Quand j'ai quitté la danse classique avec mon premier Prix, premier nommé, du Conservatoire national supérieur de Paris, rue de Madrid, je suis entré durant un an à l'Opéra dans la classe avant l'entrée au corps de ballet, que je n'ai pas fait : en effet je m'étais converti, je rejetais des moeurs où j'avais été coincé, et je voulais entrer en religion, mais en vérité j'étais en dépression.
Mon père, pour réfléchir et me mettre au vert, m'a envoyé vivre un an avec Marcel Légaut aux granges de Lesches, comme ouvrier agricole, première insertion, avec les travaux de ferme ordinaires, moisson, épandre le fumier, cuillettes etc. J'ai eu l'occasion de construire un garage, puis un hangar et j'étais heureux de manier le bois, d'enfoncer des pointes. De plus Jésus et Joseph avaient été menuisiers-charpentiers, cela avait de l'attrait pour moi. Enfin mon grand-père et sa descendance étaient tous tourneurs sur bois, fabriquants de jouets.
M. Légaut après un essai infructeux (pour incapacité d'obéir) d'un mois chez les bénédictins communautaires et paroissiaux de Rungis, m'a envoyé faire un essai d'ébénisterie chez Pierre Boquet dans le Lot, et m'a donné à lire une revue des Compagnons de Troyes, et des réflexions sur "la main et l'esprit ".
Cela allait assez bien, mais un début de schizophrénie et mon héritage maniaco-dépressif ont pris le dessus. J'ai vu à Paris un Jésuite psychiatre qui m'a envoyé dans le Loir-et-Cher chez Jean Girard en psychiatrie institutionnelle. Là, j'ai pris conscience de ces faiblesses, on a trouvé des médicaments plus légers, l'haldol, et surtout le curé proche du village de Chailles m'a guéri par la confession, conversion à la chasteté et vie intérieure et de prière instante. C'est depuis ce moment-là que je dis mon rosaire surtout en marchant et chante l'office avec le petit bréviaire des petits frères de Charles de Foucault.
J'ai au sein de l'hôpital aimé particulièrement l'atelier de menuiserie, nous avions fabriqué des lustres et mon docteur m'a proposé de faire des stages progressifs chez un artisan du village proche, Les Montils, chez le menuisier M. Lerin. Au bout de trois mois d'essai progressif, me voyant doué des mains, et la tête apte à ce métier (capacité de voir le travail fini d'avance en trois dimensions dans l'espace), il a accepté de me prendre comme apprenti pour deux ans, avec l'aide de mes parents, car en compensation du travail il me nourrissait mais ni logé ni payé. Insertion réussie non sans épreuve, j'avais 24 ans et l'autre apprenti 14 ans, car j'ai eu en mai 1968 mon CAP juste avant les grèves, et non sans les grâces de Jésus par st Joseph prié intensément avec un travail de tous les soirs.
Cela faisait deux ans que je connaissais Jacqueline, nous nous étions fiancés en décembre 1967 et avions décidé le mariage pour le 5 juillet 1968 après mon CAP pour mon retour à Limoges et la préparation de notre logement. Je lui dois beaucoup par son courage et sa lucidité depuis 43 ans et son amour dans mon insertion et ensuite mon entreprise et vie de travail, et vie d'amour tout court et surtout vie de prière en couple chaque jour, car elle connaît mes excès et emballements, et me recadre souvent.
Je dois aussi beaucoup à l'abbé Jacques Glangeaux mon directeur de conscience et confesseur, qui a su toujours couper des branches et me remettre les pieds sur terre, et éviter une fausse mystique due à ma maladie, et qui m'a appris que l'obéissance est le plus grand acte d'amour de Dieu.
