En complément à ce post présentant le chercheur arabisant-islamologue
Jean-François LEGRAIN
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voici ci-dessous un www de lui dans le système 'ACADEMIA' (très) intéressant que j'ai trouvé.
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L’idée de califat universel et de congrès islamique face à la revendication de souveraineté nationale et aux menaces d’écrasement de l’empire ottoman. À propos du Traité sur le califat de Rachîd Ridâ. Jean-François Legrain. Nouvelle édition, Lyon, Maison de l’Orient et la Méditerranée, 2006.
RÉSUMÉ . https://www.academia.edu/27099395/L_idé ... card=title
L’idée de califat ottoman universel s’est longtemps insérée dans une approche réductrice et idéologique de l’histoire musulmane : les divers califats (au moins en ce qui concerne les quatre premiers califes, les Umayyades, les Abbassides et, enfin, les Ottomans) sont ainsi souvent abordés en termes de continuité. Une telle historiographie fait, en effet, du califat ottoman une réalité indiscutée et indiscutable puisque arrimée à la tradition de « l’islam primitif ». Dans ce contexte, la brusque décision d’abolir le califat prise par Kemal Atatürk et approuvée par la Grande Assemblée Nationale de Turquie en mars 1924 constituerait une date charnière dans l’histoire de l’islam tout entière et marquerait une rupture essentielle. La documentation dépouillée en vue de la rédaction du cours de préparation aux Capes et agrégation d’arabe (1986) consacré au
Traité sur le califat de Rachîd Rîda amène à récuser une telle construction historique. Les propositions exposées ne sont pas entièrement neuves mais s’insèrent dans les perspectives déjà ouvertes par plusieurs historiens au début du XXe siècle et ensuite quelque peu oubliées. Les voici :
- L’utilisation du titre califal est relativement tardive dans l’histoire ottomane : simple mention dans la titulature des sultans, le titre est pour la première fois mis en avant dans un but politique lors de la négociation du traité de Küçûk-Karnaca (1774) entre la Russie et la Porte à propos du sort des Tatars de Crimée et du Kouban. Mais son maniement le plus spectaculaire n’intervient qu’un siècle plus tard avec Abdülhamit II ; il devient alors synonyme de panislamisme.
- Malgré quelques tentatives de justification, l’appropriation par les sultans ottomans du titre califal constitue une rupture par rapport à la tradition islamique telle qu’énoncée par Mawardî : les sultans, en effet, n’appartiennent pas à Quraych, la tribu du Prophète ; la passation du titre califal en 1516 (si elle a bien eu lieu, ce qui reste à démontrer) entre l’obscur descendant des Abbassides et Selim au Caire n’est en rien orthodoxe, etc.
- L’idée de califat universel telle que défendue dans le cadre de la politique panislamique ne peut se comprendre qu’en rapport avec la notion de papauté catholique. C’est, en effet, un diplomate français soucieux des intérêts de la Porte face à la Russie qui l’aurait lancée, et ce sont des chrétiens ottomans qui l’ont développée dans le contexte de la résistance aux tentatives répétées d’interventions européennes dans la région : faire du sultan ottoman un calife doté de pouvoirs spirituels universels légitimait le droit à protéger les musulmans de par le monde et à s’ingérer dans les affaires internationales ; cela justifiait en retour l’appel à la solidarité islamique autour de la défense du siège de Constantinople menacé.
- C’est au moment où les nationalismes ont pris le relais d’autres formes de mobilisation que le califat a disparu. Son abolition en 1924 n’a guère suscité de traumatisme parmi les populations islamiques. Une certaine agitation, certes, a bien eu lieu, divers congrès islamiques se sont tenus afin de tenter d’élaborer une réponse à cette nouvelle situation mais très vite les enjeux sont apparus comme se situant ailleurs ; les peuples musulmans ont continué à vivre leur histoire, désormais privés de cette institution que l’on avait pourtant voulu croire indispensable et essentielle.
