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Les réfugiés syriens se sentent visités
Posté : 09 oct.13, 10:22
par samuell
Une délégation composée de dix représentants d’organisations humanitaires françaises et de personnalités
chrétiennes et musulmanes
est depuis dimanche 6 octobre en Jordanie pour y rencontrer quelques-uns des 1 200 000 réfugiés syriens.
À la veille de leur départ pour le Liban, ils ont été reçus lundi 7 octobre par Mgr Maroun Lahham, vicaire patriarcal latin pour la Jordanie.
La Croix : Quel sens donnez-vous à la visite d’une délégation interreligieuse venue de France, porteuse d’un message de paix et de solidarité, alors que le Moyen-Orient n’en finit plus d’endurer l’onde de choc du conflit syrien ?
Mgr Maroun Lahham : Il est toujours positif pour des familles éprouvées de voir qu’elles ne sont pas oubliées et qu’on vient les soutenir. Personne ne s’attend à un miracle, mais au moins les réfugiés se sentent « visités », au sens évangélique du terme. Le fait que le groupe se compose de chrétiens et de musulmans a une résonance très forte pour nos pays arabes. C’est à ma connaissance la première fois depuis le début du conflit syrien qu’une telle délégation vient visiter les réfugiés syriens. C’est moralement très encourageant.
Craignez-vous de voir les chrétiens fuir massivement la Syrie, comme on les a vus quitter en nombre l’Irak ces dernières années ?
Mgr M. L. : Des craintes, il y en a, bien sûr. Mais il est nécessaire de le redire : si des chrétiens souffrent, s’ils meurent parfois, c’est avant tout parce qu’ils sont Syriens. Au début du conflit, ils ont souffert au même titre que les musulmans. Toute la population est touchée, il ne faut jamais l’oublier. L’arrivée des mouvements fondamentalistes a accentué leurs difficultés, et fragilisé davantage leur présence : il arrive aujourd’hui qu’ils soient pris pour cible en raison de leur appartenance chrétienne.
N’y voyez-vous pas les prémices d’un scénario à l’irakienne ?
Mgr M. L. : Les deux situations ne sont pas comparables. La guerre en Irak n’avait rien d’une guerre interne. Il s’agissait d’un conflit venu de l’étranger, un conflit fondé sur un mensonge des Américains qui voulaient détruire l’Irak. En Syrie, le cœur de la guerre, c’est une population qui ne peut plus supporter la tyrannie d’un président.
L’entrée de mouvements islamistes et de puissances occidentales a compliqué la donne. Oui, nous avons peur. Oui, les extrémistes savent se faire entendre. Leur omniprésence suffit-elle à conclure qu’ils incarnent la volonté du plus grand nombre ? Je ne le pense pas. Même en cas de chute du régime Assad, je doute qu’un gouvernement islamiste puisse lui succéder. Leur faillite en Égypte et en Tunisie impose de tirer des leçons : les islamistes ne sont pas capables de gouverner. En dépit de programmes sociaux performants, leurs compétences économiques et politiques restent faibles.
En quoi les enjeux de coexistence au sein du monde arabe concernent-ils l’Occident, et notamment la France ?
Mgr M. L. : L’Occident est concerné par l’avenir de l’Orient, tout comme l’inverse est vrai aussi. La grande différence entre la pluralité dans le monde arabe et occidental, c’est qu’ici les chrétiens sont tous natifs du pays. Ils sont Jordaniens, Syriens, Palestiniens… En Europe, la majorité des musulmans – même s’ils sont naturalisés et même si beaucoup y sont nés – sont issus d’autres pays auxquels ils restent culturellement attachés. Pour autant, je suis convaincu que ce sont ces musulmans d’Europe qui peuvent permettre à l’islam d’intégrer une conception pluraliste.
L’expérience minoritaire conduit à se reconnaître un parmi d’autres. Or, ce sentiment de minorité n’existe pas chez les musulmans arabes, majoritaires dans les sociétés du Proche-Orient. Je souhaite que la France, forte de son ouverture, puisse donner l’occasion à l’islam européen de se concevoir comme minorité et donc d’ouvrir ses portes à l’altérité. L’Europe peut contribuer à l’ouverture de l’islam à la modernité.
À l’heure où l’hypothèse d’un nouveau sommet international sur la Syrie semble incertaine, quel message souhaitez-vous transmettre aux Occidentaux ?
Mgr M. L. : Je leur dirais en toute franchise : pensez au bien du peuple syrien et non à vos intérêts politiques et économiques. L’important n’est pas de vous ranger d’un côté ou de l’autre, mais d’aider les uns et les autres à aboutir à une solution qui sauve la Syrie et permette d’arrêter les massacres. Oubliez vos bases militaires, vos intérêts économiques. Oubliez vos stratégies. Et priez pour la paix.
Recueilli par François-Xavier Maigre (à Amman
Re: Les réfugiés syriens se sentent visités
Posté : 16 oct.13, 06:51
par medico
Syrie : une fatwa autorise les habitants à manger du chien.
Face à une situation humanitaire dramatique et une famine qui guette, des dignitaires musulmans ont autorisé les Syriens à manger des "animaux généralement considérés comme impropres à la consommation humaine dans l'islam", révèle la BBC. Les habitants, pour survivre, vont pouvoir manger des chiens, des chats ou encore des ânes. Et si la famine venait à durer, les dignitaires pensent même que les vivants devraient manger les morts
http://www.ledauphine.com/france-monde/ ... r-du-chien
Re: Les réfugiés syriens se sentent visités
Posté : 16 oct.13, 07:15
par ultrafiltre
medico a écrit :Syrie : une fatwa autorise les habitants à manger du chien.
Face à une situation humanitaire dramatique et une famine qui guette, des dignitaires musulmans ont autorisé les Syriens à manger des "animaux généralement considérés comme impropres à la consommation humaine dans l'islam", révèle la BBC. Les habitants, pour survivre, vont pouvoir manger des chiens, des chats ou encore des ânes. Et si la famine venait à durer, les dignitaires pensent même que les vivants devraient manger les morts
http://www.ledauphine.com/france-monde/ ... r-du-chien
Dostoievsky disait dans "l'idiot" que la beautée sauverait le monde mais il a dit ça aussi et ça ça glace le sang(Dostoievsky est un prophete inconnu et même pas un saint ou alors c'est quoi un saint parce que là bonjour...?et pourtant il a décrit des choses fantastiques
mais voilà notre problème à nous et là y a comme un problème:
Je suis un homme malade... Je suis un homme méchant. Un homme repoussoir. Voilà ce que je suis. Je crois que j’ai quelque chose au foie. De toute façon, ma maladie, je n’y comprends rien, j’ignore au juste ce qui me fait mal. Je ne me soigne pas, je ne me suis jamais soigné, même si je respecte la médecine et les docteurs. En plus, je suis superstitieux comme ce n’est pas permis: enfin, assez pour respecter la médecine. (Je suis suffisamment instruit pour ne pas être superstitieux.) Oui, c’est par méchanceté que je ne me soigne pas. Ça, messieurs, je parie que c’est une chose que vous ne comprenez pas. Moi, si! Evidemment, je ne saurais vous expliquer à qui je fais une crasse quand j’obéis à ma méchanceté de cette façon-là; je sais parfaitement que ce ne sont pas les docteurs que j’emmerde en refusant de me soigner; je suis le mieux placé pour savoir que ça ne peut faire de tort qu’à moi seul et à personne d’autre. Et, malgré tout, si je ne me soigne pas, c’est par méchanceté. J’ai mal au foie. Tant mieux, qu’il me fasse encore mal!
