BuddyRainbow a écrit :Appeler Dieu Père est souhaitable puisqu'il est notre créateur et celui qui se voue à lui entre dans une relation privilégiée de père-fils. Il n'y a pas de compétition entre les dénominations de Dieu. Dieu se fait appeler différemment et si "père", "dieu", "seigneur", etc. s'applique à d'autre, "Jéhovah" ne s'applique qu'à lui seul puisque c'est un nom propre.
Appeler Dieu Père est certainement la meilleure dénomination qui soit puisque c’est celle prônée par J-C.
Quant au Nom Jéhovah, je ne suis pas certain qu’il désigne Dieu le Père en exclusivité. Ce Nom pourrait désigner Elohim, c’est-à-dire le Père associé au Fils dans son œuvre créatrice. Cela pourrait expliquer pourquoi Jésus ne pouvait pas s’adresser au Père par le Nom Yhwh.
… Le Père et le Fils sont un et Jésus et ses disciples sont un (Jn 10:30, 17:21). Mais le Père et le Fils conservent leur identité respective. L'identité c'est d'abord le nom propre. Le nom du Père est mentionné et distingué dans le livre de la Révélation : "Et j’ai vu, et regardez ! l’Agneau qui se tenait debout sur le mont Sion, et avec lui cent quarante-quatre mille ayant son nom et le nom de son Père écrits sur leurs fronts."
Le Père et le Fils conservent effectivement leurs identités propres.
Le Nom du Père de la Révélation est sans doute le même que celui de Matthieu 6:9, mais lequel est-il ? La même question se pose à propos du Nom de l’Agneau écrit sur le front des élus, est-ce le Fils, Jésus, Logos, Christ, Agneau, Emmanuel, Seigneur… ?
Si pour les Juifs il semble évident que lorsqu’on parle du Père céleste il s’agisse de Yhwh, ce n’est pas nécessairement ce Nom que Jésus avait présent à l’esprit lorsqu’il parlait de Dieu le Père, car il ne l’a pas exprimé.
Il faut se replacer dans le contexte. Jésus s'adresse ici à des Juifs qui connaissent parfaitement le nom divin et son substitut comme le Nom (il y en a d'autres). Employer ce substitut, c'est pour un Juif nécessairement faire référence au tétragramme. Quant au lecteur des Evangiles, il ne peut pas "deviner s'il s'agit de Yhwh ou pas" à moins d'être averti que ce nom existe à l'oral comme à l'écrit : si sa version de la Bible ne dévoile pas le nom divin, que ce soit sous sa forme brute YHWH ou traduit de l'hébreu, Jéhovah, le lecteur sera incapable de faire le lien.
Vouloir faire le travail du lecteur en remplaçant Seigneur par Jéhovah peut également le conduire à faire des liens erronés, notamment dans les passages où Seigneur désigne Jésus Christ et non pas Jéhovah. Il suffirait par ex. de consigner dans la marge de l’Evangile les passages de l’AT cités par Jésus qui contenaient à l’origine le tétragramme, et il n’y aurait pas de problème.
Encore une fois, le plus vieux manuscrit désigné P52 date de la première moitié du IIe siècle et ne contient pas de nomina sacra contrairement aux manuscrits postérieurs. Dire que KS était "apparemment déjà présent dans le NT du Ier siècle" n'est qu'hypothétique. Une autre question est de savoir pourquoi certains mots plus que d'autres ont été sacralisés. Il s'agit à chaque fois de nom. Ce phénomène pourrait-il s'expliquer avec la forme abrégé de nom divin, Yah ? YH est la forme abrégée du nom divin Y[HW]H comme KS est la forme abrégée du nom K[URIO]S et TS celle du nom T[HEO]S en grec. On peut à bon droit se poser la question...
Le P52 est tellement fragmentaire qu’il ne contient aucun nom propre. On ne peut donc pas le retenir comme mss le plus ancien pour la discussion en cours. Par contre le mss soi-disant de Marc daté de l’an 90 contient IC pour Christ. Depuis sa découverte, il semble que ce mss ait été retiré du domaine public afin de laisser les spécialistes se prononcer. Il va falloir être patient…
L’idée d’abréger les Noms saints vient peut-être de l’abréviation YH. C’est probable.
Maintenant, si l’équivalent de YH avait figuré dans le NT grec dès le 1er siècle, on ne l'aurait certainement pas transformé par la suite en KS, à mon avis.
…L'idée que "les traducteurs de l’AT [aient] transcrit PIPI 2 siècles plus tôt" repose sur peu. Ce sont des témoignages du IVe siècle qui ne situent pas dans le temps cette erreur que faisaient certains de lire ou d'écrire le nom divin PIPI. Cette erreur assez courante semble-t-il est à situer au IVe siècle a minima mais affirmer que c'était le cas au IIe siècle c'est arbitraire. Cela put être au IIIe siècle ou après. Par ailleurs il est intéressant de remarquer que d'autres erreurs sont commises au IIe siècle. Irénée de Lyon (130-202), grande figure du christianisme, croyait en toute bonne foi que le nom divin signifiait "Seigneur" en hébreu (Contre les hérésies II, 24:2). Il est évident que cette croyance a favorisé la disparition du nom divin sous un titre comme Seigneur.
Pour la transcription erronée PIPI, on la retrouve (à vérifier) dans les Hexaples d’Origène, donc début du IIIème siècle, voire fin du IIème.
La croyance d’Irénée a pu en effet favoriser le remplacement du tétragramme par Seigneur dans le Sinaïticus par ex. Mais cette croyance s’appuie justement sur la présence antérieure du mot Seigneur en substitution de Jéhovah dans le NT. Cet argument va donc plutôt dans le sens d’une ‘contamination’ NT —> AT.
Il y a en effet quelque chose qui ne colle pas, BenFils, je suis d'accord avec vous. Et c'est là un sujet passionnant à explorer. Je suis actuellement entrain de me documenter sur cette forme grecque Iaô. Gertoux explique dans son livre qu'elle viendrait en fait d'un substitut du nom divin, qui signifie "Yah lui-même" (Yah hou' en hébreu > Yahou), et que les Juifs employaient cette formule en lieu et place du nom divin parmi les non-Juifs. Cela est attesté à Eléphantine et Padoua. Si c'était une traduction exacte du nom divin, et non son abréviation, toujours selon Gertoux il aurait plutôt fallu traduire par Iôa. Les noms théophores dans la Septante commence par Io- en grec là où il commence par Yeho- en hébreu. Il n'y a pas de h en grec et donc le e tombe : Yeho- > Yo- > Io-. D'où la forme Iôa, soit Ihooa en français si on replace le h. Cette forme Iôa est attestée par certains témoignages comme celui de Sévère d'Antioche (Ve siècle).
Très intéressant, en effet, et à priori possible.
N’étant ni linguiste ni hébraïsant il m’est difficile de contredire un spécialiste.
Je note néanmoins plusieurs petites choses.
Puisque יה a été transcrit Yah, on peut dire que יהוה pourrait être transcrit Yah_quelquechose. Ya_o semble faire l’affaire et répondre à une transcription syllabique du tétragramme assez cohérente.
Si les grecs avaient dû transcrire le tétragramme en supprimant le H, car sans correspondance, on aurait effectivement obtenu le Nom Yo, mais du coup le a final aurait été superflu. De ce fait, je ne pense pas que ce soit la méthode utilisée.