Je n'ai jamais rien dit d'autre que « tel qu’il est défini », même si toute définition qu'on m'a donnée est toujours entrée dans les critères de ma démonstration d'inexistence.pauline.px a écrit :Avec le « tel qu’il est défini » je suis parfaitement d’accord avec vous.
Mais j’ai eu le sentiment que la démonstration de Vicomte concernait tout D-ieu, « défini » ou « hors toute définition ».
Attention toutefois : « En dehors de toute définition » est en fait déjà une définition. En plus reposent en fait sur lui toute une série de traits d'objectivation tacites (dieu personnel doté de pouvoirs, notamment). Car ceux qui formuleraient un authentique « Hors de toute définition » devraient s'attendre à ce que se révèlent une quantité d'entités là où ils supposaient qu'il n'y en ait qu'une seule, des entités appelées espace-temps, causalité, psychologie, etc.
En fait, une des conséquences de ma démonstration est que même dans ce cas ce dieu "approché" (que ce soit par les glissements de définition ou la démarche apophatique — qui est en fait une aberration épistémologique) ne peut pas exister : précisément parce que ses traits d'objectivation sont présents, même si tacites, et construits de manière invalide (cf. ce que je disais plus haut).pauline.px a écrit :[...] Depuis longtemps, les mystiques explorent une voie qui pourrait très bien être la seule voie possible pour effleurer D-ieu et, un peu parallèlement à cette démarche, la théologie apophatique pose l’impuissance de notre cerveau à définir D-ieu.
De toute façon, le croyant est toujours perdant dans sa démarche si son objectif est de tenter de concevoir un dieu existant : justement parce qu'il place la charrue avant les bœufs, c'est-à-dire qu'il place la conclusion désirée avant les inférences qui y mènent. On aboutit à une induction infinie, ne permettant mécaniquement aucune connaissance (l'une de deux raisons qui font que la démarche apophatique une aberration) même si par le plus grand hasard on tombait sur une conclusion potentiellement adéquate (paradoxe de la montre arrêtée). Cette démarche n'a aucune chance d'aboutir et ne peut au mieux engendrer que des illusions de certitudes.
Oui. Et de manière juste et opérante. (Ce qui n'empêche pas d'affiner ces définitions au cours du temps et en fonction des objectifs de recherche.)pauline.px a écrit :Bref ! Pas de définition car définition témoigne toujours d’une finitude (je songe à l’inexistence de l’ensemble de tous les ensembles).
J’ignore même s’il existe une définition rigoureuse au mot «définition», et si un concept conceptualise précisément le mot « concept»…
Et, encore une fois, même lorsque tu formules "dieu" ou "exister" sans vouloir les définir, tu en possèdes en réalité une représentation bien plus précise que tu ne le dis (et peut-être ne le conçois). Si tu n'en dis pas plus, je crains que c'est parce que tes représentations ne constituent pas une exception dans celles que Pascal Boyer décrit dans Et l'homme créa les dieux (Paris, Gallimard, 2001). Le rapport que tu laisses deviner à ton agent surnaturel me semble en effet correspondre à un mécanisme scientifiquement décrit et constitue un élément de plus pour t'inviter à concevoir qu'il n'est pas impossible que le dieu que tu t'imagines n'existe nulle part ailleurs que dans tes circuits neuronaux.
Je crois que tu fais une erreur de compréhension. Encore une fois tu confonds inconnu et inconnaissable et tu te lances dans une induction infinie que te ne peut te mener nulle part.pauline.px a écrit :<<<2. S’il existe un réel qui échappe à tout sujet connaissant (quoique cela puisse vouloir dire), ce réel a non seulement aucun intérêt pour nous puisqu’on ne peut le connaître >>>
Je serais assez d’accord avec vous si nous pouvions adopter une interprétation radicale. Dans la perspective radicale, tout se passerait comme si deux mondes étaient irréductiblement séparés. Il y a une analogie avec le Tsim Tsoum de la Kabbale qui évoque l’idée que le Saint, béni soit-Il, pour réaliser la Création Se retire afin de laisser une place à notre monde. Le Créé est comme une partie sans D-ieu.
