Amérique Latine et chrétienté
Posté : 12 mai06, 22:58
Amérique Latine et chrétienté: Bref rappel historique et tentative d'état des lieux.
J'ouvre ce topic afin de rappeler quelques informations quand aux chrétiens de ce continent, leur histoire à ce sujet et leur situation actuelle, en attendant vos réactions et réfléxions ( ou complément d'infos ).
Tout le monde connaît la merveilleuse et tragique histoire de la découverte de l'Amérique.
Après le cycle des conquètes, une fois la très grande majorité des terres latino-américaines découvertes, les conquérants entamèrent la colonisation, l'implantation de leur pouvoir et de leur société européenne sur les terres découvertes.
Un des éléments essentiels de cette "importation de valeurs" était la religion. En effet, la colonisation des terres nouvelles, leur exploitation et la possession de ses habitants ne pouvaient se faire sans l'obligation pour les conquérants, imposée par leurs gouvernements plutôt que voulue par eux, de transmettre aux populations nouvellement soumises le message du Christ et de leur fournir une éducation religieuse. La conversion des paiens indigènes au christianisme était une obligation pour les conquérants. Le pape ainsi que les souverains légitimaient la donation des terres d'Amérique Latine aux espagnols et portuguais, par le fait d'y ammener le message du Christ et ainsi de sauver cette population.
On dit beaucoup de choses à se propos :
Que la conversion se soit fait, dans beaucoup de cas, par la force en même temps que la mise en esclavage ou en "ouvriers forcés" des indiens est indéniable.
On entend souvent dire que la conversion se faisait de la manière suivante :
" L'épée ou la Croix ?" ( entendez, bien sur, "choisissez-vous de mourir ou de vous convertir ?" )
Ce n'est pas tout à fait le cas.
Les conquérants n'étaient guère grandement soucieux d'apporter le message du Christ ni même de faire des indiens de bons chrétiens ou de les sauver...
Ils étaient davantage préocuppés par le fait de transformer l'entreprise latino-américaine en une entreprise rentable et productive économiquement...
Mais, encore une fois, la conversion et l'apport du message religieux était rendue obligatoire pour leur permettre de profiter de la main d'oeuvre indigène. Ainsi les chefs d'exploitation agricoles espagnoles, les "encomenderos", se voyaient-ils contraints de donner à leur main d'oeuvre une éducatiojn chrétienne et de leur faire recevoir le baptême, et étaient sur ce point controlés par des religieux et le gouvernements colonial local. S'ils ne respectaient pas cette obigation, ils se voyaient privés de leur main d'oeuvre par les autorités.
La conversion fut donc en majorité, certes forcée, mais pas au point de " choisis entre l'Epée ou la Croix". C'était avant tout, un passage obligé pour les conquistadors, afin de pouvoir bénéficier de l'appui de leurs dirigeants, soucieux, eux, de légitimer moralement et devant Dieu ainsi que devant le reste de la chrétienté, leur conquète.
La domination européenne et la conquète donna lieu à de multiples controverses théologiques en Europe.
Tout ne fut pas simple ni décidé unanimement...
Ces controverses se basaient la plupart du temps sur la problématique des "justes titres", c'est à dire, déterminer si oui ou non, devant Dieu et devant les hommes, les peuples conquérants avaient le Droit d'affirmer une suprématie sur ces peuples indigènes et, en outre, de les réduire en esclavage, ou même de revendiquer de plein droit la possession des terres découvertes ( puisque des sociétés étatales indigène, qui à l'époque, conféraient le droit à la propriété, y étaient déjà implantées ).
Si l'on parle souvent des théologiens et des religieux de l'époque de la conquète, comme de sombres personnages cyniques, il ne faut pas se fourvoyer pour autant dans un jugement aussi simpliste.
Il y eut en effet, des hommes d'Eglise pour affirmer sans aucun scrupule que les indigènes n'étaient pas autre chose que des bêtes ou des monstres et que leur domination, voire leur extermination était tout à fait acceptable, voire voulue par Dieu.
Mais, à côté de cela, il y eut également nombre d'hommes d'Eglise qui s'opposèrent aux mauvais traitements et à la barabarie dont les conquérants abusaient. Parmi eux le célèbre Las Casas et sa " très brève relation de la destruction des Indes" que nous connaissons tous...
Il fut loin d'être le seul à s'être battu en faveur des indigènes et les changements positifs notables ( bien que, pour sur insuffisants ) de la condition de vie et de traitement des indigènes, découla de luttes acharnées de ces mêmes religieux contre la barbarie de leur concitoyens.
En un mot : si il n'y avait pas eu l'Eglise, la conquète et sa violence n'aurait sans doute pas pu avoir lieu puisque c'est elle qui lui a donné sa légitimité complète.
Et paradoxalement, si il n'y avait pas eu l'Eglise, le sort des indiens pendant et après la conquète auraient été encore bien pire que ce qu'il fut.
Le fait est que, conversion forcée ou non, barbarie légitimé ou combattue, la colonisation s'est opéré et le continent lation-américain est devenu celui que nous connaissons aujourdhui :
Un continent métissé, fait du mélange de plusieurs peuples et cultures, et un continent catholique.