Il y a longtemps que je vis comme ça - dans les vingt ans. Maintenant j’en ai quarante. Avant, j’ai été fonctionnaire, maintenant je ne le suis plus. J’étais un fonctionnaire méchant. J’étais grossier, c’était une jouissance. Je ne prenais pas de pots-de-vin, vous comprenez, il fallait bien que je me dédommage - ne serait-ce que comme ça. (Mauvaise pointe, mais je ne la barre pas. Je visais l’effet comique en l’écrivant; maintenant je comprends assez que je ne cherchais qu’à crâner, d’une façon ridicule - je ne barre rien, exprès!) Parfois, les solliciteurs s’approchaient de ma table pour un renseignement, je grinçais des dents en guise de réponse et je ressentais une jouissance insatiable quand j’arrivais à leur faire de la peine. J’y arrivais presque toujours. Ils étaient presque tous béni-oui-oui - eh, des solliciteurs. Mais parmi tous les gandins il y avait surtout un officier que je ne pouvais pas voir en peinture. Il refusait absolument de se soumettre et faisait un tintouin odieux avec son sabre, je lui ai fait la guerre six mois durant. Et je l’ai eu. Il l’a mise en sourdine. Mais bon, c’était quand j’étais jeune. Et cependant, messieurs, savez-vous ce qui, surtout, faisait le fond de ma méchanceté? C’est là qu’était le nœud de l’affaire, c’est là qu’était la saleté la plus nauséabonde, qu’à chaque instant, même dans mes montées de bile les plus irrépressibles, je comprenais honteusement que non seulement je n’étais pas un homme méchant - je n’étais même pas aigri: je ne passais mon temps qu’à faire peur aux moineaux, et je trouvais là toute ma satisfaction. J’avais l’écume aux lèvres, mais il m’aurait suffi qu’on m’apporte une poupée, qu’on me donne du thé avec du sucre, je me serais radouci - je vous le jure. Même, l’émotion m’aurait serré la gorge - après, sans doute aurais-je grincé des dents contre moi-même, de honte, et j’aurais eu des insomnies pendant des mois. Je suis comme ça.
J’ai menti plus haut, en disant que j’étais un fonctionnaire méchant. J’ai menti par méchanceté. Les solliciteurs ou l’officier, c’était un jeu, rien d’autre; en fait, je n’ai jamais pu devenir méchant. Je ressentais à chaque instant au fond de moi une foule, oui, une foule d’éléments les plus hostiles à la méchanceté. Je les sentais grouiller à l’intérieur, ces éléments hostiles. Je savais bien qu’ils y avaient grouillé toute ma vie et qu’ils ne demandaient qu’à jaillir au-dehors, mais je refusais, je refusais, oh oui, je refusais de les voir jaillir. Ils me martyrisaient jusqu’à la honte; ils en arrivaient à me donner des convulsions - et comme j’ai fini par en avoir assez, mais assez! Tout doux, messieurs, n’auriez-vous pas l’idée que je bats ma coulpe devant vous - que tout se passe comme si je vous demandais pardon de je ne sais quoi?... Je suis sûr que oui... Bah, pensez ce que vous voulez - moi, je vous assure que ça m’est égal...
Non seulement je n’ai pas su devenir méchant, mais je n’ai rien su devenir du tout: ni méchant ni gentil, ni salaud, ni honnête - ni un héros ni un insecte. Maintenant que j’achève ma vie dans mon trou, je me moque de moi-même et je me console avec cette certitude aussi bilieuse qu’inutile: car quoi, un homme intelligent ne peut rien devenir - il n’y a que les imbéciles qui deviennent. Un homme intelligent du XIX° siècle se doit - se trouve dans l’obligation morale - d’être une créature essentiellement sans caractère; un homme avec un caractère, un homme d’action, est une créature essentiellement limitée. C’est là une conviction vieille de quarante ans. Maintenant j’ai quarante ans - et quarante ans, c’est toute la vie: la vieillesse la plus crasse. Vivre plus de quarante ans, c’est indécent, c’est vil, c’est immoral. Qui donc vit plus de quarante ans? Répondez, sincèrement, la main sur le cœur! Je vous dis, moi: les imbéciles, et les canailles. Je leur dirai en face, à tous ces vieux, à tous ces nobles vieux, à ces vieillards aux cheveux blancs, parfumés de benjoin! Je le dirai à la face du monde! J’ai bien le droit de le dire, je vivrai au moins jusqu’à soixante ans. Je survivrai jusqu’à soixante-dix! Et jusqu’à quatre-vingts!... Ouf, laissez-moi souffler.
Vous devez croire, messieurs, que j’ai l’intention de vous amuser? Là aussi, vous faîtes erreur. Je ne suis pas du tout le boute-en-train que vous croyez, ou que vous croyez peut-être; mais si ce bavardage vous énerve (je sens qu’il vous énerve), et s’il vous vient l’idée de me demander: qui suis-je au juste? - je vous réponds: je suis un assesseur de collège. J’ai été fonctionnaire, pour me payer mon pain (seulement pour cela), et puis, l’année dernière, quand un de mes lointains parents m’a laissé six mille roubles d’héritage, je me suis pressé de démissionner et je me suis installé chez moi, dans mon trou. J’y habitais avant, dans ce trou, mais maintenant, je m’y suis installé. Ma chambre est moche, elle est sale, elle est au bout de la ville. Ma bonne est une paysanne, elle est vieille, elle est bête et méchante - en plus, elle pue que c’est insupportable. On me dit que le climat de Petersbourg me fait du mal et qu’il est très coûteux de vivre à Petersbourg avec des moyens aussi misérables que les miens. Je sais cela mieux que ces conseillers si sages, si doués d’expérience, mieux que les béni-oui-oui. Eh bien, je reste à Petersbourg: je ne sortirai pas de Petersbourg! Si je ne sors pas, c’est que... Ah, mais ça n’a rigoureusement aucune importance, que je sorte ou que je ne sorte pas.
Mais bon: de quoi un honnête homme peut-il parler avec le plus de plaisir?
Réponse: de lui-même.
Et donc, je parlerai de moi.
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Maintenant, messieurs, je veux vous raconter, que cela vous plaise ou non, pourquoi je n’ai même pas pu devenir un insecte. Je vous le dis avec solennité: j’ai voulu devenir un insecte à plusieurs reprises. Et, même là, je n’ai pas eu l’honneur. Je vous assure, messieurs: avoir une conscience trop développée, c’est une maladie, une maladie dans le plein sens du terme. La vie quotidienne ne se contenterait que trop d’une conscience normale, c’est-à-dire d’une conscience inférieure de moitié ou des trois quarts à celle qui est le lot de l’homme évolué de notre infortuné XIX° siècle, d’un homme qui aurait, de plus, le malheur particulier d’habiter Petersbourg, la ville la plus abstraite et la plus préméditée de la planète (il y a des villes préméditées ou des villes spontanées). Par exemple, on aurait largement assez de la conscience qui pousse les hommes soi-disant d’exception, ou les hommes d’action. Ma main au feu, vous dîtes que j’écris ça pour crâner, pour faire le malin sur les hommes d’action, que mes crâneries sont de mauvais goût et que je fais du tintouin avec mon sabre, comme mon officier. Holà! messieurs, avez-vous déjà vu quelqu’un se vanter de ses maladies - ou, à plus forte raison, crâner avec?
