J'm'interroge a écrit :On pourrait la traduire ainsi si le 'réel' et sa cohérence étaient deux choses distinctes...
À mon humble avis, toute cette confusion vient de ce que nos esprits sont encombrés de métaphysique et de la notion d'existence 'en soi' en particulier. Nous ne voyons généralement pas que le fait que nos représentations mathématiques soient de notre fait n'est pas contradictoire avec une essence purement mathématique du réel qui nous englobe, nous, ainsi que nos représentations.
S'ils sont tout aussi cohérents, ils ne peuvent pas être moins réels.HumanaFragilita a écrit :Je m’avance en terrain miné, mais il me semble que l’on peut « à première vue » concevoir le réel et sa cohérence comme deux choses distinctes. Simplement parce qu’il est possible d’imaginer des univers différents du nôtre et tout aussi cohérents, en faisant quelque peu varier les lois physiques que nous connaissons.
Leur réalité ne tiendrait comme pour la nôtre que de leur cohérence, car que seraient-ils en dehors de leur cohérence?
En quoi tient la concrétude de nôtre réalité selon toi?HumanaFragilita a écrit :Je suis conscient de la limite de cette spéculation, puisque ces univers différents n’ont aucune réalité concrète, ils sont simplement le produit d’équations modifiées. Mais on ne peut écarter cette possibilité, puisque rien ne prouve, en l’état actuel de la science, que les lois physiques de notre univers - donc la cohérence que nous observons - soient les seules possibles. A vrai dire, les théories du multivers reposent entièrement sur cette variation.
Oui c'est bien cela, ce que nous appelons "réel" est bien ce dont nous pouvons parler objectivement parlant, autrement dit c'est bien la cohérence appréhendée (empiriquement et expérimentalement), le reste n'étant forcément au mieux qu'hypothétique.HumanaFragilita a écrit :Mais peut-être est-ce cela que tu veux me dire : est-ce que le réel et sa cohérence ne se confondent pas totalement, au point de n’être qu’un seul et même objet ? Ce que nous appelons « réel » n’est alors que la perception que nous avons de l’interaction des lois qui font émerger la matière, nous-mêmes et l’univers dans son ensemble.
Pourquoi vouloir chercher une origine à la cohérence perçue et mesurée?HumanaFragilita a écrit :Je me rallie tout à fait à ce point de vue. Cela revient à dire que le réel se confond avec la physique qui le sous-tend, mais pour autant cela ne dit rien sur l’origine de cette physique, et de le cohérence que nous observons.
La voir comme simplement possible suffit amplement à mon sens.
Non la cohérence qui sous-tend la matière n'est en rien matérielle si par 'matière' l'on entend ce que l'on appelle ainsi dans notre expérience.HumanaFragilita a écrit :Tant que l’on n’y introduit pas artificiellement une origine transcendante (ce à quoi le point de vue platonicien ouvre facilement la porte), cela reste selon moi une vision matérialiste des choses.
Je ne vois pas 'le monde des idées' de Platon comme toi, je ne le vois pas comme transcendant et je ne pense pas que Platon lui-même le voyait ainsi.
J'm'interroge a écrit :Les phrases soulignées dans ton texte sont contradictoires selon moi.
Et moi je dis avec les physiciens que la matière n'existe pas objectivement en dehors de notre champ empirico-expérimental.HumanaFragilita a écrit :Non, il n’y a pas de contradiction. Le matérialisme postule que tout est matière, quel que soit le processus qui constitue cette matière. Le matérialisme postule simplement qu’il n’y a pas de transcendance (âme, esprit, souffle divin ou autre) qui gouverne la matière.
Je pense que l'on ne puisse plus aujourd'hui présenter les choses ainsi.HumanaFragilita a écrit :Le fait que la matière naisse d’interactions physiques fines au niveau quantique n’implique pas de transcendance, cela nous dit juste qu’elle émerge à partir de phénomènes complexes. Et même qu’elle pourrait être d’une autre nature si les lois physiques peuvent varier.
Les phénomènes sont d'ordres II, c'est-à-dire qu'ils n'existent qu'en tant que perceptions-représentations. Il n'y a pas de 'phénomènes' d'ordre I. Les propriétés locales de la matière n'ayant de sens que de notre point de vue d'êtres localisés, il ne peut pas y avoir de mouvement 'en soi', autrement dit en dehors de notre perception. Et encore... Parler de la réalité du mouvement même pour ce qui est de notre expérience, mène à de nombreux paradoxes logiques insolubles...
Elle (ton "échelle de réalité mathématique") n'est ni supérieure, ni transcendante, mais tout ce que nous observons et d'ordre II, c'est-à-dire impliqué dans le monde I d'essence purement mathématico-logique.HumanaFragilita a écrit :En revanche, le point de vue platonicien, qui postule que les mathématiques sont la réalité, est beaucoup plus douteux de ce point de vue. Il ouvre en effet la porte à une transcendance, par le biais d’une échelle de réalité mathématique supérieure d’où tout ce que nous percevons procéderait. Dans ce cas, les choses sont ainsi parce que les mathématiques sont ainsi.
Mais attention, il faut bien comprendre que nos mathématiques, autrement dit celles que nous développons et formalisons, sont quant-à elles d'ordre III.
Mais le fait est que nous sommes là, c'est un point essentiel à ne pas omettre.HumanaFragilita a écrit :Pour ma part, je pense que les mathématiques sont ainsi parce que les choses sont ainsi. Et si l’univers nous parait ordonné, c’est parce qu’il est complexe et en état d’équilibre. Si cet équilibre était différent, il serait ordonné différemment, et nous ne serions peut-être pas là pour le voir.