tguiot a écrit :J'ai pensé, à tort peut-être, que tu considérais tes expériences mystiques sans pensée comme une source de connaissance plus fiable que l'intellect. Mais si ces expériences n'ont pas pour objectif de produire des connaissances mais plutôt des états personnels (tu parles de quiétude, de paix, d'amour), alors je n'ai aucune critique d'aucune sorte à formuler.
C’est un peu plus nuancé que cela. L’état d’illumination permet de faire l’expérience de ce que l’on appelle souvent l’inconnaissable. Par exemple, cet état permet d’expérimenter le fait que rien n’est séparé de la totalité, que tout ce qui existe est une manifestation temporaire de l’Etre.
Alors, il est certain que ce n’est pas un état qui amène à résoudre des équations ou à décrypter le génome humain. C’est avant tout un état de paix intérieure, où l’on ressent l’amour très intensément. Mais au-delà de la félicité, cela permet aussi de faire l’expérience de l’inconcevable réalité non-manifestée qui existe au-delà du monde physique, et dont le monde physique est une fugace manifestation.
Dans cet état, la personnalité, qui n’est qu’un amas de pensées, disparaît totalement ; le « moi » disparaît pour laisser place à la réalisation que notre identité essentielle est sans forme, qu’elle est une présence omniprésente, qu’elle est l’Etre précédant toutes les formes et toutes les identifications. Nous réalisons que notre véritable identité est la conscience elle-même plutôt que ce à quoi la conscience s’était identifiée (notre forme physique et mentale). Ceci est la paix de Dieu.
Prendre conscience de cela, de l’Etre, c’est à mon avis la plus grande vérité. C’est une forme de connaissance. La vérité ultime, c’est que nous ne sommes pas ceci ou cela ; nous sommes.
Le lien d’amour qui t’unit à tes parents, tes frères et sœurs, ta conjointe ou tes enfants, est exactement le même lien que celui qui t’unit à n’importe quelle autre personne, à un animal, une fleur ou un arbre. Seule varie l’intensité avec laquelle tu ressens ce lien.
La joie de l’Etre, qui est le seul véritable bonheur, ne peut arriver à nous par une forme ou une autre, par une possession, un accomplissement, une personne ou un événement, par quelque chose qui se produit. Cette joie ne peut pas venir à nous, jamais, parce qu’elle émane de la dimension sans forme en nous, de la conscience même, et qu’elle fait par conséquent un avec ce que nous sommes. Seul compte le fait de le réaliser.
tguiot a écrit :Moi, je trouve le bonheur dans la musique. Je vis moi-même une sorte d'expérience mystique avec la musique et je passe également par des états très particuliers. Je sais bien que c'est mon cerveau et ses nombreuses activités électrochimiques qui en sont les auteurs, mais ça n'empêche pas que l'expérience est belle.
Mais surtout, je sais bien que le discours que je peux tirer d'une telle expérience est purement personnel. Je ne peux pas m'autoriser à l'ériger en vérité absolue.
Ce qui te procure une sensation de bien-être, de joie, lorsque tu fais de la musique, c’est le fait que le flux de tes pensées a tendance à diminuer. Tu es bien plus présent à ce qui est, et par conséquent tu développes inconsciemment le contact avec l’Etre. Tu le ressens plus intensément qu’en temps normal où ta conscience est accaparée par les pensées compulsives, par tes identifications.
Mais cet état peut être bien plus profond pour peu que tu veuilles bien le reconnaître ; et il n’y a aucun besoin d’une activité quelconque comme la musique pour ce faire.
Dans ton cas, la musique n’est qu’un outil, une voie d’accès. Tu peux y accéder directement, et plonger bien plus profondément dans cet état.
tguiot a écrit :Par contre, tes prévisions sur l'étape évolutive future de l'homme, permets-moi de ne pas être d'accord. À une époque, j'ai cru que la prochaine étape de l'évolution humaine serait l'absence de croyances et de superstitions. C'était avant que je réalise que l'homme "normal" (je devrais peut-être dire l'homme modal) est fait pour croire. Son cerveau est construit de telle sorte que les croyances peuvent s'ancrer très facilement. Et de même que l'humain normal possède un tel cerveau, il possède un cerveau qui lui permette de penser. Et ça ne s'arrêtera pas de sitôt.
Surtout que vivre une expérience mystique de paix et d'unité, c'est sans doute fabuleux. Mais si ton portefeuille est vide, ça ne te sauvera pas la mise.
C’est ignorer que tous les événements sont interreliés. Tout ce dont nous avons besoin nous arrive naturellement et spontanément dans notre vie. Plus nous sommes présents à ce qui est, plus notre contact à l’Etre est intense, et plus les événements qui nous arrivent semblent tomber à pic.
De plus, dans un tel état, nous disposons d’une énorme quantité d’énergie qu’auparavant nous gaspillions à renforcer notre ego. Par exemple, 3h de sommeil par jour sont largement suffisantes.
Sur l’étape évolutive future de l’homme, la non-pensée transcendera la croyance parce que toute croyance est un amas de pensées. Lorsqu’on est intensément présent à ce qui est, lorsque la pensée n’interfère pas dans la perception, il n’y a pas de croyance.
maymay a écrit :Tan, je te proposes de te diriger quelque peu vers Husserl ; tu verras que bon nombres de ce que tu appelles "spiritualismes" y sont, mais d'une manière totalement démystifiée. Ou même voir Spinoza si tu le souhaites. L'importance dans ce genre de recherches, c'est la rigueur et l'universalité ; mais c'est précisément ce qu'il manque à la majeur partie des "sages" exotiques si je puis dire...
Tu ne me comprends pas maymay, mais ce n’est pas un problème. Tu ne me comprends pas parce que tu me parles à nouveau de traités intellectuels, de théories, d’idées.
Je ne parle pas d’une idée, je parle d’un état. Une idée est une pensée ; je parle de ne pas penser. Et cet état est évidemment universel puisque c’est ce que nous sommes. De la même manière que la pensée est universelle, la non pensée est universelle, du moins en potentiel. Il suffit de l’expérimenter. Il n’y a aucune théorie là-dedans, aucune idéologie.
Le plus important n’est pas la rigueur ou l’universalité d’une idée. Le plus important est le degré de paix, d’amour et de joie que nous expérimentons ici et maintenant.
simplequidam a écrit : merci Tan,
un site que je ne connaissais pas,
mais au contraire de toi,
il faut savoir se servir de cette énergie humaine et on oublie souvent que quiétude et repos sont énergies, pour évoluer vers un mieux par les actions de constructions par l'homme,et là l'imagination doit être au pouvoir.
Aucun accomplissement n’a le pouvoir de nous rendre heureux. Ce qui compte n’est pas ce que nous accomplissons, mais la qualité avec laquelle nous agissons, le degré de conscience à l’origine des actes que nous posons. Toute construction ou accomplissement humain ne peut qu’être temporaire et retournera tôt ou tard au néant. Telle est la nature de toute forme. Pourquoi y accorder de l’importance ?