Mil21 a écrit :
Selon moi, penser est une simple affaire de mécanisme; rien de spirituel dans tout cela et en effet, la pensée de ce fait est soumise à la causalité du fait que la moindre modification d'un paramètre a un impact sur la pensée que nous allons avoir la seconde suivante.
Un deuxième point, le déterminisme complet n'existe pas, si tu veux, tu peux utiliser le terme de prédéterminisme qui lui est un forme de fatalisme.
Le déterminisme ne doit pas être confondu avec le fatalisme au sens où le principe "tout est écrit" est trop absolu pour que l'on puisse rester déterministe. Comme nous sommes incapables de prévoir ce qui va nous arriver ou même les pensées que nous allons avoir, nous sommes incapable de dire que tout est écrit. Seule un être omniscient le pourrait, d'ailleurs on pourrait aussi dire que si cet être omniscient existait, il serait lui aussi soumis aux lois de causes et d'effet, son omniscience elle-même affecterait les circonstances, rendant stupide l'affirmation "Si un être omniscient lisant son avenir, le modifie, alors ce qu'il a lu n'était pas son avenir". Il y a tellement de paramètres à prendre en compte que le déterminisme se détache du fatalisme dès lors que nous sommes incapable d'affirmer que tout est écrit.
Ça peut ne pas paraitre clair, il est vrai que j'écris bien souvent ce que je pense et que les gens parfois ont du mal à suivre. Même à l'oral parfois, je perds des gens.
Il est vrai que le déterminisme est déroutant et se rapproche fortement du fatalisme. Cependant, je ne serais pas aussi absolu qu'un véritable fataliste, je me refuse à penser qu'absolument tout soit prédestiné. Si cela te semble paradoxal, je le comprendrais parfaitement, mais si l'on a donné deux termes différents, c'est qu'il y a une raison.
Bonjour, je me permets d’intervenir dans cette discussion pour remettre certaines choses en perspective.
Shan a écrit : En théorie, si tu connais toutes les lois de l'univers, avec toutes les valeur exactes des toutes les constantes, la position et la vitesse de tous les atomes au moment du big bang, tu peux tout savoir, passé et avenir. Mais c'est loin d'être une petite hypothèse et ça présuppose une puissance de calcul inimaginable (pour moi en tout cas).
A ceci près qu’il n’y avait pas encore eu la moindre formation d’atome « au moment du big bang », Shan a parfaitement défini ce qu’est le déterminisme. C’est Laplace qui le premier avait dit cela : dans un monde physique (Newtonien) où tout est prévisible par le calcul si l’on connaît parfaitement les conditions initiales, on pourrait bien-sûr calculer tout le futur de l’Univers si l’on en connaissait parfaitement toutes les conditions initiales.
De la même manière, le neurobiologiste JP Changeux a écrit :
Je ne sais pas ce que vous êtes en train de penser, mais lorsque nous connaîtrons toutes les interactions neuronales ayant lieu dans votre cerveau, je saurai non seulement ce que vous pensez mais aussi ce que vous allez penser dans deux minutes et que vous ne savez pas encore.
(JP Changeux, « L’homme neuronal »)
Il est donc limpide que si l’on pousse le raisonnement réductionniste jusqu’au bout, alors on ne peut qu’en conclure que « tout est écrit » (selon un enchaînement causal logique).
Il y a ensuite quelques nouveautés qui ont fait leur apparition en science, comme la théorie du Chaos (illustrée par l’effet papillon), le théorème d’incomplétude de Gödel, ou encore le principe d’incertitude (en mécanique quantique). Un lien semble exister entre ces nouveaux concepts : on parle ainsi d’incomplétude (Gödel), d’imprédictibilité (théorie du Chaos), d’incertitude (Heisenberg), d’indécidable… il semble alors plutôt que « rien n’est écrit » et que le « hasard » règne en maître.
Nous pouvons ajouter à cela ce que l’on appelle les « synchronicités », ou encore « coïncidences synchroniques » : vous vous posez une question tout en entrant dans une librairie, vous prenez un livre au « hasard » et en le feuilletant vous avez un début de réponse à votre question.
Qui n’a pas un jour pensé à un ami perdu de vue et, au même instant, recevoir son appel téléphonique? La synchronicité peut se définir comme « une occurrence simultanée de deux événements liés par le sens et non par la cause ». Deux événements que rien ne semblent reliés mais qui, associés, prennent une signification dans la conscience du témoin.
J’ajoute à cela le fait que la mécanique quantique a démontré qu’il existait un niveau de réalité hors de l’espace et du temps, mais qui a une influence causale sur le monde physique (le fameux « réel voilé » cher à Bernard d’Espagnat).
Je voudrais simplement porter à votre attention le fait que nombreuses personnes n’ayant aucun problème d’ordre psychiatrique, considèrent qu’il peut exister un ordre d’organisation de la matière et des événements autre que la causalité, et que l’on nomme cet ordre « hasard » jusqu’à plus amples informations. Il n’est pas aberrant de penser qu’à côté de la causalité puisse exister un ordre ayant trait au sens.
Pour finir sur une note plus poétique, les traditions asiatiques considèrent que « rien n’arrive jamais par hasard, tout événement a une raison d’être ». Il existe un dicton zen à ce sujet : « La neige tombe, avec chaque flocon à la bonne place ».
Bref, nous pourrions peut-être poser la question selon ces termes : le hasard existe-t-il ?