ENTRETIENS sur la
SECONDE ÉPÎTRE aux CORINTHIENS
1. 1 Chapitre 1
Vous connaissez, chers amis, les circonstances extérieures qui ont donné lieu à cette épître. L’apôtre avait écrit d’Éphèse une première lettre aux Corinthiens, après avoir appris le désordre qui régnait parmi eux et auquel son coeur était d’autant plus sensible, qu’ils étaient tous ses enfants dans la foi. L’Esprit de Dieu s’est servi de ces circonstances pour instruire tous les chrétiens sur l’ordre qui convient à la maison de Dieu. En effet, pour connaître l’organisation de l’Assemblée et nous y conformer, nous n’avons qu’à lire la première épître aux Corinthiens. Après leur avoir adressé sa lettre, l’apôtre avait envoyé Tite vers eux pour s’informer de leur état. Une grande porte était ouverte à son activité dans la Troade, mais, dans son inquiétude, il avait abandonné cette oeuvre pour se rendre en Macédoine à la rencontre de Tite. Ce dernier lui ayant apporté de bonnes nouvelles des Corinthiens, l’apôtre leur écrivit cette seconde épître. Il était venu une première fois en personne auprès d’eux, puis une deuxième fois par sa première épître ; il était prêt à venir personnellement vers eux une troisième fois, mais en attendant il les visitait une troisième fois par cette seconde lettre (12:14 ; 13:1). Sa deuxième visite personnelle à Corinthe est, sans aucun doute, relatée dans les versets 2 et 3 du chap. 20 des Actes, mais c’est la seule mention qui en soit faite.
Je donne ces détails pour que nous nous rendions compte des circonstances extérieures de Paul quand il écrivait cette seconde épître, mais il est beaucoup plus important pour nous d’y chercher ce que le Seigneur veut nous y enseigner. J’ai dit une fois qu’on pouvait intituler cette épître : Le ministère chrétien. Tout en étant exacte, cette définition est cependant loin d’embrasser l’ensemble des vérités que le Saint Esprit nous y présente. C’est ainsi que, dans le chapitre que nous venons de lire, nous trouvons en premier lieu les conditions dans lesquelles un chrétien doit se trouver pour exercer un ministère qui puisse être béni au-dehors. Or, en disant «les conditions du ministère», je parle de chacun de nous, car un certain état moral est nécessaire pour s’acquitter d’un service quelconque que le Seigneur nous confie.
Je vous ferai remarquer, au commencement de ce chapitre, une parole particulièrement édifiante. La voici : «Béni soit le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus Christ, le Père des miséricordes et le Dieu de toute consolation, qui nous console à l’égard de toute notre affliction, afin que nous soyons capables de consoler ceux qui sont dans quelque affliction que ce soit, par la consolation dont nous sommes nous-mêmes consolés de Dieu» (v. 3, 4). Vous rencontrez trois fois dans les épîtres ce terme : «Béni soit le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus Christ». Dans la première épître de Pierre, (1:3), l’apôtre bénit Dieu pour avoir été régénéré, c’est-à-dire pour avoir reçu personnellement la nouvelle naissance, qui caractérise chacun de nous au début de sa carrière chrétienne. Or, dans cette épître de Pierre, le chrétien n’a, dans ce monde, aucune autre chose que celle-là. Il a devant lui une espérance et marche vers elle, sans la posséder encore ; son salut ne lui sera révélé que dans les derniers temps. Ce n’est pas, comme en d’autres épîtres, un salut actuel, mais une délivrance future et finale. L’apôtre bénit donc Dieu d’avoir reçu une vie nouvelle, avec laquelle il peut traverser le monde, sans y rien posséder, et, bien plus, sans avoir obtenu aucune des choses futures, les ayant encore toutes devant lui. Mais, par la foi en Christ, il possède la vie divine ; il est parfaitement heureux de ne rien avoir d’autre et «se réjouit d’une joie ineffable et glorieuse», en recevant «un salut d’âmes», dans lequel il n’entre que comme «fin de sa foi». Chers amis, sommes-nous pleinement satisfaits d’être des enfants de Dieu et de n’avoir aucune part dans ce monde ? d’avoir tous nos trésors devant nous, sans les avoir atteints et sans les posséder ? Rien dans le présent, tout dans l’avenir ? Cela suffisait à ces premiers chrétiens et leur communiquait une telle joie, qu’aucune autre partie de la Parole n’en présente l’expression d’une manière plus élevée : «Une joie ineffable et glorieuse !»
Dans l’épître aux Éphésiens (1:3), vous trouvez exactement l’opposé de ce qui nous est dit dans l’épître de Pierre. Là le chrétien n’a rien : ici, il a tout. Il est introduit dans le ciel, béni de toute bénédiction spirituelle dans les lieux célestes ; il est arrivé au but ; les désirs de son âme sont satisfaits ; sa position est céleste en Christ ; pour lui le monde a disparu, sauf pour y rendre témoignage et y combattre ; d’en haut, le chrétien le voit sous ses pieds. Aussi nous comprenons fort bien cette parole : «Béni soit le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus Christ !» Toutefois l’une de ces positions du chrétien est aussi réelle que l’autre. Dans l’une il est dans le monde, dans l’autre il est dans le ciel. Il est tout à la fois, comme Israël, mangeant la manne dans le désert, et se nourrissant du «vieux blé du pays».
La seconde épître aux Corinthiens nous présente le passage peut-être le plus étonnant des trois : «Béni soit le Dieu et Père de notre Seigneur Jésus Christ, le Père des miséricordes et le Dieu de toute consolation, qui nous console à l’égard de toute notre affliction, afin que nous soyons capables de consoler ceux qui sont dans quelque affliction que ce soit, par la consolation dont nous sommes nous-mêmes consolés de Dieu» (1:3, 4). Nous voyons ici un homme, entouré d’afflictions, d’épreuves, de douleurs, de souffrances si grandes qu’il désespère de vivre, étant déjà comme jeté dans la poussière de la mort. Quel est donc pour cet homme le motif de rendre grâces ? C’est que Dieu se sert des circonstances les plus douloureuses de sa vie pour se glorifier et faire de lui le canal de bénédictions nouvelles pour d’autres. Paul est satisfait de souffrir, parce que le Dieu de toute consolation le console ou l’encourage (ce mot a les deux significations) dans toute son affliction, non pas pour sa propre âme, et en réponse à ses propres besoins, mais pour qu’il soit capable d’encourager ceux qui sont dans quelque affliction que ce soit. Paul avait subi et traversé toutes ces épreuves, et ses provisions de consolations étaient inépuisables de la part de Dieu pour lui-même, afin qu’elles le fussent pour d’autres.
Vous trouverez la même pensée dans la suite de cette épître où il se compare à un vase de terre dans lequel Dieu a mis son trésor. Le vase est fêlé ou brisé ; c’était la mort qui opérait en l’apôtre, mais afin que la lumière puisse se répandre au-dehors et aller porter la vie dans le coeur des Corinthiens.
L’apôtre Paul possédait plusieurs secrets de son action et de son service au milieu des hommes. Nous les verrons dans le courant de nos lectures ; mais le premier de tous, et ce qui donnait tant de puissance a son ministère, était qu’il en avait fini avec tout ce qui constituait l’homme dans la chair : Paul était un chrétien affranchi.
On peut prêcher l’affranchissement, l’expliquer clairement à d’autres, sans être soi-même affranchi, car, pour l’être réellement, il ne faut pas seulement, souvenez-vous-en, connaître l’affranchissement, mais le pratiquer.
Ce sont, en effet, deux choses très différentes : expliquer ce que c’est que d’être mort avec Christ, ou le réaliser. L’apôtre le réalisait pleinement. L’affranchissement a, pour ainsi dire, plusieurs côtés et comprend plusieurs sortes de délivrances.
Vous trouvez le premier côté au chap. 6 de l’épître aux Romains. C’est l’affranchissement du péché. Nous avons été identifiés avec Christ dans la ressemblance de sa mort et, si nous acceptons cela par la foi, notre vieil homme a été crucifié avec Lui, afin que «le corps du péché» (le péché, comme racine en nous de tous les péchés) soit annulé pour que nous ne servions plus le péché ; car «celui qui est mort est justifié du péché». Or, si nous sommes morts avec Christ, nous croyons que nous vivrons aussi avec Lui. Tel est donc le premier côté de l’affranchissement. Nous en avons fini par la mort avec la domination du péché sur nous. Non pas que nous n’ayons pas le péché, la chair en nous, mais nous ne sommes plus dans la chair ; nous avons été affranchis de sa domination. Un autre, Christ, est venu se mettre à notre place, a été fait péché pour nous (ce n’est pas seulement qu’il a porté nos péchés), est mort au péché, est vivant à Dieu, et si nous sommes unis à Christ, nous sommes morts au péché et vivants à Dieu. Aussi l’apôtre exhorte les chrétiens à se «tenir pour morts», afin que, si le péché se présente, ils puissent dire : «Je suis mort», et ne lui céder en aucune manière.
