Exhortation Apostolique Sacramentum Caritatis (I)
L’Eucharistie : rien qu’un mystere d’amour !
Six mois après la "controverse de Ratisbonne", voici que se rejoue un scénario sans surprise : le Pape s’exprime en une longue méditation, les journalistes s’emparent de quelques positions à fort contenu passionnel, ils les retranchent de la riche pensée dans laquelle elles trouvent leur sens, les érigent en slogans outrés… privant ainsi tous ceux qui, comme eux, ne prendront pas le temps de méditer les 140 pages du document et d’en recueillir la vérité profonde.
"Le Pape ferme la porte…", accusent les mêmes qui s’emploient à barricader de leurs gros titres l’entrée dans ce "Mystère d’Amour" (Sacramentum Caritatis) dont Benoît XVI ouvre le porche à la méditation des fidèles catholiques. Aussi avons-nous un devoir de vérité : Quels sont précisément la nature et le contenu de cette longue exhortation apostolique ? De quelle manière les "questions sensibles" y sont-elles abordées ? Qu’en devons-nous retenir, nous catholiques, à qui ce discours s’adresse ? Nous répondrons cette semaine à la première question.
Un document étonnamment consensuel
"Sacrement de l'amour, la sainte Eucharistie est le don que Jésus-Christ fait de lui-même, nous révélant l'amour infini de Dieu pour tout homme. Dans cet admirable Sacrement se manifeste l'amour “le plus grand”, celui qui pousse “à donner sa vie pour ses amis"."
Ainsi commence, par la révélation de "l’amour infini de Dieu pour tout homme", l’Exhortation apostolique Sacramentum Caritatis dans laquelle le Pape Benoît XVI fait connaître au peuple chrétien les conclusions du Synode des évêques, tenu à Rome à l’automne 2005, sur le thème de l’Eucharistie, suivant l’ultime désir du Pape Jean-Paul II.
Peu de commentateurs auront noté le caractère largement consensuel de ce texte, fruit d’intenses échanges fraternels entre 250 évêques du monde entier, 32 experts, 26 auditeurs laîques et délégués de communautés non catholiques. Par cette exhortation "post-synodale", l’évêque de Rome, Chef du Collège des évêques, se propose de synthétiser "la richesse multiforme de réflexions et de propositions" exprimées par les Pères synodaux avec une grande variété de sensibilités. Ce faisant, le Pape ne ‘ferme pas les portes’, il les ouvre au contraire aux préoccupations les plus diverses de toute la catholicité !
Ces nombreuses réflexions, Benoît XVI les organise suivant un plan limpide : l’Eucharistie est un mystère à croire (I), à célébrer (II) et à vivre (III). Ceux qui désirent croire, célébrer et vivre ce mystère d’amour peuvent ainsi pénétrer par la bonne porte dans l’Exhortation !
Un mystère à croire : "Il est grand le Mystère de la foi !"
Une première partie énonce quelques profondes convictions de foi touchant le mystère de l’Eucharistie. Qu’on n’y cherche pas, cependant, une catéchèse complète sur ce sacrement. On la trouvera plutôt, avec toutes les références à la Tradition, dans la dernière encyclique du pape Jean-Paul II, Ecclesia de Eucharistia, "par laquelle il nous a laissé une référence magistérielle sûre concernant la doctrine eucharistique et un ultime témoignage sur la place centrale que ce divin sacrement occupait dans son existence."
Dans cette exhortation, le Saint-Père reprend plutôt les points de doctrine évoqués par les Pères synodaux, en les plaçant à la lumière de son encyclique Deus caritas est ("Dieu est amour"), c’est-à-dire dans la perspective de l’amour-agapè que Dieu réserve à l’homme.
Le don du Dieu d’Amour
Toute vérité de foi, en effet, prend source en Dieu qui veut faire comprendre aux hommes son Amour. "Dieu est Amour", et cet Amour s’appelle Trinité, c’est-à-dire communion d’amour du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Cet Amour (agapè), la Trinité le partage gracieusement avec les hommes afin qu’ils le reçoivent en eux, que cette grâce les unisse à Elle et les sauve, leur procurant un bonheur vraiment divin (SC 8). Aussi, la foi chrétienne et chacune de ses exigences morales ne sont données à l’homme que pour lui permettre de vivre avec Dieu une alliance d’Amour.
