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Ou on parle du centre zahra

Posté : 10 mars09, 05:33
par VT61
Les amis très particuliers du centre Zahra

Par Boris Thiolay, publié le 26/02/2009 10:00 - mis à jour le 27/02/2009 15:59

Cette association musulmane chiite du nord de la France diffuse une propagande "antisioniste" très virulente. Et tient des conférences dont certains invités ont été condamnés pour antisémitisme. Quel est son vrai visage?

C'est un ancien corps de ferme entièrement rénové, dans la banlieue de Dunkerque. Les bâtiments de brique rouge, donnant sur une cour intérieure, abritent le siège du centre Zahra France, une association musulmane chiite fondée en 2005. Son objet? Faire "connaître le message de l'islam". Ses membres, parmi lesquels de nombreux convertis, viennent ici célébrer la prière, profiter "d'une structure d'accueil à caractère social, familial et religieux". Ils assistent aussi à "des colloques, des journées d'étude" ou peuvent animer le site Web de l'organisation.

La consultation de ce site révèle rapidement une autre activité récurrente du centre: la diffusion d'images et de déclarations "antisionistes" très virulentes. A la date du 20 février, on pouvait ainsi visionner, sous la rubrique Galerie photos, des images terrifiantes, comparant le sort réservé aux juifs par les nazis durant la Seconde Guerre mondiale à celui des Palestiniens face à l'armée israélienne actuelle. Le tout sous ce titre: "Le nazisme d'hier et le sionisme d'aujourd'hui". Un amalgame souvent utilisé pour propager la haine contre les juifs, et qui va bien au-delà de la seule critique du sionisme, parfaitement recevable.

"Redonner le pouvoir à la France et aux Français"

Ce site permet aussi d'avoir un aperçu d'une conférence organisée au centre Zahra en juillet 2008. Lors de ces journées consacrées à un improbable "appel à l'initiation d'une alliance stratégique amicale entre judaïsme et islam contre le sionisme", on a pu voir défiler des personnages coutumiers de déclarations incendiaires. L'inévitable Dieudonné était présent. Certes, à l'époque, l'humoriste ne s'était pas encore affiché avec le négationniste Robert Faurisson, mais il avait déjà été condamné pour diffamation publique à caractère racial, notamment pour avoir qualifié le souvenir de la Shoah de "pornographie mémorielle".

Autre participant à la conférence de juillet 2008: Mohamed Latrèche. Interviewé à cette occasion, le président du Parti des musulmans de France (PMF) -qui regroupe quelques centaines d'adhérents - y allait de son couplet sur la "nébuleuse sioniste en France". Antisémite, Mohamed Latrèche? Il s'en défend vigoureusement, même si, en 2004, il s'était déclaré "fier et content de connaître Serge Thion", un chercheur révoqué du CNRS pour négationnisme.

Le centre Zahra a également accueilli, en août 2008, Kémi Séba, un extrémiste noir dont le premier mouvement -la Tribu Ka- avait été dissous en 2006 pour "incitation à la haine raciale" et "antisémitisme". Kémi Séba, qui s'est converti depuis à l'islam, dirige aujourd'hui le Mouvement des damnés de l'impérialisme (MDI). Il multiplie les provocations et les déclarations de sympathie pour le Hezbollah, parti chiite libanais qui ne reconnaît pas l'existence de l'Etat d'Israël.

L'Express a demandé au président du centre Zahra des précisions sur ses visiteurs et ses différentes activités. "En voyage à l'étranger et injoignable par téléphone", Yahia Gouasmi, 59 ans, de nationalité française, a répondu par mail. Dans le même temps, son argumentation, assortie de quelques formules d'intimidation, a été mise en ligne sur le site Web du centre chiite. Curieusement, alors qu'aucune question adressée ne comportait le mot "antisémitisme", Yahia Gouasmi recommande de "ne pas faire d'amalgame entre nos activités et une quelconque activité antisémite".