Dans l’épître aux Galates, vous trouvez d’autres côtés de l’affranchissement. Le premier (correspondant à Rom. 7) se trouve au chap. 2:19. «Par la loi, je suis mort à la loi». La loi a prononcé sur moi la sentence de mort, à cause du péché, mais cette sentence a été exécutée sur Christ, fait péché, quand il est «devenu malédiction pour nous», afin de «nous racheter de la malédiction de la loi» (Gal. 3:13, 14). La loi qui me condamnait a condamné Christ à mort, quand il a été fait péché pour moi. Désormais, en mourant, Christ est mort à la loi, et moi de même. Comme Lui, je suis mort au péché, afin que je vive à Dieu ; comme Lui, je suis mort à la loi, afin que je vive à Dieu.
L’épître aux Galates nous présente encore un autre côté de l’affranchissement (5:24) : «Or ceux qui sont du Christ ont crucifié la chair avec les passions et les convoitises». Ici, la crucifixion est l’acte de ceux qui sont du Christ. C’est à peu près le «mortifiez vos membres», de Col. 3:5, sauf que, dans notre passage, c’est une chose faite et accomplie une fois pour toutes. Celui qui, après être mort avec Christ, a reçu l’Esprit comme puissance de sa nouvelle vie, est censé avoir fait usage de cette puissance pour en finir avec la chair et se soustraire à sa domination, car elle domine par les passions, et par les convoitises qui sont l’amorce des passions. Nous trouvons donc ici la réalisation pratique, dans la puissance de l’Esprit de Dieu, de la domination sur la chair qui a déjà rencontré son jugement complet à la mort de Christ.
À la fin de cette même épître aux Galates (6:14), nous trouvons encore un nouveau côté de l’affranchissement : «Qu’il ne m’arrive pas à moi de me glorifier, sinon en la croix de notre Seigneur Jésus Christ, par laquelle le monde m’est crucifié, et moi au monde». L’apôtre était affranchi, par la croix, de tout cet ordre de choses dont l’homme pécheur est le centre et dont Satan est le prince. Le monde, le système qui avait mis à mort le Sauveur, était jugé, condamné, crucifié pour Paul par cet acte même ; et, quand le monde portait les yeux sur l’apôtre, il voyait un homme crucifié, mort à tout ce que le monde aime, veut et recherche ; un homme que rien ne pouvait tenter dans la scène de péché, d’éloignement de Dieu et d’inimitié contre Christ, qu’il traversait ; scène dont il est dit : «Le monde entier gît dans le Méchant» (1 Jean 5:19). N’est-il pas vrai, chers amis, que nous connaissons fort peu ce côté de l’affranchissement ? C’est ce qui me fait dire que l’affranchissement n’est une réalité pour l’âme qu’autant qu’il est pratiqué. Un chrétien retenu dans les liens du monde politique, artistique, scientifique, du monde où l’on s’amuse ou du monde religieux, ne sera jamais un chrétien affranchi.
Paul était donc un homme libre de ce qui le retenait autrefois ; il avait vu la fin de toutes ces choses à la croix ; aucune d’entre elles ne pouvait revivre pour lui ; elles avaient toutes reçu le coup de grâce dans le jugement qui avait atteint son Sauveur, aussi peut-il dire : «Je suis crucifié avec Christ ; et je ne vis plus, moi, mais Christ vit en moi» (Gal. 2:20). Il était devenu comme une personnalité nouvelle, un nouvel homme, tout en ayant la chair en lui, mais cette dernière, il la tenait à la seule place qui lui soit due, dans la mort sur la croix.
Il est si vrai que, pour Paul, l’homme lui-même est crucifié que, dès le premier chapitre de cette épître aux Galates, il refuse de lui accorder aucune place dans son ministère. Il déclare n’être pas apôtre de la part des hommes, ni par l’homme. Il ne s’applique pas à satisfaire les hommes, ni à complaire aux hommes. Son évangile n’est pas selon l’homme ; il ne l’a pas reçu de l’homme ; et, s’il s’agissait même des meilleurs d’entre les apôtres, Christ n’avait point égard à l’apparence de l’homme (Gal. 1 et 2).
Revenons maintenant au premier chapitre de notre épître aux Corinthiens. Nous y trouvons un dernier côté de l’affranchissement qui dépasse encore celui dont nous venons de parler. Dieu faisait passer l’apôtre par des circonstances telles, qu’il avait en lui-même la sentence de mort, afin qu’il n’ait pas confiance en lui-même, mais en Dieu qui ressuscite les morts (v. 9). Il aurait pu n’avoir aucune confiance dans la chair, dans l’homme, dans le monde, et cependant avoir confiance en lui-même ; mais quand la sentence de mort est, non pas prononcée sur lui du dehors, mais réalisée en lui-même, il ne peut avoir confiance qu’en Celui qui ressuscite les morts. À la fin de cette épître, nous apprenons que quatorze ans auparavant, c’est-à-dire au commencement de sa carrière, l’apôtre avait fait une expérience tendant au même but. Dieu l’avait transporté au troisième ciel, où il avait entendu des choses si merveilleuses qu’aucun langage humain ne saurait les reproduire ; mais, quand il descendit de ces hauteurs, le danger commença. Il aurait pu s’enorgueillir et prendre confiance en lui-même. Dieu lui envoie un ange de Satan pour le souffleter, puis il lui dit : «Ma grâce te suffit». Longtemps après cette expérience, elle se renouvelle, car rien n’est plus subtil que le «moi», et il doit être continuellement tenu en échec. Ici, ce n’est plus l’ange de Satan, c’est la sentence de mort que rencontre l’apôtre et il l’a tellement réalisée, qu’à la fin de cette épître il s’écrie : «Je ne suis rien» (12:11). Où est la confiance en soi-même, quand on est souffleté par Satan, quand la sentence de mort s’exécute ? On n’est plus rien ! Je ne pense pas que la pratique de l’affranchissement puisse dépasser cette expérience.
La conséquence est que, si l’apôtre n’est rien, Christ est tout pour lui. Il peut dire : «Pour moi, vivre c’est Christ» et, par rapport à son ministère, Christ en est le seul objet. Lui seul a pris la place de toute autre chose dans le coeur, dans les pensées, dans l’activité de Paul. S’agit-il de ses circonstances, il dit : «Comme les souffrances du Christ abondent à notre égard» (v. 5). Ses souffrances ne sont plus les souffrances de Paul ; dans sa carrière d’amour, il accomplit les souffrances du Christ, afin qu’il puisse apporter à d’autres tous les encouragements qui les accompagnent. Par la grâce de Dieu, il peut parler de lui-même comme d’un «homme en Christ» (12:2). Telle est chez l’apôtre la réalisation pratique de l’affranchissement.
Le résultat de cet affranchissement quant à son ministère, était que sa prédication avait Christ, et rien d’autre, pour sujet. Vous avez pu penser, dit-il aux Corinthiens, que je faisais preuve d’incertitude dans mes desseins, mais il n’y a pas d’incertitude en Lui, «Car autant il y a de promesses de Dieu, en lui est le oui et en lui l’amen, à la gloire de Dieu par nous» (v. 20). Oui, toutes les promesses se résument en Lui. En Gal. 3:14, le Saint Esprit est une de ces promesses. C’est en vertu de l’acceptation de Christ et de son élévation à la droite de Dieu, que la promesse de l’Esprit est devenue notre part. En Tite 1:2, il en est de même pour la vie éternelle, mais il y a encore d’autres promesses : la gloire, la justice, le pardon, l’héritage. L’apôtre ajoute : «À la gloire de Dieu par nous». Pourquoi ce par nous ? Parce que, chose merveilleuse, Dieu nous a unis à Christ d’une manière si indissoluble que tout ce qui Lui appartient nous appartient aussi. La gloire de Dieu est par Christ, mais la gloire de Christ étant notre gloire, la gloire de Dieu est aussi par nous. L’héritage est à Christ, mais cet héritage nous appartient. La vie est en Christ, cette vie est à nous. Si donc Dieu est glorifié par Christ, il l’est aussi par nous.
