L’Islam et la démocratie (dernière partie)
Voir : el ‘Adl fî Sharî’a el Islam wa laïsa fî e-Dîmuqrâtiya el Maz’ûma de Sheïkh ‘Abd el Muhsin el ‘Abbâd.
Par le biais des deux moyens d’élection précédemment cités, les deux meilleurs Khalifes que l’Islam n’a jamais connus furent désignés. ‘Alî fut nommé au Khalifat de la même façon qu’Abû Bakr. Quant à ‘Uthmân, il fut élu sur la décision de six têtes pensantes de l’état qu‘Omar (t) avait désignées juste avant sa mort. Au cours de sa vie, le Messager (e) a fait état des mérites de ses quatre futurs successeurs. Il affirme en effet selon el ‘Irbâdh ibn Sâriya : « Tenez-vous à ma tradition et à la tradition des nobles Khalifes bien guidés. Attachez-vous-y et prenez-les par les molaires. Prenez garde aux inventions car toute invention est innovation et toute innovation est égarement. »[1]
Un Hadith rapporté par Safîna nous apprend quant à lui : « La succession (Khalifat) prophétique durera trente ans. Puis, Allah donnera la royauté (ou Sa royauté) à qui il veut. »[2] Le premier et le meilleur roi musulman fut Mu’âwiya.(3] Après les quatre Khalifes, l’usage voulait que le souverain en place élise son successeur. Le Prophète (paix sur lui) a prédit également au sujet de ses quatre successeurs et des huit souverains de la dynastie omeyyade : « L’Islam restera fort et puissant jusqu’à la fin du douzième Khalife. »[4] C’est au cours de cette période qu’eurent lieu les conquêtes. Les frontières musulmanes s’étendirent vers l’Inde et la région du Sind,[5] et d’Est en Ouest de la Chine jusqu’à l’Océan Atlantique.
Si quelqu’un s’empare du pouvoir par la force, il devient le chef des musulmans incontesté. Une fois le pouvoir en place et que l’ordre est rétabli, il est illégitime de se rebeller contre lui. Les musulmans lui doivent donc obéissance. Ce fut le cas pour le premier Khalife abbasside qui s’insurgea contre le dernier souverain omeyyade. L’Imam Ahmed souligne dans sa profession de foi, comme le relève e-Lâlakâî dans son recueil e-Sunna : « Quiconque se rebelle contre le chef des musulmans divise les rangs des musulmans et s’oppose aux annales venant du Messager d’Allah (paix sur lui) sur la question. Cela dans la mesure où les sujets se sont réunis autour de leur chef et où ils lui reconnaissent l’autorité de n’importe quelle façon qu’il ait pu la prendre ; soit par consentement soit par la force. Si un tel dissident meurt, il le sera à l’état de l’ère païenne. Il est interdit à quiconque de prendre les armes contre le sultan et de s’insurger contre lui. L’auteur d’une telle action est un vulgaire innovateur qui n’est ni conforme à la Sunna ni sur la bonne voie. »[6]
Au sujet du Hadith : « Celui qui parmi vous voit une chose chez son émir qui lui déplait doit patienter, car quiconque vient à mourir alors qu’il s’est séparé de la communauté d’un empan meurt d’une mort païenne. » El Hâfizh ibn Hajar donne l’explication suivante : « Ibn Battâl a dit : « Ce Hadith est un preuve qu’il ne faut pas se rebeller contre le gouverneur en place même s’il est injuste. Les légistes s’accordent à dire qu’il incombe d’obéir au sultan qui a pris le pouvoir par la force et de faire le Djihad derrière lui. Il vaut mieux lui obéir que de se rebeller contre lui car la soumission permet de préserver le sang des musulmans et de garder les rangs paisibles. Pour conforter leur tendance, ils prennent le Hadith précédemment cité et autre en argument. La seule exception à leurs yeux, c’est que le souverain commette une apostasie incontestable. Le cas échéant, il est interdit de lui obéir. Il incombe plutôt de prendre les armes contre lui pour celui qui en aurait les moyens comme le dénote le Hadith suivant. »[7] Il fait allusion à l’annale de ‘Ubâda ibn e-Sâmit disant : « Nous faisons l’allégeance d’obéir à notre Imam que ce soit de notre plein gré ou non, dans la facilité et la difficulté, ou qu’il s’arroge des privilèges à nos dépends. Nous ne contestons pas l’autorité en place sauf si nous constatons un acte de mécréance incontestable qu’une preuve venant d’Allah vient vérifier. »
La façon de parvenir au pouvoir dans le système démocratique
Dans le système de la prétendue démocratie, le pouvoir s’obtient par la constitution d’un parti politique en faveur duquel les citoyens votent. Ces derniers choisissent un candidat de leur choix. Après le partage du scrutin, le candidat ayant le plus de voix est désigné président. Or, ce procédé que certains musulmans ont importé d’ailleurs est contraire à l’Islam pour plusieurs raisons :
Premièrement : Le système du vote aboutit à la division de la société en partis, alors que l’Islam prône l’unité et bannit la divergence. Allah révèle :
[Accrochez-vous tous ensembles à la corde d’Allah et ne vous divisez point],[8] et : [Ne soyez pas comme ceux qui se sont divisés et qui ont divergé après que leur soient venues les preuves évidentes].[9]