Le Sacrifice de l’Alliance nouvelle
Le pacte par lequel Dieu a scellé cette alliance avec les hommes, c’est le Sacrifice de la Croix, "dans lequel Dieu se donne pour relever l’homme et le sauver – tel est l’amour dans sa forme la plus radicale." Jésus est ainsi le véritable Agneau pascal, "qui s’est spontanément offert lui-même en sacrifice pour nous, réalisant ainsi la nouvelle et éternelle Alliance" (SC 9). Il est l’Agneau immolé, victorieux de la mort par sa Résurrection, qui mène à son achèvement la Pâque juive, figure annonciatrice de l’Alliance nouvelle.
Or "l’Eucharistie contient en elle cette nouveauté radicale, qui se propose de nouveau à nous dans chaque célébration." A chaque Messe, les fidèles sont invités à participer au Sacrifice définitif de l’Agneau, qui est toujours présent dans le Sacrement de l’Eucharistie, par la puissance de l’Esprit Saint. "L’Eucharistie nous attire dans l’acte d’offrande de Jésus… Il nous attire en Lui" (SC 11).
L’Eucharistie fait l’Eglise
Lorsque Jésus a donné sa vie sur la Croix, il "a engendré l’Eglise comme son Epouse et son Corps" (SC 14). L’Eucharistie, qui est la présence actuelle du Sacrifice de la Croix, donne vie chaque jour à l’Eglise : "l’Eglise vit de l’Eucharistie", selon le titre de l’encyclique de Jean-Paul II.
Si l’Eucharistie est la source de l’Eglise, tous les actes par lesquels l’Eglise répand l’Amour de Dieu plongent leurs racines dans l’Eucharistie. Le Saint-Père décrit alors le lien vital entre l’Eucharistie et chacun des sacrements : l’Eucharistie couronne l’initiation chrétienne (SC 17-19) ; elle instaure une authentique communion avec Dieu et avec nos frères, communion que restaure de manière merveilleuse le sacrement de Réconciliation (SC 20-21) ; l’Eucharistie est offerte, en la personne du Christ et au nom de toute l’Eglise, par ces "humbles serviteurs" qui participent d’une manière spécifique au sacerdoce de la Nouvelle Alliance : les Èvêques et les prêtres qui, par leur célibat consacré, sont identifiés au "Christ Epoux, qui donne sa vie pour son Epouse" (SC 23-24) ; comme "sacrement de la charité" et "banquet des noces" entre le Christ et son Eglise, l’Eucharistie signifie et "fortifie d’une manière inépuisable l’unité et l’amour indissoluble de tout mariage chrétien" (SC 27-29).
Le signe du banquet éternel
Enfin, l’Eucharistie donne de goûter déjà aux fruits du festin éternel, et cet avant-goût fortifiant "vient en aide à notre liberté en chemin" vers le Bonheur éternel (SC 30-32)
Ce Don de Dieu, dont la richesse nous est décrite en de longues et belles pages, c’est la Vierge Marie qui nous apprend la bonne manière de l’accueillir, elle qui a si parfaitement participé à l’offrande de son Fils et en a, la première, recueilli tous les fruits (SC 33).
Un mystère à célébrer : la beauté de l’action liturgique
Lex orandi, lex credendi
Le Synode a mis en évidence le lien que toute la Tradition a établi entre la juste manière de prier (lex orandi) et la juste manière de croire (lex credendi), en "soulignant le primat de l’action liturgique" (SC 34). Quand l’Eglise célèbre les mystères liturgiques, elle formule et explique sa foi.
Beauté et liturgie
Le Saint-Père offre alors une magnifique méditation sur la beauté dans la liturgie. La beauté que la foi nous invite à contempler ne consiste pas "en une simple harmonie de formes", en un choix esthétique. Ici, dit-il, c’est la splendeur de la gloire de Dieu qui "dépasse toute beauté présente dans le monde. La beauté véritable est l’Amour de Dieu, qui s’est définitivement révélé à nous dans le mystère pascal."
