en nous beaucoup de péchés que personne ne connaît ; peut-être même des péchés que nous avons commis et qu’il ne serait d’aucun profit à personne de savoir, c’est un soulagement, si nous connaissons l’amour parfait de Dieu, que de savoir que tout est dans la parfaite lumière devant Lui. C’est ce qui arrive par la foi, et pour la foi, dans tous les cas où l’on jouit d’une paix solide ; on est devant Dieu tel qu’il est, et l’on s’y trouve tel que l’on est, c’est-à-dire en soi-même rien que péché, hélas! sauf en ce que Dieu a opéré lui-même en nous vivifiant ; et Dieu est tout amour dans cette lumière dans laquelle nous sommes placés ; car Dieu est lumière, et il se révèle Lui-même. Sans la connaissance de la grâce, nous craignons la lumière, et il ne peut en être autrement ; mais quand nous connaissons la grâce, quand nous savons que le péché a été ôté pour ce qui regarde la gloire de Dieu, et que l’offense n’est plus sous ses yeux, nous aimons à être dans la lumière. C’est une joie pour nous, c’est ce dont le coeur a besoin ; il ne peut être satisfait s’il n’est pas dans cette lumière, lorsqu’il est animé de la vie du nouvel homme. La nature du nouvel homme est d’aimer la lumière, d’aimer la pureté dans toute cette perfection qui n’admet pas le mal des ténèbres et qui exclut tout ce qui n’est pas elle-même. Or, être ainsi dans la lumière et «être manifesté», c’est une seule et même chose, car la lumière manifeste tout.
Nous sommes dans la lumière par la foi quand notre conscience est dans la présence de Dieu ; nous serons selon la perfection de cette lumière quand nous paraîtrons devant le tribunal du Christ. J’ai dit, et il en est ainsi, que c’est une chose solennelle, que tout soit jugé selon cette lumière, mais c’est ce que le coeur aime, parce que, grâces en soient rendues à notre Dieu, nous sommes lumière dans le Seigneur.
Mais il y a plus que cela. Quand le chrétien est ainsi manifesté, il est déjà glorifié et parfaitement semblable à Christ, et n’a alors aucun reste de la mauvaise nature dans laquelle il a péché. Il peut regarder en arrière sur tout le chemin par lequel Dieu l’a conduit en grâce, l’a aidé, soutenu, gardé de chute, Lui qui ne retire pas ses yeux de dessus le juste. Il connaît comme il a été connu. Quelle histoire de grâce et de miséricorde! Si maintenant je regarde en arrière, mes péchés ne pèsent pas sur ma conscience, bien que j’en aie horreur : Dieu les a jetés derrière son dos. Je suis la justice de Dieu en Christ ; mais quel sentiment d’amour et de patience, de bonté et de grâce! Combien tout apparaîtra plus parfait alors, quand tout sera devant moi. Assurément il y aura un grand gain quant à la lumière et à l’amour, lorsque nous rendrons compte de nous-mêmes à Dieu, sans qu’il reste une trace de mal en nous. Nous serons semblables à Christ. Si quelqu’un craint de voir tout placé ainsi devant Dieu, je ne pense pas qu’il soit affranchi quant à la justice — quant à être justice de Dieu en Christ ; il n’est pas pleinement dans la lumière. Et nous n’avons pas à être jugés pour quelque chose que ce soit ; Christ a tout ôté.