L’apôtre ajoute : «Or celui qui nous lie fermement avec vous à Christ et qui nous a oints, c’est Dieu, qui aussi nous a scellés, et nous a donné les arrhes de l’Esprit dans nos coeurs» (v. 21, 22). C’est donc ce qui caractérise le chrétien : Il est lié fermement à Christ, fait «une même plante avec Lui». Il est oint de l’Esprit, comme Jésus l’a été, mais le Seigneur, Lui, en vertu de sa perfection comme homme, et nous, en vertu de l’oeuvre qu’il a accomplie en notre faveur. Le chrétien est scellé du Saint Esprit qui lui apporte la conscience et l’entière connaissance de sa relation avec Dieu, relation dont le Seigneur jouissait lui-même comme homme ici-bas. Enfin, l’Esprit est «les arrhes de notre héritage». Nous allons entrer dans notre héritage céleste dont, par l’Esprit, nous avons déjà l’avant-goût et la certitude. Le Seigneur, Lui, y est entré avant nous, tandis que nous n’en avons que les arrhes ; mais Il attend encore d’entrer dans son héritage terrestre, et nous y entrerons aussi avec Lui.
Telles étaient les choses que Paul annonçait. Il «prêchait le Fils de Dieu, Jésus Christ». Il montrait la valeur de sa personne et de son oeuvre, et ce qu’elles étaient pour Dieu et pour nous. Il affirmait qu’en dehors de Christ, les chrétiens n’avaient rien, et lui ne voulait pas d’autre place. Il n’avait qu’une pensée, être trouvé en Lui, sans autre justice que celle de Dieu ; il n’avait qu’un désir, celui de le connaître en traversant ce monde, et de le reproduire dans sa marche ; il n’avait qu’une ambition, celle de l’atteindre dans la gloire.
Que Dieu nous donne de pouvoir dire ces mêmes choses, et de pratiquer notre affranchissement de telle sorte que nous soyons de vrais témoins de Christ dans ce monde !
2. 2 Chapitre 2
Il existe une certaine liaison entre la première et la seconde épître aux Corinthiens. Dans la première, les Corinthiens, bénis extérieurement et comblés de tous les dons spirituels, avaient pris confiance en eux-mêmes, s’étaient enorgueillis, et cela n’avait pas eu d’autre résultat que d’amener parmi eux des divisions et toute espèce de désordre. Il y avait chez eux beaucoup de choses à reprendre, mais je n’insiste ici que sur les divisions. Ils étaient désunis pour le bien et unis pour le mal. L’un disait être de Paul, l’autre d’Apollos, et cela les divisait en sectes diverses. Puis, quand un mal scandaleux s’était présenté dans l’assemblée, indifférents à ce qui déshonorait le nom de Christ, ils étaient unis pour le passer sous silence. L’apôtre en avait pris occasion pour montrer qu’il y a un ordre dans la maison de Dieu, ordre qu’il n’est pas permis d’enfreindre. Si tous les enfants de Dieu comprenaient cela en ce qui concerne l’Église ou l’Assemblée, comme le témoignage de cette dernière serait plus puissant devant le monde !
Ayant reçu l’exhortation, les Corinthiens perdent la confiance qu’ils avaient en eux-mêmes. Une tristesse selon Dieu remplit leurs coeurs et les amène à la repentance. L’apôtre leur montre alors que lui n’avait aucune confiance en lui-même, et se sert de ses propres expériences pour leur édification. Il connaissait la tristesse, il connaissait la puissance de Satan dans le monde. N’ayant aucune confiance en lui-même, il pouvait apporter aux Corinthiens qui n’étaient plus exaltés par la valeur de leurs dons, les consolations que lui-même avait éprouvées.
Mais n’oublions pas que lorsqu’on a surmonté certains dangers, et c’était le cas pour les Corinthiens, d’autres dangers se présentent. Satan ne se tient jamais pour battu. S’il n’a pas réussi à nous vaincre d’un côté, il nous attaquera de l’autre, et il nous faudra de nouveau lui faire face. Quel était donc le danger que couraient maintenant les Corinthiens ? Ils avaient été ramenés à une juste appréciation de la pensée de Dieu quant à la discipline ; ils avaient été, comme on le voit au chap. 7 de notre épître, remplis de zèle pour juger le mal parmi eux et avaient suivi les enseignements de l’apôtre à ce sujet. La partie semblait donc gagnée, car maintenant ils étaient unanimes dans le bien, unanimes pour exercer une action judiciaire contre le méchant. Ils l’avaient fait comparaître devant leur tribunal et l’avaient ôté du milieu d’eux. Mais, au lieu de les louer de ce qu’ils avaient parfaitement accompli leur devoir, l’apôtre leur dit : Ce n’est pas tout d’être unis dans le jugement ; il faut que vous soyez unis dans l’exercice de l’amour (v. 8). Dieu ne voulait pas les faire demeurer sur une action judiciaire. Avec le retranchement tout n’est pas fini. Les Corinthiens avaient ôté le méchant du milieu d’eux, mais l’apôtre avait appris que ce dernier était accablé de tristesse (v. 7). L’assemblée le laissait dans cet état. Où était l’amour ? L’apôtre en profite pour montrer ce qu’ils avaient à faire envers un homme humilié et repentant. Avant toute chose il s’occupe d’eux ; il leur avait écrit sa première lettre «dans une grande affliction et avec serrement de coeur, avec beaucoup de larmes, non afin, dit-il, que vous fussiez attristés, mais afin que vous connussiez l’amour que j’ai si abondamment pour vous». La cause de ces larmes était, sans doute, en partie le péché qui avait été commis dans l’assemblée de Corinthe, si chère à son coeur. L’apôtre prenait leur place, alors qu’eux ne savaient pas encore pleurer avec lui. Il pleurait pour eux sur celui qui, ayant déshonoré le Seigneur, avait jeté de l’opprobre sur Lui et terni sa gloire au milieu de son Assemblée. Mais il pleurait aussi sur les Corinthiens, et, remarquez-le, à un moment où ils ne pleuraient pas du tout. Le souci des assemblées assiégeait continuellement l’apôtre. Il sentait profondément la dureté de coeur qui avait rendu les Corinthiens indifférents au mal et avait déshonoré le nom de Christ au milieu d’eux. Maintenant il ne lui suffisait pas de les voir unis dans le jugement ; il voulait les voir unis dans l’amour. Il leur dit : Si moi j’ai pleuré, ce n’était pas pour vous attrister, mais afin que vous connussiez l’amour que j’ai si abondamment pour vous. Il voulait qu’ils comprissent qu’il avait été affligé de les reprendre, de venir à eux avec l’autorité apostolique pour leur parler de leur péché, dans cette première épître si sévère, et que les Corinthiens avaient pu estimer froide et dure. La pensée que leurs coeurs étaient peut-être froissés ne lui laissait pas un moment de répit ; il désirait savoir quel serait l’effet de sa lettre sur eux. Se révolteraient-ils ou accepteraient-ils la réprimande ? Paul en était presque à regretter d’avoir écrit cette épître inspirée ! (7:8).
Tableau touchant de l’amour qui remplissait son coeur ! Trop angoissé pour attendre leur propre réponse à sa lettre, il leur envoie Tite pour qu’il lui rende compte de leur état. En attendant, il est lui-même dans la Troade où la porte est largement ouverte à l’Évangile ; mais une chose est plus importante pour son coeur que même cette oeuvre que Dieu lui confie ! Il l’abandonne, va au devant de Tite en Macédoine, et n’a pas de repos qu’il ne l’ait rencontré.
Cela parle à nos propres coeurs. Il n’y a rien de plus béni, de plus heureux pour nous que l’Évangile. Quelle joie, quand on le voit pénétrer dans les consciences et amener des âmes au Seigneur par la conversion ! C’est une oeuvre merveilleuse à laquelle il nous est donné de prendre part ! Cependant, dans ce moment-là, une chose avait plus d’importance pour Paul que même la porte ouverte pour l’Évangile. Il désirait voir une vraie restauration chez ses bien-aimés enfants dans la foi : une assemblée, reprenant par une repentance complète, par le jugement d’elle-même, un chemin où le Seigneur pouvait être glorifié. Voilà ce qui remplissait son coeur. Sa joie était que les frères de l’assemblée de Corinthe marchent ensemble fidèlement, humblement, dépouillés de toute confiance en eux-mêmes, prompts à juger le mal, prompts à pardonner au méchant repenti. Il dit : «Si quelqu’un a causé de la tristesse» (v. 5). Cet homme n’étant pas encore restauré, l’apôtre ne l’appelle pas : «un frère», et ne le nomme même pas ; il est : «quelqu’un». Nous pouvons en tirer une utile instruction pour la conduite de l’assemblée envers ceux qui sont retranchés. «Si quelqu’un a causé de la tristesse, ce n’est pas moi qu’il a attristé, mais, en quelque sorte... c’est vous tous». Il avait été obligé de les charger dans sa première épître ; maintenant qu’il les voit attristés, il renonce à leur écrire sévèrement. Il avait encore, comme nous le verrons plus tard, beaucoup de choses à reprendre, qu’il aurait pu placer devant eux dès le début de son épître, mais il ne voulait pas les accabler. Nous apprenons ici de quelle manière nous avons à nous comporter envers nos frères, quand nous avons été obligés de les reprendre. Il nous arrive parfois de les charger plus lourdement encore quand nous voyons que la réprimande n’a pas produit tout l’effet désiré ; et nous aggravons ainsi le fardeau dont ils sont déjà accablés. L’apôtre n’agissait pas de cette manière. Voyant les Corinthiens restaurés dans une mesure, il ne cherchait pas à ajouter à leur accablement. Il dit : Ce que je désire, c’est la joie, c’est l’amour ; et il les engage à pardonner, à consoler un tel homme, de peur qu’il ne soit accablé par une trop grande tristesse. Après vous être repentis, leur dit-il, vous pouvez être maintenant réjouis, consolés, fortifiés par mon ministère, et vous laissez cet homme, chez qui la repentance s’est produite, en proie à l’accablement ! (v. 8, 9).