Ce mystère de beauté est l’œuvre du Christ ressuscité qui inclut l’Eglise dans son action, cette Action sacrée par excellence que toute la liturgie doit s’employer à représenter de manière resplendissante. Elle est en effet "l’expression très haute de la gloire de Dieu et elle constitue, en un sens, le Ciel qui vient sur la terre." (SC 35-37).
L’art de bien célébrer
On a souvent opposé, dans un passé récent, "l’art de bien célébrer", c’est-à-dire la fidélité au rituel liturgique, et la "participation active des fidèles". Pourtant, on ne peut pas concevoir de participation vraiment active et intérieure des fidèles sans une célébration qui favorise, avec ses langages propres, le sens du sacré : paroles liturgiques forgées par deux millénaires d’histoire et de foi, architecture sacrée, noblesse des lieux et des objets de culte, musique et chant sacrés, "valorisant de manière appropriée le chant grégorien, en tant que chant propre de la liturgie romaine" (SC 38-42).
La participation active et authentique à la liturgie
Après avoir mis en lumière quelques parties significatives du rite eucharistique, avec une attention particulière à la digne manière de recevoir la sainte Communion (SC 43-51), Benoît XVI livre une réflexion originale sur la "participation authentique" des fidèles à la célébration eucharistique.
D’emblée, il écarte une participation extérieure qui consisterait à donner à chacun quelque chose à "faire" : "En réalité, la participation active souhaitée par le Concile doit être comprise en termes plus substantiels, à partir d’une plus grande conscience du mystère qui est célébré" (SC 52). Aussi rappelle-t-il le primat qui revient aux ministres sacrés dans la présidence et les tâches spécifiques de l’action sacrée (SC 53). Enfin, avec les Pères synodaux, il met en relief "les conditions personnelles dans lesquelles doit se trouver tout fidèle pour une participation fructueuse" : un esprit de constante conversion, le recueillement et le silence, le jeûne et, quand cela est nécessaire, la confession sacramentelle, l’esprit missionnaire (SC 55).
Le Pape revient ensuite en profondeur sur ce propos en rappelant la manière par laquelle les fidèles pourront "entrer toujours mieux dans les mystères qui sont célébrés" et qu’il appelle un "itinéraire mystagogique" (chemin à l’intérieur du mystère). Cet itinéraire est balisé par les rites, les attitudes et les signes liturgiques, qui recèlent toutes les richesses de la foi et de la vie spirituelle, mais à l’égard desquels une grande œuvre d’éducation et de catéchèse reste encore à accomplir (SC 64-65).
Adoration et piété eucharistique
Célébrer le Mysterium caritatis requiert enfin une "attitude d’adoration envers Celui que nous recevons" en communion. Par cette adoration profonde, "nous devenons un seul être avec Lui et nous goûtons par avance la beauté de la liturgie céleste" (SC 66). Aussi la pratique de l’adoration eucharistique doit-elle être vivement louée et encouragée, comme aussi tout ce qui favorise la piété eucharistique (SC 67-69).
Un mystère à vivre : le Pain de la vie
Une vie transformée par l’Eucharistie
Ainsi doit-être la vie chrétienne. En affirmant que "celui qui me mange vivra par moi", le Christ nous fait comprendre qu’il nous attire dans sa propre vie. "Ce n’est pas l’aliment eucharistique qui se transforme en nous, mais c’est nous qui sommes mystérieusement changés par lui." Aussi l’Eglise, et chacun de ses membres, participent-ils au propre culte du Christ ; or ce culte est un "sacrifice" – une "action qui rend sacré" –, si bien que toute la vie chrétienne est rendue sacrée et devient un culte agréable à Dieu, une vie "intrinsèquement eucharistique" (SC 70-71).