Ce serait un peu triste de ne rien savoir de l’autre monde et des tas de gens chercheraient à franchir l’abîme qui sépare les deux mondes, mais moi, comme vous, j’attendrais sans la moindre impatience que leurs efforts soient couronnés de succès.
Dès lors que tu forges des concepts pour décrire des manifestations du réel, alors ces concepts peuvent décrivre le champ du connaissable (qui est peut-être inconnu et le sera toujours) mais pas celui de l'inconnaissable (sinon tu ne penserais même pas à en formuler des concepts).
"Monde", "Mon monde", "l'autre monde" sont des concepts. Il faut commencer par en examiner la validité épistémologique avant de s'en servir.pauline.px a écrit :Toutefois,
1 ) Il m’est impossible de distinguer a priori «l’inconnu de mon monde» de «l’inconnaissable de l’autre monde».
En l'occurrence, si tu n'en as pas les concepts, tu ne peux de toute façon même pas en opérer la distinction. Mais tous les nouveaux concepts qui apparaissent ne peuvent décrire de toute façon que le champ du connaissable (même s'ils sont invalides). Donc dieu, qui est déjà formulé en tant que concept, est forcément un élément du connaissable s'il existe.
Quoi que tout cela veuille dire, le concept de dieu a déjà été formulé, donc si dieu existe il appartient au champ du connaissable.pauline.px a écrit :2 ) Je ne peux pas poser a priori que ce monde qui m’échappe échappe nécessairement aussi à tout sujet connaissant. L’abîme entre les deux mondes me paraît infranchissable mais il a peut-être été franchi.
3 ) Je ne peux pas poser a priori que ce monde qui m’échappe aujourd’hui m’échappera nécessairement demain.
4 ) Je ne peux pas affirmer a priori que si l’autre monde m’échappe alors nécessairement et symétriquement j’échappe à l’autre monde.
Es-tu en train de dire qu'un extra-terrestre t'a contactée ?pauline.px a écrit :[...] Cette proposition insolite est-elle «par nature» plus farfelue que la proposition analogue que m’a faite récemment un habitant d’une exoplanète ?
Non : fausse. Parce qu'elle fait croire qu'elle s'applique à l'inconnaissable alors qu'en fait elle s'applique à des lacunes du connaissable.pauline.px a écrit :<<<2 bis ---, et par conséquent, toute hypothèse sur ce réel est nécessairement fausse. >>>
Indémontrable tout au plus. [...]
Petite bibliographie au passage : Paul Boghossian, La peur du savoir (déjà cité plusieurs fois).
Ce n'est pas un problème dans le cas d'un examen épistémologique. Il y a très souvent chez le croyant confusion entre hypothèse et croyance, auxquelles ils donnent à tort le même statut épistémologique.pauline.px a écrit :[...] Bref, pour plonger l’insolite dans le faux, ce n’est pas facile logiquement.
Au sein de notre monde à nous, comment démontrer que tous les corbeaux sont noirs ? (est-ce vrai ?)
Les choses sont claires d'un point de vue de la prédictivité et de la vérifiabilité : Dieu n'existe pas, pas plus que Zeus, Quetzalcoatl, Odin, les fées ou la Théière de Russel.
Et tous les corbeaux sont normalement noirs. Si l'on en trouve un albinos (ce qui arrive), cela ne remet pas en question la première proposition, car on sait comment, pourquoi et de quelle façon ils sont noirs.
Et de la même façon, on comprend de mieux en mieux comment, pourquoi et de quelle façon les croyances infectent les cerveaux(1) ou simplement comment, pourquoi et de quelle façon le cerveau produit des concepts et élabore des connaissances à partir d'eux. Et ce concept nébuleux qu'est "dieu" perd alors tout son mystère et trouve sa place dans la cohérence de l'univers.