La manipulation de l’idée de califat universel doté de pouvoirs spirituels aux XVIIIe et XIXe siècles apparaît bien comme le fruit de la récupération d’un concept profondément chrétien au profit de la défense de l’empire ottoman dans sa lutte contre les Puissances qui se réclamaient elles-mêmes d’institutions chrétiennes.
-- https://www.academia.edu/27099395/L_idé ... card=title
TABLE DE MATIÈRES
#### p.6 — Introduction
- p.9 : Bibliographie sur Rachîd Ridâ
#### p.10 — A/ L'empire ottoman jusqu’en 1908
## p.10 : 1 — Pénétration de l’occident
- p.10 Domination du capital étranger
## p.13 : 2 — Sultanat ottoman et titre califal au XVIIIe siècle
- p.14 : Utilisation du titre califal au XVIe siècle.
- p.14 : Le traité de Küçük Kaynarca (1774).
- p.15 : Mouradgea D’Ohsson et l’origine du califat ottoman.
- p.17 : D’Ohsson et les pouvoirs temporel et spirituel.
- p.18 : D’Ohsson et le traité de 1774.
- p.18 : Savvas Pacha.
- p.19 : L’idée de pontificat musulman chez les Européens.
- p.19 : L’Encyclopédie.
- p.20 : Le comte de Saint-Priest.
## p.21 : 3 — Les tanzimat
- p.21 : Résistance à l’occident.
- p.22 : Premières réformes occidentalisatrices.
- p.22 : Les tanzimat (1839-1876).
- p.24 : Les Jeunes Ottomans.
- p.26 : Abdülaziz 1er la réaffirmation du titre califal ottoman.
- p.26 : La Syrie ottomaniste.
- p.30 : Beyrouth et la Nahda.
- p.31 : Le séparatisme égyptien
## p.33 : 4 — Abdülhamit et le panislamisme
- p.33 : La constitution de 1876.
- p.34 : Despotisme et panislamisme.
- p.35 : Les émissaires et apologètes.
- p.36 : Jamâl Al-Dîn Al-Afghânî.
- p.40 : Le panislamisme comme protonationalisme.
## p.42 : 5 — La montée du nationalisme turc et l’opposition à Abdülhamit
- p.42 : Les Tatars et la naissance du nationalisme turc.
- p.44 : Émergence d’une identité turque dans l’empire ottoman.
- p.44 : Les Jeunes Turcs.
- p.46 : Ahmet Rõza. Les Jeunes Turcs et le califat.
- p.48 : Union et Progrès.
## p.49 : 6 — Les Arabes sous Abdülhamit
- p.49 : Prospérité et développement en Syrie.
- p.50 : L’opposition au sultan à Damas.
- p.51 : L’appel indépendantiste au mont Liban.
- p.52 : L’Égypte asservie et la montée du nationalisme.
## p.53 : 7 — Congrès islamique et califat arabe
- p.53 : Muhammad "Abduh et Al-Manâr.
- p.55 : Rachîd Ridâ et le califat (1898).
- p.56 : Al-Kawâkibî et le califat arabe.
- p.60 : Azoury et la Ligue de la patrie arabe.
- p.61 : Blunt et l’Avenir de l’islam.
- p.64 : Gasprinsky et le congrès musulman universel.
#### p.66 — B/ De l’ottomanisme aux nationalismes (1908-1924)
## p.66 : 1 — Émergence du nationalisme turc dans l’empire
- p.66 : La révolution des Jeunes Turcs
- p.67 : La monarchie constitutionnelle d’Abdülhamit (1908-1909).
- p.69 : La démocratie constitutionnelle ottomane (1909-1911).
- p.70 : Ziya Gökalp et le nationalisme turc.
## p.72 : 2 — De l’ottomanisme au nationalisme arabe
- p.72 : Le cercle du cheikh Al-Jazâ’irî .
