Dès qu'on accepte que Jésus est de la même nature que Dieu le Père, qu'il n'est pas créé, il s'ensuit nécessairement qu'il est avec lui un seul et même Dieu.
Car en effet Dieu est sa propre existence; il n'y a pas en lui composition d'essence et d'existence, ni aucune sorte de composition; car toute être formé de parties doit avoir une cause, chacune des parties étant impuissante à expliquer l'unité du tout (étant
en puissance par rapport au tout); or Dieu, qui est cause première, n'a pas de cause. Ou encore le tout est plus grand que la somme des parties; mais en Dieu tout est infini; sa bonté, sa vérité, etc; il faut que tout cela soit une seule et même chose. Ou encore il ne peut y avoir ni composition de matière et de forme, Dieu n'étant pas fait de parties quantitatives; il ne peut y avoir composition de substance et d'accident, Dieu étant toujours identique à lui-même; et par le fait même, aucune sorte de composition puisque toutes se ramènent à celles-là. Il y a encore de très nombreuses raisons pour lesquelles il serait insensé de soutenir qu'en Dieu il puisse y avoir composition comme chez les humains ou d'autres créatures: elles sont exposées dans la première partie de la Somme Théologique (Ière partie, question 3) ainsi que dans la Somme Contre les Gentils. (Ière partie)
Il s'ensuit que la nature de Dieu est Dieu; Dieu n'est rien d'autre que ce qu'il est de toute éternité, il n'y a en lui pas de devenir, pas de puissance (au sens philosophique du terme), pas d'accident; il n'y a rien de plus que sa nature: Dieu est sa nature, son essence.
MLP a écrit :C'est exact. Il n'est pas créature puisqu'engendré par le Père, donc nécessairement de même nature que le Père, donc que Dieu. C'est de la que vient la relation filiale. Mais celà implique que le Père aie une existance antérieure à celui qu'il engendre.
Au contraire. Rien n'existe en-dehors de Dieu que par création: la création est en effet l'acte par laquel Dieu, qui existe par lui-même, fait exister ce qui sans lui n'existerait pas. Ce qui n'est pas créature ne peut être autre que Dieu; il n'y a pas de moyen terme entre être créé et être antérieur à toute création. Soit un être est différent de Dieu et dépend de lui quant à son existence, soit il est Dieu.
Si l'on dit donc du Fils qu'il n'est pas créature, mais engendré, c'est dire qu'il est ce même Dieu, en qui il y dès lors
relations de filiation et de paternité.
MLP a écrit :Pinnochio était le fils de Jepetto, mais créé, donc n'ayant pas la même nature humaine que lui. S'il avait été engendré, il aurait été humain.
Seul Dieu est vraiment créateur; lorsque nous disons qu'homme créé un objet d'art, c'est analogiquement. En effet Pinnochio a bel et bien été formé par Jepetto mais pas
ex nihilo; sa matière existait déjà. Quant à sa forme, elle provient en dernière analyse de Dieu, et Jepetto n'est ici qu'une cause seconde, cause libre, certes, mais incapable de donner l'existence à ce qui n'existe pas, ne la possédant pas soi-même en propre. L'homme ne créé donc pas; c'est Dieu qui créé, mais souvent par l'intermédiaire d'une créature. La créature, en effet, tient tout ce qu'elle a de Dieu; elle ne saurait rien faire venir à l'être si ce n'était Dieu qui passait par elle. Ainsi s'explique, par exemple, que la nature, qui a pourtant dans tous ses phénomènes des causes matérielles, est réellement l'oeuvre de Dieu.
La différence, dans le monde matériel, entre des êtres de même nature, comme les humains, provient de ce qu'ils ne résument pas à leur nature; mais tous ils sont sujets au devenir et aux innombrables aléas de la Nature. Ce n'est donc pas parce qu'ils sont de natures humaines différentes (ce qui ne veut rien dire, la nature humaine étant ce qu'il y a de commun à tous les hommes), mais bien parce qu'ils sont
composés de matière et forme, substance et accident, et
individués par la matière, que ces êtres de même nature se distinguent.
MLP a écrit :Ne pas confondre ce que les juifs disaient et ce que Jésus disait.
Or l'évangéliste ne dit pas : "les juifs disaient qu'il se faisait l'égal de Dieu", mais bien "les juifs cherchaient à le tuer parce qu'il se faisait l'égal de Dieu": ici celui qui affirme qu'il se faisait l'égal de Dieu, c'est l'évangéliste.
Didier a écrit :Jean 4:22 présente le Fils comme un adorateur du Père. C'est pourquoi durant son ministère terrestre, Jésus a pu l'appeler "mon Dieu" (Mat. 27:46). Le Dieu de Jésus était le même que celui des Juifs: "Je monte vers mon Père et votre Père, et vers mon Dieu et votre Dieu" - Jean 20:17. Les relations qui unissaient Jésus (dans la chair) à son Père étaient celle d'un adorateur vis à vis de son Dieu. Ces relations changeraient-elles lorsque Jésus serait glorifié dans sa position céleste, après sa résurrection?
Pour la théologie catholique, ce raisonnement n'a pas de sens, car si Jésus a été glorifié, ce ne peut être que selon la chair, et non selon sa nature divine; car la nature divine (celle de Dieu) est celle de la perfection absolue et on ne saurait lui ajouter quoi que ce soit.
Les relations ne changent donc pas entre le Fils et Dieu après sa Résurrection, et cela ne pose pas de problème, parce qu'ontologiquement le Christ n'a pas changé de nature à la Résurrection; il a été glorifié selon la chair, et par Lui la nature humaine est donc rachetée; mais sa nature humaine demeure nature créée et donc soumise à Dieu.