Ils avaient été obéissants pour exercer le jugement ; il s’agissait maintenant qu’ils soient obéissants pour pardonner. Paul désirait savoir s’ils étaient obéissants en toutes choses (v. 10). La différence entre cette seconde épître et la première est très frappante. S’agissait-il de juger le mal, l’apôtre avait décidé de livrer cet homme à Satan, mais il avait suspendu son verdict. Dans la seconde épître, il se hâte de pardonner dans la personne de Christ. Au lieu de prononcer le jugement qu’il avait retardé, il accorde le pardon, afin qu’il soit donné par la puissance et avec l’autorité de Christ à l’homme qui avait péché. Cela ayant lieu, l’Ennemi ne pouvait réussir dans ses desseins (v. 11). Satan aurait voulu répandre de nouveau la désunion, séparer l’assemblée de l’apôtre ; car ainsi elle aurait été unanime à juger, et l’apôtre tout seul à pardonner. Lorsque l’Ennemi de nos âmes peut nous empêcher de marcher dans une même pensée, dans un même sentiment, soyons bien certains qu’il n’y manque pas.
Au v. 14, l’apôtre conclut en disant : Il m’est donc arrivé d’abandonner l’oeuvre par amour pour vous, mais je puis m’en remettre à la grâce de Dieu (*) : Il me conduit «toujours en triomphe dans le Christ». Un empereur ou un général qui avait remporté des victoires et soumis des peuples, célébrait un triomphe. Son char était accompagné d’un cortège portant des encensoirs. La fumée de l’encens montait autour du triomphateur. Parmi les captifs qu’il menait à sa suite, les uns étaient destinés à la mort, les autres à être graciés. Christ ayant remporté la victoire à la croix, l’apôtre accompagnait son triomphe comme thuriféraire (v. 14). Le parfum, l’odeur de la connaissance de Christ par l’Évangile, montait autour de Lui pour proclamer la valeur de Son oeuvre.
(*) Cette oeuvre en Troade, il la reprit après sa seconde visite à Corinthe (Actes 20:2-6).
Paul ajoute : «Nous sommes la bonne odeur de Christ pour Dieu» ; il se présente ici, en second lieu, lui-même comme un parfum de Christ qui monte devant Dieu. Persécuté, voué à la mort, humilié, sans aucune confiance en lui-même, ayant besoin d’être continuellement consolé, il était la bonne odeur de Christ. On pouvait voir, dans la personne de celui qui accompagnait son Maître, ce que ce Maître, maintenant vainqueur et triomphateur, avait été ici-bas. Chers amis, sommes-nous, aux yeux de Dieu, le parfum de Christ, ou faisons-nous monter devant Lui la mauvaise odeur du monde et de ses convoitises ? Cela parle, me semble-t-il, à nos consciences. Paul pouvait dire : «Nous sommes la bonne odeur de Christ pour Dieu». Dieu estimait précieux ce parfum et voulait le répandre pour glorifier son Fils. C’était une odeur de vie pour ceux qui croient, car la victoire de Christ leur annonce la délivrance ; mais une odeur de mort pour ceux qui refusent le salut, car c’est leur condamnation. Les hommes suivent aujourd’hui, qu’ils le veuillent ou ne le veuillent pas, le triomphe de Christ ; mais leur attitude vis-à-vis de l’Évangile décide de leur sort : la vie, s’ils reçoivent la bonne nouvelle ; la mort, s’ils la repoussent. Dans ce pays-ci, où l’Évangile est connu de tous, quelle est la condition de ceux qui suivent le triomphe de Christ ? Question sérieuse pour ceux qui n’ont pas reçu le Sauveur pour la vie !
Quel beau tableau de toute l’activité de l’apôtre, au v. 17 ! Elle était de la part de Dieu dans ce monde ; elle était devant Dieu, avec sincérité, sans fraude ; et il parlait en Christ ! Toutes les ambitions de Paul se concentraient sur ce point : agir pour Dieu avec un coeur sincère, agir devant Dieu avec un coeur droit ; agir en Christ, de manière à n’être pas plus séparé de Lui, en pensée qu’en réalité ! Que Dieu nous donne d’apprécier la victoire de Christ, la valeur de son oeuvre et de sa personne, et de pouvoir dire, comme Paul : «C’est de la part de Dieu, devant Dieu, que nous parlons en Christ !»
3. 3 Chapitre 3
Le temps assez long qui s’est écoulé depuis notre dernier entretien me donne l’occasion de revenir un peu sur les pensées contenues dans les deux premiers chapitres de notre épître. Cette dernière présente un sujet particulier, le Ministère, son fonctionnement, la tâche qui lui incombe, et les qualités indispensables pour être un ministre de Christ, principes dont nous serons toujours plus pénétrés, à mesure que nous approfondirons ce sujet. Il est nécessaire de faire remarquer que le ministère a, dans cette épître, un caractère très étendu. Ce n’est pas seulement le ministère apostolique ou ministère de la Parole ; car le mot traduit ici par «ministère» se traduit ailleurs par «service». En effet, nous avons tous un ministère. Si nous n’avons pas tous le ministère de la Parole, à chacun de nous le Seigneur a confié un service, et souvent le plus infime service aux yeux des hommes a une importance très grande aux yeux de Dieu. Plus tard, aux chap. 8 et 9, l’apôtre s’étend sur le service pécuniaire à l’égard des saints, montre comment il faut s’y prendre pour l’exercer, et s’estime heureux d’y participer lui-même. Pénétrons-nous donc bien de cette vérité : si nous n’avons pas un don de l’Esprit en faveur de l’Assemblée ou pour le monde, nous avons tous un service particulier auquel nous devons vaquer aussi soigneusement qu’à un service public. Si ce dernier a plus d’apparence aux yeux des hommes, il offre aussi plus de dangers pour celui qui l’exerce.
En considérant le premier chapitre, nous pouvons conclure que notre service pour le Seigneur, quand il s’allie à la confiance en nous-mêmes, sera toujours frappé, non pas de nullité — car il n’y a pas un de nous qui n’ait à passer, au cours de son service, par le jugement graduel et détaillé de lui-même — mais du moins frappé de faiblesse en proportion de l’importance que nous sommes disposés à nous attribuer. Comme nous l’avons vu, le plus grand des apôtres disait : «Afin que nous n’eussions aucune confiance en nous-mêmes» ; «Moi qui suis moins que le moindre de tous les saints» ; et encore : «Moi qui ne suis rien». C’est dans la mesure où cette vérité est réalisée que le ministère chrétien est béni. Ce jugement absolu de soi-même, l’apôtre l’exerçait pour être en exemple à ses frères et les encourager dans ce chemin.
À la fin du chap. 1, nous avons vu que l’objet du ministère est Christ ; aussi l’apôtre s’occupe à faire ressortir ses gloires. Il montre ensuite que, pour présenter Christ il faut de la puissance, qu’il faut être oint et scellé du Saint Esprit. Rien n’est plus misérable que de présenter aux âmes la vérité de Dieu comme affaire d’intelligence, ou comme résultat de nos études, car de cette manière l’action de la Parole sur les consciences est annulée, l’Esprit de Dieu seul pouvant lui donner efficace.
Au chap. 2, le ministère n’a pas seulement pour but de présenter Christ, mais il a aussi une action dans l’Assemblée en vue de la discipline ; seulement c’est en amour que la discipline doit s’exercer. Sans amour, elle n’est qu’un jugement légal qui n’a rien à faire avec l’Esprit de Dieu. À la fin du chapitre, le ministère est la présentation de la victoire de Christ aux hommes et la présentation du parfum de Christ à Dieu ; immense responsabilité pour nous, mais aussi pour ceux qui rejettent notre témoignage !
