La preuve cosmologique de l'existence de Dieu
Posté : 01 nov.14, 05:23
Bonjour,
J'ai trouvé un lien fort intéressant que je voulais vous faire partager: http://www.epistheo.com/la-preuve-cosmologique/
01. Qu’est-ce que la preuve cosmologique ?
La preuve cosmologique est un type de preuve visant à démontrer l’existence de Dieu en partant de l’existence de l’univers. Elle tire son nom de celui-ci, puisque « cosmos » signifie « univers » en grec. D’une manière générale, les preuves cosmologiques s’appuient sur le principe de causalité. Elles commencent par démontrer que l’existence de l’univers est un effet, et dans la mesure où il n’y a pas d’effet sans cause, l’univers doit avoir une cause, identifiée à Dieu. En réalité, il y a deux types différents de preuves cosmologiques. D’une part, il y a la preuve cosmologique par la contingence, qui démontre que l’univers est contingent, c’est-à-dire qu’il aurait pu ne pas exister ou qu’il aurait pu exister d’une autre manière, et qu’il faut donc trouver la raison dans son existence et de sa manière d’être, dans un être nécessaire. D’autre part, il y a la preuve cosmologique du kalam, qui démontre que l’univers ne peut pas avoir un passé infini, qu’il doit donc avoir eu un commencement, or dans la mesure où tout ce qui commence à une cause, il doit y avoir une cause première. La première preuve déduit l’existence d’un être qui soutient l’univers, tandis que la seconde déduit celle d’un être qui est à l’origine de l’univers. Nous étudierons chacune de ces preuves, ainsi que leurs objections, dans les prochaines émissions.
02. Qu’est-ce que la preuve cosmologique par « la contingence » ?
C’est une preuve de l’existence de Dieu, formulée notamment par Leibniz (Monadologie, 1714). D’après lui, la réalité est rationnelle. Elle est régie par ce qu’il appelle le « principe de raison suffisante ». D’après ce principe, rien n’est sans raison, toute chose a une explication qui rend compte de son existence et de sa manière d’être. Appliqué à la totalité de l’existence, il conduit à se poser la question suivante : « Pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ? » Pour répondre à cette question, Leibniz distingue deux types de choses : celles qui sont nécessaires et celles qui sont contingentes. Les choses qui sont nécessaires contiennent en elles-mêmes leur propre raison d’être, ce qui fait qu’elles ne peuvent pas être autrement que ce qu’elles sont. Au contraire, les choses contingentes pourraient être différentes, voir même ne pas exister, dans la mesure où elles dépendent d’autres choses. Le fait est que toutes les choses dans l’univers sont contingentes, elles sont relatives à d’autres choses. Mais il n’est pas possible que tout soit contingent, sinon il n’y aurait aucune explication à l’existence de l’univers. Il faut donc qu’il y ait au moins un être nécessaire, qui soit la raison ultime de l’univers. Cet être est identifié à « Dieu ». Cette preuve à fait l’objet de nombreuses discussions, nous les étudierons dans les prochaines émissions.
03. Que vaut le « principe de raison suffisante » ?
D’après le « principe de raison suffisante », rien n’est sans raison, toute chose a une explication à son existence et à sa manière d’être. C’est un principe qui joue un rôle essentiel dans la preuve cosmologique par la contingence, qui déduit l’existence de Dieu de la nécessité d’expliquer l’existence et la nature de l’univers. Certains philosophes remettent donc en question le principe de raison suffisante, afin de contester la valeur de la preuve. C’est le cas par exemple de Kant, dans sa Critique de la Raison Pure (1781), qui dénie toute valeur objective à ce principe, comme à tous les principes de la raison d’ailleurs. D’après lui, il est impossible de savoir si la réalité est rationnelle ou non. Le principe de raison suffisante n’est donc qu’un postulat rationaliste. Dans le même ordre d’idée, dans un célèbre débat radiophonique de 1948, le philosophe Bertrand Russell affirmait que l’univers n’a pas à recevoir d’explication. Ses deux positions irrationalistes sont très étonnantes, et surtout contredites par le fait que ces deux philosophes admettent l’usage de la raison pour d’autres questions. Il est vrai que la raison est indémontrable, puisqu’elle est au fondement de tout raisonnement. Néanmoins, si elle est admise, elle doit être pleinement admise, puisque ses lois ont une valeur universelle. Il serait auto-contradictoire de ne l’admettre que partiellement. Dans la prochaine émission, nous étudierons le caractère contingent de l’univers.