La catholicité en Amérique-latine est réputée très forte et très implantée. Ceci est une donnée connue par tous.
Il reste à préciser que cette catholicité est bien entendu fortement et souvent imprégnée de synchrétisme et que certains symboles, fêtes ou traditions religieuses ancestrales indigènes survécurent à travers les siècles en se fondant, s'incorporant à la tradition catholique. Ce synchrétisme à d'ailleurs été hautement toléré et accepté par les religieux catholiques eux-mêmes qui ont procédé à l'évangélisation et à la conversion du continent afin de faciliter celle-ci.
On en retrouve encore des exemples : cf la Vierge de Guadalupe au Mexique, faiseuse de miracles et symbole même du synchrétisme religieux latino-américain.
Au 20ème siècle, la religion catholique en Amérique-Latine a connu des remous :
L'apparition de la "Théologie de la libération", courant catholique imprégné de valeurs sociales très fortes, pronant l'aide aux plus démunis et la vie des religieux à leur côté pour lutter contre les discriminations et la misère sociale et économique qui éssèment le continent et tenter d'établir une société nouvelle, basée sur l'Egalité.
Cette prise de position de certains religieux latino-américains a été fortement combattue et réprimée par le Vatican et Jean-Paul II...
Depuis quelques années maintenant, un phénomène nouveau est apparu sur le plan religieux.
Les Eglises Evangéliques se sont implantées sur le continent et font chaque jour plus d'adeptes au sein de la communauté latino-américaine, au point d'en inquiéter le Vatican. Les adhésions à ces nouveaux cultes, importés des USA pour la plupart, sont en constante extension et constituent un véritable phénomène de société.
Ces Eglises évangéliques trouvent leurs nouveaux participants dans les couches les moins aisées de la société. Elles expliquent à leurs aspirants que le catholicisme est la religion brutale qui a permis la conquète et la violence infinie et n'ont aucun mal à les en convaincre. Ce n'est certes pas tout à fait faux mais ces nouvelles Eglises ont elles aussi leurs grands travers : prosélythisme à tout crin, obligation de "dons d'argent assez conséquent par les fidèles", messages apocalyptiques douteux, etc.
J'attends votre avis et me permet dores et déja de vous demander de ne pas transformer ce débat en un simple "duel", "pour ou contre" les courants évangéliques, mais bien en tentant de réfléchir et d'émettre des hypothèses, des interprétations, des avis, et d'autres informations, concernant la chrétienté en Amérique-Latine.
Leticia
J'ouvre ce topic afin de rappeler quelques informations quand aux chrétiens de ce continent, leur histoire à ce sujet et leur situation actuelle, en attendant vos réactions et réfléxions ( ou complément d'infos ).
Tout le monde connaît la merveilleuse et tragique histoire de la découverte de l'Amérique.
Après le cycle des conquètes, une fois la très grande majorité des terres latino-américaines découvertes, les conquérants entamèrent la colonisation, l'implantation de leur pouvoir et de leur société européenne sur les terres découvertes.
Un des éléments essentiels de cette "importation de valeurs" était la religion. En effet, la colonisation des terres nouvelles, leur exploitation et la possession de ses habitants ne pouvaient se faire sans l'obligation pour les conquérants, imposée par leurs gouvernements plutôt que voulue par eux, de transmettre aux populations nouvellement soumises le message du Christ et de leur fournir une éducation religieuse. La conversion des paiens indigènes au christianisme était une obligation pour les conquérants. Le pape ainsi que les souverains légitimaient la donation des terres d'Amérique Latine aux espagnols et portuguais, par le fait d'y ammener le message du Christ et ainsi de sauver cette population.
On dit beaucoup de choses à se propos :
Que la conversion se soit fait, dans beaucoup de cas, par la force en même temps que la mise en esclavage ou en "ouvriers forcés" des indiens est indéniable.
On entend souvent dire que la conversion se faisait de la manière suivante :
" L'épée ou la Croix ?" ( entendez, bien sur, "choisissez-vous de mourir ou de vous convertir ?" )
Ce n'est pas tout à fait le cas.
Les conquérants n'étaient guère grandement soucieux d'apporter le message du Christ ni même de faire des indiens de bons chrétiens ou de les sauver...
Ils étaient davantage préocuppés par le fait de transformer l'entreprise latino-américaine en une entreprise rentable et productive économiquement...
Mais, encore une fois, la conversion et l'apport du message religieux était rendue obligatoire pour leur permettre de profiter de la main d'oeuvre indigène. Ainsi les chefs d'exploitation agricoles espagnoles, les "encomenderos", se voyaient-ils contraints de donner à leur main d'oeuvre une éducatiojn chrétienne et de leur faire recevoir le baptême, et étaient sur ce point controlés par des religieux et le gouvernements colonial local. S'ils ne respectaient pas cette obigation, ils se voyaient privés de leur main d'oeuvre par les autorités.
