Le publicain a écrit :Bonjour Aladin4
Que pensez-vous de la ressemblance entre le Coran et les auteurs Gréco-Latins sur la génération humaine ?
Bonjour,
Je pense que c'est une mystification aussi grotesque que celle qui consistait à nier l'apport de la civilisation musulmane au reste de l'humanité en prétendant que les musulmans n'ont fait que servir de courroie de transmission entre les grecs et le reste de monde, en oubliant au passage de dire que la civilisation musulmane a durée deux fois plus de temps que la civilisation grecque. Ceci est une autre histoire.
Pour en revenir a ta question, je voudrais te rappeler que dans la Grèce ancienne ce sont surtout les philosophes et les mathématiciens qui parlèrent de «biologie ». Thalès de Milet, Anaximandre, Empédocle d’Agrigente, Hippocrate et autres noms célèbres évoquèrent et essayèrent d’approfondir les mystères de la nature dont la biologie était une des composantes essentielles. Leur apport fut, cependant insignifiant. Malgré un travail considérable, Aristote commit, quant à lui, de graves erreurs de biologie. Il pensait que la semence du male provenait du sang et n’apportait aucune contribution matérielle à la formation de l’embryon. Elle ne faisait que fournir la forme, alors que la femelle produisait la matière (voir biologie et biologistes de Gabriel Goheau, édition Magnard). Bien que complètement erronée, l’une des théories les plus en vogue fut celle « de la double semence ». Des savants comme Empédocle, Aristote, Galien etc., pensaient à l’instar d’Hippocrate qu’il existait une semence femelle qui était mélangée au sperme dans l’utérus pour donner naissance à l’embryon. Puis, durant tout le moyen âge, période de profonde léthargie, on délaissa un sujet, qui comme tant d’autres, devenait tabou. On se retrancha derrière les conceptions antiques à défaut d’en formuler de nouvelles.
Après la découverte de la loupe au 17ème siècle, le hollandais Leeuwenhoek et son assistant Hamm, purent observer pour la première fois des spermatozoïdes. Des lors, de nombreuses conceptions contradictoires, virent le jour, chacune défendue avec acharnement par ses partisans.
1ère ECOLE
Il y eut les ovistes, pour lesquels le germe est déjà préformé, minuscule, dans l’œuf de la femelle d’où il sortirait graduellement de ses enveloppes. Cette théorie a été élaborée par le Hollandais Swammerdam qui, après avoir observé le phénomène dans le monde des insectes, l’étendit à l’espèce humaine. L’anatomiste et médecin du Pape innocent XII, Malpighi fut lui aussi, partisan de l’ovisme.
2ème ECOLE
Il y eut également l’école des animalculistes. L’embryon existe et est déjà préformé à l’intérieur des spermatozoïdes. Le physicien Hartsoecker (1656-1725) qui revendiqua la primauté de la découverte des animalcules – qu’il n’osa publier, selon lui, en raison de son étrangeté- crut voir un petit homme ( homunculus ) accroupi à l’intérieur d’un spermatozoïde !
3ème ECOLE
La troisième école était une exhumation de l’antique théorie de la double semence. Elle fut cautionnée par des scientifiques d’un prestige certain à l’image d’Ambroise Paré, Bacon, Van Helmont et Descartes. Selon le physiologiste anglais, William Harvey (157-1657), médecin personnel des rois Jacques 1er et Charles 1er, la matrice conçoit l’embryon par l’effet d’une contagion que lui communique la semence, comme l’aimant communique au fer sa vertu magnétique.
Malgré la naïveté des conceptions énoncées, on avait quand même grand soin de se préoccuper de l’origine des germes. Si les germes étaient préformés dans les spermatozoïdes (partisans des animalculiste ou germe paternel) ou dans l’œuf (partisans de l’ovisme ou germe maternel), ils doivent bien venir de quelque part avant de se loger à l’intérieur du corps humain. Deux écoles eurent leurs émules respectifs qui se contredisaient avec une égale conviction. Il y eut les partisans de la dissémination et les partisans de l’emboitement.
Les disséminationnistes considèrent que les germes de tous les animaux existent depuis la Création et sont disperses a travers le monde en nombre infini. Ils pénètrent dans le corps par la respiration ou la nourriture, procédant à la fécondation selon une sorte d’infestation exogène ;
Leurs adversaires soutenaient la théorie de l’emboitement respectif et se divisaient en deux tendances : l’emboitement oviste dans lequel l’ovaire de la première femme contenait non seulement les œufs de ses propres enfants, mais également ceux de toute l’espèce humaine, et l’emboitement animalculiste qui postulait que le premier homme renfermait en lui, à l’intérieur des spermatozoïdes emboités l’un dans l’autre, tous les hommes de l’humanité jusqu'à son extinction.
Pascal et Malebranche entre autres, étaient des partisans de l’emboitement. Ce dernier généralisa même cette conception au règne animal et végétal.
