Revenons au raid de Nakhla.
Avant l'Hégire, alors qu'il était à la Mecque, Muhammad a vu la situation évoluer en sa défaveur à partir du moment où ses principaux alliés et protecteurs, Khadidja et Abu Talib, respectivement sa femme et son oncle, sont décédés. Son engagement en faveur d'un strict monothéisme heurtait de plus en plus d'intérêts et il était de plus en plus isolé au sein de sa cité et sa tribu, tant et si bien qu'il finit par passer un serment avec des pélerins de Yathrib, séduits par sa prédication, pour se placer sous leur protection (le premier serment d'Aqaba). Ainsi Muhammad s'est dégagé de son plein gré des solidarités claniques (Hachemite) et tribales (Qoreyschites) dans lesquels il s'inscrivait jusqu'alors, pour rejoindre les Médinois. De ce fait, il devenait plus ou moins un paria aux yeux des Mecquois qui lui étaient déjà en majorité hostiles : dans une civilisation comme celle des Arabes du Hedjaz, un individu qui n'a plus ni famille, ni clan, ni tribu, n'est rien. Il n'a aucune valeur, et peut être tué à merci. C'est exactement le même mécanisme que celui qui prévaudra ensuite pour l'apostasie : celui qui quitte le groupe (l'oumma islamiyya) est un homme à abattre. Voilà pourquoi, entre parenthèses, l'islam a tendance à préfèrer les hypocrites (munafiqun), qui ne croient plus ni ne pratiquent mais se gardent bien de rompre, aux apostats qui officialisent leur rupture avec la communauté des croyants.
Bref, Muhammad dut quitter la Mecque lorsque le bruit de son "retournement de veste" vint aux oreilles des autorités qoreyschites, et selon la tradition, il échappa de très peu à une tentative d'assassinat de la part de ses ennemis désormais déclarés.
Dès qu'il parvint à Yathrib, connue désormais sous le nom de Médine (al-Madina, la ville), Muhammad récita les versets qui déclaraient licites le sang des infidèles et des hypocrites (c'est le début d'une longue série de versets désormais marqué par la violence, l'appel au meurtre et l'intolérance). A partir de ce moment commençèrent les escarmouches et les razzias menées à l'encontre des caravanes mecquoises. Muhammad est devenu entretemps un chef de guerre, obligé de recourir aux méthodes de guerre et de pillages traditionnelles des bédouins pour subsister et étendre son influence politique et religieuse. C'est dans ce contexte que survint le raid "sacrilège" de Nakhla, commis par des fidèles ayant "débordé" les instructions de Muhammad, ce qui l'obligea à déclarer, de façon rétroactive, que les infidèles pouvaient être tués y compris pendant le mois de trêve (et pour les musulmans, que la concordance quasi-parfaite entre les intérêts du Prophète et les versets coraniques ne semble pas choquer, il s'agit bien entendu d'une révélation divine).
Nul pacte rompu, nulle provocation particulière de la part des Mecquois. Depuis son expatriation hors de la Mecque, Muhammad étaitde toute façon devenu un apatride et un traître à la tribu de Qoraysch.
Abdellah a écrit : Mais il n'empêche le raid de Nakhla eu lieu après une trêve de 4 mois, rompue par les mécquois.