- p.73 : Al-Ikhâ’ Al-"Arabî Al-"Uthmânî.
- p.73 : Al-Muntadâ Al-Adabî.
- p.74 : Le Parti de la Décentralisation.
- p.74 : Al-Qahtâniyya.
- p.75 : Al-Fatât.
- p.75 : Jam"iyyat Bayrût Al-Islâhiyya.
- p.76 : Le premier congrès arabe de Paris.
- p.76 : L’Irak et Al-"Ahd .
- p.77 : Les Arabes et le califat.
## p.78 : 3 — L’orient en guerre
- p.78 : L’Égypte
- p.78 : Damas durant la guerre.
## p.79 : 4 — L’enjeu du califat
- p.79 : La déclaration de jihâd.
- p.79 : Les missions de mobilisation.
- p.80 : La vaticanisation du califat.
- p.80 : "Alî Al-Mirghânî et le califat chérifien.
- p.81 : Mustafâ Al-Marâghî et le califat égyptien.
- p.81 : Ubayd Allah Sindhi et son armée de Dieu.
## p.82 : 5 — La diplomatie des grandes Puissances
- p.82 : Correspondance Hussein-Mc Mahon.
- p.83 : Les accords Sykes-Picot.
- p.84 : La Déclaration Balfour.
## p.84 : 6 — La révolte arabe
- p.85 : Damas et la révolte arabe.
- p.86 : La chute de Damas.
## p.86 : 7 — L’occupation de la région
- p.87 : Les projets de partage.
## p.87 : 8 — Fayçal à Damas et l’instauration du mandat
- p.88 : Fayçal en Europe, la Palestine.
- p.89 : Al-Nâdî Al-"Arabî.
- p.89 : Al-Fatât.
- p.89 : Hizb Al-Istiqlâl Al-"Arabî .
- p.89 : Al-"Ahd.
- p.90 : Les divisions nationalistes.
- p.91 : Le congrès syrien.
- p.91 : Les marchandages européens.
- p.91 : La Commission King-Crane.
- p.92 : Fayçal seul face à la France.
- p.92 : San Remo et l’instauration des mandats.
- p.93 : La chute du gouvernement arabe.
- p.94 : Bilan du gouvernement Fayçal.
## p.94 : 9 — Mustafa Kemal et la reconquête de la Turquie
## p.96 : 10 — Mustafa Kemal et le califat
- p.96 : Le CUP et la ligue des sociétés islamiques révolutionnaires.
- p.97 : Le nouvel État turc.
- p.99 : L’abolition du sultanat.
- p.102 : Déchéance de Mehmet VI et désignation d’Abdülmecit .
- p.103 : Les activités de Mehmet VI en exil.
- p.105 : Rachîd Ridâ et le califat.
- p.105 : Le mouvement du Khilafat en Inde.
- p.107 : Proclamation de la république turque.
- p.107 : Zia Gökalp et le califat.
- p.108 : Abolition du califat.
- p.109 : Réaction d’Abdülmecit.
- p.110 : Réaction de Mehmet VI.
- p.111 : Réaction de Hussein.
- p.111 : Réaction en Égypte.
#### Annexes p.115
## p.115 : Annexe 1 - Cheikh Ali 'Abd al Râziq et ses sept propositions condamnées
## p.117 : Annexe 2 - Les chiites en Irak et l’Empire ottoman depuis l’avènement de Abdülhamit II jusqu’à l’abolition du califat en 1924
- p.117 : L’Irak, marche ottomane aux confins de l’Empire
- p.117 : Villes saintes chiites irakiennes semi-indépendantes et ulémas iraniens
- p.118 : Les ulémas chiites en Irak et le panislamisme sous Abdülhamit II
- p.118 : Les ulémas chiites en Irak à la tête des luttes politiques
## p.121 : Annexe 3 : Cartes
#### p.123 : Résumé
InfoHay1915
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