On le peut. Effectivement pas a priori (même si en tant qu'hypothèse ça n'a épistémologiquement rien d'invalide) mais le résultat est là.pauline.px a écrit :On peut énumérer des tas de trucs qui n’existent pas, des tas de trucs qu’il serait ridicule de démentir tellement ils sont invraisemblables, cette démarche pour amusante qu’elle soit ne démontre rien.
D'autant qu'on ne peut prétendre a priori qu’un éléphant rose ou un chat invisible soient de même nature que D-ieu.
Cf. Michael Shermer, Why People Believe in Weird Things: Pseudo-science, Superstition and Other Confusions of Our Time, New York, W.H. Freeman, 1997.
Quelle que soit cette place, ce ne peut être en aucun cas celle d'un dieu. Précisément parce que celui-ci est réputé interagir avec notre univers, avec toutes les contradictions que cela impose. (Par exemple, quand on a compris ce qu'était le Big Bang, c'est-à-dire non pas une explosion mais le début du temps lui-même, il ne peut y avoir d'avant le Big Bang, pas même dieu, donc ce dernier ne peut pas avoir créé l'univers.)pauline.px a écrit :[...] Quant à la place qui resterait à D-ieu dans ce monde-ci, je ne partage pas du tout votre sentiment.
Il me semble que l’amont du Big Bang et l’aval du Big Crunch laissent de la place à un autre monde.
Pourtant, si on réduit tes propositions à l'essentiel de leur articulation, tu dis exactement ce dont tu t'interdis : tu places précisément dieu dans les trous laissés par l'exercice de la construction logique des connaissances. Autrement dit, dieu est ce qui échappe à tout examen de vérité, donc ton dieu est condamné à n'être jamais vrai.pauline.px a écrit :Puis, la place prépondérante du hasard dans l’histoire de notre monde ne manque pas de m’interpeler, la mécanique quantique ne laisse-t-elle pas suffisamment de jeu dans tous les rouages de notre monde pour qu’il s’ouvrît à l’interventionnisme de l’autre monde ?
Cela ne signifie pas que D-ieu doit nécessairement remplir ces « trous » (ce serait revenir à l’hypostase de notre ignorance). Tant que ces « trous » existent, à la fois ils demandent aux humains de réfléchir sur leur statut sans exclusive, et aux scientifiques de les combler.
L'expérience personnelle est une chose, l'examen objectif et logique des faits en est une autre. Les connaissances ne se forgent pas à coups de convictions personnelles.pauline.px a écrit :Voilà pourquoi la démonstration de Vicomte me paraît contredite par mon expérience personnelle. La Science semble bien constituer au fil de sa démarche des bulles d’inconnaissable au sein même de ce monde-ci.
Et non, la science ne constitue pas des bulles d'inconnaissable, mais ouvre des territoires inconnus, ce qui n'est absolument pas la même chose (et je vois bien que tu n'as pas encore compris cette distinction).
Tu ne le peux peut-être pas, mais la science, elle, le fait sans problème. Absolument toutes les assertions de l'Intelligent Design ont été examinées et réfutées dans le champ où elles ont prétendu s'inscrire (c'est-à-dire celui de la science).pauline.px a écrit :Et je ne peux pas balayer d’un revers de main la question que nous posent les tenants du dessin intelligent ou quelques anthropistes. Il ne suffit pas d’y percevoir un nouveau créationnisme ou un concordisme astucieux pour évacuer cette problématique.
Si tu penses à l'une d'entre elles en particulier pour laquelle il te semble impossible de la réfuter, je me ferai un plaisir de te démontrer le contraire pour peu que tu m'en donnes les références.
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(1) Sur la croyance en tant qu'infection contagieuse (ce qui n'a rien d'irrespectueux), je m'en justifie là-bas : http://www.forum-religion.org/sciences/ ... 22139.html