Réponse à Guilhem.
Les écritures sacrées ont ceci de particulier qu'elles ne cessent pas d'être considérées même après leur falsification. Si vous êtes croyant, alors vous devez apprendre à voir la révélation à travers tous les artefacts du monde temporel. Même falsifiés, les textes ont un sens.
Ainsi, vous dites :
"corrections" destinées à leur retirer leur caractère dualiste et à les faire correspondre aux données de l'AT.
C'est justement pour en finir avec le dualisme de l'AT que le NT a été fait. Ainsi, les corrections restaurent le dualisme en le faisant perdurer.
Selon certains chercheurs actuels, les plus vieux textes seraient l'évangile de Jean, et l'évangile de Thomas. Bien sûr, l'évangile natif de Jean nous est inconnu, et celui que nous avons, bien plus tardif, est largement retravaillé. Toutefois, il s'oppose assez manifestement aux évangiles synoptiques et se montre particulièrement anti-judaïque. Les évangiles synoptiques tentent de remettre l'enseignement nouveau dans un cadre judaïque à cause de la réaction juive que le johannisme avait suscitée. Celui des apôtres qui tente un équilibre est Paul, en expliquant le lien entre les deux testaments et orientant vers la solution non-dualiste. Aussi, il ne faut considérer de Paul que les dix épitres qu'on lui rattache et qui ne font l'objet d'aucune réserve. De même, il convient d'avoir certaines réserves au sujet des Actes des apôtres, qui semblent là encore être une version tardive d'un original perdu qui pourrait être les "Actes de Paul".
C'est pour cela que Marcion à proposé de séparer l'ancien pacte (testament) qui n'a plus de raison d'être du nouveau pacte qui devient la règle.
C'est exact. Marcion enseignait une séparation entre la pratique juive et le nouveau pacte. Toutefois, cela ne peut pas signifier que le Dieu Père et le dieu de l'AT sont opposés l'un à l'autre, comme le laisserait croire les détracteurs de Marcion. Le dieu Père étant le Tout, il ne peut pas être opposable à IHWH qui n'est que le principe de l'individualité, l'Ego, ce principe logique qui limite l'être en lui donnant une forme corporelle limitée et qui par sa signification séparative, oppose chaque individu aux autres (le Moi est en effet contraire du Non-Moi). Ainsi, après le chapitre 1 de la genèse, montrant la création conceptuelle d'Elohim, on voit dès le verset Gen 2,4 intervenir l'Esprit sous le Nom d'IHWH-Elohim, qui est le saint-Esprit ou le Verbe d'Elohim dans son rôle d'acteur de la création effective. A ce stade-là, il y a encore une logique d'ensemble, non séparative, car le principe temporel IHWH est uni au principe intemporel Elohim, et cette réunion (relation) est mathématiquement l'éternité.
Après la chute, IHWH-Elohim est séparé en deux, d'un côté IHWH, l'Ego qui procède à la création temporelle, de l'autre Elohim, qui est son adversaire, son satan, mais dans un rôle réel d'adversité. C'est seulement dans ce contexte de la création temporelle, qu'Elohim peut être vu comme le satan d'IHWH. Mais le Dieu du NT est l'Elohim du début, celui qui conçoit l'image de Lui-même, le véritable Père, Tout intégral et sans distinction d'aucune sorte. C'est lui qui peut guider la voie du repentir afin qu'IHWH retrouve la composante Elohim perdue dans la chute. Alors on voit bien que dans cette présentation de la genèse, il y a à la fois dualisme et non dualisme. Car le Verbe dualise en distinguant chaque mot, mais il permet aussi les synthèses logiques. Les deux testaments se complètent et le premier est nécessaire à la compréhension du second.
Il semble bien que les auteurs les plus anciens aient repris à leur compte des croyances bien plus anciennes (sumériennes certainement) polythéistes qui ont permis de donner à une tribu sémitique une argumentation à ses prétentions territoriales.