Que dis-je? - Mais, tout le monde!... C’est bien de ses maladies qu’on se vante, et moi le premier. D’accord; ma réplique ne valait rien. Et néanmoins, je reste fermement convaincu que non seulement une conscience accrue, mais que toute forme de conscience est une maladie. J’insiste. Laissons cela aussi pour l’instant. Dites-moi une chose: pourquoi est-ce justement, comme par hasard, dans les mêmes minutes, oui, les minutes mêmes où je me trouvais le plus apte à prendre conscience de toutes les finesses “du beau et du sublime”, comme on disait jadis, qu’il m’arrivait non plus d’avoir conscience mais d’accomplir des actes si peu reluisants que... bref, en un mot, qui sont le lot de tous, mais que je faisais, moi, comme par hasard, dans les instants précis où je sentais le plus que je ne devais pas les faire? Plus je prenais conscience du bien, de tout ce “beau” et ce “sublime”, plus je m’engluais dans mon marais, et plus j’étais capable de m’y noyer complètement. Mais l’essentiel restait que ça ne semblait jamais fortuit - comme si c’était ce qu’il fallait. Comme si c’était là mon état naturel, et non ma maladie ou mon défaut, de sorte qu’à la fin j’ai perdu toute envie de combattre ce défaut. Et j’ai fini par faillir croire (peut-être l’ai-je cru vraiment) que c’était bien cela, mon état naturel. Mais d’abord, au début, que n’ai-je pas dû subir dans cette lutte! J’étais incapable de croire que tout le monde était dans le même cas, je cachais donc cela comme un secret. J’avais honte (peut-être ai-je honte jusqu’à ce jour); j’en arrivais à ressentir je ne sais quel petit plaisir secret, pas normal et pas propre, quand je rentrais chez moi, dans mon trou, par une de ces nuits les plus mauvaises que nous avons à Petersbourg et que j’avais une conscience accrue d’avoir fait ce jour-là encore une nouvelle saleté et, ce que j’avais fait étant irréparable, je me rongeais, secrètement, de l’intérieur, je me rongeais à toutes dents, me taraudais et me bouffais moi-même jusqu’à ce que l’amertume devienne une honteuse, une maudite espèce de douceur et puis une jouissance, franche et grave! Une jouissance, oui, une jouissance! J’insiste. J’en parle parce que j’ai toujours voulu en avoir le cœur net: les autres ressentent-ils ce genre de jouissance? Que je vous explique: cette jouissance-là provient d’une conscience trop claire de votre abaissement; du fait que vous sentez vous-même que vous en êtes au dernier stade; et que c’est moche, et qu’il n’y a pas moyen de se sentir mieux; qu’il ne vous reste aucune issue, que plus jamais vous ne serez un autre; que, même s’il vous restait du temps et de la foi pour devenir quelque chose d’autre, vous ne voudriez plus vous-même, sans doute, vous transformer; et que, si vous vouliez, vous ne pourriez rien faire de toute façon, parce qu’il est vrai, peut-être, que vous n’avez plus rien en quoi vous transformer. Surtout et à la fin des fins, cela se produit suivant les règles naturelles, fondamentales, de la conscience accrue et de l’inertie qui en découle directement, et donc, en conséquence, non seulement il n’y a plus moyen de se transformer, mais il n’y a, tout simplement, plus rien à faire. Vous arrivez, par exemple, à cela, avec votre conscience accrue: vous faîtes bien d’être une canaille - comme si c’était une consolation pour une canaille, d’avoir conscience qu’elle est vraiment une canaille. Pourtant, assez... Ca, pour parler, j’ai bien parlé, mais j’ai expliqué quoi?... Comment s’explique ce genre de jouissance? Si, si, je m’expliquerai! Je finirai par y arriver. C’est pour cela que je me suis mis à écrire...
Par exemple, j’ai un amour-propre effrayant. Je suis susceptible et rancunier comme un bossu ou comme un nain, et cependant, j’ai vécu des minutes où si j’avais reçu une gifle, j’aurais bien pu en être heureux. Je ne ris pas: sans doute aurais-je été capable de découvrir même là une sorte de jouissance - jouissance du désespoir, cela s’entend, mais c’est dans le désespoir que nous arrivent les plaisirs les plus brûlants, surtout si l’on ne ressent que trop l’impasse où nous sommes tombés. Et là, cette gifle - comme elle vous écrabouille la conscience, de voir quelle crotte on vient de faire de vous. L’essentiel, quoi qu’on qu’en en dise, c’est quand même cela, que c’est moi le premier coupable de tout, et, le plus humiliant, c’est que je suis coupable sans péché, pour ainsi dire, selon les seules lois de la nature. Parce que, d’abord, je suis coupable d’être plus intelligent que tous ceux qui m’entourent. (Je me suis toujours senti plus intelligent que tous ceux qui m’entouraient, et quelquefois - me croirez-vous? - j’en ai même éprouvé des scrupules. Du moins, toute ma vie, ai-je regardé pour ainsi dire de biais, et me suis-je toujours montré incapable de regarder quiconque droit dans les yeux.) Parce que je suis coupable, enfin, du fait que même si j’étais doué d’une quelconque grandeur d’âme, je n’en éprouverais qu’une douleur plus grande à la conscience de son inutilité. Je crois que je ne saurais pas quoi faire avec ma grandeur d’âme: ni pardonner à mon offenseur, s’il m’a frappé en vertu des lois de la nature; ni oublier, parce que les lois de la nature sont ce qu’elles sont, mais l’humiliation aussi. Et même si j’avais voulu ne pas avoir la moindre grandeur d’âme, si j’avais désiré, au contraire, tirer vengeance de mon offenseur, j’aurais bien été incapable de le faire, parce que, sans doute, je n’aurais jamais pu me décider, et ça, même si j’en avais eu la possibilité. Pourquoi n’aurais-je pas pu me décider? Je veux dire deux mots sur le sujet.