04. L’univers est-il réellement contingent ? (1)
C’est une question fondamentale pour la preuve cosmologique par la contingence, puisqu’elle repose presque entièrement sur cette affirmation. D’après cette preuve, l’univers est contingent, c’est-à-dire qu’il aurait pu ne pas être, ou qu’il aurait pu être autrement. Par conséquent, il faut trouver la raison de son existence et de sa manière d’être hors de lui, dans un être nécessaire, que l’on appelle « Dieu ». Quelques philosophes pourtant doutent du caractère contingent de l’univers. Par exemple, Bertrand Russell, dans un célèbre débat radiophonique de 1948, reconnaissait que les éléments qui composent l’univers sont contingents, mais cela n’implique pas nécessairement que l’univers en tant que totalité le soit également. Par exemple, si toutes les pierres qui constituent un château sont petites, on ne peut pas en conclure que le château lui-même est petit. C’est ce que Russell appelle le « sophisme de la composition ». Mais d’après les défenseurs de la preuve cosmologique, cette analogie est fausse. Elle correspondrait mieux au fait que le château lui-même est un château de pierre, puisqu’il est constitué de pierre. Si l’on revient précisément à la question de la contingence, un ensemble de choses contingentes est-il lui-même contingent ? Evidemment, dans la mesure où une l’existence d’une totalité dépend au moins de ses parties. Par conséquent, l’univers est bien contingent, il lui faut une cause nécessaire. Nous poursuivrons ce débat dans la prochaine émission.
05. L’univers est-il réellement contingent ? (2)
La preuve cosmologique par la contingence s’appuie sur le fait que l’univers soit contingent pour en déduire l’existence d’un être nécessaire permettant de l’expliquer, à savoir « Dieu ». La contingence de l’univers, cela signifie qu’il aurait pu ne pas être, ou qu’il aurait pu être autrement. En effet, le néant absolu est une possibilité, il n’y a pas de contradiction dans le fait de concevoir une telle chose. Un univers différent est également une possibilité, là encore il n’y a pas de contradiction dans une telle idée. La question est alors : Pourquoi l’univers existe-il ? Pourquoi est-il ainsi plutôt qu’autrement ? On pourrait affirmer que l’univers comme totalité s’explique par chacune de ses parties, et que chacune de ses parties s’expliquent elles-mêmes mutuellement. Mais cela n’explique que sa cohérence, non pas pourquoi il existe et pourquoi est-ce cet univers précisément qui existe. La cohérence interne ne suffit pas : on peut très bien concevoir un univers différent, par exemple par simulation informatique, qui soit absolument cohérent ; et pourtant, cet univers là n’existe pas. La cohérence interne n’explique pas pourquoi c’est précisément cet univers qui existe, alors que d’autres alternatives sont toutes aussi cohérentes. L’univers est donc contingent, il faut qu’il y ait quelque chose, hors de l’univers, qui le détermine à être, lui plutôt qu’une alternative. Nous continuerons à discuter de cette preuve dans la prochaine émission.