Mais il y a une autre idée dans le passage qui nous occupe, savoir celle de rétribution. L’apôtre ne parle pas d’un jugement sur les personnes, parce que les saints sont compris parmi elles, et que Christ s’est mis à leur place pour ce qui regarde le jugement de leurs personnes. «Il n’y a aucune condamnation pour ceux qui sont dans le Christ Jésus» ; ils ne viennent pas en jugement, mais chacun sera manifesté devant le tribunal de Christ, et recevra ce qu’il aura fait dans son corps. Le bien ne mérite rien : il a reçu ce par quoi il a fait ce qui est bien ; la grâce l’a produit en lui ; toutefois il en recevra la récompense : ce qu’il a fait est estimé comme étant de lui. Si, en négligeant la grâce et le témoignage de l’Esprit en lui, les fruits que le chrétien aurait dû produire ont été écartés, il en portera les conséquences. Ce n’est pas que, dans ce cas, Dieu l’ait abandonné, ce n’est pas que le Saint Esprit n’ait pas agi en lui à l’égard de l’état où il se trouve, mais cette action s’exercera dans la conscience du croyant, en jugeant la chair qui l’a empêché de porter le fruit naturel de la présence du Saint Esprit et de son opération dans le nouvel homme. De sorte que le Saint Esprit aura fait tout ce qui était nécessaire en rapport avec l’état du coeur où il demeurait ; et le conseil parfait de Dieu à l’égard de la personne elle-même aura été accompli, sa patience aura été manifestée, aussi bien que sa sagesse, ses voies en gouvernement et les soins qu’il daigne prendre de chaque croyant individuellement dans son amour plein de condescendance. Chacun aura sa place selon qu’elle lui est préparée du Père. Mais le fruit naturel de la présence et de l’opération du Saint Esprit dans une âme, qui a ou qui aurait dû avoir, d’après les avantages dont elle a joui, une certaine mesure de lumière, ce fruit, dis-je, n’aura pas été produit. Ce qui en a empêché la production sera manifesté. Tout ce qui était bien et mal en soi-même sera jugé selon le jugement de Dieu, avec un sentiment solennel de ce que Dieu est, et une fervente adoration à cause de ce qu’il a été pour nous. La parfaite lumière sera appréciée, les voies de Dieu seront connues et comprises dans toute leur perfection, en appliquant la lumière parfaite à toute la suite de notre vie et des voies de Dieu envers nous, dans lesquelles nous reconnaîtrons entièrement que l’amour parfait, souverain, au-dessus de tout, a régné avec une grâce ineffable.
Ainsi la majesté de Dieu aura été maintenue par son jugement, en même temps que la perfection et la tendresse de ses voies resteront gravées comme éternel souvenir dans nos âmes. La lumière sans nuages ni ténèbres sera comprise dans sa propre perfection. La comprendre, c’est y être et en jouir. Or, la lumière, c’est Dieu lui-même. Quelle chose que d’être ainsi manifesté ! Quel amour que celui qui, dans sa parfaite sagesse et dans ses voies merveilleuses, dominant tout le mal, a pu amener des êtres tels que nous à jouir de cette lumière sans nuages ! Quel amour que celui qui a pu amener à jouir de cette lumière des êtres ayant la connaissance du bien et du mal, cette prérogative naturelle de ceux-là seuls dont Dieu peut dire «l’un de nous» ; des êtres sous le joug du mal qu’ils connaissaient, et chassés par une mauvaise conscience loin, de la présence de Dieu à qui cette connaissance appartenait ! Oui, quel amour que celui qui a introduit dans la pure lumière des êtres ayant dans leur conscience un témoignage assez puissant de ce qu’était le jugement de Dieu, pour leur faire éviter sa présence et pour être misérables, mais rien pour les attirer vers Lui qui seul pouvait porter remède à cette misère ! Quel amour et quelle sainte sagesse se trouvaient en Dieu pour amener de tels êtres à la source du bien, du pur bonheur, où la puissance du bien repousse absolument le mal que le bien juge.
Pour ce qui est des injustes, ils auront, au jour du jugement, à répondre personnellement pour leurs péchés, sous une responsabilité qui pèse tout entière sur eux-mêmes.