3
Parce que, chez ceux qui savent se venger, ou qui savent se défendre, en général - comment cela se passe-t-il? Eux, dès qu’ils sont possédés, disons par l’idée de vengeance, ils n’ont plus rien en eux que leur idée aussi longtemps qu’ils n’atteignent pas leur but. Un monsieur de ce genre vous fonce droit au but, comme un taureau furieux, cornes baissées, il n’y a guère qu’un mur qui vous l’arrêtera. (A propos: devant le mur, ce genre de messieurs, je veux dire les hommes spontanés et les hommes d’action, ils s’aplatissent le plus sincèrement du monde. Pour eux, ce mur n’est pas un obstacle comme, par exemple, pour nous, les hommes qui pensons et qui, par conséquent, n’agissons pas; pas un prétexte pour rebrousser chemin, prétexte auquel, le plus généralement, nous ne croyons pas nous-mêmes, mais auquel nous réservons le meilleur accueil. Non, ils s’aplatissent de tout cœur. le mur agit sur eux comme un calmant, une libération morale, comme quelque chose de définitif, quelque chose même, je peux dire, de mystique... Mais - plus tard avec le mur.) Eh bien, c’est cet homme spontané que je considère, comme l’homme le plus normal, tel que l’imaginait sa tendre mère - la nature - quand elle le mit au monde. Cet homme-là, j’en suis jaloux jusqu’à m’en faire tourner la bile. Il est idiot, nous n’en discuterons pas, mais qui vous dit qu’un homme normal ne devrait pas être un idiot - qu’en savez-vous? Peut-être est-ce même très bien. Je suis d’autant plus convaincu de ce - comment dirai-je? - soupçon, que si vous prenez, par exemple, l’antithèse de l’homme normal, c’est-à-dire l’homme à la conscience accrue, qui tire son origine non plus, bien sûr, de la nature mais du fond d’une cornue (cela, c’est presque du mysticisme, messieurs, mais c’est le soupçon que j’ai), il arrive à cet homme de la cornue de s’aplatir si fort devant son antithèse qu’il se ressent lui-même, le plus sincèrement du monde, avec toute sa conscience accrue, comme une souris, et non plus comme un homme. Une souris à la conscience accrue, peut-être, mais une souris, et là, elle voit un homme, etc. Surtout, c’est de lui-même, de sa propre initiative qu’il se prend pour une souris; personne ne le lui demande; voilà un point capital. Observons à présent cette souris en action. Supposons, par exemple, qu’elle aussi, elle a été humiliée (elle est humiliée presque perpétuellement) et qu’elle aussi, elle désire se venger. Elle accumule une rage encore plus grande que l’homme de la nature et de la vérité. Le petit désir mesquin et moche de rendre à l’offenseur la monnaie de sa pièce la ronge de l’intérieur, peut-être, d’une manière plus sale encore qu’il ne le fait chez l’homme de la nature et de la vérité, car l’homme de la nature et de la vérité, avec son idiotie congénitale, estime que sa vengeance n’est qu’une oeuvre de justice; mais la souris, à cause de sa conscience accrue, la nie, cette justice. Nous en venons enfin à l’acte en tant que tel, à la vengeance proprement dite. La malheureuse souris, en plus de sa saleté originelle, a eu le temps de s’entourer du cercle que représentent les questions et les doutes, et tant d’autres saletés; à une seule question, elle à ajouté tant d’autres questions sans réponse que c’est à son corps défendant qu’elle a vu s’amasser autour d’elle une sorte de fange mortifère, un genre de boue malodorante que viennent composer ses doutes, ses inquiétudes et, pour finir, les crachats que lui envoient les hommes d’action spontanés qui, l’entourant gravement comme ses tyrans ou ses juges, la couvrent, riant à gorge déployée, de ridicule. Bien sûr, il ne lui reste plus qu’à faire un petit geste d’impuissance avec sa patte, à s’affubler d’un sourire méprisant auquel elle ne croit pas elle-même et à filer la queue basse jusqu’à son trou. Là, au fond de son sous-sol puant, abject, notre souris humiliée, enfoncée, couverte de ridicule, se plonge immédiatement dans une rage froide et vénéneuse, une rage - voilà le point! - perpétuelle. Quarante ans de suite, elle ruminera jusqu’aux derniers, aux plus honteux détails de son humiliation et, chaque fois, elle en rajoutera de plus honteux, s’entretenant dans sa rage méchante et se moquant d’elle-même avec sa propre fantaisie. Elle aura honte elle-même de cette fantaisie, et, néanmoins, elle se rappellera tout, elle retournera tout dans tous les sens, elle s’inventera les contes les plus invraisemblables sous le prétexte que cela aussi aurait pu se passer, et elle ne se pardonnera rien. Elle commencera peut-être à se venger, mais ce sera par à-coups, par des vétilles, comme dans le dos, incognito, sans croire ni à son droit de se venger ni au succès de sa vengeance et sachant par avance que toutes ces tentatives la feront souffrir elle-même cent fois plus que celui qu’elle vise - que celui-là, peut-être, elles lui feront l’effet d’une piqûre de moustique. Et sur son lit de mort, elle se rappellera tout encore une fois, avec les intérêts accumulés, et là... Mais c’est dans ce répugnant, c’est dans ce glacial espoir-et-désespoir, dans cette inhumation volontaire et consciente sous le poids du malheur pendant quarante années dans un sous-sol, c’est dans la conscience accrue et néanmoins - fût-ce en partie - douteuse de l’impasse dans laquelle on se trouve, dans le poison de ces désirs insatisfaits qui a fini par pénétrer vos chairs, dans cette fièvre, enfin, des valses-hésitations, dans des décisions prises pour toujours et des remords qui vous reviennent une minute plus tard, que réside l’essence de la jouissance bizarre dont j’ai parlé. Elle est à ce point volatile, elle échappe parfois tellement à la conscience qu’il suffit que les gens soient un peu limités, ou qu’ils aient simplement les nerfs solides pour ne pas comprendre du tout. « J’en connais d’autres, peut-être, qui ne la comprendront pas, ajouterez-vous dans un sarcasme, ceux qui n’ont jamais reçu de gifles », ce qui serait une manière polie d’insinuer que cette expérience-là m’est arrivée peut-être à moi aussi et que j’en parle donc en connaissance de cause. Ma main au feu que vous croyez ça. Mais calmez-vous, messieurs, je n’ai jamais reçu de gifles, même si ça m’est égal ce que vous pensez à ce sujet. C’est moi, peut-être, qui regrette de ne pas en avoir assez distribué. Mais il suffit, plus un mot sur ce thème qui vous intéresse à ce point.
Je continue, imperturbable, sur les gens aux nerfs solides qui ne comprennent pas ce raffinement des plaisirs dont nous parlons. Ces messieurs-là, dans telle ou telle circonstance, par exemple, pourront beugler comme des taureaux, à toute gorge, ce qui, posons cela, leur fait le plus grand honneur mais, qu’ils se trouvent devant une impossibilité, ils se soumettent illico. L’impossibilité, c’est donc un mur de pierre? Quel mur de pierre? Eh, comment ça? - Les lois de la nature, les conclusions des sciences naturelles, les mathématiques. On vous démontre, par exemple, que vous descendez du singe: pas la peine de faire la grimace - acceptez-le comme c’est. Et quand on vous démontre qu’au fond, une seule goutte de votre propre graisse doit vous être plus chère qu’un bon million de vos semblables et que cet argument résout finalement les prétendues vertus et les devoirs, tous ces délires et autres préjugés - acceptez-le tel quel, qu’est-ce que vous y pouvez, c’est comme deux fois deux - mathématique. Répliquez donc, pour voir.
« Mais enfin, vous criera-t-on, on ne peut pas se révolter? C’est deux fois deux font quatre! La nature ne vous demande pas votre avis; ça lui est bien égal, ce que vous voulez et que vous soyez d’accord ou non avec ses lois. Vous êtes forcé de la prendre comme elle est - elle, par conséquent, et tous ses résultats. Le mur, donc, c’est un mur, etc. » Mon Dieu, mais moi, ça ne m’est pas égal, les lois de la nature et de l’arithmétique, si, pour telle ou telle raison, ces lois, ces deux fois deux font quatre n’ont pas l’heur de me plaire? Bien sûr, ce n’est pas le mur que je trouerai avec mon front, si, réellement, je n’ai pas assez de force pour le trouer, mais le seul fait qu’il soit un mur de pierre et que je sois trop faible n’est pas une raison pour que je me soumette.
