medico a écrit : c'est facile de dire ça il faut ( plutot le dire a AUGUSTIN ) lui il est mort et quand faute d'argument on arirve a dire ( je crois parceque c'est absurbe ) c'est bien là une pruve que la trinité est absurbe tout simplement.
Mais, Medico, aucun croyant, à ma connaissance, ne dit : "Je crois PARCE QUE c'est absurde".
En effet dire cela serait une vraie absurdité. Et la Trinité est difficile à comprendre, mais elle n'est pas une absurdité.
Cette Trinité des personnes à laquelle tu ne crois pas, cher Medico, cette Trinité semble en effet en contradiction avec "l’ultime principe" de la raison naturelle qu’est le principe de contradiction, ainsi défini par Aristote
(Métaphysique, G, 3, 19-20, p.121, t.1, éd.Vrin) :" Il est impossible que le même attribut
[un] appartienne et n’appartienne pas
[être trine, c’est être non-un] en même temps, au même sujet
[Dieu] et sous le même rapport" . Ainsi la Trinité divine semble bien incompatible avec la rationalité naturelle.....
La croyance pourrait donc en effet, comme tu le constates, Medico, être taxée véritablement d’irrationnelle. C’est pourquoi il faut pour achever la cohérence du système de justification théologique assurer la compatibilité des vérités de foi et des vérités de la raison naturelle :
Mais, comme le fait remarquer Thomas d'Aquin :
"La connaissance des principes qui nous sont naturellement connus nous est donné par Dieu, puisque Dieu est l’auteur de notre nature. Ces principes sont donc inclus également dans la sagesse divine. Donc, tout ce qui contredit ces principes contredit la sagesse divine. Or cela ne peut pas se réaliser en Dieu. Tout ce que la révélation divine nous demande de croire ne peut donc être contraire à la connaissance naturelle."
(Somme contre les gentils, chapitre VII, p.28.)
Mais alors, pour légitimer le recours à la croyance, on peut peut-être se souvenir de ce qu’est l'expression "rendre raison", ce qu’est la justification philosophique elle-même.
Selon Michel Boucey, "Rendre raison’ est d’abord un acte, et plus généralement une activité de l’esprit humain qui tend à déterminer ce qui fonde quelque chose à être (quod) et à être ce qu’elle est (quid) plutôt que ne pas être ou être autre. Ainsi avons-nous à rendre raison avant tout de nos assertions (ordre du discours, ordo cognoscendi) sur ce qui est (ordre des choses, ordo essendi).
Rendre raison, ou déterminer le fondement, est un acte de la faculté de la raison, qui est, pour reprendre une expression de Martin Heidegger, la faculté qui fonde. Et pour reprendre le modèle conceptuel du bâtiment, cette faculté ne fonde pas à partir de rien.
Elle est constituée de principes, dont les plus importants sont, comme l’énoncera Leibniz, le principe de contradiction (suscité) et le principe de raison suffisant ; ce dernier étant essentiellement à l’oeuvre dans l’acte de rendre raison -.
Mais qu’est-ce qui rend compte du principe de raison lui-même ? Un principe au sens fort est un fondement, et, en tant que tel, paradigmatiquement le principe de raison,
un principe est paradoxalement ce qui fonde sans être fondé lui-même (Cf. l’aporie du principe de raison suffisante in Martin Heidegger, Le principe de raison, collection Tel, Gallimard, p.60, premier et second alinéas). Autrement dit, il n’est pas possible de rendre raison d’un principe (si ce n’est qu’à lui donner un statut transcendantal) :
le principe comme tel est extrinsèque à la rationalité ; et ce, malgré qu’elle la fonde. En terme contemporain, la rationalité est axiomatique. Mais qu’y a t-il donc là de philosophique dans le fait de rendre raison ? Si tout un chacun peut rendre raison.
........................;.
Ainsi la raison naturelle, c’est-à-dire les principes naturels qui fondent, ne peut rendre raison d’elle-même. Dès lors de quel droit irait-elle demander à une vision du monde donnée, une philosophie, de rendre raison de ces principes ? "
(fin de citation.)
Thomas d'Aquin décrivait dans sa
Somme théologique, IIa IIae, q.1-a.7 ; t.3, p.25 :
"Les articles de foi [les croyances du chrétien] tiennent dans la doctrine de foi le même rôle que les principes évidents par eux-mêmes dans la doctrine qui se construit à partir de la raison naturelle."
La croyance comme telle est donc quelque chose qui ne peut pas par nature rendre raison et donc n’a pas à rendre raison. Paul de Tarse le disait :
" la foi est le fondement de ce qu’il y a à espérer, le moyen de prouver ce qu’on ne voit point. "Epitre aux Hébreux, 11, 1.
Ainsi, un système de croyances fondent une rationalité (ou encore une axiomatique) autre que la rationalité naturelle par adjonction de principes déterminant une vision du monde. En l’occurrence, ces principes ne tiennent pas leur certitude de l’expérience mondaine comme les "principes évidents" constituant la raison naturelle, mais ils la tiennent, justification purement théologique certes, de l’attestation du Dieu se révélant.
Donc, si le recours à la croyance peut être justifié philosophiquement, c’est par ce que nous appellerons le statut systémique de principe d’une vision du monde (ou philosophie) que doit endosser la croyance, essentiellement considérée comme objet de foi.
Celui qui pointe du doigt le croyant trinitaire comme irrationnel doit alors pointer du doigt tout essai d'explication pholosophique du monde .. La foi n’est pas nécessairement une fuite hors de la raison.
Comme le dit Michel Boucey :
" Au rationaliste naïf, il faut opposer de façon paradigmatique un croyant théologien comme l’a été Thomas d’Aquin, qui soutient magnifiquement et sa conviction de foi et son exigence de rationalité dans l’énonciation de sa vision du monde."
Cordialement.