Le leader du centre Zahra, par ailleurs président de la Fédération chiite de France, détaille ensuite les objectifs de son Parti Anti Sioniste (PAS). Créé en janvier, pendant l'offensive israélienne sur Gaza, ce groupuscule entend notamment "éradiquer toutes les formes de sionisme dans la nation", "libérer l'Etat, le gouvernement et les médias de la mainmise sioniste" et « redonner le pouvoir à la France et aux Français". Un programme inquiétant qu'il cherche à diffuser sur la voie publique. Les 17 et 24 janvier, une quarantaine de militants du centre Zahra et du PAS s'agrégeaient au cortège des deux grandes manifestations propalestiniennes, à Paris. Sur fond de slogans appelant au djihad, ils défilaient accompagnés de drapeaux du Hezbollah et de drapeaux israéliens marqués de croix gammées. Parmi les orateurs qui dénonçaient alors la "bête immonde du sionisme parisien et israélien" se trouvait un "théologien" du centre Zahra, un homme qui sait adapter son message en fonction de son auditoire.

En décembre 2008, il était invité à représenter le culte musulman lors d'une journée consacrée au dialogue entre les religions, organisée par un collège catholique de la région dunkerquoise. Ce jour-là, assis aux côtés d'un prêtre et d'un représentant de la communauté juive, il délivrait un discours apaisé devant des élèves de quatrième. Pour obtenir un brevet de respectabilité? Son intervention était filmée par le centre Zahra, afin d'être ensuite diffusée sur son site Internet. Le principal de ce collège réalise aujourd'hui qu'il a été piégé: "Ce double discours n'a rien à voir avec les valeurs de tolérance et de fraternité que nous inculquons à nos élèves."

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L'ultradroite en quête d'alliés

La mise en scène, nocturne, martiale, rappelle de sombres périodes. Le 6 février dernier, vers 20 heures, 150 militants d'extrême droite se sont rassemblés, à la lumière des flambeaux, aux abords de l'Assemblée nationale, à Paris. Une manifestation autorisée, mais placée sous forte surveillance policière. Les principaux courants de la droite ultra étaient présents: vieux nostalgiques du IIIe Reich, skinheads, jeunes garçons et filles se réclamant du "nationalisme social", venus honorer la mémoire des morts des émeutes antirépublicaines du 6 février 1934. Si le mot "juif" n'a jamais été prononcé dans les allocutions, tous les poncifs antisémites des années 1930 ont été passés en revue: "forces occultes qui dominent la nation","financiers apatrides", "purs produits de la Compagnie financière de Rothschild"...
Peu nombreux -ils seraient environ 3 500 en France- les tenants de l'ultradroite ont vu dans les récents appels à la haine antijuive une occasion de souffler sur les braises. L'instrumentalisation de la cause palestinienne à des fins antisémites n'est pas un procédé nouveau. Mais cette tentation a suscité, ces derniers temps, des alliances de circonstance pour le moins inattendues... Ainsi, un groupuscule "nationaliste-socialiste", le Parti solidaire français (PSF), a noué des contacts avec Kémi Séba, gourou du Mouvement des damnés de l'impérialisme, qui rêve de rallier jeunes musulmans et Noirs pour "éradiquer le sionisme". Des groupes aux idéologies a priori totalement opposées. "Ils se retrouvent sur un terrain: combiner la haine du système et l'antisémitisme en vitupérant indistinctement Israël, le sionisme et les juifs", analyse le politologue Jean-Yves Camus. "L'ultradroite a compris qu'elle pouvait surfer sur la radicalité de certains manifestants propalestiniens", poursuit-il. Lors du défilé du 24 janvier en faveur de Gaza, on pouvait voir, notamment, des membres du PSF s'inviter dans la frange extrême du cortège, au côté de groupuscules scandant des slogans favorables au Hezbollah et appelant à la "disparition d'Israël".