Une autre théorie avait aussi cours :
celle de l’épigenèse, soutenue par le Suisse Abraham Tremblay (1710-1784) ; Ayant observé que les tentacules de l’hydre d’eau douce avaient la faculté de régénérer après avoir été coupés, il conçut alors l’idée que dans l’œuf, l’être pouvait prendre forme étape par étape. Geoffroy Saint-Hilaire, Maupertuis, Buffon, etc., appuyaient ce point de vue. La semence est constituée de particules venant de toutes les parties du corps, qui s’agencent selon un certain ordre par une sorte d’instinct.
Comme tu le vois, mon cher ami le Publicain, le recensement des théories relatives à la conception, depuis l’Antiquité n’est pas simple. On peut énumérer
les préformationnistes qui se divisent en quatre catégories : les ovistes avec dissémination, les ovistes avec emboitement, les animalculistes avec dissémination et les animalculistes avec emboitement. On y trouve également les partisans de la théorie de l’épigenèse, celle de la double semence », les atomistes, sans compter d’autres courants marginaux.
En dépit de l’abondance des spéculations, on éprouve quelque peine à constater que les plus grands savants occidentaux étaient loin de pouvoir expliquer correctement ce phénomène. Tout ce qui a été projeté dans ce domaine s’est avéré sans fondement.
C’est seulement au 19 siècle que l’on commença à avoir une idée assez exacte des mécanismes de la fécondation.En 1838, la théorie cellulaire végétale fut formulée par un botaniste allemand, Schleiden (1804-1881), puis Theodore Schwann l’étendit au règne animal. En 1854, le biologiste Schultze Max (1825-1874) décrivit la cellule comme une petite masse de protoplasme possédant un noyau. La division cellulaire végétale fut mise en évidence en 1875 par Strasburger, alors que Flemming l’observa chez les amphibiens et Oscar Hertwig, sur l’œuf d’oursin.
Désormais, l’embryologie allait être influence par l’étude des cellules ou cytologie et par la découverte de la nature cellulaire des gamètes (ovules et spermatozoïdes). On reconnut que l’œuf et le spermatozoïde étaient des cellules renfermant les chromosomes qui se trouvent dans le noyau ; La fécondation fut observée chez les algues, les oursins, etc. Von Baer qui formula la loi biogénétique fondamentale, mit en évidence la division de l’œuf et ses travaux, poursuivis par Remak, embryologiste (1815-1865) permirent d’approfondir les connaissances déjà importantes.
Contrairement, à ce qui a été admis, Von Baer vit dans ses expériences, non pas la croissance d’un petit être préformé, mais une suite d’événements prodigieux. La conception devenait l’objet d’intenses recherches émerveillant ceux qui ont pu constater le degré d’organisation et de complexité de cette « insignifiante » cellule.
Ainsi, on à travers ce petit résume de l’histoire de la biologie, que l’abime qui sépare les théories anciennes de la réalité est tout a fait impressionnant. La description qu’en fait le Coran (il faut toujours replacer dans le 7ème siècle) est évidemment moins détaillée que celle que l’on peut lire dans un ouvrage d’embryologie, mais on ne trouve aucune trace des extravagances qui marquèrent l’histoire de la conception.
Le Coran par exemple évoque à travers de nombreux passages le liquide spermatique et son émission : « De quoi [Allah] l'a-t-Il créé ?
D'une goutte de sperme, Il le crée et détermine (son destin). (Coran 80.17/18)
Le sperme ou semence est considéré comme l’élément fécondant par excellence et le seul qui remplisse cette fonction, à l’inverse des partisans de la double semence. Une telle expression revient plus de 10 fois dans le Coran et aucun doute n’est permis quant à son acceptation. Le rôle du sperme n’est plus, comme
l’explique Charles Bonnet « d’animer le cœur de l’embryon, jusque-là trop faible pour battre afin de surmonter par son impulsion la résistance des liquides extérieurs ».
Pour le Coran, le sperme n’est pas seulement un liquide blanchâtre et mystérieux qui intriguait les milieux scientifiques occidentaux et que Descartes considérait comme une sorte de levain, a partir duquel se constituait le corps du fœtus par fermentation. Au contraire, le sperme est un liquide complexe formé d’un mélange de différents éléments. La sourate 76. Verset 2, précise «
En effet, Nous avons créé l'homme d'une goutte de sperme mélangé [aux composantes diverses]…. »
L’analyse du sperme fait justement apparaitre qu’il s’agit d’un liquide résultant du mélange du produit des testicules avec les secrétions de la vésicule séminale, de la prostate et des glandes de Cowper. Il est constitué de 82 % d’eau et renferme les spermatozoïdes, des matières albuminoïdes, de la lécithine, des sels minéraux, notamment des phosphates, des sulfates, des carbonates et de chlorures. Cela concorde parfaitement avec la description coranique.
Autre fait intéressant a relever est que le sperme est surtout compose d’eau, à raison de 82% et ceci en conformité encore une fois, avec la sourate 21, verset 30 qui affirme «…
et fait de l'eau toute chose vivante. Ne croiront-ils donc pas ?
En conséquence on relève, contrairement a tout ce qui se dit, que le Coran ne prend pas à son compte les fantaisies des savants grecs, ni celles des biologistes européens jusqu’au 19 siècle.