Une vie dominicale
Cette influence intérieure de l’Eucharistie sur la vie du chrétien fait de lui un homme "vivant selon le dimanche" (S. Ignace d’Antioche). "Le dimanche est donc le jour où le chrétien retrouve la forme eucharistique de son existence (…)". “Vivre selon le dimanche” signifie vivre dans la conscience de la libération apportée par le Christ et accomplir son existence comme l’offrande de soi à Dieu" (SC 72). Et de rappeler avec profondeur le sens du précepte dominical et du repos qui y est attaché (SC 73-74). Toute la vie du chrétien, et singulièrement sa vie dans la communauté humaine, se trouve ainsi convertie par la célébration eucharistique dans laquelle chaque vocation chrétienne retrouve sa "forme" et sa "cohérence" eucharistiques (SC 76-83).
Un mystère pour la vie du monde
L’Exhortation s’achève par un envoi en mission. "En effet, nous ne pouvons garder pour nous l’amour que nous célébrons dans ce Sacrement. Il demande de par sa nature d’être communiqué à tous". Aussi, "nous ne pouvons nous approcher de la Table eucharistique sans nous laisser entraîner dans le mouvement de la mission qui, prenant naissance dans le Cœur même de Dieu, veut rejoindre tous les hommes" (SC 84).
La mission première qui nous vient des saints Mystères est de rendre témoignage par une vie chrétienne cohérente – jusqu’au martyre – dans les milieux où le Seigneur veut que nous l’annoncions (SC 85). Le Saint-Père rend grâce pour tous les chrétiens qui apportent ce témoignage au péril de leur vie, dans les régions où la liberté de culte leur est déniée (SC 87). Ils sont comme "le froment de Dieu" moulu par leurs persécuteurs pour devenir, dans le martyre, "le pur pain du Christ", vraiment eucharistique.
Ensuite, le mystère eucharistique nous enseigne à donner notre vie "jusqu’au bout" pour nos frères, à nous laisser manger comme un pain rompu "pour que le monde ait la vie" (SC 88). Transformés ainsi en "pain vivant" par la communion au Pain de Vie, nous devons étendre cette communion à tous les hommes pour lesquels le Christ a versé son sang. L’Eucharistie nous donne ainsi des forces nouvelles pour édifier la "civilisation de l’amour", depuis l’humble geste du pain partagé avec les plus pauvres jusqu’à "un engagement courageux dans les structures de notre monde" selon le réalisme et l’équilibre de la doctrine sociale de l’Eglise (SC 89-91).
Le Saint-Père souhaite enfin la publication d’un Compendium sur l’Eucharistie qui permette "que le mémorial de la Pâque du Seigneur devienne chaque jour davantage source et sommet de la vie et de la mission de l’Eglise."
A venir… Sacramentum Caritatis (II) : Les questions disputées
Thomas Diradourian, prêtre +
Exhortation Sacramentum Caritatis (synthèse)
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Le christianisme est une religion monothéiste et abrahamique, issue d'apôtres célébrant la vie et les enseignements de Jésus. Les chrétiens croient que Jésus de Nazareth est le Messie que prophétisait l'Ancien Testament, et, hormis quelques minorités, Fils de Dieu, ou Dieu incarner, néanmoins Prophete.
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Exhortation Sacramentum Caritatis (synthèse)
Ecrit le 28 mars07, 22:10
Modifié en dernier par VexillumRegis le 28 mars07, 22:18, modifié 1 fois.
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Ecrit le 28 mars07, 22:10
Exhortation Apostolique Sacramentum Caritatis (II)
Les questions disputées…
Après notre lecture d’ensemble de l’Exhortation Apostolique Sacramentum Caritatis (SC) de Benoît XVI, il est bon de revenir cette semaine sur quelques rappels qui ont particulièrement ému les médias et le grand public, mais dont le sens apparaît lumineux dès lors qu’on prend la peine de les placer dans la perspective catholique, où l’Eucharistie est tout à la fois Mystère, Offrande de soi et Communion de charité. Ainsi…
ON PARLE DU RETOUR DE LA MESSE EN LATIN ?