Mais, en plus, j'ai enfin une dette d'insertion énorme à M. Simon qui avait 70 ans, ce menuisier artisan qui m'a embauché après un mois chez M. Malefond en juillet 2008 dans cette grosse entreprise. Au bout de deux mois avec lui, M. Simon m'a proposé d'acheter son entreprise de trois ouvriers, apprenti compris, de devenir mon ouvrier durant deux ans en m'apprenant à être patron pour faire compta, devis, visite clients, en me poussant à passer mon permis de conduire et à m'inscrire les soirs aux cours de dessin des Compagnons du Devoir de liberté, et aussi aux cours, deux jours par semaine, pour passer mon brevet de maîtrise (1ère et deuxième partie ) que j'ai eu je crois en 1972, et je devins en Limousin le premier Maître artisan qualifié. En plus de cette formation insertion de patron, il a voulu que je cumule son salaire sans le lui donner durant deux ans pour avoir de la trésorerie, car j'avais payé son entreprise avec une assurance d'un accident de la route que j'avais eu à mes 17 ans, et qui est une des sources de ma fragilité psychiatrique, plus l'héritage maladif. J'ai pu le rembourser au bout de deux ans mais il est vite mort d'un cancer, et providence et amour extrême, sa femme m'a reprêté tout pour avoir un apport pour me développer et emprunter aux banques, le tout à l'intérêt de l'inflation sur 4 ans, ce qui me permettait de la voir chaque mois.
Donc durant 6 ans je fus redevable de 5 maîtres qui ont su m'insérer, me former et m'ont permis de redémarrer dans la vie. Enfin de construire une famille grâce à eux.
Aussi, tout de suite, j'ai voull rendre aux autres la pareille dans mon entreprise, durant les 18 ans où je fus le patron, sous le regard et intuition du Sacré-Coeur fleuri, de st Joseph prié, de Jésus pour qu'il m'envoie son Esprit saint en toute action. J'ai eu en insertion : des malades de psychiatrie, des adultes en recherche d'un métier, des dames en recherche d'apprendre en menuiserie - après le bac comme Marion, ou adultes -, des jeunes ou plus vieux en prison avec sortie le jour pour le travail et la nuit en cellules pour leur insertion, et aussi à leur sortie de prison à chaque fois comme avec Gérard , ou des cassés de la vie. L'un après deux mois de formation est parti avec mon vélo, mais deux ans après, le jour de Noël, est venu me remercier de lui avoir donné un métier. Il avait la mauvaise habitude de partir le vendredi à midi et de revenir le lundi soir assoiffé d'espace, il vit en caravane à travers la France, en poseur à la tâche, heureux et libre. Et comme apprentis, des jeunes difficiles ou illettrés à qui, en plus du métier à l'atelier et en cours à la Chambre des métiers, j'ai appris presque tout de la vie. C'est eux qui réalisaient les meubles compliqués de l'atelier et annexe, qui avaient une intelligence rare de trouvailles pratiques de pose ou de fabrication qui nous ont souvent aidés malgré leur apparence illettrée. Et avec les apprentis j'ai mis un point d'honneur à leur donner le double du minimum syndical en salaire, avec une formation pour être indépendants financièrement ou en soutien de famille, afin que, comme Dominique ou Jean-Pierre, à 21 ans quand la DDASS les lâche, ils soient capables de vivre et de tout payer.
Après, en 1984, je me suis écroulé, épuisé de souci par le franc fort de Barre qui a effondré les marchés d'exportation que nous avions trouvés. Et après trop de nuits blanches et une année avec 450 euros de bénéfice pour vivre (j'ai dû m'endetter pour ma famille), je fus arrêté un an en dépression. Heureusement j'avais pris pour mon épouse une assurance chère mais efficace. J'ai préféré laisser l'atelier à Roger car la menuiserie avait pris beaucoup d'ampleur, variant entre 12 et 18 personnes. Je n'avais plus le temps du travail manuel et de la formation des apprentis, courant de clients en banques. Pour pouvoir, en étant menuisier de magasin pour la chaîne de mon frère Dominique, qui va devenir Séphora, avoir du temps pour créer avec ATD la "menuiserie dans la rue". Avec l'aide financière de la Justice puis de la CAF, le samedi et mercredi après-midi, de 14h à 17h dans les cours et salle technique pour jeunes, je venais avec une feuille de contreplaqué de 19mm, réaliser avec un jeune entre 6 ans et 13 ans un meuble pour lui, à la main, sans machine (bureaux, étagères, tabourets, bibliothèques etc.) ou avec les 14/17 ans des pistes de skate-board.