Nous arrivons ainsi au commencement du chap. 3, où nous trouvons une fonction nouvelle du ministère. Ce dernier a pour but, non seulement de présenter le parfum de Christ dans le monde, mais d’y adresser une lettre de Christ connue et lue de tous les hommes, Les Corinthiens étaient sans doute la lettre de recommandation de l’apôtre, mais, pour Paul, cette lettre était absolument identique avec la lettre de recommandation de Christ. Paul n’avait point écrit son propre nom sur le coeur des Corinthiens, mais uniquement celui de Jésus. Combien de ministres de Christ, au lieu de suivre l’exemple de l’apôtre, ont, hélas pour triste fonction, d’écrire un nom d’homme, ou le nom de la secte à laquelle ils appartiennent, ou toute autre chose encore, sur le coeur des croyants !
Le Seigneur avait fourni à Paul les instruments nécessaires pour écrire la lettre de Christ, et il s’était acquitté fidèlement de sa tâche. Ses tablettes étaient les tables de chair du coeur, non les tables de pierre de la loi ; sa plume et son encre, l’Esprit de Dieu ; sa lettre, l’Église ; son sujet, Christ — Christ, un seul nom, et rien d’autre, mais un nom qui contient en une syllabe les conseils éternels de Dieu, toutes ses pensées et toutes ses gloires !
Comme les Corinthiens, nous sommes le fruit du ministère de l’apôtre, ce ministère étant contenu dans la Parole de vérité ; et, comme eux, nous sommes appelés à être la lettre de recommandation de Christ, connue et lue de tous les hommes ; mais, remarquez-le bien, le ministère de l’apôtre est appelé ici, non pas à former des individus, mais un ensemble. L’apôtre ne dit pas : Vous êtes des lettres, mais vous êtes la lettre de Christ, quoiqu’il soit parfaitement vrai que tout chrétien, individuellement, doive recommander Christ devant le monde. Telle était l’importance de l’Église, de l’Assemblée de Christ, aux yeux de Paul.
À la fin de ce chapitre, il confie aux Corinthiens le secret qui leur permettra d’être cette épître de Christ, secret simple et élémentaire, s’il en fut. Il faut que nous tous, car il s’agit toujours ici de l’ensemble des chrétiens (v. 18), nous ayons pour objet la contemplation du Seigneur. Cette contemplation nous transforme graduellement à son image glorieuse, de telle manière que le monde puisse ne voir que Lui dans son Assemblée.
Ce même chap. 3 nous présente une autre fonction tout aussi importante du ministère chrétien. Il a un enseignement en vue. C’est pourquoi l’apôtre résume l’ensemble de la doctrine chrétienne dans la parenthèse qui s’étend du v. 7 au v. 16. Cette doctrine est en contraste absolu avec ce que la loi avait enseigné jusque-là. Or, parmi les chrétiens de nos jours qui prétendent connaître la grâce, combien peu la comprennent réellement et la séparent entièrement de la loi !
Nous trouvons donc ici la différence entre le ministère de la lettre, c’est-à-dire de la loi, et le ministère de l’Esprit. L’apôtre commence par montrer que le ministère de la loi est un ministère de mort. La loi promet, sans doute, la vie à celui qui lui obéira, mais un homme est-il capable d’obtenir la vie, même promise ? Ce qui lui rend la chose impossible, c’est le péché. Or le péché n’est pas autre chose que la propre volonté et la désobéissance de l’homme. Ainsi la loi, tout en promettant la vie, est un ministère de mort. Elle condamne celui qui ne l’a pas suivie et le convainc de péché. Tout homme sous la loi se trouve donc sous un ministère qui le tue en prononçant sur lui la sentence de mort. C’est le sujet du chapitre 7 aux Romains. La loi anéantissait, une fois pour toutes, chaque prétention de l’homme à se mettre en règle avec Dieu et à obtenir la vie de cette manière.
En contraste avec le ministère de la mort, l’apôtre parle, non pas du ministère de la vie, mais de celui de l’Esprit, parce que le Saint Esprit, quand il agit, apporte la vie dans l’âme.
D’autre part, le ministère de la loi est un ministère de condamnation, tandis que le ministère de l’Esprit est un ministère de justice ; mais il ne s’agit pas d’une justice humaine et légale, car l’Esprit est venu nous annoncer la justice de Dieu. Tel est le contenu même de l’Évangile, et c’est pourquoi l’apôtre y met une si grande importance. Il montre comment Dieu a pu concilier sa haine pour le péché (une justice qui doit condamner le péché) avec son amour pour le pécheur. La justice de Dieu est ainsi une justice justifiante et non pas une justice en condamnation. Cette conciliation de deux choses inconciliables ne s’est trouvée qu’à la croix de Christ où la justice et la paix se sont entrebaisées. Il n’existait aucune chose pareille avant le ministère chrétien dont l’apôtre était le représentant. Ce ministère est le résumé de toutes les pensées de Dieu à l’égard des hommes. C’est par lui que nous apprenons à connaître Dieu dans toute sa gloire, dans toute la perfection de sa nature et de son caractère.
L’apôtre continue et dit : «Ce qui demeure subsistera... en gloire» (v. 11). Ce qui demeure, c’est le caractère même de Dieu. Il n’y a plus rien à ajouter à ce que Dieu nous a révélé de lui-même. Ce que Dieu est, sa gloire tout entière, s’est montrée dans l’oeuvre qu’il a accomplie à la croix pour nous. Cette oeuvre subsiste à jamais en gloire.
À la fin de ce passage, il est dit (v. 17) : «Là où est l’Esprit du Seigneur, il y a la liberté». La loi était un ministère d’esclavage qui rendait l’homme incapable de s’approcher de Dieu ; la grâce nous introduit en Sa présence, et nous pouvons y contempler sans voile la personne du Seigneur Jésus qui est devenu justice de Dieu pour nous. Comme nous l’avons vu déjà, avoir une pleine liberté pour entrer devant Lui, c’est posséder le secret par lequel on peut être réellement devant le monde une lettre de Christ. Considérer la gloire du Seigneur, nous transforme graduellement — de gloire en gloire — à Sa ressemblance. Cette transformation est partielle, car nous n’avons pas atteint la perfection et ne l’atteindrons jamais ici-bas.
4. 4 Chapitres 3 à 4:6
Nous avons vu l’autre jour que tout ce passage présente l’opposition la plus complète entre le ministère de la loi et le ministère de l’Esprit. Les deux ministères ne s’accordent en aucun point. Celui de la loi est un ministère de mort et ne peut faire autre chose que condamner. La loi, dans son caractère le moins sévère, telle que Dieu la fit connaître à Moïse lorsqu’il lui donna pour la seconde fois les tables de la loi, ne pouvait cependant que condamner. Un régime où la loi est mélangée de miséricorde, régime sous lequel, de fait, Israël se trouvait, car ce n’était pas le régime de la loi pure, est mortel pour ceux qui l’acceptent. Maintenant encore, ceux qui, n’étant pas Juifs et s’appelant chrétiens, se placent sous ce régime mixte, n’ont à en attendre qu’une condamnation absolue, la loi n’étant pas seulement un ministère de mort, mais un ministère de condamnation. L’homme se trouve sous la sentence prononcée par la loi, et cette sentence est irrévocable. Tout homme placé sous la loi n’y rencontre pas autre chose que cela, mais Dieu emploie ce moyen pour le convaincre de péché, afin de l’instruire sur son propre état et de l’amener à reconnaître que la grâce de Dieu seule peut fournir un sacrifice qui le délivre de la malédiction de la loi. Par la venue du Seigneur qui apportait la grâce aux pécheurs, tout le système de la loi, comme moyen de justification, est tombé.