La conversion fut donc en majorité, certes forcée, mais pas au point de " choisis entre l'Epée ou la Croix". C'était avant tout, un passage obligé pour les conquistadors, afin de pouvoir bénéficier de l'appui de leurs dirigeants, soucieux, eux, de légitimer moralement et devant Dieu ainsi que devant le reste de la chrétienté, leur conquète.
La domination européenne et la conquète donna lieu à de multiples controverses théologiques en Europe.
Tout ne fut pas simple ni décidé unanimement...
Ces controverses se basaient la plupart du temps sur la problématique des "justes titres", c'est à dire, déterminer si oui ou non, devant Dieu et devant les hommes, les peuples conquérants avaient le Droit d'affirmer une suprématie sur ces peuples indigènes et, en outre, de les réduire en esclavage, ou même de revendiquer de plein droit la possession des terres découvertes ( puisque des sociétés étatales indigène, qui à l'époque, conféraient le droit à la propriété, y étaient déjà implantées ).
Si l'on parle souvent des théologiens et des religieux de l'époque de la conquète, comme de sombres personnages cyniques, il ne faut pas se fourvoyer pour autant dans un jugement aussi simpliste.
Il y eut en effet, des hommes d'Eglise pour affirmer sans aucun scrupule que les indigènes n'étaient pas autre chose que des bêtes ou des monstres et que leur domination, voire leur extermination était tout à fait acceptable, voire voulue par Dieu.
Mais, à côté de cela, il y eut également nombre d'hommes d'Eglise qui s'opposèrent aux mauvais traitements et à la barabarie dont les conquérants abusaient. Parmi eux le célèbre Las Casas et sa " très brève relation de la destruction des Indes" que nous connaissons tous...
Il fut loin d'être le seul à s'être battu en faveur des indigènes et les changements positifs notables ( bien que, pour sur insuffisants ) de la condition de vie et de traitement des indigènes, découla de luttes acharnées de ces mêmes religieux contre la barbarie de leur concitoyens.
En un mot : si il n'y avait pas eu l'Eglise, la conquète et sa violence n'aurait sans doute pas pu avoir lieu puisque c'est elle qui lui a donné sa légitimité complète.
Et paradoxalement, si il n'y avait pas eu l'Eglise, le sort des indiens pendant et après la conquète auraient été encore bien pire que ce qu'il fut.
Le fait est que, conversion forcée ou non, barbarie légitimé ou combattue, la colonisation s'est opéré et le continent lation-américain est devenu celui que nous connaissons aujourdhui :
Un continent métissé, fait du mélange de plusieurs peuples et cultures, et un continent catholique.
La catholicité en Amérique-latine est réputée très forte et très implantée. Ceci est une donnée connue par tous.
Il reste à préciser que cette catholicité est bien entendu fortement et souvent imprégnée de synchrétisme et que certains symboles, fêtes ou traditions religieuses ancestrales indigènes survécurent à travers les siècles en se fondant, s'incorporant à la tradition catholique. Ce synchrétisme à d'ailleurs été hautement toléré et accepté par les religieux catholiques eux-mêmes qui ont procédé à l'évangélisation et à la conversion du continent afin de faciliter celle-ci.
On en retrouve encore des exemples : cf la Vierge de Guadalupe au Mexique, faiseuse de miracles et symbole même du synchrétisme religieux latino-américain.
Au 20ème siècle, la religion catholique en Amérique-Latine a connu des remous :
L'apparition de la "Théologie de la libération", courant catholique imprégné de valeurs sociales très fortes, pronant l'aide aux plus démunis et la vie des religieux à leur côté pour lutter contre les discriminations et la misère sociale et économique qui éssèment le continent et tenter d'établir une société nouvelle, basée sur l'Egalité.
Cette prise de position de certains religieux latino-américains a été fortement combattue et réprimée par le Vatican et Jean-Paul II...
Depuis quelques années maintenant, un phénomène nouveau est apparu sur le plan religieux.
Les Eglises Evangéliques se sont implantées sur le continent et font chaque jour plus d'adeptes au sein de la communauté latino-américaine, au point d'en inquiéter le Vatican. Les adhésions à ces nouveaux cultes, importés des USA pour la plupart, sont en constante extension et constituent un véritable phénomène de société.
Ces Eglises évangéliques trouvent leurs nouveaux participants dans les couches les moins aisées de la société. Elles expliquent à leurs aspirants que le catholicisme est la religion brutale qui a permis la conquète et la violence infinie et n'ont aucun mal à les en convaincre. Ce n'est certes pas tout à fait faux mais ces nouvelles Eglises ont elles aussi leurs grands travers : prosélythisme à tout crin, obligation de "dons d'argent assez conséquent par les fidèles", messages apocalyptiques douteux, etc.
J'attends votre avis et me permet dores et déja de vous demander de ne pas transformer ce débat en un simple "duel", "pour ou contre" les courants évangéliques, mais bien en tentant de réfléchir et d'émettre des hypothèses, des interprétations, des avis, et d'autres informations, concernant la chrétienté en Amérique-Latine.
Leticia