https://www.sciencesetavenir.fr/archeo- ... que_104103
C'est LA star incontestable d'il y a -3,2 millions d'années. Elle ? Lucy, ce pré humain dont les ossements ont été découverts dans les années 70 par une équipe internationale de paléontologues dont le célèbre Yves Coppens. Gros plan sur l'un des mythes de la science traités dans le nouveau hors-série de Sciences et Avenir.
C'est l'un des mythes de la science, auquel le hors-série de Sciences et Avenir numéro 190 (daté juillet/août 2017) consacre plusieurs pages : Lucy, "grand-mère" de l'humanité. En complément de la lecture de cet article, nous vous proposons de retrouver ici les réponses aux principales questions posées par ce fossile d'Australopithecus afarensis ainsi que les vidéos tournées par Sciences et Avenir et dans lesquelles Yves Coppens parle de Lucy.
En 1974, Yves Coppens, Donald Johanson et Maurice Taieb, en fouillant le site d'Hadar, au nord-est de l'Ethiopie, découvrent des ossements de pré-humain. Ce qui aurait pu n'être qu'une relativement banale découverte se révélera un trésor lorsque les paléontologues réaliseront que tous ces os (52 exactement) ont la même couleur, les mêmes proportions et ne peuvent donc qu'appartenir à un seul être. Avec 40% des os que nous possédons tous, ce squelette de 3,2 millions d'années est le plus complet jamais découvert. Cette créature venue du fond des âges, nommée Lucy en écho à la chanson des Beatles "Lucy in the sky with diamonds" que les archéologues écoutaient au moment de la trouvaille, sera, en 1978, rattachée à l'espèce des Australopithecus afarensis.
Lucy aimait grimper dans les arbres et savait couper sa viande
Un peu comme une carte d'identité profonde, les os permettent d'en savoir beaucoup sur leur propriétaire : sa taille bien sûr, son poids approximatif, son régime alimentaire (en étudiant ses dents) et même ses gestes via l'étude des articulations... Alors, ceux de Lucy, que nous disent-ils ? Qu'elle mesurait entre 1,10 m et 1,20 m pour 25 kg, possédait un visage prognathe et un petit cerveau d'environ 400 cm3. D'autres crânes d'Australopithèques afarensis découverts ensuite, plus volumineux, suggèrent qu'il existait un fort dimorphisme sexuel dans cette espèce : aussi, du fait de son petit gabarit, Lucy serait donc une femelle. S'il est peu probable que Lucy ait été une chasseuse, son faible volume cérébral ne l'empêchait pas de découper la viande avec des outils, comme le laissent penser des ossements retrouvés bardés de traces de pierre. D'abord imaginée végétarienne, Lucy serait donc plus vraisemblablement, une charognarde. Parmi les os de Lucy, fémur et bassin en disent long sur sa façon de se déplacer : Lucy était bipède lorsqu'elle marchait -de manière chaloupée-, mais elle préférait sans doute grimper dans les arbres, comme en témoignent ses membres supérieurs un peu plus longs que ses membres inférieurs. Ces caractéristiques la classent donc, entre nos ancêtres purement grimpeurs et nos ancêtres essentiellement bipèdes.
Lucy, notre arrière arrière arrière (...) grand-mère ? Pas tout à fait...
Du fait de sa bipédie, Coppens et ses collègues ont cru qu'A. Afarensis était un de nos ancêtres direct. Mais de nouvelles découvertes sont venues ébrécher cette idée notamment lorsque l'on a trouvé Toumaï, un squelette de pré humain âgé de 7 millions d'années, déjà bipède. On pense donc aujourd'hui qu'il y a 8 à 10 millions d'années, lorsque les lignées des grands singes et celles des humains ont pris des chemins séparés, une sorte d'embranchement évolutif a permis l'émergence de nombreuses lignées de pré humains "dont Lucy est une fleur", pour citer le paléontologue. Aujourd’hui, il est admis que les Australopithèques afarensis se situent sur une branche déjà séparée de celle du genre Homo. Lucy serait donc, non pas une grand-mère mais une très ancienne cousine éloignée.
Pourquoi Lucy est elle si célèbre ?
Depuis Lucy, d'autres A. afarensis ont été découverts. Divers ossements, attribués à des individus aux noms tels que AL 200-1 ou AL 444-2 ont été mis à jours en Ethiopie et au Kenya. On a même trouvé les ossements d'une famille de 13 individus en 1975. Puis a été exhumée une jeune australopithèque, Selam, en décembre 2000, à quatre kilomètres du lieu où Lucy a été découverte. Mais tous ces ancêtres n'ont pas été si "incarnés" que Lucy, sur qui on pouvait projeter une silhouette et presque un visage, pour la première fois. Selon Coppens, "le fait que ce soit une femme a beaucoup joué. On l’a présentée – à tort – comme la mère de l’humanité. Elle est devenue le symbole de la naissance de l’homme."
Par Marina Lena