Si la loi est un ministère de mort et de condamnation, le ministère chrétien est, comme nous l’avons vu, le ministère de l’Esprit et de la justice. Mais nous trouvons encore autre chose dans le passage que nous venons de lire : l’Évangile que l’apôtre présentait était l’Évangile de la gloire et apportait la connaissance de la gloire de Dieu dans la face de Jésus Christ (4:4, 6). Souvent, dans les écrits de Paul, il est parlé de l’Évangile (ou bonne nouvelle) de la gloire. Beaucoup y voient seulement l’idée que le Seigneur, après avoir accompli l’oeuvre de la rédemption, est monté dans la gloire. C’est en effet une bonne nouvelle, mais le terme va beaucoup plus loin. La gloire est l’ensemble de toutes les perfections de Dieu, mis en pleine lumière depuis la croix. Qui donc les fait connaître ? Qui les met en évidence ? Où puis-je les voir ? Dans la face de Jésus Christ. C’est en Lui que Dieu a manifesté sa haine contre le péché, sa justice qui devait le condamner, et l’a condamné, en effet, en la personne du Sauveur. C’est là que Dieu a manifesté sa sainteté, une sainteté qui ne peut pas voir le mal, ni le supporter en Sa présence. C’est là que Dieu a montré sa majesté, la grandeur du Dieu souverain qui daigne s’occuper de ses créatures. C’est là que Dieu a fait éclater son amour, le point culminant de ses perfections, un amour qui a pris envers nous le nom sublime de la grâce. La grâce est venue nous chercher au fond de l’abîme où le péché nous avait plongés, afin de nous sauver et de nous amener à Dieu. Voilà ce qu’est l’Évangile de la gloire de Dieu. Au chap. 3:18, l’apôtre nous montre que nous pouvons tous nous présenter devant cette gloire et nous en pénétrer. Pour nous, aucune crainte devant la gloire : la justice de Dieu a été pleinement satisfaite par le don de Christ. Comment cette justice m’atteindrait-elle en condamnation puisque, après avoir atteint mon Sauveur, elle l’a fait asseoir à la droite de Dieu ? C’est une chose passée ; l’amour de Dieu a éclaté une fois. envers moi. Je pense souvent à ce mot : éclaté. L’amour a été mis tout à coup en pleine lumière, à cet endroit sombre, où le Fils de Dieu, rejeté des hommes, a été crucifié. Puis-je voir un amour plus complet que celui qui a été montré à la croix ?
L’apôtre compare maintenant la gloire, manifestée sous la loi, avec la gloire, pleinement mise en lumière sous le régime de la grâce. Il prend pour cela l’exemple de Moïse (v. 7). Il y avait une certaine gloire sous la loi, mais non pas la gloire. Vous pouvez vous en rendre compte en lisant le chap. 33 de l’Exode (v. 18) où, après le péché du veau d’or, Moïse demande à Dieu de voir Sa gloire. L’Éternel répond que ce n’est pas possible (v. 20-23) ; Moïse ne pouvait voir la face de Dieu ; celui-ci demeurait seul dans sa propre gloire ; la nuée était sa demeure glorieuse et personne ne pouvait y pénétrer. Ce n’est que sous le régime de la grâce que les disciples peuvent entrer dans la nuée et entendre le Père leur parler de son Fils. Malgré cette interdiction, l’Éternel fait connaître à Moïse «toute sa bonté» (Exode 33:19), c’est-à-dire une partie de sa gloire, dans la mesure où elle pouvait être révélée sous la loi (34:6, 7). Il semblerait au premier abord que nous entrons ici sous le régime de la grâce. En aucune manière. Dieu qui ne peut se renier lui-même, consent à mettre en avant qu’il est un Dieu de miséricorde, de bonté, de patience, mais tout autant un Dieu «qui ne peut tenir le coupable pour innocent, et visite l’iniquité des pères sur les fils jusqu’à la troisième et quatrième génération».
Moïse, le médiateur de la loi, était, pour ainsi dire, le seul homme en Israël qui ne soit pas lui-même sous la loi. Il connaissait quelques traits précieux du caractère de Dieu en grâce et pouvait en jouir. Dans ces conditions-là, il sort de devant l’Éternel et se présente devant le peuple (34:29-35). Qu’arrive-t-il ? Sa face resplendissait ! Les quelques rayons de la gloire de Dieu qu’il avait reçus brillaient sur son visage. La vue de cette gloire va-t-elle attirer le peuple ? Bien au contraire : «Ils craignirent de s’approcher de lui». Ils avaient peur de la gloire, parce qu’elle contenait les éléments de leur jugement. Alors Moïse met un voile sur son visage. Ce fait est le point de départ de tout notre passage.
Mais Moïse ne met pas seulement un voile sur son visage, parce que les fils d’Israël n’auraient pas pu supporter cette lumière ; il le met, afin que le peuple n’arrête pas ses yeux sur la consommation de ce qui devait prendre fin. Ils ne devaient pas voir la gloire. S’ils l’avaient vue, telle que nous la voyons, ils seraient sortis de dessous le régime sous lequel Dieu les avait placés et auraient vu Christ dans toutes les ordonnances de la loi. Le régime de la loi aurait été terminé, et toute la suite des voies de Dieu envers les hommes aurait été interrompue. Nous, nous voyons dans Sa face tout l’ensemble de la gloire de Dieu en notre faveur, et nous y découvrons des choses merveilleuses. Dieu se sert de ces découvertes, pour nous faire apprécier le trésor que nous possédons en Lui, et pour nous remplir du désir d’imiter notre modèle.
L’apôtre nous montre ensuite que ce voile, qui est sur la face de Moïse, se trouve aussi, pour les Juifs, sur les Écritures. C’est un jugement sur eux, selon Ésaïe 6. La seule chose qu’ils devraient voir dans les Écritures, c’est Christ, et c’est précisément la seule qu’ils n’y voient pas. Ils savent combien de lettres et de syllabes les Écritures contiennent, mais ils ne connaissent rien de la personne du Sauveur. C’est ce que nous trouvons ici : Le voile est sur la face de Moïse qui aurait pu les renseigner sur la gloire de Dieu ; il est sur les Écritures qui leur auraient fait connaître Christ ; puis, une chose encore : le voile est sur leurs propres coeurs ! (v. 16).
Aujourd’hui, quelle différence ! Nous pouvons considérer, à face découverte, la gloire du Seigneur ! Le voile est ôté de la face de notre Moïse, le Seigneur Jésus ; nous pouvons nous tenir devant Lui, pour le contempler en pleine liberté. Par la rédemption, tout ce que Dieu est, toute sa gloire, a été manifesté dans le Fils de l’homme et dans le Fils de Dieu. Le résultat de cette contemplation est que nous sommes transformés en la même image. Bienheureux les chrétiens qui entrent, avec cette pleine liberté, devant la face découverte de Jésus Christ, et sont assez occupés de ses perfections pour les reproduire dans leur marche ici-bas ! Remarquez ces mots : «Nous tous, contemplant à face découverte». Point de voile sur la face de Jésus Christ, point de voile sur notre visage ! Nos yeux sont ouverts, ouverts maintenant ; les yeux d’Israël seront ouverts plus tard, selon Ésaïe 29:18, et selon notre passage (v. 16) : «Quand Israël se tournera vers le Seigneur, le voile sera ôté».
Bien-aimés, Dieu nous a ouvert les yeux, mais nous devons les tenir ouverts. Nous pourrions très facilement les fermer ; entre les mains de Satan, tout ce qu’il y a dans ce monde contribue à nous aveugler, si nous n’y prenons garde. Alors, perdant de vue la gloire de Dieu, il y a arrêt, et, qui pis est, recul dans notre développement spirituel, et le nom de Christ est vite effacé de nos coeurs pour être remplacé par les choses qui nous accréditent aux yeux du monde.
Après avoir parlé des Juifs, l’apôtre passe aux nations (4:1-6) : «Nous recommandant nous-mêmes à toute conscience d’homme devant Dieu». Paul faisait le contraire de ce que Moïse avait dû faire : Rayonnant de la gloire qu’il avait contemplée dans la face de Jésus Christ, il se présentait devant le monde, portant sur son visage, comme Étienne, le reflet de cette gloire, fruit de l’oeuvre de grâce accomplie pour les pécheurs. «Et si aussi», dit-il, «notre Évangile est voilé, il est voilé en ceux qui périssent, en lesquels le dieu de ce siècle a aveuglé les pensées des incrédules, pour que la lumière de l’Évangile de la gloire du Christ, qui est l’image de Dieu, ne resplendît pas pour eux» (v. 3, 4). Comment les nations ont-elles reçu cet Évangile ? Il y a aussi un voile sur leurs coeurs. Ne le constatons-nous pas aujourd’hui chez le monde qui nous entoure et qui, portant le nom de Christ, est entièrement étranger à l’Évangile de sa gloire ? En effet, Satan a réussi à jeter un voile épais sur le coeur des hommes qui se trouvent en contact avec la pleine lumière de l’Évangile.
