Il y a cent ans, la première guerre mondiale (1914-1918) démarrait. Oui, mais pour quelle raison ?
Curieusement, lors de l’entrée en guerre, on n’a pas eu de diffusion d’explications sur les buts de guerre ni même sur les causes autres que des insultes aux peuples des pays ennemis. Le dernier poilu français vivant Lazare Ponticelli déclarait : « Tous ces jeunes tués, on ne peut pas les oublier. Je tire sur toi, je ne te connais pas. Si seulement tu m’avais fait du mal… Cette guerre, on ne savait pas pourquoi on la faisait. On se battait contre des gens comme nous." Les gouvernements ne parlent pas, dans la première phase de la guerre, des buts de guerre que de manière générale, en parlant d’honneur, de gloire, de patrie, et cela jusqu’en 1917 ; ils se consacrent plus volontiers à rallier l’opinion publique à l’idée de victoire. Les buts de guerre détaillés sont secondaires, seul le caractère héroïque de la guerre compte. De toutes manières, les buts de guerre ne sont pas exactement identiques aux causes de celle-ci comme on va le voir ensuite.
« L’histoire dira un jour, en toute vérité, que la France, qui avait depuis quarante-quatre ans les meilleures, les plus puissantes, les plus légitimes raisons de faire la guerre, a refoulé dans son cœur les sentimens qui devaient l’y pousser et n’a reculé devant aucun sacrifice, si ce n’est celui de son honneur, pour assurer le maintien de la paix. » disait un journal patriotard (La Chronique de la Quinzaine) mais il ne développait nullement les puissantes et meilleures (!) raisons en question ni n’expliquait pourquoi avoir attendu 44 ans et pas plus d’années ou moins...
Des motifs officiels de l’entrée en guerre, des justifications développées par la suite, la première guerre mondiale en a eu de multiples et qui sont parfois contradictoires ou même absurdes (de la pure propagande) :
- les opinions publiques auraient été chauffées par de nombreux incidents rappelant des situations cuisantes pour le patriotisme national. Mais les classes dirigeantes n’ont jamais suivi les opinions publiques : elles les ont plutôt fabriqué à leur convenance. L’ennemi héréditaire anglais s’était transformé en allemand par exemple...
- l’assassinat de l’Archiduc d’Autriche à Sarajevo mais l’assassin n’appartient à aucune nation importante qui sera engagée dans le conflit... L’attaque de la Serbie par l’Autriche n’est nullement justifiée par un attentat d’un terroriste nationaliste serbe qui n’est pas commandité par le pouvoir. L’entrée en scène des autres puissances n’était nullement fatale, s’il n’y avait d’autres raisons plus générales aux impérialismes et plus fondamentales que les alliances des grandes puissances, les unes avec l’Autriche et les autres avec la Serbie.
- la reconquête par la France de l’Alsace-Lorraine, contestée depuis le dernier conflit européen de 1870. Mais justement, cela faisait 44 ans que la situation perdurait et on ne voit pas pourquoi le conflit reprendrait justement en 1914, sans aucun événement local l’expliquant...
- les revendications italiennes sur des territoires de l’empire austro-hongrois mais, justement, l’Italie tarde à se décider d’entrer dans la première guerre mondiale et ne va pas suivre immédiatement la France et l’Angleterre qu’elle ne rejoindra sur les champs de bataille qu’en mai 1915...
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