Où se trouve la véritable valeur de l'existence
(1.15.1)
La gloire et la valeur de chaque créature existante sont liées à une cause, et dépendent de certaines circonstances.
(1.15.2)
La beauté, la parure et la perfection de la terre résident en ce qu'elle est verdie et fertilisée par la bonté des pluies printanières : alors les plantes croissent, les fleurs et les herbes odorantes poussent, les arbres fruitiers se couvrent de fruits et donnent de fraîches et nouvelles primeurs, les jardins se parent de fleurs, et les prairies s'embellissent de leurs ornements; les plaines et les montagnes revêtent leur robe de verdure; les jardins, les champs, les villages et les villes deviennent ravissants. Telle est la félicité du monde minéral.
(1.15.3)
Le summum de la gloire et de la perfection du monde végétal consiste, pour un arbre, à pousser sur les rives d'un fleuve à l'eau fraîche, à ce qu'une douce brise souffle sur lui, que la chaleur du soleil l'illumine, qu'un jardinier s'occupe à le cultiver, que de jour en jour il croisse, se développe et donne des fruits.
(1.15.4)
Quant à sa félicité réelle, elle consiste en ceci qu'il évolue jusqu'au monde animal et au monde humain, et qu'il remplace ce qui a été détruit dans le corps de l'animal et de l'homme.
(1.15.5)
La valeur du monde animal consiste à avoir des membres, des organes et des facultés en parfait état qui pourvoient à ses besoins. Tel est le summum de sa gloire, de son honneur et de sa valeur.
(1.15.6)
Egalement le summum de la félicité pour un animal, c'est d'avoir une prairie verdoyante, un pré, de l'eau qui coule extrêmement pure, et une forêt de la dernière fraîcheur. S'il a tout cela, on ne peut imaginer pour l'animal une félicité plus grande.
(1.15.7)
Ainsi un oiseau construira son nid dans une forêt verte et plaisante, dans un lieu élevé plein de douceur, sur un arbre robuste, et sur le haut d'une branche élevée; trouver tout ce qu'il désire en fait de graines et d'eau, pour un oiseau, c'est la félicité absolue.
(1.15.8)
Mais la véritable félicité consiste à passer du monde animal au monde humain, comme les infiniment petits qui, par l'intermédiaire de l'air et de l'eau, pénètrent dans l'intérieur de l'homme, et sont assimilés et remplacent ce qui a été détruit dans le corps de l'homme. C'est la plus grande gloire et la plus grande félicité : on ne peut en imaginer de plus grande pour l'animal.
(1.15.9)
Il est donc clair et évident que cette fortune, ce confort, cette richesse matérielle, sont la félicité complète du minéral, du végétal, de l'animal.
(1.15.10)
Et il n'y a pas dans le monde matériel de richesse ou de fortune, de confort ou d'aise comparables à la richesse de cet oiseau; parce que ces plaines et ces étendues sont la place de son nid, que toutes les graines des champs sont sa nourriture et son bien, et que toutes les terres, les villages, les prairies, les prés, les forêts et les plaines sont sa propriété.
(1.15.11)
Voyons qui est le plus riche : cet oiseau, ou l'homme le plus riche ? car malgré toutes les graines qu'il consomme, sa richesse matérielle ne diminue pas.
(1.15.12)
Il est donc certain que la gloire et la valeur de l'homme ne sont pas limitées aux richesses matérielles et à la fortune de ce monde. Au contraire, la félicité matérielle est seulement la branche; mais la racine de la grandeur humaine se trouve dans les bonnes moeurs et les vertus qui sont l'ornement de la réalité de l'homme.
(1.15.13)
Ce sont ces manifestations divines, ces bienfaits célestes, ces sentiments sublimes, cet amour et cette connaissance de Dieu, cette science universelle, cette compréhension intellectuelle, ces découvertes scientifiques, la justice, l'équité, la fidélité, la bonté, le courage naturel et la virilité innée;
(1.15.14)
le respect des droits et la fidélité aux pactes et aux traités, la droiture dans toutes choses, l'amour de la vérité dans toutes les conditions, le dévouement pour le bien général, la bienveillance et l'estime pour toutes les races humaines, l'obéissance aux enseignements divins, les services dans le royaume de Dieu, la direction des créatures, et l'éducation des peuples et des nations.
(1.15.15)
Voilà la félicité du monde humain! Voilà l'élévation de l'homme dans le monde contingent! Voilà la vie éternelle et la gloire céleste!
(1.15.16)
Et, sans le pouvoir de Dieu et les enseignements célestes, ces bienfaits n'apparaissent pas chez l'homme. Car une puissance supra naturelle est nécessaire. [nota : cette puissance supranaturelle est nécessaire pour faire apparaître ces bienfaits]
(1.15.17)
Il se peut qu'il existe dans le monde de la nature des signes de ces perfections, mais ils sont instables et éphémères; ils sont comme les rayons du soleil sur un mur.
(1.15.18)
Telle est la couronne merveilleuse que Dieu, le Compatissant, a placée sur la tête de l'homme : nous devons nous efforcer de faire briller sur le monde entier ses joyaux étincelants!