« Pour mieux exprimer l’unité et l’universalité de l’Église, je voudrais recommander ce qui a été suggéré par le Synode des Évêques, en harmonie avec les directives du Concile Vatican II : excepté les lectures, l’homélie et la prière des fidèles, il est bon que ces célébrations soient en langue latine ; et donc que soient récitées en latin les prières les plus connues de la tradition de l’Église, et éventuellement que soient exécutées des pièces de chant grégorien. De façon plus générale, je demande que les futurs prêtres, dès le temps du séminaire, soient préparés à comprendre et à célébrer la Messe en latin, ainsi qu’à utiliser des textes latins et à utiliser le chant grégorien ; on ne négligera pas la possibilité d’éduquer les fidèles eux-mêmes à la connaissance des prières les plus communes en latin, ainsi qu’au chant en grégorien de certaines parties de la liturgie. » (SC 62)
La requête du Saint-Père vise avant tout les Messes célébrées à l’occasion des grands rassemblements, auxquels prennent part des fidèles de cultures et de langues différentes. On comprendra facilement que l’utilisation du latin, « langue universelle de l’Église romaine », permette de « mieux exprimer l’unité et l’universalité de l’Église ». En outre, comme langue cultuelle et sacrée, le latin est propre à suggérer combien l’Eucharistie est un Mystère surnaturel.
Ce rappel n’est en aucun cas un « retour en arrière », mais une simple marque de fidélité aux intentions du concile Vatican II : s’il découle du bon sens que les lectures, l’homélie et la prière universelle soient prononcées dans les langues maternelles, « on veillera, écrit Vatican II, à ce que les fidèles puissent dire ou chanter ensemble en langue latine les parties de l’ordinaire de la Messe qui leur reviennent. » Sur ce point, comme sur celui du chant grégorien, il est vrai que le Concile n’aura guère été suivi en France, d’où l’émotion suscitée par ce simple rappel... de bon sens !
D’ACCORD, MAIS LA COMMUNION POUR LES DIVORCES-REMARIES ?
« Si l’Eucharistie exprime le caractère irréversible de l’amour de Dieu pour son Église dans le Christ, on comprend pourquoi elle implique, en relation au sacrement de Mariage, l’indissolubilité à laquelle tout véritable amour ne peut qu’aspirer. L’attention pastorale que le Synode a réservée aux situations douloureuses dans lesquelles se trouvent de nombreux fidèles qui, après avoir célébré le sacrement de Mariage, ont divorcé et contracté une nouvelle union, est donc plus que justifiée. Il s’agit d’un problème pastoral épineux et complexe, une vraie plaie du contexte social actuel, qui touche de manière croissante les milieux catholiques eux-mêmes. Par amour de la vérité, les Pasteurs sont obligés de bien discerner les diverses situations, pour aider spirituellement de la façon la plus appropriée les fidèles concernés. Le Synode des Évêques a confirmé la pratique de l’Église, fondée sur la Sainte Écriture (cf. Mc 10, 2-12), de ne pas admettre aux sacrements les divorcés remariés, parce que leur état et leur condition de vie contredisent objectivement l’union d’amour entre le Christ et l’Église, qui est signifiée et mise en œuvre dans l’Eucharistie. »
Il y a là une question de cohérence. La vérité de l’Eucharistie, c’est que ce sacrement signifie le don d’amour total et irréversible que Jésus fait de son Corps à l’Église. La vérité du mariage chrétien, c’est que, dans ce sacrement, les époux signifient par le don total qu’ils se font de leur vie le don total que Dieu fait aux hommes de sa propre vie. Le mariage et l’Eucharistie signifient donc la même vérité : celle de l’amour absolument fidèle – et on sait au prix de quelles souffrances ! – que Dieu veut offrir aux hommes.
Quand, d’une manière qu’il revient à Dieu seul de juger, l’union de deux époux à été non seulement rompue mais remplacée par une seconde union de type conjugal, on comprend aisément que cette situation « contredit objectivement l’union d’amour entre le Christ et l’Église, qui est signifiée et mise en œuvre dans l’Eucharistie », car l’amour de Dieu pour chacun de nous est unique, total et définitif. Dans une telle situation, la Communion eucharistique serait détournée de sa signification.