L’apôtre (v. 6) était un vase d’élection, destiné à porter l’Évangile au monde. Dieu avait fait, à son égard, une chose merveilleuse, infiniment plus grande que même la création du monde, et certes, la création du monde n’était pas une chose sans conséquence ! Lors de la création, quand «il y avait des ténèbres sur la face de l’abîme... Dieu dit : Que la lumière soit. Et la lumière fut». La lumière traverse les ténèbres, et dès ce moment elle brille. Mais, quant au coeur de l’homme : «La lumière luit dans les ténèbres ; et les ténèbres ne l’ont pas comprise» (Jean 1:5). Aussi l’apôtre décrit-il ainsi l’état de son coeur lors de sa conversion : «C’est le Dieu qui a dit que du sein des ténèbres la lumière resplendît, qui a relui dans nos coeurs pour faire luire la connaissance de la gloire de Dieu, dans la face de Christ». La lumière de Dieu, bien autrement brillante que celle du soleil à la création, a relui dans le coeur de Saul de Tarse, et pareillement aussi au milieu des ténèbres de nos propres coeurs, pour se manifester là dans toute sa plénitude. C’est une nouvelle création, aussi supérieure à la première que le ciel est supérieur à la terre, une création qui a pour théâtre, non pas le monde tout entier, mais un pauvre coeur d’homme infirme et ténébreux, étroit et limité, que Dieu a rendu capable de le contenir Lui, ainsi que toute la lumière de sa gloire resplendissant dans la face d’un homme ! Les choses vieilles sont passées ; toutes choses sont faites nouvelles. Tout ce que Dieu est en amour est venu se loger dans un coeur d’homme, afin d’y resplendir. Mais dans quel but ? Non pas afin que l’apôtre (et nous aussi) la garde pour lui-même, mais afin qu’elle brille et resplendisse au-dehors de tous ceux auxquels le ministre de Christ la présente. Sans doute, l’apôtre en jouit profondément pour lui-même et, je l’espère, nous aussi, mais le but de la lumière est de resplendir au-dehors, tout en remplissant de son éclat les coeurs dans lesquels elle est venue briller.
Puissions-nous apprécier cette immense grâce ! Quelque faibles que nous soyons, et sans être des «vases d’élection» comme l’apôtre, Dieu nous a faits les dépositaires de tout ce qu’Il est dans la personne de Christ, afin que nous le manifestions au-dehors de notre vie, et que des âmes nouvelles soient amenées à sa connaissance, ou que d’autres soient encouragées par nous dans le chemin de la foi et du témoignage.
5. 5 Chapitre 4:7 à 18
Plus je lis les chap. 3 à 5 de cette épître, plus je suis frappé du sujet dont ils sont remplis. Ce sujet est la gloire. Permettez-moi donc d’y revenir. On ne peut du reste jamais assez en parler, car il faut que tout chrétien en ait une vue claire et nette. Sans doute, entrer dans la gloire, c’est entrer dans le lieu de la lumière parfaite, mais nous sommes trop habitués à considérer la gloire sous cet aspect assez vague, si bien que, pour la plupart d’entre nous, la gloire c’est le ciel. La chose est si vraie que vous entendez continuellement des enfants de Dieu dire, quand ils ont perdu un de leurs bien-aimés : Il est entré dans la gloire. Je suis souvent tenté de répondre : Vous vous trompez ; il n’y est pas, et vous ignorez ce qu’est la gloire. Pourquoi donc les saints qui nous ont quittés n’y sont-ils pas ? C’est parce que, même en nous quittant, ils ne sont pas encore semblables à Christ. On n’est pas comme Lui, malgré la jouissance de sa présence, tant qu’on est encore absent du corps. Il est le seul homme qui, étant ressuscité, ait atteint la perfection. Or, la perfection de Dieu lui-même, la perfection absolue, l’ensemble des perfections divines, constitue la gloire. On peut la voir en Christ qui, dans son corps glorifié, est le porteur de toutes ces perfections. Un saint délogé est sans doute en dehors de la scène du péché, jouissant du repos auprès du Seigneur, mais il ne sera dans la gloire que lorsque «le corps de son abaissement sera transformé en la conformité du corps de la gloire de Christ» (Phil. 3:21). Il y a donc encore «quelque chose de meilleur pour nous», une perfection glorieuse, que n’ont pas atteinte ceux qui nous ont devancés auprès du Seigneur, et dans laquelle nous entrerons tous ensemble à sa venue (Héb. 11:40).
Lorsque nous avons abandonné le vague qui s’empare si facilement de nous au sujet des choses célestes, la pensée de la gloire prend une tout autre valeur pour nos âmes. Dans ces chapitres, il nous est parlé de la gloire du Seigneur (chap. 3), de la gloire de Dieu (chap. 4), et de notre propre gloire (chap. 5). Quand il s’agit de la gloire du Seigneur, remarquez tous les noms qui Lui sont donnés dans ces chapitres : Il est le Seigneur, le Seigneur Jésus Christ, le Sauveur, Christ ; enfin il est Jésus. Le coeur de l’apôtre est tellement occupé de Sa personne qu’il ne peut, pour ainsi dire, faire autrement que le nommer de tous les noms qui, venant à sa pensée, expriment ce que Jésus est pour lui, Paul, et ce qu’il doit être pour nous.
Nous avons vu, à la fin du chap. 3, que le grand privilège chrétien est de pouvoir contempler les gloires de Christ, cachées autrefois, mais pleinement manifestées maintenant. Si un homme juste, saint, un homme au coeur aimant, gardait toutes ces qualités au-dedans de lui, à quoi serviraient-elles ? La gloire n’est pas d’avoir ces qualités, mais de les montrer, de les mettre en lumière. Or le point culminant de la gloire, c’est l’amour. Si le Seigneur avait traversé ce monde sans montrer son amour, où aurait été sa gloire ? Dans le chap. 1 de l’évangile de Jean, l’apôtre dit : «Et nous vîmes sa gloire (il parle de Christ, la Parole faite chair), une gloire comme d’un Fils unique de la part du Père». Sa gloire ne pouvait être mesurée que par ce qu’il y avait dans le coeur du Père, envoyant ici-bas son Fils unique pour nous. Sa gloire, c’était son amour, mais son amour apparaissant sous forme de grâce et de vérité pour le pécheur. L’apôtre pouvait dire, en considérant cet homme, abaissé au-dessous du niveau d’une femme pécheresse, au puits de Sichar, cet homme humilié, esclave volontaire de tous : «Nous avons vu Sa gloire», mais cette gloire, quelque grande que soit sa manifestation, n’a pas resplendi de tout son éclat quand le Seigneur marchait au milieu des hommes. C’est pourquoi, il dit, en parlant de sa croix : «Maintenant le Fils de l’homme est glorifié, et Dieu est glorifié en Lui» (Jean 13:31). Or Dieu a été tellement satisfait de la manifestation de cette gloire, qu’il a pris Christ dans le tombeau, l’a élevé à sa droite et lui a donné une gloire qui, maintenant, remplit le ciel tout entier. Entré là sans voile, j’y ai vu l’amour, consommé maintenant par son sacrifice, pour ne parler que d’une de ses gloires. Si je redescends du ciel où je l’ai contemplé, pensez-vous que je puisse montrer, dans mes rapports avec les hommes, autre chose que de l’amour ? Montrerai-je un esprit de haine, d’animosité, de dénigrement ? Et de plus, pensez-vous qu’en sortant de là je passerai à travers le monde, indifférent, comme cela arrive si souvent, à l’incrédulité des hommes au sujet de mon Sauveur, ou indifférent à leur propre misère ? Je souffrirai, n’est-ce pas ? mais je n’aurai qu’une pensée, leur témoigner de l’amour. C’est ce que nous verrons au chap. 5. Après être entré dans la pleine lumière de la présence du Seigneur, l’apôtre dit : «L’amour du Christ nous étreint». Il m’a été manifesté ; je désire le manifester à d’autres. En attendant, je suis manifesté à Dieu, et j’espère l’être aussi à vos consciences. Voilà ce qu’était la gloire pour l’apôtre.
Je désire encore faire une remarque au sujet de ce chapitre, et de fait au sujet de toute cette seconde épître aux Corinthiens. On pourrait s’étonner de ce que, parlant de n’avoir aucune confiance en lui-même et de n’être rien, la personnalité de Paul soit cependant en scène du commencement à la fin. C’est que son sujet est le ministère, et que le ministère est montré dans sa personne. Il suivait fidèlement son Maître dans le service de la Parole, dans les secours, les encouragements, les consolations, les appels adressés aux âmes, et dans la répression du mal. S’il était devenu un ministre de Christ, ce n’était pas son oeuvre à lui ; c’était absolument l’oeuvre de Dieu, et il pouvait en parler comme d’une création nouvelle dans laquelle lui n’avait aucune part, pas plus que l’ancienne création n’était l’oeuvre du monde créé. Aussi a-t-il une pleine liberté pour parler de lui-même. Le Dieu qui a voulu que la lumière soit, a voulu Saul de Tarse pour porter l’Évangile dans ce monde et a relui dans son coeur. Cet Évangile, ce n’est plus ici la gloire de Christ, mais la gloire de Dieu. Tout ce qu’est le Dieu invisible a été révélé dans la face d’un homme ! Merveilleuse connaissance donnée à l’homme ! Y eut-il jamais rien de semblable ? Un regard sur Christ homme, me fait découvrir Dieu dans la plénitude de ses perfections et de son amour comme Père ! C’est pourquoi le Seigneur dit à Philippe : «Qui m’a vu, a vu le Père !» (Jean 14:9).