C'est là une vision trop terrestre des choses. La réalité est que dans l'antiquité, il y a avait de véritables intellectuels capables de remonter à la conception d'un Dieu métaphysique universel, malgré que les langages humains n'aient pas encore la précision logique qu'ont les langages de nos jours. De même, il n'y avait pas encore de formalisation de la logique comme nous disposons à notre époque de l'écrit banalisé. C'est pourquoi, les enseignements étaient sous forme mythique et allégorique. Le mot Elohim est un pluriel employé au singulier. On désignait alors par ce mot au moins deux notions. J'y reviendrais.
Ces textes sont entâchés de nombreuses erreurs.
Peu importe ! Les textes sont comme les données d'un problème mathématique ou d'un ensemble de problèmes. Certains ont une solution, et d'autres n'en ont pas. Cependant, ils sont pourvus de ce qui est nécessaire à exercer l'esprit, c'est-à-dire à renforcer le discernement et la logique. la Loi de Moïse conduit à toutes ses conséquences, parce que c'est logique. Ainsi, la vérité et l'erreur sont contenues et mélangées dans le texte, cela faisant apparaître des contradictions lourdes de sens. La dualité conduit à, la dispersion de l'être et à la perte de son unité (son caractère entier, Un) et il y a un grand intérêt à cette chute de la conscience. De même, pourquoi accorder une trop grande importance historique à des récits mythiques ?
Quant à voir une "continuité" entre les deux testaments, tu ne m'as pas du tout convaincu.
Cela n'est nullement grave. Cette continuité est logique. Après Babel et la confusion du langage, il est normal de voir la fin de la confusion et la restitution du langage. Le NT est l'anti-Babel. Sans babel, pas de NT ! Le point de vue de Marcion n'est connu qu'à travers les critiques exacerbées de ses détracteurs. Rien ne prouve que ce qu'on en connaisse aujourd'hui soit exactement l'intégralité de son message. Il en est de même des cathares médiévaux, que nous connaissons essentiellement à travers les procès verbaux de l'inquisition. Mais là encore, nous avons la vision des cathares qui était la plus en opposition au pouvoir temporel. Il faut se montrer plus critique des circonstances de la recherche historique. De même, le monothéisme est par excellence le mode privilégié de la pensée dualiste. le non-dualisme se base lui sur l'existence d'un principe unique universel, transcendant, Invisible et Inaudible, Inconnaissable et Infini. Il n'est pas plus personnel qu'impersonnel, et pas davantage "mono" que "poly".
C'est ce principe qui est remis en exergue dans le NT, rebouclant alors avec la finalité de la Création indiquée en genèse 1.
Réponse à L'hirondelle-soucoupe volante
Marcion, il arrive combien de temps après Jésus?
Jésus est-il réellement historique ? Dans la tradition, il est dit que Jean le Baptiste naît en même temps que Jésus. Ne sont-ils pas historiquement un seul et même homme, le baptiste étant ce sage qui a révélé Jésus en l'homme ? Il se pourrait aussi que ce Jean transformé soit aussi le premier évangéliste, ayant vécu en lui la manifestation du Messie.
Jusqu'ici on ne m'a pas encore cité le verset de l'Evangile ou Jésus prétend adorer un autre Dieu que ses correligionnaires et pour cause, il n'existe pas!
C'est que vous n'avez pas bien lu ! Dans l'Evangile de Jean, Jésus est le porte-parole d'un Dieu que nul n'a vu ni entendu. Il s'agit donc d'un autre Dieu que celui des Juifs, lequel est bien visible et bien audible, même à travers une nuée qui n'empêche nullement son esprit versatile de mener la confusion.
On ne m'a toujours pas expliquer comme Jésus fait pour accomplir quelque chose qu'il supprime alors qu'il prétend justement ne rien abolir.