Comme si ce mur de pierre pouvait vraiment vous apporter le repos, comme si, vraiment, il renfermait en lui ne serait-ce qu’un seul mot d’apaisement pour cette unique raison que deux fois deux font quatre. Absurdité des absurdités! Ah non, mais - tout comprendre, avoir conscience de tout, de tous les impossibles, de tous les murs de pierre; ne se soumettre à rien, aux impossibles, aux murs de pierre, si cela vous répugne de vous soumettre; arriver par les combinaisons logiques les plus inévitables aux conclusions les plus dégoûtantes sur ce sujet toujours d’actualité que le mur de pierre, c’est comme si vous, vous en étiez coupable, même si - encore une fois - vous n’êtes, à l’évidence, coupable de rien, ce qui amène, sans dire un mot et en grinçant des dents par impuissance, à se figer voluptueusement dans l’inertie et à songer qu’il apparaît ainsi que vous n’avez même plus personne sur qui déverser votre bile; que l’objet du délit n’y est plus, vous ne le retrouverez plus jamais peut-être, vous êtes là, devant un tour d’escamotage, un truc, une pure et simple filouterie, un genre de mélasse, on ne sait quoi, on ne sait qui, et que pour vous, malgré les mystères et les trucs, ça vous fait toujours mal - et moins vous comprenez, et plus ça vous fait mal!
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- Ha! Ha! ha! mais après ça, vous trouverez même du plaisir dans une rage de dents! vous esclafferez-vous.
- Eh quoi? - Même dans une rage de dents, il y a du plaisir, vous répondrai-je. J’ai eu une rage de dents pendant un mois; je sais de quoi je parle. Sauf que, c’est le cas de le dire, la rage, on ne la garde plus muette, on geint; mais ces geignements-là ne sont pas sincères, ce sont des geignements retors, et tout le sel est là, qu’ils soient retors. Ces geignements traduisent le plaisir de celui qui souffre; s’il n’en ressentait pas de plaisir, il ne geindrait pas. Un bon exemple que vous avez pris, messieurs, je m’en vais le développer. Ces geignements traduisent d’abord pour notre conscience toute l’humiliante absurdité de votre douleur; toutes ces lois de la nature, dont vous n’avez que faire, évidemment, mais qui font que c’est vous qui souffrez, et pas elle. Ils traduisent votre conscience d’être hors d’état de vous trouver un ennemi, et d’avoir mal quand même; la conscience que vous, avec vos régiments de Wagenheim, vous êtes pleinement esclave de vos dents; qu’il suffirait qu’on ne sait qui le veuille, vos dents cesseraient de vous faire mal, et que s’il ne le veut pas, elles peuvent encore continuer pendant trois mois; que si, enfin, vous n’êtes toujours pas d’accord et que vous protestez quand même, il ne vous reste pour vous consoler qu’à vous fouetter tout seul ou à cogner le mur avec vos poings - que ça lui fasse bien mal, au mur - et que vous n’avez résolument rien d’autre à faire. Or donc, messieurs, ce sont dans ces humiliations sanglantes, dans ces sarcasmes venus d’on ne sait qui, que commence à paraître un plaisir qui peut s’élever dans certains cas jusqu’à la volupté suprême. Messieurs, je vous demande de prêter l’oreille, un jour, aux geignements d’un homme évolué du XIX° siècle atteint d’une rage de dents, le deuxième jour, ou le troisième, disons, de sa maladie, alors qu’il cesse progressivement de geindre comme il geignait le premier jour, quand il avait tout simplement très mal aux dents; non pas comme pourrait geindre je ne sais quel rustre mal peigné, mais comme le fait un homme touché par le développement et la civilisation européenne, un homme arraché à la terre et aux racines nationales, comme on dit maintenant. Ses geignements deviennent pour ainsi dire mauvais, aussi rageurs que sales, ils durent des jours et des nuits d’affilée. L’homme comprend lui-même qu’il ne s’aidera en rien à geindre comme il geint; il sait mieux que personne qu’il ne fait que s’épuiser, que s’énerver, lui-même, et tout son entourage; il sait que même le public devant lequel il s’évertue avec tant d’insistance, que toute sa famille l’écoute déjà avec dégoût, ne le croit pas le moins du monde et comprend bien qu’il pourrait geindre différemment, d’une manière simple, sans ces roulades et ces grimaces, qu’il ne s’amuse à ça que par méchanceté, que par sournoiserie. C’est dans toutes ces prises de conscience, toutes ces hontes que réside le plaisir. « Bigre, je vous dérange, je vous tire des larmes, j’empêche toute la maison de dormir. Eh bien, ne dormez pas, sentez chaque seconde que j’ai une rage de dents. Maintenant, j’ai cessé d’être ce héros que je voulais être devant vous, je ne suis plus qu’un homme ridicule, un mauvais drôle. Tant mieux! Je suis heureux que vous m’ayez percé à jour. Ca vous dégoûte d’entendre mes sales petits gémissements? Moi, ça me plaît de vous rendre malades; tenez, je vais vous faire un de ces trilles qui vous dégoûtera encore plus... » Vous ne comprenez toujours pas, messieurs? Non, je vois qu’il faut se développer longtemps, il faut longtemps cultiver sa conscience pour saisir les méandres de cette jouissance-là! Vous riez? Parfait. Bien sûr, messieurs, je fais des plaisanteries de mauvais goût, elles sont inégales, hésitantes, elles doutent sitôt qu’elles sont lancées. C’est que je ne m’estime pas moi-même. Un homme doué d’une conscience est-il capable de s’estimer un tant soit peu?
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Oui, est-ce possible, enfin, est-ce possible que l’on s’estime encore un tant soit peu si l’on a essayé de chercher du plaisir même dans la sensation de son propre abaissement ? Ce n’est pas je ne sais quel remords à la Tartuffe qui me fait dire ce que je dis. En général, jamais je n’ai pu supporter de dire : « Pardon, papa, je ne le ferai plus » - non que je fusse incapable de le dire, au contraire, peut-être, c’est justement que j’en étais trop capable, et dans quelles circonstances ! Des fois, je me faisais prendre, comme par hasard, dans des histoires où j’étais innocent comme l’enfant qui vient de naître. C’était là le plus moche. Et, avec ça, je m’émotionnais de fond en comble, je me repentais, je versais des flots de larmes et il va de soi que je me bernais tout seul, et je ne faisais pas semblant le moins du monde. Le cœur, ou quoi, qui s’amochait… Là, on ne pouvait même pas accuser les lois de la nature qui m’humiliaient le plus et le plus constamment toute la vie. C’est moche de repenser à ça, et c’était moche sur le coup. Parce qu’une minute plus tard, des fois, je comprenais rageusement que tout cela n’était que du mensonge, oui, du mensonge, un monstrueux mensonge de façade, je veux dire ces remords, ces émotions, tous ces serments de renaissance. Demandez-moi pourquoi je me démolissais et je me torturais tout seul de cette façon. Réponse : parce que je m’ennuyais de rester les bras croisés ; d’où ces chinoiseries. Absolument. Observez-vous un petit peu plus vous-mêmes, messieurs, vous comprendrez que c’est comme ça. Je m’inventais moi-même des aventures, une vie – pour vivre, ne fût-ce qu’un petit peu. Combien de fois m’est-il arrivé, eh