eric121 a écrit :
Originale ta perception, et cela m'amène à poser plusieurs questions
Non, Mahomet n'a pu recevoir en une fois le Kitab (Livre), lors de la nuit appelée Lailat al-Qadr.... la sourate 97 se contredit avec les faits : versets révélés à cause et au moment de certains faits bien précis :
https://en.wikipedia.org/wiki/Asbab_al-nuzul
Mouais, j'y vois surtout que le Coran ainsi que la réalité historique contredisent la Sira, et comme la Sira est postérieure de 2 siècles au Coran, on ne peut pas l'utiliser pour interpréter le Coran.
Aucun texte contemporain du Coran (Sebeos, Doctrina Jacobi...) dont nous disposons ne confirme la Sira.
Par exemple, la Mecque est inconnue du reste du monde vers le milieu du VIIeme siècle.
Le point de départ de la datation de la Sira dans la chronique de Tabari est l'expédition d'Abraha vers la Mecque, datée par Tabari en 570 après J.C.
On sait désormais par les découvertes archéologiques au Yémen qu'elle est datée par Abraha lui-même en 552 après J.C. Et qu'il n'est jamais allé vers la Mecque : il faudrait avoir été fou pour faire traverser le désert à des éléphants.
Et son expédition n'était pas une défaite mais une victoire.
Donc toute la chronologie de la Sira est très certainement fantaisiste. On peut juste utiliser la Sira pour comprendre comment les musulmans ont tenté d'interpréter le Coran à travers les siècles, mais pas plus.
eric121 a écrit :
Quelles sont les parties différentes du Livre qu'Allah a choisit de révéler à chacun des différents messagers ?
C'est pas du tout clair : "Le Livre en question n'est pas le Coran lui-même. Le Coran est la façon de divulguer ce Livre par Mohamed à travers des prêches"
Je l'ai dit : le Kitab (Livre) est le cadre abstrait exprimant la volonté d'Allah pour l'humanité. Tawrat, Injil, Coran mentionnés dans le Coran sont, selon le Coran, différentes révélations de ce Kitab. Il y en a sans doute d'autres.
eric121 a écrit :
"séances appelées salât dans le Coran, et qui n'ont rien à voir avec la salât (la prière) aujourd'hui." : explique la différence des 2 salat
La salat aujourd'hui est une séance de "gymnastique" 5 fois par jour. Ce rituel n'est nullement décrit dans le Coran.
Les musulmans y voient la preuve que le Coran ne suffit pas tout seul, et qu'il faut chercher dans les hadiths.
Mais ce rituel ressemble en fait très fort à celui des zoroastriens.
Salat est le substantif d'un verbe qui signifie dans les dictionnaires d'arabe ancien (comme le Lane Lexicon), être connecté, être lié, suivre de près, etc. Dans le Coran, je comprends ce terme comme étant la connexion à l'Esprit de Dieu, notamment par l'étude.
eric121 a écrit :
"rien ne permet d'affirmer que Mohamed comprenait totalement ces concepts divins et leur portée : langue arabe, le fond culturel sémitique, des histoires et des coutumes que Mohamed et son entourage connaissaient."
Pourquoi Mahomet ne pouvait pas comprendre ces concepts ? de plus, tu dis qu'il les connaissait...
Je n'ai pas dit que les concepts divins du Kitab
étaient histoires, langue arabe, etc.
J'ai voulu dire que les histoires, la langue arabe, le fond culturel sémitique, etc. partagés par Mohamed et son entourage constituaient un code ou un langage que le Coran utilise pour véhiculer les concepts divins du Kitab.
Quand je lis un texte en français, je peux très bien comprendre les mots (c'est-à-dire le code) individuellement sans comprendre totalement le texte.
De même quand j'écris un texte en français, il y a tout un arrière-plan culturel qui y préside, et qui influe sur le texte que j'écris sans m'en rendre compte.
Je peux écrire le même texte en anglais parfait, mais un Anglais repèrera assez vite que ce texte ne vient pas d'un Anglais.
Ben là, c'est pareil : Mohamed pouvait connaître un certain nombre d'histoires venant de la Bible ou d'ailleurs, constituant le "code", sans comprendre forcément totalement pourquoi le Coran les emploie.
eric121 a écrit :
"Le Coran revisite donc un fond culturel, des histoires, des faits, des coutumes connus de Mohamed et ses disciples "
Non, il les décrit tout simplement
Question de perception.
