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Le Musée du créationnisme, qui a ouvert ses portes en mai dernier à Cincinnati, déploie des moyens très sophistiqués pour prouver que l'histoire de l'humanité commence avec la Bible. Entre maquettes de l'arche de Noé et dinosaures mécaniques, visite d'une institution doctrinaire.

Diplodocus dans l'arche de Noé
La visite commence par des salles dédiées à «la science» (planétarium, fossiles, géologie, etc.). Mais l'attention porte immédiatement sur les dinosaures. Une vidéo montre deux archéologues qui dépoussièrent le squelette d'un monstre jurassique. L'un d'eux, Bible à la main, explique: «Chang et moi avons étudié dans la même université, mais nous ne voyons pas les choses de la même manière. Chang pense que les dinosaures ont disparu il y a des millions d'années, alors que moi, je pense que c'était il y a 4300 ans, lors du Déluge.» Selon les créationnistes, dinosaures et humains vivaient en parfaite harmonie avant qu'Adam et Eve ne déclenchent le mal sur terre par leur ignoble péché. Pourtant, en regardant ces gigantesques créatures (mécaniques, certes, mais néanmoins réalistes) qui ouvrent leurs immenses mâchoires et agitent leurs bras écailleux à griffes, on se dit que le darwinisme - la théorie de l'évolution des espèces - a quand même quelque chose de rassurant...

Un peu plus loin, une maquette de l'arche de Noé met en scène un gentil couple de diplodocus qui montent sagement les escaliers derrière un couple de girafes. Pourquoi n'ont-ils pas survécu au déluge au même titre que les autres créatures? On pose immédiatement la question à des «agents», présents pour «répondre aux visiteurs qui ont des doutes ou des interrogations». Une curiosité qui ne sera pas satisfaite, car on ne parle pas à la presse... Pas grave. Dans la documentation, on finit par trouver un texte du jésuite Kircher, qui explique que certaines espèces se sont métamorphosées après la grosse tempête et ont généré de nouvelles races. Les dinosaures ont ainsi pu se transformer en lézards. Désormais, on comprend l'étendue de l'expression «Après moi, le déluge»...

Paradis perdu
Salle suivante: Adam et Eve, au physique hollywoodien, se baignent dans une eau hawaïenne. Interrompant cette atmosphère paradisiaque, l'ignoble «Kaa» surgit. D'un coup, le serpent apparaît derrière une vitre sombre, vous scrutant de ses yeux vert enfer. «La tentation» peut-on lire sur une étiquette.

La section suivante présente des scènes de terreur: Hiroshima, un enfant africain souffrant de malnutrition et... un loup qui dévore sa proie, le tout sur fond de tirs de mitraillettes et d'explosions... Un père explique à sa fille: «C'est quand le mal est venu sur terre.» Dans une autre salle, un tableau affiche les noms des mécréants qui ont mis en doute la parole de Dieu. Parmi les indexés, Voltaire, «le philosophe infidèle qui avait prédit qu'on ne publierait plus de Bibles» et le «Da Vinci Code», «un ouvrage qui tente d'attaquer Dieu».