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Torah et Modernité

Posté : 04 janv.07, 13:03
par Gilles-Michel DEHARBE
Le Jeudi 21 Décembre, s’est tenu à l’université Bar Ilan un colloque entièrement consacré au Rav Yéhuda Léon Askénazi-Manitou, en l’honneur du dixième anniversaire de son décès.

La tenue d’un tel colloque est en soi un événement important, et il faut féliciter les organisateurs du congrès, Yossef Charbit, Moshe Halamish et Erik Cohen, pour cette heureuse initiative. Que la profondeur de pensée de Manitou soit enfin reconnue par l’université, ce n’est que justice rendue à un homme qui a su exprimer dans un langage moderne les tenants de la pensée juive. Nous lui devons tous, universitaires ou non, d’avoir réalisé avec génie cette conjonction des mondes de la Torah et de la modernité, et d’avoir montré, de par son enseignement et son engagement personnel, que l’on pouvait conjuguer foi et raison, attachement aux valeurs juives ancestrales et intégration dans la vie moderne.

Avant lui, cette conjonction était loin d’être évidente. On était rabbin ou moderne, mais certainement pas les deux. Manitou a montré que la Torah articulait en elle toutes les facettes de la vie, et qu’il fallait évaluer toutes les catégories de pensée à l’aune de ce que dit la tradition juive, et non le contraire.

La Bible est le creuset de l’identité hébraïque, qui se définit par son aptitude à appliquer la moralité pour chaque homme dans la société. L’équation personnelle du Juif doit être d’abord orientée vers la moralité, et c’est en cela qu’il réalise pleinement sa fonction de Juif dans le monde et la société dans laquelle il évolue.

Car le Juif se doit de s’engager dans le monde et la société. On ne peut rester dans sa tour d’ivoire. Manitou aurait pu, comme beaucoup d’autres, choisir la voie universitaire, confortable et sécurisante. Il a préféré se lancer dans l’arène de l’engagement pour son peuple et sa terre. Cet engagement, qui caractérise toute la vie de Manitou depuis son alyah en 1967, n’a malheureusement pas été mis en exergue dans ce colloque, qui par ailleurs, répétons-le, était d’une haute tenue.

Car l’engagement politique gêne. Il semble en effet réduire la vie intellectuelle, parce qu’il est par définition partisan: on s’engage pour une idée particulière, on repousse donc toutes les autres.

Mais Manitou a réussi le tour de force de s’engager pour de grandes causes, qui ne sont pas des causes de politique partisane, mais des idéaux édictés par la Torah. On pourrait peut-être se demander si la stratégie était la bonne, mais en tout cas, les causes pour lesquelles il s’est battu, ont été nobles et grandes, et il faut rendre hommage à cet homme de Torah, qui était aussi un grand intellectuel, qui n’a pas hésité à descendre dans l’arène et à se battre à voix nues, pour ce à quoi il croyait.

Espérons que les universitaires sauront prendre exemple aussi sur cet aspect de Manitou, et qu’ils oseront se battre (de façon pacifique, bien sur) pour les grandes causes juives et universelles qui devraient être le fleuron des académies israéliennes.