Gaza: Les dernières heures du Fatah

(En cours de programmations)
Répondre
FromDaWu

Christianisme [Catholique]
Christianisme [Catholique]
Messages : 1246
Enregistré le : 10 janv.07, 09:49
Réponses : 0
Localisation : Champagne Ardennes, France

Gaza: Les dernières heures du Fatah

Ecrit le 18 juin07, 01:11

Message par FromDaWu »

Gaza : les dernières heures du Fatah
LE MONDE | 18.06.07 | 11h52 • Mis à jour le 18.06.07 | 11h53
GAZA ENVOYÉ SPÉCIAL



Dans le jargon militaire palestinien, il est désigné sous le nom de code "khamsa-khamsa" (cinq sur cinq). C'est l'ultime poste de contrôle avant le terminal d'Erez, le point de passage vers Israël, à l'extrémité nord de la bande de Gaza. Ou, du moins, ce l'était. Jeudi 14 juin, à l'approche des miliciens du Hamas, les policiers qui tenaient le registre des entrées et des sorties ont pris la fuite à travers les champs d'orangers.


Des baraquements saccagés par les assaillants et dépecés par les pillards, il ne reste que des murs couverts d'autocollants à la gloire des martyrs du Fatah et d'un poster de son fondateur, Yasser Arafat. Le sol est jonché de papiers jaunis, arrachés aux brochures de présentation de la bande de Gaza qui étaient distribuées durant l'été 2005 aux journalistes venus couvrir le retrait israélien. Des vestiges d'une époque défunte, celle où l'Autorité Palestinienne, incarnée par le Fatah, espérait faire de la bande de Gaza, libérée des colons et des soldats israéliens, le tremplin vers la création d'un Etat souverain.

Ce samedi, une trentaine de taxis sont garés sur le parking de l'ex-poste de sécurité. Des familles en descendent, les bras remplis de bagages, et s'engouffrent à l'intérieur du corridor de béton qui mène vers le point de contrôle israélien. Les visages sont tendus, le pas, saccadé. Les femmes et les hommes sont tous membres du Fatah. Ils travaillaient à la Mountada, le quartier général de Mahmoud Abbas à Gaza, au sein de l'administration ou de la garde présidentielle. Et puis, jeudi, dans la soirée, les miliciens du Hamas ont déferlé sur les bâtiments. Ils les ont pillés, brûlés et planté le drapeau vert de leur mouvement sur ces lieux symboliques.

Ce jour-là, ces Palestiniens qui étaient habitués à fréquenter le pouvoir et à profiter parfois de ses largesses ont vu leur monde s'écrouler. Certains d'entre eux, parce qu'ils ont participé aux combats ou incarné, aux yeux des islamistes, les dérives d'un régime honni, craignent pour leur vie. D'autres, familiers d'un mode de vie à l'occidentale, adopté à Beyrouth et à Tunis, dans le sillage des exils à répétition de Yasser Arafat, redoutent la férule islamique du Hamas sur un territoire dont ils n'ont jamais goûté le conservatisme. Alors, ils fuient, vite, très vite, en direction de Ramallah, en Cisjordanie, l'autre capitale des territoires occupés.

"Hier soir, des hommes armés et masqués sont montés dans mon immeuble, raconte Zubeida, la veuve d'un célèbre fedayin tué au Liban. Mes voisins m'ont prévenue une minute avant qu'ils n'arrivent chez moi, et j'ai réussi à me sauver en catastrophe." Zubeïda assure que les miliciens étaient là pour la tuer, "mettre le feu à l'appartement et me brûler dedans", dit-elle. Un témoignage impossible à vérifier.

Depuis le coup de force du Hamas, la rumeur est reine à Gaza. La plupart des partisans de Mahmoud Abbas prédisent des purges. Jusqu'à présent, les cas d'exécution sommaire ont été rares, une demi-douzaine au maximum. Mais le souvenir de combattants du Fatah précipités dans le vide du haut des immeubles de Gaza-ville et celui de Samieh Al-Madhoun, l'un des chefs militaires du mouvement, massacré devant les caméras de la chaîne pro-Hamas Al-Aqsa, suffit à entretenir la panique. "Je suis une patriote, clame Zubeïda. Jusqu'à hier, je portais même le voile. Mais je l'ai enlevé avant de partir. Si c'est ça leur islam, le terrorisme, l'intolérance, alors je n'en veux pas."

Au bout de quatre cents mètres de marche dans le tunnel bétonné, la troupe de "fatahouis" en déroute, composée d'une centaine de personnes, bute sur un immense portail métallique, équipé de haut-parleurs et de caméra de surveillance. C'est là que débute le terminal d'Erez, un dédale de tourniquets électroniques, de tapis à rayons X et de couloirs aveugles. Haut lieu des humiliations infligées aux Palestiniens, notamment les milliers d'entre eux qui s'y entassaient pendant des heures, avant l'Intifada, afin d'obtenir le droit d'aller travailler en Israël, l'endroit, ce jour-là, s'apparente à la porte de la délivrance.

Or, celle-ci ne s'ouvre pas. Le commandant israélien du terminal redoute un mouvement de foule incontrôlable. L'attente commence donc. La tension monte d'un cran quand un nouvel arrivant révèle que des miliciens ont dressé un check-point à un kilomètre en arrière. Une jeune fille se pend aussitôt aux grilles du portail et hurle en direction des caméras : "Ouvrez-nous, ouvrez-nous, on préfère être tués par vos balles que par celles du Hamas." En vain.

Dans l'attroupement, un homme qui se présente comme "Mohamed" grille des cigarettes à la chaîne. Il évoque les appels au dialogue lancés par Ismaïl Haniyeh à l'intention de Mahmoud Abbas. "Cet homme est incroyable, dit-il. Ses miliciens détruisent le palais présidentiel, saccagent la maison d'Arafat (un musée dédié au défunt raïs à Gaza), plantent leur drapeau sur tous les bâtiments officiels. Et il persiste à dire qu'il n'a pas mené un coup d'Etat et qu'il doit rester premier ministre."

La razzia du Hamas, sa rapidité et sa brutalité, a terrassé tous les habitants de Gaza. Mercredi 13 juin, dans les rues du centre-ville, rien ne permet encore de dire que le régime instauré par Yasser Arafat est aux abois. Plusieurs bases des services de sécurité fidèles à Mahmoud Abbas sont bien tombées, dans le nord et le sud de la bande côtière palestinienne. La bataille se rapproche des postes de commandement implantés dans la ville même de Gaza. Le fracas des rafales et des explosions emplit le centre d'un tonnerre perpétuel. Mais les combattants du Fatah tiennent leurs positions.

Sur la rue Nasser, deux blocs d'immeubles à l'écart des combats, Ahmed, un retraité en galabeya, prend l'air pour la première fois depuis deux jours. Assis sur une chaise en plastique plantée sur le trottoir, il écoute avec son transistor le bulletin d'informations de Radio Shebab, une station pro-Fatah. "Oui, bien sûr, dit-il, le Fatah est en mauvaise posture. Mais un mouvement pareil, à la tête de la cause palestinienne depuis quarante ans, ça ne peut pas s'écrouler comme cela."

Répondre
  • Sujets similaires
    Réponses
    Vues
    Dernier message

Retourner vers « Crimes, Guerres & Génocides »

Qui est en ligne

Utilisateurs parcourant ce forum : Aucun utilisateur enregistré et 0 invité