Si, pour ce motif de cohérence, les personnes divorcées-remariées (comme du reste tout chrétien dont le cœur serait dans une situation d’infidélité à l’amour de Dieu) ne peuvent participer à la Communion, elles n’en sont pas pour autant «excommuniées», comme trop souvent on l’entend dire, et faussement. Cela est très clairement souligné par le Pape et par les évêques qui connaissent de près ces situations complexes et douloureuses :
« Toutefois, les divorcés remariés, malgré leur situation, continuent d’appartenir à l’Église, qui les suit avec une attention spéciale, désirant qu’ils développent, autant que possible, un style de vie chrétien, par la participation à la Messe, mais sans recevoir la Communion, par l’écoute de la Parole de Dieu, par l’adoration eucharistique et la prière, par la participation à la vie de la communauté, par le dialogue confiant avec un prêtre ou un guide spirituel, par le dévouement à la charité vécue et les œuvres de pénitence, par l’engagement dans l’éducation de leurs enfants. » (SC 29) De quoi, donc, apporter vraiment sa pierre à l’édifice de l’Église !
… ET FINALEMENT, LE CELIBAT DES PRETRES ?
« Les Pères synodaux ont voulu souligner que le sacerdoce ministériel requiert, à travers l’ordination, l’entière configuration au Christ. Tout en respectant les pratiques différentes et la tradition orientale, il convient de rappeler le sens profond du célibat sacerdotal, justement considéré comme une richesse inestimable et confirmé aussi dans la pratique orientale pour les candidats à l’épiscopat. Dans un tel choix, en effet, le dévouement qui conforme le prêtre au Christ et l’offrande exclusive de lui-même pour le Règne de Dieu trouvent une expression particulière. Le fait que le Christ lui-même, prêtre pour l’éternité, ait vécu sa mission jusqu’au Sacrifice de la Croix dans l’état de virginité constitue le point de référence sûr pour recueillir le sens de la tradition de l’Église latine sur cette question. »
Le Synode des Évêques – auquel, il faut le souligner, nombre d’évêques orientaux ont participé – est unanime à souligner la richesse de l’antique tradition latine du célibat des prêtres. Il ne s’agit pas tant, par cet état de célibat, de jouir de cette totale disponibilité pour la vie paroissiale que restreindrait la charge d’une famille. Il s’agit plus fondamentalement d’un célibat « consacré », signe d’un don total que le prêtre fait de sa vie à Dieu et à l’Église, par amour, à l’image du sacrifice que le Christ offrit de sa vie sur la Croix.
Cette consécration du prêtre à Dieu et à la famille spirituelle qui lui est confiée, le prêtre est appelé à la vivre à la manière dont un époux donne toute sa vie pour les siens, à la manière surtout dont le Christ à donné sa vie pour aimer et sauver tous les hommes, et non pas quelques uns en particulier. Aussi l’Exhortation peut-elle écrire :
« Il n’est donc pas suffisant de comprendre le célibat sacerdotal en termes purement fonctionnels. En réalité, il est une conformation particulière au style de vie du Christ lui-même. Ce choix est avant tout sponsal ; il est identification au cœur du Christ Époux, qui donne sa vie pour son Épouse. Unie à la grande tradition ecclésiale, au Concile Vatican II et aux Souverains Pontifes mes prédécesseurs, je redis la beauté et l’importance d’une vie sacerdotale vécue dans le célibat comme signe exprimant le don de soi total et exclusif au Christ, à l’Église et au Règne de Dieu, et j’en confirme donc le caractère obligatoire pour la tradition latine. Le célibat sacerdotal vécu avec maturité, joie et dévouement est une très grande bénédiction pour l’Église et pour la société elle-même. » (SC 24)
Thomas Diradourian, prêtre +
Les questions disputées…
Après notre lecture d’ensemble de l’Exhortation Apostolique Sacramentum Caritatis (SC) de Benoît XVI, il est bon de revenir cette semaine sur quelques rappels qui ont particulièrement ému les médias et le grand public, mais dont le sens apparaît lumineux dès lors qu’on prend la peine de les placer dans la perspective catholique, où l’Eucharistie est tout à la fois Mystère, Offrande de soi et Communion de charité. Ainsi…
ON PARLE DU RETOUR DE LA MESSE EN LATIN ?