[Ceux qui se sont divisés pour se scinder en schismes. Tu n’as aucun lien avec eux. Leur sort revient plutôt à Allah. Il les informera ensuite de ce qu’ils faisaient sur terre].[10]
[Ne soyez pas comme les païens • Ceux qui ont divisés leur religion pour se scinder en schismes ; chaque parti se contente de ses acquis].[11]
[Tu ne peux trouver des gens croyants en Allah et au Jour Dernier avoir de l’affection pour ceux qui s’opposent à Allah et à Son Messager, quand bien même ils seraient leurs pères, leurs fils, leurs frères ou leurs familles. Ceux-là, Allah leur inscrit la foi dans leur cœur et Il les assiste d’un Esprit venant de Lui. Il les fait entrer dans des jardins sous lesquels coulent des rivières et où ils demeurent à jamais. Allah les agrée et eux l’agréent • Ceux-là constituent le parti d’Allah • le parti d’Allah n’est-il pas le bienheureux !][12]
[Voici Mon chemin qui est droit alors empruntez-le et ne suivez pas les sentiers qui vous feront dévier de sa voie. Voici ce qu’Allah vous recommande ; ainsi allez-vous Le craindre].[13]
Le Messager d’Allah (paix sur lui) déclare : « Allah vous agrée trois choses et Il ne vous agrée pas trois choses : Il agrée que vous L’adoriez sans rien Lui associer, que vous vous accrochiez tous ensemble à Sa Corde sans vous diviser. Il n’agrée pas les on-dit, que vous multipliiez les questions et que vous gaspilliez vos biens. »[14] Ainsi, la soi-disant démocratie s’oppose aux principes de l’Islam étant donné qu’elle est basée sur le schisme et la division.
Deuxièmement : Dans un système soi-disant démocratique, le pouvoir législatif est aux mains d’une partie du peuple alors que dans l’Islam il appartient exclusivement au Tout-Puissant. Quant au Messager (paix sur lui), son rôle est de transmettre la Révélation.[15] Allah révèle :
[Il ne parle pas de ses propres pulsions • mais il est inspiré par la Révélation].[16]
[Quand Allah et Son Messager décide d’une chose, il n’appartient pas à tout croyant et à toute croyante de faire un choix les concernant. Quiconque désobéit à Allah et à Son Messager, sombre ainsi dans un égarement manifeste].[17]
(Quiconque se rebelle à Sa Loi doit se méfier de ne pas subir une tentation ou un châtiment terrible).[18]
[Les enseignements que le Messager vous offre, prenez-les et ce qu’il vous interdit, abstenez-vous-en et craignez Allah car Allah a le châtiment terrible].[19]
[Puis, Nous t’avons mis sur le chemin de la Loi ; suis-le donc et ne suis pas les passions de ceux qui ne savent pas • Ils ne peuvent nullement te protéger contre Allah. Les injustes sont les alliés les uns des autres tandis qu’Allah est l’Allié des gens pieux].[20]
[Ou bien ont-ils des associés qui leur légifèrent des lois de la religion sans n’avoir reçu aucun consentement d’Allah !][21]
Il est néanmoins possible d’établir certains codes en vue d’organiser la vie en société dans la mesure où ils ne s’opposent ni au Coran ni à la Sunna. Dans un système soi-disant démocratique, le pouvoir législatif est aux mains d’un certain groupe élu par le peuple et que les membres vont représenter au Parlement. Les lois qu’ils promulguent à leur guise ne se fondent sur aucune religion. Pourtant, depuis l’avènement de notre Prophète Mohammed (paix sur lui), l’Islam est la seule religion convenable comme le souligne le Verset :
[Toute religion désirée par quiconque autre que l’Islam, ne lui sera pas accepté et il comptera dans l’au-delà parmi les perdants].[22] Le Prophète (paix sur lui) dit à ce sujet : « Par Celui qui détient mon âme entre Ses Mains ! Quiconque dans cette communauté qu’il soit juif ou chrétien entend parler de moi et ne croit pas au message que j’ai reçu avant de mourir, comptera parmi les gens de l’Enfer. »[23]
Troisièmement : L’accès au pouvoir s’obtient grâce à la majorité des votes mais nous avons vu que l’Islam tolère deux façons de désigner le chef d’état ; soit les responsables de l’autorité s’accordent de façon unanime sur le choix du khalife soit le Khalife en place désigne lui-même son successeur. Il ne revient pas à n’importe qui dans la religion musulmane de désigner le gouverneur suprême. Cette tâche revient uniquement aux sages et aux savants qui sont les responsables de l’autorité. Un simple citoyen ne fait que suivre leurs décisions. Quant au mode d’élection dans un système démocratique, il est fonction du nombre de voix que les candidats obtiennent. Il ne fait aucune différence entre les personnes compétentes et le simple citoyen. Si les gens bas (dans le sens moral du terme ndt.) constituent la majorité des votants, ils vont forcément choisir quelqu’un comme eux, car comme il est dit les oiseaux de même race se cherchent entre eux. Autrement dit, les faucons avec les faucons, les vautours avec les vautours, les hiboux avec les hiboux, etc.