Et bien cela se fait par une disposition particulière de la logique binaire. Jésus étant l'incarnation du Verbe, il est donc ce par quoi la logique transparaît dans la conscience humaine. Et bien aujourd'hui, nous savons qu'une logique à deux valeurs Vrai-Faux conduit aussi à certains paradoxes qui montrent l'existence d'un "Ni Vrai-Ni Faux" (travaux de Cantor). Le NT introduit cette notion du "Ni bien Ni Mal" qui se trouve à l'inverse de la faute originelle qui avait établi le Bien et le Mal comme deux valeurs de connaissance, en opposition respective. Or cette connaissance est une illusion, car il n'y a rien dans la création qui soit exactement un Bien pur opposable à un Mal pur, et il n'y a rien qui soit un Mal pur opposable à un Bien pur. Tout est combinaison de bien et de mal, de Lumière et de Ténèbre, car la Lumière pure n'est pas éclairage mais aveuglement, et la ténèbre pure n'a aucun éclairage et donc n'est pas visible. La conscience Adam est alors le Moyennement éclairé, insufflation lumineuse d'une matière obscure, à mi-chemin entre aveuglement et cécité. C'est d'ailleurs ce qui conditionne la Loi causale, entre les causes et les effets.
Toute cause dans un sens est un déséquilibre qui entraîne un retour en sens inverse, au-delà de l'équilibre. C'est pourquoi vouloir le bien c'est obtenir le mal et vice versa. D'ailleurs, l'observation de la Création révèle le mélange subtil entre ce qui est éclairé et ce qui est "moins éclairé" et qui apparaît alors obscur. Regardez comment chaque objet de la réalité se distingue grâce à un jeu de points clairs et de points sombres. Il n'y a donc pas de Bien ou de Mal séparés, mais un mélange, une combinaison des deux. Il y a donc Ni Bien, Ni mal absolus et l'observation de la Création est comme un paradoxe dans la logique de la faute originelle. Toute la création est le Bien dans le chapitre 1 de la genèse et le mal n'y est pas mentionné, alors que la ténèbre y est "clairement" mentionnée.
Face à la dualité de la conscience, le christianisme est la phase d'amortissement de cette dualité, comme une corde de guitare que l'on gratte et qui produit un son manifeste, mais qui finit par s'éteindre, la corde reprenant alors sa position d'équilibre et de silence.
On se demande où Illibiade a appris l'hébreu! El exprime l'idée de force, de héros puis de divinité. Elohim est un pluriel, non de majesté, mais exprimant les différents aspects de Dieu.
Et bien dans l'origine sémitique des racines sémitiques ! Ce n'est pas parce qu'aujourd'hui le mot El est traduit par "Dieu" que cela est son sens originel. Dans le Zohar (partie introductive) il est expliqué le sens du mot
Eleh qui signifie "cela" et dont El est une prémisse. Le mot El provient d'une racine 'L sémitique qui signifie "Ce" et que l'on peut traduire par "cela". Eloah est alors une désignation plus déterminée, plus démonstrative et c'est pourquoi je l'ai appelé "Ceci". Quant à Elohim, il exprime effectivement la multiplicité mais dans une unicité d'action et on pourrait le traduire par "Ceux de Ceci", c'est-à-dire "la multiplicité contenue et cachée dans le Ceci unique".
Il ne faut jamais oublier qu'une langue évolue dans le temps. L'étude des racines sémitiques peut être alors reliée à d'autres racines, par comparaison. Par exemple, représenter la cause universelle par le mot "Cela" est aussi ce que l'on rencontre dans le sanscrit et d'une certaine manière dans le chinois. Pourquoi de telles correspondances ? Et bien parce que le mot "cela" est le mot qui désigne quelque chose que l'on ne peut désigner réellement par une description ou une détermination. C'est la façon d'incorporer au discours un élément lui échappant en nature, car le discours ne manipule que des choses définies et limitées. Lao-Tseu dira : "San-Nom il est le tao éternel, Avec un Nom, il est la Mère des dix milles êtres". Avec un Nom qui le détermine, il est limité et produit le multiple (le discours), sans nom, Il est illimité et unique.