Je dirai maintenant quelques mots sur les versets 7 à 18. On y trouve, comme nous l’avons dit, la personnalité du ministre. Il vient nous exposer son histoire morale, nous dire ce qu’il est personnellement comme porteur du ministère de Christ. Va-t-il nous parler de ses propres qualités et de ses perfections ? En aucune manière. Quand, à la fin de l’épître, il parlera de ce qu’il a souffert et de la manière dont il lui a été donné de réaliser son apostolat, nous l’entendrons parler de lui-même, pour ajouter : «Je parle en insensé» (11:21). S’il est obligé de se louer lui-même, il s’accuse de folie, et il n’use d’un tel procédé que pour convaincre les Corinthiens de la folie de ceux qui cherchent à les détourner de l’Évangile.
Ici, quand il parle de lui-même, Paul dit : «Nous avons ce trésor dans des vases de terre, afin que l’excellence de la puissance soit de Dieu, et non pas de nous». Des vases de terre ! Tout ce qu’il y a de plus ordinaire, de plus commun. Un vase de fer vaut mieux qu’un vase de terre ; un vase d’airain, mieux qu’un vase de fer ; un vase d’or ou d’argent, mieux qu’un vase d’airain. Paul s’attribue la qualité d’un vase d’argile. Mais pourquoi Dieu a-t-il choisi une telle enveloppe pour y mettre son trésor ? «Afin que l’excellence de la puissance soit de Dieu, et non pas de nous». Que serait-il arrivé, si Paul avait été autre chose qu’un vase de terre ? D’un côté, il aurait pu s’attribuer l’excellence de la puissance, de l’autre, le trésor n’aurait pu resplendir au-dehors. Il fallait donc un vase de terre, mais plus encore un vase qui puisse être brisé. Nous en avons un bel exemple quand les compagnons de Gédéon vont combattre Madian. Leurs torches étaient conservées dans des cruches vides et, pour faire resplendir la lumière, ils brisèrent leurs cruches. Dans le cas de Gédéon, il s’agissait du combat contre le monde ; la lumière qui remportait la victoire ne pouvait briller dans tout son éclat qu’à part toute intervention de puissance humaine. Dans notre passage, il s’agit de l’influence du ministère sur les enfants de Dieu. Le trésor de lumière et de vie que Dieu voulait communiquer aux Corinthiens était contenu dans un vase de terre. Paul décrit comment Dieu s’y est pris avec lui, non pas pour briser complètement le vase, mais pour le fêler. La tribulation, la perplexité, les persécutions, s’adressaient au vase, et il fallait qu’il en fût ainsi, mais il n’était ni réduit à l’étroit, ni sans ressource, ni abandonné, parce que Dieu veillait sur son trésor, en vue du développement de la vie de Christ dans les Corinthiens. Dieu s’occupait ainsi de son cher serviteur, afin que, par lui, la lumière de la gloire de Dieu dans la face de Jésus Christ pénêtre dans le coeur de ses enfants dans la foi. Mais si Dieu agissait ainsi envers lui, Paul, de son côté, n’était point inactif. Il dit : «Portant toujours, partout, dans le corps, la mort de Jésus, afin que la vie aussi de Jésus soit manifestée dans notre corps». Ce : portant toujours, partout, est très beau. L’apôtre était lui-même actif, pour porter en tout lieu et à tout instant la mort de Jésus, c’est-à-dire le caractère moral de Christ, quand il s’offrait lui-même à Dieu, dans une obéissance parfaite. Il le faisait librement et ne laissait pas un moment s’écouler sans le faire. Il voulait qu’en tout on voie en lui la mort de cet homme venu ici-bas pour mourir, et l’apôtre réalisait cela par la mort au péché, au monde, à la chair, à lui-même — dans une dépendance complète de Dieu, séparé par la mort de tout ce à quoi il appartenait autrefois : ainsi la vie que ce vase renfermait était manifestée.
Mais de plus, l’apôtre montre ici que Dieu avait soin de faire lui-même ces choses, là où, pauvres et faibles que nous sommes, nous serions en danger de ne pas les réaliser suffisamment. Ne faisons-nous pas, en effet, continuellement l’expérience que, s’il s’agit de marcher dans la dépendance du Seigneur ici-bas et d’y représenter Christ, nous y manquons ? Combien cela est vrai ; combien cela m’humilie ! Mais Dieu va prendre soin de moi. L’apôtre dit : «Car nous qui vivons, nous sommes toujours livrés à la mort pour l’amour de Jésus, afin que la vie aussi de Jésus soit manifestée dans notre chair mortelle» (v. 11). «Livrés à la mort !» Ce n’est plus Paul qui se livre ; c’est Dieu qui le livre ! Comme il l’a dit en 1 Cor. 15:31 : «Je meurs chaque jour». Dieu a soin d’appliquer la sentence de mort à nos circonstances. Il faut que nous passions à travers les difficultés, le deuil, la mauvaise réputation, que nous soyons humiliés de toute manière, que nous soyons malades... que sais-je encore ? afin que la vie de Jésus soit manifestée en nous. Il y a, en cela, une grande différence entre nous et l’apôtre. Ce dernier ne traversait pas ces choses pour lui-même, mais pour ses chers Corinthiens. Comme nous l’avons vu, au chap. 1, consolé pour les autres, nous le voyons ici, un pauvre vase brisé pour les autres. Il pense si peu à lui-même qu’il se réjouit de traverser tout cela, afin que cette pure lumière de Christ, contenue dans le vase de terre, puisse être versée en d’autres pour les remplir de vie. Celui qui s’approchait de Paul, que voyait-il ? Le grand apôtre des gentils ? Non, mais un pauvre homme, extérieurement misérable, souffleté par Satan, portant sur son corps des stigmates qui le rendaient méprisable aux yeux des hommes, mais plus on considérait ce vase brisé, plus on recevait de son contenu, et ce contenu était Christ. Alors le coeur était rempli de reconnaissance et de joie !
Je voudrais encore faire une remarque sur les derniers versets de ce chapitre : «C’est pourquoi nous ne nous lassons point ; mais si même notre homme extérieur dépérit, toutefois l’homme intérieur est renouvelé de jour en jour» (v. 16). L’homme intérieur est toujours le nouvel homme (Éph. 3:16 ; 4:23) ; il est renouvelé par l’Esprit. Nous avons vu «la gloire de Dieu dans la face de Jésus Christ», puis Dieu travaillant dans son apôtre bien-aimé, pour que cette gloire aille au-dehors atteindre et remplir le coeur des saints. Maintenant nous apprenons que Dieu a amené l’apôtre, à travers toutes ces tribulations, pour le faire jouir lui-même de la gloire. Il veut que la gloire resplendisse aussi dans le coeur de son bien-aimé serviteur. Celui-ci met sur un plateau de la balance les tribulations, sur l’autre la gloire. Immédiatement la gloire descend de tout son poids jusqu’au fond du coeur de l’apôtre pour qu’il en ait l’entière jouissance. La tribulation a produit «un poids éternel de gloire» souverainement excellente. Le coeur de Paul n’est donc pas seulement occupé à manifester au-dehors la gloire de Christ, mais il en jouit pour lui-même «en mesure surabondante !» «Un poids éternel de gloire !» Je ne crois pas qu’on puisse employer des expressions plus fortes et plus absolues pour exprimer la jouissance actuelle de la gloire. L’apôtre ne regarde pas en avant vers un jour où il pourra en jouir dans la perfection. Elle remplit son coeur. Dans ce coeur auquel le monde ne peut rien offrir, qui est brisé de toutes manières, il n’y a pas de place pour autre chose. La gloire souverainement excellente s’en est emparée, personnifiée dans un homme glorieux dans le ciel !
Au chap. 5, l’apôtre montre qu’il aura la gloire pour son corps, mais il parle ici de la gloire actuelle pour son âme. Paul était un homme qui n’arrêtait pas, comme nous, ses yeux sur une quantité d’objets d
ENTRETIENS sur la SECONDE ÉPÎTRE aux CORINTHIENS
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Ecrit le 21 déc.03, 07:03-
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