« Pour mieux exprimer l’unité et l’universalité de l’Église, je voudrais recommander ce qui a été suggéré par le Synode des Évêques, en harmonie avec les directives du Concile Vatican II : excepté les lectures, l’homélie et la prière des fidèles, il est bon que ces célébrations soient en langue latine ; et donc que soient récitées en latin les prières les plus connues de la tradition de l’Église, et éventuellement que soient exécutées des pièces de chant grégorien. De façon plus générale, je demande que les futurs prêtres, dès le temps du séminaire, soient préparés à comprendre et à célébrer la Messe en latin, ainsi qu’à utiliser des textes latins et à utiliser le chant grégorien ; on ne négligera pas la possibilité d’éduquer les fidèles eux-mêmes à la connaissance des prières les plus communes en latin, ainsi qu’au chant en grégorien de certaines parties de la liturgie. » (SC 62)
La requête du Saint-Père vise avant tout les Messes célébrées à l’occasion des grands rassemblements, auxquels prennent part des fidèles de cultures et de langues différentes. On comprendra facilement que l’utilisation du latin, « langue universelle de l’Église romaine », permette de « mieux exprimer l’unité et l’universalité de l’Église ». En outre, comme langue cultuelle et sacrée, le latin est propre à suggérer combien l’Eucharistie est un Mystère surnaturel.
Ce rappel n’est en aucun cas un « retour en arrière », mais une simple marque de fidélité aux intentions du concile Vatican II : s’il découle du bon sens que les lectures, l’homélie et la prière universelle soient prononcées dans les langues maternelles, « on veillera, écrit Vatican II, à ce que les fidèles puissent dire ou chanter ensemble en langue latine les parties de l’ordinaire de la Messe qui leur reviennent. » Sur ce point, comme sur celui du chant grégorien, il est vrai que le Concile n’aura guère été suivi en France, d’où l’émotion suscitée par ce simple rappel... de bon sens !
D’ACCORD, MAIS LA COMMUNION POUR LES DIVORCES-REMARIES ?
« Si l’Eucharistie exprime le caractère irréversible de l’amour de Dieu pour son Église dans le Christ, on comprend pourquoi elle implique, en relation au sacrement de Mariage, l’indissolubilité à laquelle tout véritable amour ne peut qu’aspirer. L’attention pastorale que le Synode a réservée aux situations douloureuses dans lesquelles se trouvent de nombreux fidèles qui, après avoir célébré le sacrement de Mariage, ont divorcé et contracté une nouvelle union, est donc plus que justifiée. Il s’agit d’un problème pastoral épineux et complexe, une vraie plaie du contexte social actuel, qui touche de manière croissante les milieux catholiques eux-mêmes. Par amour de la vérité, les Pasteurs sont obligés de bien discerner les diverses situations, pour aider spirituellement de la façon la plus appropriée les fidèles concernés. Le Synode des Évêques a confirmé la pratique de l’Église, fondée sur la Sainte Écriture (cf. Mc 10, 2-12), de ne pas admettre aux sacrements les divorcés remariés, parce que leur état et leur condition de vie contredisent objectivement l’union d’amour entre le Christ et l’Église, qui est signifiée et mise en œuvre dans l’Eucharistie. »
Il y a là une question de cohérence. La vérité de l’Eucharistie, c’est que ce sacrement signifie le don d’amour total et irréversible que Jésus fait de son Corps à l’Église. La vérité du mariage chrétien, c’est que, dans ce sacrement, les époux signifient par le don total qu’ils se font de leur vie le don total que Dieu fait aux hommes de sa propre vie. Le mariage et l’Eucharistie signifient donc la même vérité : celle de l’amour absolument fidèle – et on sait au prix de quelles souffrances ! – que Dieu veut offrir aux hommes.