bien, ne serait-ce que de me vexer, comme ça, pour rien, exprès ; des fois, je n’en savais rien, pourquoi j’étais vexé, je m’étais mis le masque, mais ça en arrivait au point où, pour le coup, je me trouvais une raison valable. Toute ma vie j’ai été attiré par ce genre d’histoires, au point que, pour finir, j’étais vraiment lancé. Une fois même, j’ai voulu me forcer à tomber amoureux – et même deux fois. Et je souffrais, messieurs, je vous en fiche mon billet. Au fond du cœur, on n’y croit pas, qu’on souffre, c’est un sarcasme qui vous remue, mais moi, je souffre, et de la manière la plus vraie, la plus réglementaire ; je suis jaloux, je bous et je trépigne… Et tout cela, messieurs, c’est par ennui – oui, par ennui ; le poids de l’inertie. Car elle est un fruit direct, légitime, une conséquence logique de la conscience, cette inertie – cette position consciente les bras croisés. J’en ai parlé plus haut. Je le répète, je répète et j’insiste : les hommes spontanés, les hommes d’action sont justement des hommes d’action parce qu’ils sont bêtes et limités. Comment j’explique cela ? Très simple : c’est cette limitation qui leur fait prendre les causes les plus immédiates, donc les causes secondaires, pour des causes premières ; ainsi parviennent-ils plus facilement et plus vite que les autres à se convaincre d’avoir trouvé la base indubitable de leur affaire – et ça les tranquillise ; et c’est là l’essentiel. Parce que, pour se mettre à agir, il faut d’abord avoir l’esprit tranquille, il faut qu’il n’y ait plus la moindre place pour les doutes. Mais, par exemple, moi, comment ferais-je pour avoir l’esprit tranquille ? Pour moi, où sont-elles donc, les causes premières qui me serviront d’appui, où sont les bases ? D’où est-ce que je les prendrais ? Je m’exerce à penser ; par conséquent, chez moi, toute cause première en fait immédiatement surgir une autre, plus première encore, et ainsi de suite jusqu’à l’infini. Telle est l’essence de toute conscience et de toute pensée. Encore, si vous voulez, une loi de la nature. Et quel est donc le résultat final ? Toujours la même chose. Souvenez-vous de ce que j’ai dit de la vengeance. (Vous n’avez rien compris, je parie). On dit : l’homme se venge parce qu’il trouve là une chose juste. C’est donc qu’il a trouvé sa cause première, sa base – en l’occurrence : la justice. Il peut donc être tranquille sur tous les plans, d’où – il se venge tranquillement et avec succès, convaincu qu’il est d’accomplir un acte aussi noble que juste. Mais moi, je n’en vois pas, de justice, là-dedans, et je n’y vois non plus aucune vertu, et donc, si je commence à me venger, je ne le ferai que par méchanceté. Cette méchanceté pourrait évidemment l ‘emporter sur mes doutes, et pourrait donc, ainsi, servir de cause première justement parce qu’elle n’est pas une cause. Mais qu’est-ce que je peux faire si je n’ai même pas de méchanceté (c’est bien par ça que j’ai commencé) ? La méchanceté, à cause de ces maudites lois de la conscience, elle est soumise à une désagrégation chimique. Un geste – et l’objet devient gaz, les raisons s’évaporent, le coupable disparaît, l’offense cesse d’être une offense, elle devient un fatum, quelque chose comme une rage de dents dont personne n’est coupable, et, de nouveau, il ne vous reste donc qu’une seule issue – cogner le mur, pour que ça lui fasse très mal. Et bon, on laisse tomber, parce qu’on n’a pas trouvé la cause première. Essayez un peu de vous laisser emporter à l’aveuglette par votre passion, sans réfléchir, sans cause première, essayez de chasser la conscience ne serait-ce qu’à ces moments ; aimer, haïr – mais ne plus rester les bras croisés. Le lendemain, ou le jour d’après, grand maximum, vous commencerez à vous mépriser de vous être berné vous-même comme ça, en toute connaissance de cause. Le résultat ? Bulle de savon et inertie. Ah, messieurs, mais il est bien possible que la seule raison pour laquelle je me prenne pour un homme intelligent, c’est que, de toute ma vie, je n’ai jamais rien pu commencer ni achever. CA va, ça va, je ne suis qu’un bavard, rien qu’un bavard inoffensif et contrariant, comme tout le monde. Mais qu’est-ce que je peux faire quand la fonction unique et évidente de tout homme intelligent reste le bavardage, c’est-à-dire d’agiter les bras pour faire du vent ?
6
Si c’était seulement par paresse que je ne faisais rien. Messieurs, comme je m’estimerais! Je m’estimerais parce que je serais en état de posséder en moins de la paresse; j’aurais au moins une caractéristique, qu’on pourrait presque dire positive, et dont je serais assuré. Question: qui suis-je? Réponse: un fainéant; qu’une chose pareille ferait plaisir à entendre. C’est donc que je suis positivement défini, donc on peut dire quelque chose de moi. « Un fainéant! » - Mais c’est un titre, une fonction, oui, une carrière, mes bons messieurs. Non mais c’est vrai. Dès ce moment, je suis membre de droit du club le plus important, et je ne fais plus rein d’autre que m’estimer. J’ai connu un monsieur qui s’est flatté toute sa vie de s’y connaître en Laffites. Il pensait que c’était là une dignité tout à fait positive et ne laissait jamais de place pour le doute. Il est mort la conscience tranquille, et même triomphante, et il avait raison. Moi, à sa place, je me serais choisi une carrière: j’aurais été un fainéant et un glouton, mais pas un glouton ordinaire - non, un glouton qui, par exemple, se serait adonné au beau et au sublime. Qu’en pensez-vous? Moi, il y a longtemps que j’ai ça dans l’idée. Ce « beau » et ce « sublime », je l’avoue, ils me tapent sérieusement sur le système, la quarantaine venue; mais c’est que j’ai quarante ans - à l’époque, la chose aurait été toute autre! Non, à l’époque, je me serais trouvé une activité - je veux dire boire à la santé de tout ce qu’est le beau et le sublime. Je me serais accroché à toutes les occasions pour commencer par verser une larme dans ma coupe, puis pour la boire à la santé du beau et du sublime. C’est le monde entier, à ce moment-là, que j’aurais vu en beau et en sublime. Dans la saleté la plus minable, la plus patente, j’aurais trouvé du beau et du sublime. Je serais devenu larmoyant comme une éponge mouillée. Un peintre, par exemple, vous aurait peint un tableau de Gay. Je bois tout de suite à la santé du peintre qui a peint ce tableau de Gay, parce que j’aime le beau et le sublime. Un auteur a écrit Comme il plaît à chacun; je bois tout de suite à la santé de chacun à qui ça plaît, parce que j’aime le beau et le sublime. Et je demande qu’on me montre du respect pour cet amour, je persécute ceux qui ne m’en montrent pas. Je vis tranquille, je meurs en triomphant - ah, mais c’est formidable, formidable! Et je me serais laissé pousser une de ces bedaines, je me serais arrangé un de ces triples mentons, je me serais sculpté un de ces nez de poivrot tel que n’importe qui en me voyant se serait dit: « Ben mon vieux, ça c’est du positif! » Dites ce que vous voulez, messieurs, il est bien agréable d’entendre ces exclamations en notre époque négative.
