Pour un chrétien, un vrai, il n'y a qu'un seul chemin et c'est le Christ ! Alors si une personne se dit bouddhiste c'est qu'elle ne fait pas confiance au Christ et à son enseignement !
Tu as raison : le chemin pour le chrétien pratiquant c'est le Christ.
La question qu'il faut se poser c'est quoi une voie christique. Or une voie christique ou une pratique christique (rappelons que Jésus n'enseignait pas une orthodoxie mais une orthopraxie) n'est nullement incompatible avec une pratique bouddhiste.
Pour un bouddhiste la notion de Dieu est totalement différente de celle que prône le christianisme !
Soit nous sommes chrétiens soit nous sommes bouddhistes mais les deux c'est impossible.
Si tu me le permets, je vais m'autoriser dans ma réponse à rétablir certaines vérités mal comprises que je constate malheureusement trop souvent sur des forums où interviennent des personnes s'étant intéressés au Bouddhisme.
Il y a beaucoup d'amalgames et de préjugés sur le Bouddhisme.
L'un des principaux préjugés, parmi les plus répandus en occident, voudrait faire du Bouddhisme une religion rationnelle et athée, bien adaptée à la modernité. Si la rationalité est effectivement présente dans le bouddhisme philosophique qui reconnaît l'importance des faits avérés et fait volontiers usage d'inférences logiques, elle n'amoindrit pas l'importance de la foi ("shraddha") et de la dévotion ("adhimoksha"). Ces éléments y occupent aussi une grande place.
De plus, rappelons que le Bouddhisme à ses origines, en Inde, n'a côtoyé que des dieux d'origine védique. Dans le Brahmanisme ancien et plus tard dans l'Hindouisme, la question d'un dieu unique créateur ex nihilo n'a jamais été à l'ordre du jour. Les dieux indiens sont sans équivalent avec le Dieu d'Abraham. Par conséquent toutes les réfutations des logiciens bouddhistes n'ont jamais concerné que le Dieu Souverain Ishvara Ordonnateur du Chaos.
Précisons également que le Bouddha se voulait pragmatique et non spéculatif dans son enseignement. Il s'agissait pour lui d'expérimenter la voie qui pour lui mène directement vers l'Eveil et vers la Libération, pas de disserter sur les mystères et les grandes questions de l'Univers. Cela ne signifie nullement qu'il décourage toute recherche scientifique, philosophique, et religieuse.
Le Bouddhisme évite simplement de subordonner la pratique spirituelle à la croyance a priori : même si l'élément de la foi est moteur chez un débutant, il doit être vérifié dans l'expérience de la pratique.
Dans le Bouddhisme asiatique on ne s'est jamais posé l'interrogation du Dieu des Chrétiens, des Juifs ou des Musulmans, c'est pour cela que cette question est absente des textes canoniques et des commentaires traditionnels asiatiques.
Quand au Bouddha, il apparaît qu'il n'a jamais parlé de l'origine de l'Univers, répétons-le Bouddha était pragmatique appartenant à une lignée de maîtres matérialistes. La question n'a été abordée que tardivement dans les textes des abhidharma et qu'en rapport avec la cosmologie indienne pré-existante. Il faut bien comprendre cela. L'idée d'un démiurge ou d'un Dieu Créateur n'a aucun sens aux yeux d'un bouddhiste : notre Univers ne résulte que de l'énergie résultante du karman des êtres (dont la série psychique survit à la destruction du grand kalpa précédent) qui le conditionne. Et dans ce modèle-là, c'est ce karman résiduel qui agence les éléments et les particules des univers précédemment détruits. En langage plus clair, cela signifie qu'il y a bien une force à l'origine d'un Univers, mais il s'agit d'une force psychique produite par la somme des actes accomplis par les êtres de mondes précédents. C'est cette force psychique qui conditionne la production et la composition. De plus, dans la perspective bouddhiste, l'esprit n'est pas une propriété émergente de la matière (idéologie occidentale matérialiste) mais c'est de l'esprit qu'est engendré la matière.
Un dernier mot, la doctrine du Bouddhisme n'est pas celle du Christianisme, même s'il y a quelques convergences très importantes.
Le Bouddha n'est pas un Sauveur comme l'est Jésus Christ ("Je suis la Vérité, le Mouvement et la Vie"). Le Bouddha est juste un conseiller éveillé dont les précieux conseils ne sont libérateurs que lorsqu'on se les applique à soi-même. C'est à nous de nous prendre par la main, et de nous mettre en chemin. Pour le pratiquant, l'objectif le plus intime qui soit est la bouddhéité, et la dévotion qui existe aussi dans le bouddhisme est une alchimie de confiance, qui se traduit par l'abandon des prérogatives égotiques.
Avec sa doctrine, sa foi, sa sotériologie, sa communauté, ses cultes et son sens du sacré, le Bouddhisme se présente davantage comme un phénomène religieux à part entière. Mais pour comprendre la démarche du Bouddhisme, il faut abandonner toute image d'une religion à la ressemblance des religions abrahamiques. On ne peut le ranger parmi les cadres prédéfinies par nos enjeux socioculturels et parmi nos religions monothéistes. Le Bouddhisme ne relève pas non plus d'une philosophie matérialiste à proprement parler, mais d'un enseignement et d'une attitude pragmatique, sans être pour autant fataliste. Il existe bien une démarche rationnelle cherchant à résoudre les questions posées par notre existence en ce monde, mais cette pensée n'est jamais séparée d'une préoccupation sotériologique comme la libération de la souffrance. C'est pourquoi le Bouddha est comparé souvent à un grand médecin qui diagnostique notre maladie ("la souffrance de l'existence conditionnée"), en révèle les origines et déclare sa possible guérison en prescrivant l'ordonnance ("l'octuple noble sentier").
Bien à vous,
Cordialement,
Ase