Quand, d’une manière qu’il revient à Dieu seul de juger, l’union de deux époux à été non seulement rompue mais remplacée par une seconde union de type conjugal, on comprend aisément que cette situation « contredit objectivement l’union d’amour entre le Christ et l’Église, qui est signifiée et mise en œuvre dans l’Eucharistie », car l’amour de Dieu pour chacun de nous est unique, total et définitif. Dans une telle situation, la Communion eucharistique serait détournée de sa signification.
Si, pour ce motif de cohérence, les personnes divorcées-remariées (comme du reste tout chrétien dont le cœur serait dans une situation d’infidélité à l’amour de Dieu) ne peuvent participer à la Communion, elles n’en sont pas pour autant «excommuniées», comme trop souvent on l’entend dire, et faussement. Cela est très clairement souligné par le Pape et par les évêques qui connaissent de près ces situations complexes et douloureuses :
« Toutefois, les divorcés remariés, malgré leur situation, continuent d’appartenir à l’Église, qui les suit avec une attention spéciale, désirant qu’ils développent, autant que possible, un style de vie chrétien, par la participation à la Messe, mais sans recevoir la Communion, par l’écoute de la Parole de Dieu, par l’adoration eucharistique et la prière, par la participation à la vie de la communauté, par le dialogue confiant avec un prêtre ou un guide spirituel, par le dévouement à la charité vécue et les œuvres de pénitence, par l’engagement dans l’éducation de leurs enfants. » (SC 29) De quoi, donc, apporter vraiment sa pierre à l’édifice de l’Église !
… ET FINALEMENT, LE CELIBAT DES PRETRES ?
« Les Pères synodaux ont voulu souligner que le sacerdoce ministériel requiert, à travers l’ordination, l’entière configuration au Christ. Tout en respectant les pratiques différentes et la tradition orientale, il convient de rappeler le sens profond du célibat sacerdotal, justement considéré comme une richesse inestimable et confirmé aussi dans la pratique orientale pour les candidats à l’épiscopat. Dans un tel choix, en effet, le dévouement qui conforme le prêtre au Christ et l’offrande exclusive de lui-même pour le Règne de Dieu trouvent une expression particulière. Le fait que le Christ lui-même, prêtre pour l’éternité, ait vécu sa mission jusqu’au Sacrifice de la Croix dans l’état de virginité constitue le point de référence sûr pour recueillir le sens de la tradition de l’Église latine sur cette question. »
Le Synode des Évêques – auquel, il faut le souligner, nombre d’évêques orientaux ont participé – est unanime à souligner la richesse de l’antique tradition latine du célibat des prêtres. Il ne s’agit pas tant, par cet état de célibat, de jouir de cette totale disponibilité pour la vie paroissiale que restreindrait la charge d’une famille. Il s’agit plus fondamentalement d’un célibat « consacré », signe d’un don total que le prêtre fait de sa vie à Dieu et à l’Église, par amour, à l’image du sacrifice que le Christ offrit de sa vie sur la Croix.
Cette consécration du prêtre à Dieu et à la famille spirituelle qui lui est confiée, le prêtre est appelé à la vivre à la manière dont un époux donne toute sa vie pour les siens, à la manière surtout dont le Christ à donné sa vie pour aimer et sauver tous les hommes, et non pas quelques uns en particulier. Aussi l’Exhortation peut-elle écrire :
« Il n’est donc pas suffisant de comprendre le célibat sacerdotal en termes purement fonctionnels. En réalité, il est une conformation particulière au style de vie du Christ lui-même. Ce choix est avant tout sponsal ; il est identification au cœur du Christ Époux, qui donne sa vie pour son Épouse. Unie à la grande tradition ecclésiale, au Concile Vatican II et aux Souverains Pontifes mes prédécesseurs, je redis la beauté et l’importance d’une vie sacerdotale vécue dans le célibat comme signe exprimant le don de soi total et exclusif au Christ, à l’Église et au Règne de Dieu, et j’en confirme donc le caractère obligatoire pour la tradition latine. Le célibat sacerdotal vécu avec maturité, joie et dévouement est une très grande bénédiction pour l’Église et pour la société elle-même. » (SC 24)
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