Je suis sceptique sur tes explications.
Tu en as le droit...
Le fait de croire qu’il y a un Dieu amène obligatoirement à penser différemment, parce que la vie devient éternel en quelque sorte.
Minute papillon ! Tu vas trop vite en besogne, là. Il est clair que la vie est contemplée sous une autre perspective à partir du moment où l'on croit en Dieu, et où on croit en une vie après la mort (avec retrouvailles et tout le toutim). CEPENDANT, le fait de voir la vie sous un angle éternel n'enlève rien à la douleur de l'instant présent, lié au fait qu'il y a séparation, et même séparation prolongée.
Prenons un exemple pratique : quand mon frère habitait encore en Malaisie, ses visites en Suisse avec sa femme et son fils étaient assez rares. Et à chaque fois qu'ils repartaient pour la Malaisie après un séjour, ma mère fondait en larmes. Pourquoi ? Elle savait très bien que dans les 6 prochains mois, on les reverrait. Pourquoi tant de tristesse ? D'une certaine façon, à chaque séparation, elle effectuait un "mini-deuil", accepter le départ d'un être aimé et attendre les retrouvailles.
C'est la même chose pour ceux qui nous quittent. En plus du fait que chez beaucoup de croyants la vie après la mort reflète davantage un espoir ou une croyance, qu'une certitude, il y a le fait que la séparation sera prolongée, et que dans le fond on n'est pas très certain des circonstances qui nous réuniront. Il y a beaucoup d'incertitudes derrière la mort, et bien entendu la séparation qu'elle entraîne.
Psychologiquement, face à une épreuve, on l'assume mieux.
Peut-être. Ce devrait être le cas. Mais comme déjà précisé, il est illusoire de penser qu'on va passer outre le processus du deuil.
Je sais qu'une séparation radical peut être pénible, mais pas au point de faire un deuil, à moins que se ne soit que pour l'enveloppe charnelle où les souvenirs sur Terre.
Tu devrais plus te documenter sur ce qu'est le deuil; tu apprendrais qu'on vit beaucoup plus de deuils que ce qu'on en est directement conscients, et qu'il en existe différents niveaux.
Quand on voit des gens s'effondrer face à la mort d'un proche, je suis désolé, mais psychologiquement parlant ce ne sont plus des croyants. Qui a t-il de mieux que d'être auprès de Dieu? Vous comprenez, ce que je veux dire.
Oui, mais toi tu ne comprends pas le croyant, ça saute aux yeux. Lors du deuil, on ne pleure pas l'état de l'âme du défunt, on pleure la séparation. C'est pourtant pas difficile à comprendre...
Le paradoxe, il est là, vous nous dite que seul Dieu est amour, qu'il n'y a qu’avec lui qu’on vit pleinement son bonheur. Votre comportement est une preuve d’égoïsme en quelques sortes envers celui qui près du divin. Ce niveau de souffrance, seul des athées peuvent l’atteindre. Voir cette même attitude vis à vis de croyants, alors que ce n’est que parti remise, montre qu’il y a autre chose. Il est tout à fait normale que je sois perplexe.
Je ne crois pas. ll faudrait surtout que tu te détaches de tes idées préconçues sur ce qu'est le deuil. Quand je suis endeuillé parce qu'une personne meurt, je le suis parce que je suis séparé d'elle, et parce que je sais que cela crée de la douleur chez les autres.
Sans vouloir être trop intime, je vis en ce moment un deuil - non un deuil dû à la mort, mais à une séparation. Pourtant la personne n'est pas morte, et elle sera mieux sans moi dans ses pattes...
Il n'empêche qu'il y a un travail à faire sur moi. Il y a un "nous-couple" qui doit mourir en moi, une "identité-à-deux" qui doit disparaître. Cela requiert un deuil, ou une de ses formes. D'ailleurs, bien souvent les gens qui se séparent passent souvent par les mêmes réactions que les personnes qui perdent un être chère : d'abord elles sont choquées en apprenant que le conjoint s'en aille (ce qui peut s'exprimer par des troubles d'ordre physiologiques également); puis, elles peuvent en venir à le nier ("Non, c'est pas vrai, tu me fais une blague, là!") - c'est le déni, et ça peut durer assez longtemps; puis il y a la période de colère, suivi de la tristesse (voire d'une dépression). Enfin, l'acceptation de la situation est suivie à terme par la reconstruction du parcours de vie.
Bref! Le deuil, ce n'est pas seulement pleurer la perte de qqun, ou la séparation ! Le deuil c'est laisser quelque chose *en soi-même* s'en aller : une forme d'identification, des projets d'avenir, etc.
Donc tu vois, croyant ou non-croyant, on est tous plus ou moins logés à la même enseigne, si ce n'est qu'un croyant sincère devrait, effectivement, mieux traverser un deuil lié à une mort du fait que sa douleur n'est pas allourdie par le désespoir de la perte définitive.
Tu me parles des réflexes animaux et sentimentaux de survie, mais tu ne vois pas là que c’est la vie, elle même qui te parle, ton inconscient.
Désolé, mais en tant que psychologue, je ne peux pas accepter cette idée selon laquelle les réflexes animaux et sentimentaux sont l'équivalent d'une expression de l'inconscient. A moins d'accepter que *tous* les animaux ont un inconscient, ce qui reviendrait à leur assigner une forme d'intelligence qu'ils n'ont évidemment pas. Souvenons-nous que l'inconscient au sens psychanalytique du terme regroupe les pulsions, les pensées, les désirs refoulés. Les réflexes de survie sont simplement des réactions nécessaires à la survie immédiate de l'organisme. L'être humain n'est pas disposé à anihiler ce genre de réflexe (pour autant qu'il le puisse) car il n'arrive que rarement qu'il se sente près à quitter ce monde.
D'ailleurs, il me semble très peu pertinent de mélanger deuil et réflexes de survie, même s'il est évident que dans les deux cas, la croyance peut avoir une *influence*.
C’est cette vérité qui se montre au grand jours. C’est elle qui fait souffrir violemment et non une peine d’une séparation temporaire.
Pas d'accord avec toi. Je te recommande la lecture (assez facile) de John Bowlby "Attachement et perte", en 3 tomes. Bowlby est le premier théoricien de l'attachement. Ses recherches les réactions émotives humaines liées à l'attachement et à la perte de figures d'attachement sont très instructives et apportent un éclairage primordial sur le deuil.
Une séparation temporaire ne peut pratiquement pas engendrer le désespoir et c’est là le problème. En quoi une telle séparation apporte-t-il un deuil vu que c’est provisoire.
J'espère que les explications qui ont précédé auront répondu à cette dernière question.
A+