Quatrièmement : Dans le système démocratique, chaque candidat met tout-en-œuvre pour accéder au pouvoir. Dans l’Islam, la moindre fonction de responsabilité réclame d’avoir pour seule ambition de défendre et d’établir la religion d’Allah. C’est pourquoi, il interdit formellement à ses adeptes susceptibles de manquer à leurs devoirs, de solliciter toute responsabilité. Quiconque aspire à la moindre fonction doit se la voir refusée. ‘Abd e-Rahmân ibn Samura raconte à ce sujet : « Le Messager d’Allah (paix sur lui) m’a dit : « Hé ‘Abd e-Rahmân ! Ne sollicite pas l’autorité. Si tu la reçois après l’avoir demandée, tu seras livré à ton sort mais si tu la reçois sans l’avoir demandée tu seras assisté dans ta fonction. » »[24] D’après les recueils e-Sahîh d’el Bukhârî et de Muslim également, selon Abû Mûsâ el Ash’arî, je suis entré avec deux de mes cousins chez le Prophète (paix sur lui). L’un deux demanda : « Ô Messager d’Allah ! Investis-nous à la tête d’une des provinces qu’Allah a mis sous ton autorité ! » Le deuxième formula la même demande. Le Prophète (paix sur lui) répondit dès lors : « Par Allah ! Nous n’offrons aucune fonction à celui qui la réclame ou qui la désire. »[25] Ce Hadith nous enseigne que le Prophète (paix sur lui) a refusé d’investir ses deux hommes de l’autorité étant donné qu’ils l’avaient réclamée. Certaines voies de ce Hadith recensé dans les recueils d’el Bukhârî et Muslim précisent que le Messager (paix sur lui) investit Abû Mûsâ el Ash’arî à la tête du Yémen, lui qui s’était abstenu de faire la moindre demande.
Quant au système démocratique, celui-ci est basé sur le multipartisme et la concurrence acharnée des uns et des autres en vue d’accéder aux fonctions de l’autorité. Les candidats au pouvoir vont jusqu’à investir des sommes énormes en vue de se faire élire. Comme pour les jeux de hasard, à la fin du vote, il y a des gagnants et des perdants. En outre, les candidats influencent le choix des citoyens à travers des promesses alléchantes.
(1] Rapporté par Abû Dâwûd (4607) et e-Tirmidhî (2676) qui fit le commentaire suivant : « Ce Hadith est bon et authentique. »
(2] Rapporté par Abû Dâwûd (4646) et d’autres. Ce Hadith est authentique ; Sheïkh el Albânî le recense d’après neuf références différentes.
(3] L’auteur a consacré une Risâla sur les mérites du noble Compagnons Mu’âwiya (t) et qui s’intitule Min Aqwâl el Munsifîn fî e-Sahâbî el Khalîfa Mu’âwiya (N du T.).
[4] Rapporté par Muslim (1821).
[5] L’Indus ou anciennement le Sindhu est un fleuve de l’Asie méridionale. Il prend sa source dans l’Himalaya et se jette dans la mer d’Oman (ou mer d’Arabie) près de Karachi. Long de 3180 km, il coule pour la moitié à travers le Pakistan en passant en amont par le Cachemire. (N du T.).
[6] E-Sunna d’e-Lâlakâî (1/161).
[7] Fath el Bârî (13/7).
[8] La famille de ‘Imrân ; 103
[9] La famille de ‘Imrân ; 105
[10] Les troupeaux ; 159
[11] Les romains ; 32
[12] La polémique ; 22
[13] Le bétail ; 151-153
[14] Rapporté par Muslim (1715), selon Abû Huraïra ().
[15] Il prend le nom de législateur dans le sens où il transmet les lois aux hommes, mais il n’en est pas l’auteur (N. du T.)
[16] Les astres ; 3
[17] Les coalisés ; 36
[18] La lumière ; 63
[19] Le rassemblement ; 7
[20] L’agenouillée ; 18-19
[21] La concertation ; 21
[22] La famille de ‘Imrân ; 85
[23] Rapporté par Muslim (153) comme nous l’avons déjà vu.
[24] Rapporté par el Bukhârî (6622) et Muslim (1652).
[25] Rapporté par el Bukhârî (7149) et Muslim (1733).
Source :
Mizab Over Blog Le site de Karim Zentici, diplômé en langue arabe à l'université islamique de Médine.