Quel que soit le bonheur de se trouver dans la parfaite lumière, et ce bonheur est complet et divin dans son caractère, c’est du côté de la conscience que ce sujet est présenté ici. Dieu maintient sa majesté par le jugement qu’il exécute, comme il est écrit : «L’Éternel s’est fait connaître par le jugement qu’il a exécuté» (Ps. 9: 16) ; là, dans son gouvernement du monde, ici, dans son jugement éternel, final et personnel ; et, pour ma part, je crois qu’il est d’un grand profit pour notre âme que nous ayons le jugement de Dieu présent à nos pensées, et que le sentiment de l’immuable majesté de Dieu soit maintenu dans notre conscience par ce moyen. Si l’on n’était pas sous la grâce, ce serait et devrait être insupportable ; mais le maintien du sentiment de la majesté d’un Dieu juge, ne contredit pas la grâce ; au contraire, c’est sous la grâce seule qu’il peut exister dans sa vérité ; car qui autrement, si ce n’est un homme complètement aveugle, supporterait un instant la pensée de «recevoir ce qu’il a fait dans le corps» ?
Mais l’autorité, la sainte autorité de Dieu, qui s’affirme elle-même dans le jugement, est une partie de nos relations avec Lui, et le maintien de ce sentiment dont nous parlons, associé à la pleine jouissance de la grâce, une partie de nos saintes affections spirituelles. C’est la crainte du Seigneur ; elle l’est dans ce sens que «bienheureux l’homme qui craint continuellement» (Prov. 28: 14). Si la pensée du jugement affaiblit le sentiment que l’amour de Dieu repose pleinement, éternellement sur nous, alors nous quittons le seul terrain possible d’une relation quelconque avec Dieu, à moins qu’on n’appelle la perdition une relation. Mais dans la douce et paisible atmosphère de la grâce, la conscience maintient ses droits et son autorité contre les empiètements subtils de la chair, et elle le fait par le sentiment du jugement de Dieu en vertu d’une sainteté qui ne saurait être séparée du caractère de Dieu sans nier qu’il y a un Dieu : car s’il y a un Dieu, il est saint. La conscience que nous devons tous être manifestés devant le tribunal de Christ engage le coeur du croyant accepté de Dieu à chercher à plaire au Seigneur à tous égards ; et, dans le sentiment de tout ce qu’il y a de solennel pour un pécheur de paraître devant Dieu, l’amour qui accompagne nécessairement ce sentiment dans le coeur du croyant, pousse celui-ci à persuader les hommes en vue de leur salut, tandis qu’il maintient sa propre conscience dans la lumière. Or celui qui maintenant marche dans la lumière, celui dont la conscience réfléchit cette lumière, ne la craindra pas au jour où elle paraîtra dans sa gloire. Il nous faut être manifestés ; mais marchant dans la lumière dans le sentiment de la crainte de Dieu, réalisant son jugement du mal, nous sommes déjà manifestés à Dieu : rien n’empêche le doux et assuré courant de son amour. En conséquence la marche de celui qui lui-même est manifesté à Dieu se légitime à la longue dans la conscience des autres ; il est manifesté comme marchant dans la lumière.
Nous trouvons donc ici les deux grands principes pratiques du ministère : 1° marcher dans la lumière, dans le sentiment du jugement solennel de Dieu à l’égard de chacun ; 2° la conscience étant ainsi pure dans la lumière, ce sentiment du jugement (qui ne peut troubler pour elle-même l’âme, ni obscurcir la vue qu’elle a de l’amour de Dieu) pousse le coeur à chercher, par amour, les âmes en danger de ce jugement. Cela se rattache à la doctrine de Christ, le Sauveur, par sa mort sur la croix, et l’amour du Christ nous étreint, parce que nous voyons que si un est mort pour tous, c’est que tous étaient morts. Tel était l’état universel des âmes : l’apôtre cherche ces âmes afin qu’elles vivent par Christ à Dieu.