Quand j'étais au lycée, j'ai appris en cours de français à faire des commentaires composés.
Même sur un texte assez bateau de mon point de vue, je voyais avec étonnement le prof sortir des métaphores et toutes sortes de figure de style pour montrer la richesse du texte. Plus tard, j'ai compris qu'il fallait une certaine maturité d'esprit pour les voir.
eric121 a écrit :
" je ne crois pas au Coran incréé, mais seulement au Livre incréé."
Peux-tu démontrer que le Coran est incréé ? on peut facilement démontrer qu'il ne l’est pas
Oui, donc rien ne sert de démontrer quelque chose qui n'a pas lieu d'être.
eric121 a écrit :
"les mots employés dans le Coran pour raconter cette histoire, ils ont tous un double sens en arabe ancien,..."
Ne penses-tu pas que tu racontes n’importe quoi ?
Prends n'importe quel dictionnaire d'arabe ancien (Lane Lexicon, Lisan Al-Arab...) et tu le verras.
eric121 a écrit :
"quand on relit cette histoire dans le Coran avec le sens alternatifs de ces mots"
Fais-nous relire cette histoire dans le Coran avec le sens alternatifs de ces mots
C'est un peu long, alors je le fais en abrégé.
Le verset 27.17 parle d'"oiseaux" rassemblés devant Salomon. Or le mot arabe utilisé est Ţayr, qui a aussi le sens de concepts, par exemple religieux, voir
http://ejtaal.net/aa/#q=Tyr
D'ailleurs une variante (ṭāiruhum) de ce mot est utilisée au verset 7.131 pour parler des mauvais augures.
Ce mot Ţayr a en fait un sens proche d'augure en latin, qui désigne oiseaux et présages religieux.
Le verset 27.18 parle de "fourmis" qui parlent. Or le mot arabe utilisé est Naml, qui a aussi le sens de menteur, ou calomniateur, voir
http://ejtaal.net/aa/#q=nml (plus précisément le Steingrass pour les non-arabophones).
Le verset 27.23 parle de "trône". Or le mot arabe utilisé est 3arsh, qui ne veut pas dire trône en arabe, mais désigne une construction amenée à s'étendre. Construction qui peut être physique, sociale, culturelle ou spirituelle.
Si on le traduit par trône, c'est uniquement par synonyme de souveraineté, qui est une construction amenée à s'étendre.
Le Coran utilise un dérivé, ma3aroushati pour désigner des cultures maraîchères.
Donc ici, 3arsh pour culture religieuse fait parfaitement l'affaire.
Le mot djinn (verset 27.17) est le plus compliqué, je n'expliquerai pas ici, ce serait trop long. Les djinns dans le Coran n'ont rien à voir avec les créatures surnaturelles qui terrorisent certaines populations. Ils désignent l'imaginaire humain.
Donc l'histoire de Salomon et de la Reine de Saba dans le Coran dit que Salomon pouvait rassembler les imaginaires (djinns), les hommes et les connaissances religieuses (Ţayr).
Quand Salomon arrivait dans une région où régnait le mensonge (naml), les prêtres menteurs (namlatun) se dissimulaient et se disaient "faites attention que Salomon ne détruise pas notre demeure (de mensonge) sans même faire gaffe". Et ça faisait doucement rigoler Salomon.
Un de ses émissaires lui rapporta la nouvelle de la Reine de Saba et de son peuple qui avaient une culture religieuse très élaborée (3Arshun 3Ažīmun), mais adoraient le Soleil au lieu d'Allah.
Salomon demanda à ses notables (al-Mala') à l'imagination (djinn) redoutable (3Ifrytun) de compiler des arguments contre cette religion (3arsh) et de faire venir la Reine de Saba pour les lui exposer. C'est le sens de l'expression Nakkirū Lahā 3Arshahā Nanžur : résumer schématiquement la religion de Saba, pour voir si la Reine reconnaît sa religion ou non.
Entendant cela, la Reine de Saba dit : "on dirait bien que c'est ça". Elle "découvrit ses jambes", en arabe ça veut dire se rendre compte qu'une affaire est importante.
Bon j'arrête là, c'est déjà trop long.