7
Mais ce sont là que des rêves dorés. Oh, dîtes moi qui a dit le premier, qui a énoncé le premier que si les hommes faisaient des saletés, c’est seulement qu’ils ne connaissaient pas leurs véritables intérêts? qu’il suffisait de les éclairer, de leur ouvrir les yeux sur ces intérêts véritables pour qu’ils arrêtent à l’instant de faire leurs saletés - que, s’ils sont éclairés sur leur véritable profit, s’ils le comprennent, ils deviendront honnêtes et bons en un clin d’œil et que c’est dans le bien qu’ils verront ce profit, car on sait bien que personne ne peut agir sciemment contre son intérêt, qu’ils feront donc le bien, pour ainsi dire, par nécessité. O pauvre enfant! O pur et innocent bébé! Mais, tout d’abord, quand donc avez-vous vu, dans tous les millénaires, que les hommes n’agissaient que dans leur intérêt? Que faites-vous de ces millions d’actions qui témoignent que les hommes, en toute conscience, c’est-à-dire dans la pleine compréhension de leur intérêt véritable, le laissent au deuxième plan pour se lancer sur un autre chemin, celui du risque, du hasard, sans y être forcés par rien ni par personne, comme si, justement, ils voulaient tout sauf une route balisée, et qu’ils s’en ouvrent une autre, avec obstination, sans aucune raison - une autre, absurde, plus pénible, dont c’est tout juste s’ils ne se l’ouvrent pas dans les ténèbres? Parce que, n’est-ce pas, c’est leur obstination et leur lubie qu’ils préfèrent à leur intérêt... Un intérêt... Qu’est-ce que c’est donc, un intérêt? Et puis, pouvez-vous prendre sur vous de définir à coup sûr ce qui est intéressant pour l’homme? Et que se passerait-il si cet intérêt, certaines fois, certaines fois, non seulement pouvait, mais devait consister, justement, à se souhaiter non pas ce qui est profitable, mais ce qui est le pire? Et s’il en est ainsi, si ce genre de situations peut se produire, alors, c’est toute votre loi qui tombe à l’eau. Qu’en dites-vous, ces situations existent? Vous riez; riez, messieurs, mais répondez; ce qui profite à l’homme peut-il toujours être établi sans un risque d’erreur? N’y a-t-il pas des cas qui, non seulement n’entrent pas, mais ne peuvent pas entrer dans une classification? Parce que, messieurs, autant que je le sache, votre grand registre de nos intérêts, vous l’avez pris dans la moyenne des chiffres statistiques et des formules des sciences de l’économie. Vos intérêts, qu’est-ce que c’est? Le bien-être, la richesse, la liberté, le calme, etc.; de sorte que les hommes, qui, par exemple, iraient délibérément à l’encontre de cette liste ne seraient, d’après vous, rien d’autre que des obscurantistes, ou carrément des fous, n’est-ce pas? Mais, une chose étonnante; comment se fait-il que toutes ces statistiques, ces sages, ces amis du genre humain, énumérant les intérêts des hommes en oublient toujours un? Ils ne le prennent même pas en compte au sens où il le faudrait, et c’est pourtant de cela que leur calcul dépend. Le malheur ne serait pas bien grand, si on le prenait, cet intérêt, pour l’inclure sur la liste. Mais là est toute la catastrophe, que cet intérêt si fameux n’apparaît dans aucune classification, ne trouve sa place dans aucune liste. Par exemple, j’ai un ami... D’ailleurs, messieurs, c’est votre ami à vous aussi; et de qui donc, oui, de qui donc n’est-il pas l’ami? En se mettant à faire quelque chose, ce monsieur-là vous expliquera tout de suite, d’une manière claire et pontifiante, comment il faut agir précisément selon les lois de la raison et de la vérité. Bien plus: c’est avec feu et émotion qu’il vous peindra les véritables intérêts de l’espèce humaine, ses intérêts normaux; il accusera d’un ton moqueur ces taupes imbéciles qui ne comprennent ni leurs intérêts ni la vraie signification de la vertu; et - un quart d’heure, à peine, plus tard, sans aucune raison impondérable ou extérieure, non - par on ne sait quelle raison tout à fait intérieure, bien plus puissante que tous ses intérêts, il vous sortira une chose exactement inverse, il se placera en contradiction flagrante avec ce qu’il vient de dire: contre les lois de la raison, contre ses propres intérêts, bref, contre tout... Je vous préviens que cet ami est un personnage collectif, c’est pourquoi il me semble délicat de l’accuser tout seul. Mais c’est ce que je dis, messieurs: n’existe-t-il pas réellement quelque chose qui est plus cher à presque tous les hommes que leurs intérêts les plus grands, ou bien (pour ne pas aller contre la logique), est-ce qu’il n’existe pas un intérêt qui est le plus intéressant (celui-là même que tout le monde omet, et dont je viens de parler), un intérêt primordial, plus intéressant que tous les autres intérêts et au nom duquel, si cela s’avère nécessaire, les hommes sont prêts à braver toutes les lois - parfaitement, à se dresser contre le bon sens, l’honneur, le calme, le bien-être - bref, à se dresser contre tout ce qui est utile et beau, dans le seul but d’atteindre cet intérêt premier, cet intérêt le plus intéressant et qui leur est plus cher que tout?
- Bah, ça reste un intérêt, répliquez-vous, m’interrompant. Attendez donc, messieurs, nous aurons le temps de nous expliquer, il ne s’agit pas de faire des calembours, mais de ceci: cet intérêt-là est d’autant plus remarquable qu’il détruit toutes nos classifications et qu’il démolit constamment tous les systèmes imaginés par les amis du genre humain pour le bonheur du genre humain; que, bref, il dérange tout le monde... Mais avant de vous le nommer, cet intérêt, je veux me compromettre personnellement et c’est pourquoi j’affirme, comme par défi, que tous ces beaux systèmes, ces théories pour expliquer à notre humanité ses intérêts réels et naturels afin que son nécessaire élan pour les atteindre, ces intérêts, l’emplisse immédiatement de bonté et de noblesse, que, tous donc, ils ne sont pour le moment, à mon avis, que de la fausse logique! Car enfin, ne serait-ce qu’affirmer cette théorie d’une régénération du genre humain dans son ensemble par un système fondé sur ses propres intérêts, c’est, d’après moi, ou peu s’en faut, la même chose... eh bien, qu’affirmer, par exemple, à la suite de Buckle, que l’homme s’adoucit avec la civilisation et que, par conséquent, il devient moins sanguinaire et moins capable de faire la guerre. La logique veut que ça paraisse vrai. Mais l’homme est à ce point esclave de son système et de ses conclusions abstraites qu’il est prêt, en toute conscience, à déformer la vérité, prêt à ne plus rien voir, à ne plus rien entendre, du moment qu’il justifie mieux cette logique. Voilà pourquoi je prends ça en exemple, c’est un exemple trop frappant. Regardez autour de vous: le sang coule à grands flots, et d’une façon tellement joyeuse, encore, on dirait du champagne. Et c’est cela, notre XIXe siècle dont Buckle fut le contemporain. Regardez Napoléon le Grand, et celui d’aujourd’hui. Regardez l’Amérique du Nord - cette union perpétuelle. Regardez, enfin, cette caricature qu’est le Schleswig-Holstein... Qu’est-ce donc qu’elle adoucit en nous, la civilisation? Tout ce fait la civilisation, c’est qu’elle amène à une plus grande complexité de sensations... absolument rien d’autre. Je parie même que, cette complexité se développant, elle peut aller jusqu’au point où elle nous fera découvrir des plaisirs jusque dans le sang. Cela s’est déjà produit. Avez-vous remarqué que les