Mais cela va plus loin. Premièrement, par rapport à ce qui était le lot de l’homme déchu, la mort, elle est un gain pour le croyant. S’il est absent du corps, il est présent avec le Seigneur. Quant au jugement, il en reconnaît la solennité, mais cela ne le fait pas trembler. Il est en Christ — il sera semblable à Christ, et Christ, devant qui il doit être manifesté, a ôté tous les péchés pour lesquels il devait être jugé. L’effet produit, en l’amenant pleinement manifesté en la présence de Dieu maintenant, est un effet sanctifiant. Mais cela stimule son amour envers les autres. Ce n’est pas seulement par la crainte du jugement à venir pour eux ; l’amour de Christ l’étreint — l’amour manifesté dans la mort. Et cela prouve plus que les actes de péché qui amènent le jugement ; Christ est mort, parce que tous étaient morts. L’Esprit de Dieu va à la source et à la racine de leur condition tout entière, de leur état, et ne considère pas seulement les fruits d’une mauvaise nature — tous étaient morts. Nous avons le même enseignement important en Jean 5: 24 : «Celui qui entend ma parole, et qui croit celui qui m’a envoyé, a la vie éternelle et ne vient pas en jugement (celui qui s’applique aux péchés) ; mais il est passé de la mort à la vie» ; il est sorti, comme un être déjà perdu, de tout cet état et de cette condition, et a passé dans un autre état et une autre condition en Christ. Cela est un aspect très important de la vérité. Et la distinction entre ces deux états, largement développée en Romains, se trouve en plusieurs passages.
L’oeuvre de la manifestation devant Dieu dans la lumière est déjà vraie, pour autant que nous avons réalisé la lumière. Ne puis-je pas, étant maintenant en paix, regarder en arrière à ce que j’étais avant ma conversion, et à tous mes manquements depuis ma conversion, humilié, mais adorant la grâce de Dieu dans tout ce qu’il a fait pour moi, mais sans une pensée de crainte ou d’imputation de péché? Cela n’éveille-t-il pas un très profond sentiment de tout ce qu’est Dieu en sainte grâce et en amour, en patience illimitée envers moi, me gardant, m’aidant et me restaurant? Tel sera le cas d’une manière parfaite quand nous serons manifestés, quand nous connaîtrons comme nous avons été connus.
Afin que ce point soit rendu encore plus clair — car il est important — j’ajouterai ici quelques observations de plus. Ce que nous trouvons dans ce passage, c’est la parfaite manifestation de tout ce qu’une personne est et a été devant un trône caractérisé par le jugement, sans que la personne en question soit jugée comme coupable. Sans doute que, quand le méchant reçoit les choses faites dans le corps, il est condamné. Mais il n’est pas dit ici «jugé», car alors tous doivent être condamnés. Mais cette manifestation est précisément ce qui amène moralement tout devant le coeur, lorsqu’il est capable de juger le mal pour lui-même : s’il était sous le jugement, il ne le pourrait pas. Affranchi de toute crainte, dans la parfaite lumière et avec la consolation de l’amour parfait — car là où nous avons la conscience du péché, sans qu’il nous soit imputé, nous avons le sentiment, quoique d’une manière qui humilie, de l’amour parfait — et en même temps avec le sentiment de l’autorité et du gouvernement divin pleinement démontré dans l’âme, tout est jugé par l’âme elle-même comme Dieu le juge, et en communion avec Lui. Cela est extrêmement précieux.
Il faut nous rappeler que, quand nous paraissons devant le tribunal du Christ, nous sommes déjà glorifiés. Christ est venu lui-même dans son grand amour, nous chercher, et a changé notre corps d’humiliation en la conformité du corps de sa gloire. Nous sommes glorifiés et semblables à Christ avant que le jugement ait lieu. Et remarquez l’effet produit sur Paul. Est-ce que la pensée d’être manifesté éveille en lui l’anxiété ou la crainte? Nullement. Il réalise toute la solennité d’un tel moment. Il sait combien le Seigneur doit être craint ; il l’a devant les yeux, et quelle est la conséquence? Il se met à persuader d’autres qui ont besoin de cette crainte.
