Le thème que vous avez introduit laisse planer un doute sérieux sur la définition du mot "esprit". Or ce qui est appelé esprit dans les traductions des écrits bibliques peut revêtir différents sens, et le fait d'employer le mot à tous bouts de champs sans rien préciser est un inconvénient dans le cadre d'un échange. La traduction d'André Chouraqui se base sur la correspondance entre l'hébreu et le grec tels qu'on les trouve dans la version massorétique et la version dite Septante. Or dans cette traduction, on trouve 5 fois le mot esprit dans toute la bible, dont voici les versets :
Marc 5:15 Ils viennent vers Iéshoua‘; ils voient le démoniaque assis, vêtu, sain d’esprit, lui qui avait eu Légion; ils frémissent.
Luc 8:35 Ils sortent voir ce qui était advenu et viennent vers Iéshoua‘. Ils trouvent assis l’homme dont les démons sont sortis, vêtu, sain d’esprit, aux pieds de Iéshoua‘. Ils frémissent.
2 Corinthiens 4:13 Ayant le même souffle d’adhérence, selon l’Esprit: «J’ai adhéré; oui, je parle»; nous, nous adhérons, donc nous parlons aussi.
Ephésiens 4:17 Ceci donc, je le dis et l’atteste en l’Adôn, jamais plus ne marchez comme les goîm marchent, dans la vanité de leur esprit.
Ephésiens 4:23 pour être rénovés au souffle de votre esprit
En marc 5,15, le mot signifie psyché, à savoir que quelqu'un qui est sain d'esprit est celui qui maîtrise son psychisme et son comportement. Sain d'esprit signifie donc
au comportement normal
Idem pour Luc.
En 2 Cor 4,13, le contexte évoque le fait que Jésus vit dans le corps autant que notre conscience s'approche de la mort de Jésus. Ici, l'auteur est extrêmement subtil, car il déclare qu'une partie de l'être doit mourir pour que l'autre vive. Or il affirme aussi que ces deux parties adhèrent par le même souffle selon l'Esprit. L'Esprit qui est évoqué ici est l'Esprit qui anime le Christ, IHWH-Elohim.
En Eph 4,14, le mot est employé dans le sens de la vanité de l'esprit des goïms. Les goïms sont les non-juifs ou ce qu'il y a de non-juif dans l'être humain. Dans ce verset, l'esprit évoque la conscience ordinaire de l'être humain, qui se situe hors de toute conception religieuse. En effet, ce qui est Juif a considération de Dieu. Ce qui n'est pas Juif n'a pas considération de Dieu. L'esprit est alors ici synonyme de
mentalité ou mental ou conscience ou encore pensée.
En Eph 4,23, ce qui rénove le vieil homme est le souffle de notre esprit, à savoir celui de la partie de l'être qui est religieuse et qui s'attache à être selon Elohim. Il s'agit encore de la mentalité.
Pour être plus complet, le grec distingue Psyché et Pneuma. Et cela est extrêmement important. Car s'il est possible à ce qui est psyché d'être vrai ou faux, cela n'est pas possible à pneuma. Le pneuma agit par une action qui est presque mécanique. C'est pourquoi le terme de souffle est très approprié à décrire ce qu'est l'esprit pneumatique. Or, si la psyché est le lieu de la volonté, le pneuma remplit son rôle quel que soit la pertinence de la psyché. Si le mental (psyché) est conforme à une volonté transcendante s'approchant d'Elohim, alors on dira que la psyché est "de vérité", et dans le cas contraire "d'erreur".
Par le mental, l'homme produit un souffle, et ce souffle agit sur de la substance. Si l'homme élève son niveau de conscience de la terre et de ciel en ciel, son mental produira un souffle en rapport avec le niveau atteint. Dans ces conditions, un souffle peut être de vérité ou d'erreur, selon sa source. Il reste alors à savoir quels niveaux sont susceptibles d'engendrer le vrai ou le faux, en tenant compte, que les niveaux qui peuvent engendrer le vrai, peuvent également engendrer le faux. On sait en Genèse 3, que ce niveau est très élevé et qu'il correspond à Adam, l'Etre conscient universel, dans sa phase sensible.
Enfin, il n'existe qu'un seul souffle qui ne soit pas le résultat d'une source mentale : le souffle sacré d'Elohim qui avant même toute création, plane au-dessus des eaux, lesquelles forment le champ de la future conscience et du futur mental. Ce souffle sacré ne peut donc jamais être de vérité ou d'erreur, puisqu'il n'y a pas de mental, et, sans mental, il n'y a pas d'activité d'identification et de reconnaissance de la réalité, comme c'est le cas chez les êtres produits. Ce souffle sacré est l'Esprit d'Elohim, agissant comme une perturbation fondamentale du néant afin de produire par contradiction l'Etre, de façon intemporelle. Ce souffle a donc les propriétés d'une négation logique, fondement de tout langage. Ce qui est chaotique et désordonné devient ainsi ordonné et constructible.
Alors le verset est le suivant :
1 Jean 4,6 Nous sommes d’Elohîms. Celui qui pénètre Elohîms nous entend; celui qui n’est pas d’Elohîms ne nous entend pas. À cela nous pénétrons le souffle de vérité et le souffle de l’erreur.
Le terme "pénétrer" représente l'idée de pouvoir entrer dans un domaine à partir de l'extérieur. Vis-à-vis d'Elohim, qui est l'Unique, cette pénétration ne peut se faire que par distinction en conscience de ce qui est du domaine d'Elohim et de ce qui est d'un domaine plus restreint. Cette distinction est une compréhension de Dieu et par la connaissance ou la reconnaissance de ce qui vient de Dieu ou non, on pénètre Elohim ou non.
Alors le verset fait état que ceux qui pénètrent Elohim sont aussi ceux qui comprennent le sens de cette révélation alors que ceux qui ne pénètrent pas Elohim ne peuvent pas comprendre. Ceux qui pénètrent Elohim sont aussi ceux qui distinguent vérité et erreur, alors que ceux qui ne pénètrent pas Elohim n'ont pas ce discernement.
Enfin, pour lever toute invraisemblance, celui qui sait discerner le vrai, sait donc discerner l'erreur, mais celui qui sait discerner l'erreur sait aussi discerner le vrai. Il y a ici correspondance biunivoque. Il suffit d'avoir le discernement de l'un des deux pour avoir le discernement intégral.
Il n'y a aucun souffle spécial de vérité qui devrait être acquis ou reçu par la religion. Celle-ci apporte le discernement logique. Lors de l'adhérence à Jésus, celui-ci, qui s'accorde avec le souffle sacré, effectue le discernement, que la conscience en soit capable ou non. Le souffle sacré est le souffle de référence. Cependant, la conscience doit consentir à pratiquer et s'exercer à discerner elle aussi. Alors elle peut pénétrer de degré en degré Elohim, et alors atteindre le discernement du vrai et du faux, par l'évaluation de l'écart entre le souffle de référence et celui qu'elle produit.