buveurs de sang les plus raffinés furent presque tous les hommes les plus civilisés qui soient, même si les Attila et les Stenka Razine ne leur arrivaient pas à la cheville, parfois, et que, s’ils sont peut-être moins visibles qu’Attila et les Stenka Razine, c’est simplement qu’ils sont devenus communs, trop ordinaires, qu’ils sont rentrés dans le rang? La civilisation, si elle n’a pas rendu les hommes plus sanguinaires, a conféré à cette cruauté quelque chose de plus sale, de plus odieux. Avant, les hommes voyaient dans le meurtre un acte de justice, ils étripaient donc qui ils devaient sans remords de conscience; maintenant, nous avons beau savoir que le meurtre est une saloperie, nous la pratiquons de plus belle, cette saloperie, et encore plus qu’avant. Qu’est-ce qui est pire? - A vous de décider. Il paraît que Cléopâtre (passez-moi cet exemple d’histoire romaine) aimait enfoncer des épingles dorées dans les seins de ses servantes et qu’elle trouvait une jouissance dans leurs tortillements et dans leurs cris. Vous me direz que cela se passait à une époque qu’on pourrait dire relativement barbare; que maintenant aussi, c’est une époque barbare parce que, maintenant aussi (toujours relativement parlant) on enfonce des épingles; que maintenant aussi, même si les hommes ont su apprendre quelquefois à se faire une vision plus claire qu’aux époques barbares, ils sont loin d’avoir appris à agir selon ce que leur dictent les sciences ou la raison. Et, néanmoins, vous êtes toujours persuadés qu’ils finiront bien par apprendre, quand on ne sait quelles ancestrales et détestables habitudes seront définitivement passées, que le bon sens et les sciences réunis les rééduqueront de fond en comble et dirigeront leur humaine nature vers sa voie naturelle. Vous êtes persuadés qu’alors, c’est d’eux-mêmes qu’ils cesseront de se tromper volontairement et que, pour ainsi dire, c’est malgré eux qu’ils ne chercheront plus à séparer leur liberté de leurs intérêts normaux. Bien plus: alors, dites-vous, c’est la science en tant que telle qui apprendra aux hommes (encore que là, ce soit même du luxe, à mon avis) qu’en fait, ils n’ont ni volontés ni caprices, qu’au fond, ils n’en n’ont jamais eu, et qu’ils ne sont eux-mêmes rien d’autre que des espèces de touches de piano, ou des goupilles d’orgue; et que, en plus de tout cela, il y a encore les lois de la nature; de sorte que tous les actes qu’ils font ne se font pas selon leur volonté, mais par eux-mêmes, d’après les lois de la nature. Il suffit donc de découvrir ces lois de la nature et l’homme pourra cesser de répondre de ses actes, ce qui simplifiera sa vie d’une façon considérable. Toutes les actions humaines seront d’elles-mêmes classées selon ces lois, mathématiquement, un peu comme des tables de logarithmes, jusqu’à 108000, elles seront inscrites à l’almanach; ou, mieux encore, on pourra voir paraître des éditions utiles du genre de nos dictionnaires encyclopédiques, où tout sera noté et codifié avec une telle exactitude qu’il n’y aura plus jamais d’actes ni d’aventures. - Alors - c’est toujours vous qui parlez - s’instaureront de nouvelles relations économiques, toutes prêtes à l’usage, calculées, elles aussi, avec une exactitude mathématique, de sorte qu’en un instant disparaîtront tous les problèmes possibles et imaginables, pour cette unique raison, en fait, qu’ils trouveront toutes les réponses possibles et imaginables. Alors, on verra se construire un palais de cristal. Alors... Bon, bref, c’est l’Oiseau bleu qui nous rendra visite. Evidemment, nul ne peut garantir d’aucune façon (c’est moi qui parle maintenant) qu’alors, disons, la vie ne sera pas mortellement ennuyeuse (parce que, à quoi sert de faire quoi que ce soit, si c’est déjà inscrit sur une tablette?), mais elle sera parfaitement raisonnable. Certes, que n’inventerait-on pas quand on s’ennuie! Car les épingles d’or, c’est aussi par ennui qu’on les enfonce - mais laissons ça. Ce qui est moche (c’est encore moi qui parle), c’est qu’on pourrait bien voir les hommes se réjouir de ces épingles d’or. Parce que l’homme est bête, phénoménalement bête. C’est-à-dire, il est loin d’être bête, mais il est tellement ingrat que rien au monde ne l’est plus que lui. Moi, par exemple, ça ne m’étonnerait pas du tout, de voir surgir, comme ça, sans prévenir, en plein milieu de cette raison régnante, un monsieur au physique ingrat, ou, pour mieux dire, rétrograde et sarcastique, qui se mettrait les deux mains sur les hanches et qui dirait: Dites-donc, messieurs, est-ce qu’on ne pourrait pas l’envoyer valdinguer, toute cette raison, d’un seul coup de pied, seulement pour envoyer ces logarithmes au diable, et pour vivre à nouveau selon notre liberté stupide? Ca, encore, ce n’est rien, mais le malheur, c’est qu’il trouvera obligatoirement des partisans: l’homme est ainsi fait. Et tout cela, pour cette raison tellement idiote qu’il serait malséant, sans doute de la mentionner: c’est que les hommes, partout et de tout temps, qui qu’ils puissent être, aiment agir comme ils le veulent, et non comme le leur dictent la raison et leur propre intérêt; vouloir contre son intérêt est non seulement possible, c’est quelquefois positivement obligatoire (cela, c’est déjà mon idée). Leur volonté particulière, libre, affranchie de contraintes, leur caprice individuel, fût-il le plus farouche, leur fantaisie, exacerbée parfois jusqu’à la folie même - c’est bien cela, cet intérêt omis, ce plus profitable de tous les profits, qui n’entre dans aucune classification et qui envoie perpétuellement au diable tous les systèmes et toutes les théories. Car quoi, où les savants ont-ils pu bien trouver que les hommes ont besoin de je ne sais quelle volonté naturelle, de je ne sais quelle volonté de vertu? Ce dont les hommes ont besoin - c’est seulement d’une volonté indépendante, quel que soit le prix de cette indépendance, et quelles que soient ses conséquences. Bon, et la volonté, le diable sait de quoi...
.la suite plus tard...car il y a des limites d'affichage
Re: Les réfugiés syriens se sentent visités
Posté : 16 oct.13, 07:52
par medico
c'est un roman fleuve qui n'a aucun rapport avec le sujet.
Re: Les réfugiés syriens se sentent visités
Posté : 16 oct.13, 08:07
par ultrafiltre
Bonsoir Medico
Il parle d'une chose monstrueuse et vrai mais dont personne ne parle ni ici ni ailleurs:
du grain de sable
j'avoue que mieux vaut le lire direct plutôt que de parler dessus
je sais pas ce que ça donnera mais faut faire confiance
il est mort il y a plus d'un siècle et je pense qu'il mérite une lecture
je trouve qu'on ne parle pas assez de son sous sol...il explique et il est intelligent certes c'est pas Dieu
mais la guerre n'est pas plus jolie que ce qu'il dit et la guerre c'est une chose visible mais trop visible et à la limite ça aveugle
lui il passe inaperçu et c'est ça le problème en fait
Dostoievski essaye d'aborder les choses autrement pour parler de la même chose que ce que tu a dit
bonne soirée j'essayerai de poster la suite mais faut déjà qu'on sente ce debut et c'est pas gagné même après cent cinquante ans environ (depuis 1863 ou 1865)
bonne soirée medico
Re: Les réfugiés syriens se sentent visités
Posté : 17 oct.13, 07:53
par Ren'
La déclaration de la délégation interreligieuse française partie à la rencontre des réfugiés syriens :
http://blogren.over-blog.com/article-de ... 46143.html