Il y a, pour ainsi dire, deux parties dans la nature et dans le caractère de Dieu : sa justice qui juge tous, et son amour parfait. Les deux sont unis pour nous en Christ, et sont à nous en Lui. Si vraiment nous réalisons ce que Dieu est, tous deux auront leur place ; or le croyant est en Christ la justice que Dieu, sur son trône, d’après sa nature même, doit avoir devant Lui, si nous devons être avec Lui et jouir de Lui. Mais le Christ, sur le tribunal devant lequel nous sommes, est notre justice. Il juge par la justice laquelle il est, et nous sommes cette justice, la justice de Dieu en Lui. C’est pourquoi ce point (d’être devant le tribunal) ne peut soulever aucune question dans l’âme ; nous adorons une telle grâce, mais aucune question n’est soulevée. Cela ne fait qu’exalter le sentiment que nous avons nous-mêmes de la grâce, nous la fait comprendre comme appropriée à l’homme tel qu’il est, et nous fait sentir les conséquences solennelles et terribles de n’y avoir point de part, puisqu’il y a un tel jugement. C’est pourquoi cette autre et essentielle partie de la nature divine — l’amour — agira en nous envers les autres ; et sachant combien le Seigneur doit être craint, nous persuaderons les hommes. Ainsi Paul (c’est la conscience en vue de ce moment très solennel) possédait la justice qu’il voyait dans le Juge, car ce qui jugeait était sa justice ; mais alors et en conséquence il cherchait sérieusement et avec ardeur d’autres afin qu’ils fussent sauvés selon l’oeuvre qui l’avait ainsi amené près de Dieu, et c’est vers cette oeuvre qu’il se tourne (v. 13, etc.). Mais cette vue du jugement et de notre complète manifestation dans ce jour, a sur le saint un effet actuel selon la propre nature du jugement. Il le réalise par la foi. Il est manifesté. Il ne craint pas de l’être. Toutes les voies passées de Dieu envers lui se déploieront devant lui quand il sera dans la gloire ; mais il est manifesté à Dieu maintenant, sa conscience est exercée dans la lumière. Ainsi la pensée du tribunal a une puissance actuelle sanctifiante.
Remarquez l’assemblage de puissants motifs, de principes d’une importance prééminente, que nous trouvons ici : principes en apparence contradictoires, mais qui, pour une âme marchant dans la lumière, au lieu de se heurter et de s’entre-détruire, se réunissent pour donner son caractère complet au ministre et au ministère chrétiens.
Premièrement se trouve la gloire, dans une telle puissance de vie que celui qui la réalise, ne désire pas la mort, parce qu’il voit dans la puissance de vie en Christ ce qui peut absorber tout ce qui est mortel en lui ; et il la voit avec la certitude qu’il en jouira. Le chrétien a tellement la conscience qu’il possède cette vie (Dieu l’ayant formé pour cela et lui ayant donné les arrhes de l’Esprit) que la mort, si elle survient pour lui, n’est qu’une heureuse absence du corps pour être présent avec le Seigneur.
Or la pensée de monter vers Christ donne le désir de Lui être agréable et présente Christ — second motif ou principe qui forme ce ministère — comme le Juge qui rendra à chacun ce qu’il a fait. Ici, la pensée solennelle de la crainte qu’on doit avoir d’un tel jugement, prend possession du coeur de l’apôtre. Quelle différence entre cette pensée et celle de «l’édifice de la part de Dieu», que l’apôtre attendait avec assurance! Cependant, cette pensée ne l’alarmait pas mais, dans le sentiment solennel de la réalité de ce jugement, elle le poussait à persuader les autres.
Mais ici est introduit un troisième principe, savoir, l’amour de Christ en rapport avec l’état de ceux que Paul cherchait à persuader. Puisque cet amour de Christ se montrait dans sa mort, elle est le témoignage que tous étaient déjà morts et perdus.
Ainsi nous trouvons dans ce passage la gloire avec la certitude personnelle d’en jouir, et la mort, devenant le moyen d’être présent avec le Seigneur ; puis le tribunal de Christ et la nécessité d’y être manifesté ; enfin l’amour de Christ dans sa mort, tous étant déjà morts.
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Ecrit le 21 déc.03, 07:02-
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