Ceci grâce à leurs idées car en 1984 à la suite d'un été où nous avions lancé une "semaine de l'avenir partagé" d'ATD , et où j'avais eu l'idée bourgeoise de faire avec eux des boîtes à jouets, les enfants de 12 ans m'ont dit : "Viens chez moi, tu verras", et ils me firent voir à la cité des portes ferrées, et à Coubertin leur appartement : une table à la cuisine, des matelas par terre dans les chambres avec le linge aligné par terre."Tu vois c'est un bureau, un tabouret et une étagère dont j'ai besoin"; et de 1985 à 1992 j'ai fait 134 bureaux pour autant d'enfants différents, de toutes origines, chacun son tour dans une cité, et 34 dans l'autre, et ensuite le complément qui allait avec : tabouret-bibliothèque, étagère sans porte etc., avec un élève par jour, étude de "à quoi ça sert", mesure, plan, calcul au millimètre (pour faire voir à quoi sert l'école) puis fabrication à la scie égoïne et marteau et clous torsadés pour leur faire voir qu'on peut faire sans machine chez soi seul. Plus tard, certains ont choisi ce métier et beaucoup sont insérés et fiers de ce qu'ils ont fait (selon l'âge je faisais avec eux ou seuls, jamais à leur place.)
Laurent Debrat avait créé une entreprise d'insertion, "l'escabeau". Voyant mon bon contact avec ces jeunes et cherchant un menuisier-chef pour son entreprise, comme j'allais être en retraite progressive, il a voulu m'embaucher, ce que j'ai accepté après un essai en 1992. Puis à plein temps jusqu'à ma retraite en 2005, avec à partir de 55 ans à mi-temps. Quand j'ai pris cette décision, j'ai voulu pour avoir patience, écoute, foi dans l'autre, m'appuyer sur la prière, et dès lors chaque matin à 7h15 avant l'embauche je suis allé chanter laudes à l'église devant le Saint Sacrement avec mon curé (à la retraite j'ai gardé l'habitude avec de la souplesse pour l'heure). J'ai eu bien des amis cassés dans l'entreprise où je contrôlais les maçons, carreleurs et menuisiers dont je m'occupais, et dont la moitié étaient musulmans pratiquants. Aussi j'ai décidé d'étudier le Coran avec l'Église catholique avec la formation faite par le Père Monteil, et même, je crois, en 1995 j'ai avec eux fait le ramadan. Cette insertion on l'a faite aussi jusqu'en la prison où on a eu la mission de refaire les cellules avec les prisonniers pour détecter les talents, sans obligation de temps et avec beaucoup de pédagogie et formation, j'ai bien aimé et rencontré des hommes formidables de foi. J'ai eu aussi de fortes têtes, que je calmais en les mettant au travail délicat de pose de lambris ou autres, seuls, en n'étant pas loin pour ne pas vivre d'échecs. J'ai eu des garçons qui dès que je leur montrais une fabrication faisaient mieux que moi la deuxième fois. Avec les pauvres il faut être compétent et vrai, et en insertion je leur disais si on était près ou loin des pros en qualité et temps. Les ouvrir aux prix et gestion. Le meilleur, suite à la mort de sa mère, avait eu une belle-mère dure, il avait fui, fait la route en sans domicile, fui le service militaire, mais il était si fort qu'on l'a mis chez les compagnons menuiserie, et ébénisterie en CAP en même temps, et très vite il fut bon en tourneur. Or un jour il apprend qu'il a un héritage, il est convoqué à la gendarmerie qui découvre son non-service militaire, renvoyeéen prison dans l'est à un mois de son examen. Notre patron est arrivé en 8 jours à ce qu'il soit réformé et de retour. Il faut dire que sa fiancée avait pour papa un gendarme qui était venu me voir et que j'avais rassuré. Il est artisan maintenant.
Depuis trois ans maintenant que je suis retraité, j'ai embauché avec des collègues de 21 métiers avec"l'outil en main". Tous les mercredis de 14h à 17h, nous formons en découverte des métiers des jeunes filles et garçons de 8 ans à 13 ans, en leur faisant faire une pièce à la main, avions, bateaux, étagères etc. Ils restent 5 semaines puis changent de métier, le tout sans machine électrique et au milieu chez les compagnons des aînées en formation de CAP et brevet professionnel. Voilà la dernière étape de mes engagements d'insertion, en espérant avec fort désir que Jésus ressuscité me formera en son paradis durant l'éternité.
De mon insertion a éducateur en entreprise d'insertion
- paul de LIMOGES
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De mon insertion a éducateur en entreprise d'insertion
Ecrit le 15 déc.09, 00:19-
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