06. La preuve par la contingence du monde est-elle auto-contradictoire ?
D’après la preuve par la contingence, l’univers est contingent, c’est-à-dire qu’il aurait pu ne pas exister ou qu’il aurait pu être autrement. Il faut donc trouver son explication dans un être nécessaire, c’est-à-dire qui ne peut pas ne pas exister et qui ne peut pas être autrement. Un tel être est identifié à Dieu. Certains critiques pensent que cette preuve est auto-contradictoire. En effet, si la cause de l’univers est nécessaire, alors l’univers n’est-il pas lui aussi nécessaire ? Et si l’univers est nécessaire, alors le point de départ de la preuve, à savoir que l’univers est contingent, est faux. En réalité, cette critique repose sur une confusion entre la détermination et la nécessité. Lorsqu’on explique exhaustivement la raison d’un effet, on explique ce qui le détermine, quelle est sa cause. Etant donné la cause, l’effet ne pouvait pas être autrement. Néanmoins, il n’est pas nécessaire pour autant, puisqu’il dépend justement de sa cause pour exister. Son existence n’est pas absolue, mais relative à sa cause. Un effet est donc toujours contingent par définition. Pour la même raison, les partisans de cette preuve ajoutent que l’acte créateur est libre. Dieu aurait pu s’abstenir de créer l’univers, mais dans la mesure où il est bon, il a préféré le créer. C’est donc un acte volontaire, donc libre, et déterminé, donc contingent. Nous poursuivrons cette réflexion dans la prochaine émission.
07. La contingence du monde prouve-t-elle l’existence de Dieu ?
La contingence du monde implique l’existence d’un être nécessaire. Mais un être nécessaire est-il forcément Dieu ? C’est la question que pose Kant dans sa Critique de la Raison pure (1781). Mais il répond avec précipitation par la négative, sans avoir auparavant examiné les arguments de Christian Wolff dans sa Theologia naturalis (1728-1754). Voici ses arguments : un être nécessaire n’a besoin d’aucun autre être pour être expliqué. Par conséquent, il est autosuffisant et indépendant. Son existence étant indépendante et autosuffisante, il est éternel. Il est également simple, c’est-à-dire non-composé, sinon il dépendrait de ses parties. Pour la même raison, il est hors de l’espace, puisque l’espace implique des parties. En tout cela, il est radicalement distinct de l’univers. Et dans la mesure où il suffit seul à l’explication de l’univers, il est unique. Mais l’univers étant contingent, il y avait plusieurs alternatives : celle de causer son existence plutôt que de s’abstenir, et celle de causer cet univers-ci, plutôt qu’un autre autrement. La réalisation de cette alternative implique un choix, donc une intelligence et une volonté libre. L’être nécessaire est donc bien ce que l’on appelle « Dieu ». Mais il est vrai que l’on ne sait pas si l’univers créé est infini, ou s’il a un commencement, comme le prétendent les monothéismes. Cette question, c’est l’objet de la preuve que nous étudierons dans la prochaine émission.
08. Qu’est-ce que la preuve cosmologique par « le commencement » ?
La preuve cosmologique par le « commencement », que l’on pourrait également appeler « preuve par la cause première » ou « preuve du kalam », puisqu’elle a été particulièrement développée par des penseurs arabes, est un type de preuve de l’existence de Dieu. Comme toutes les preuves cosmologiques, cette preuve particulière part de l’existence de l’univers. Elle établit le fait que cette existence ait eu un commencement pour en déduire l’existence d’une cause. En effet, tout ce qui a un commencement, a une cause. Si donc l’univers a commencé à exister, il doit avoir eu une cause. Cette preuve cosmologique est très différente de l’autre preuve cosmologique, celle par la contingence. La preuve par « la contingence » réclamait simplement une explication à l’existence de l’univers, qu’il ait eu un commencement ou qu’il ait un passé infini, il doit y avoir une raison expliquant pourquoi l’univers existe plutôt qu’il n’y ait rien. La preuve par « le commencement », au contraire, dépend de l’existence d’un commencement à l’univers. Les philosophes, et en particulier les penseurs arabes du kalam, ont proposé quelques arguments reposant sur l’impossibilité d’une régression temporelle à l’infini, qui impliquent la nécessité que l’existence de l’univers ait eu un commencement. Nous étudierons les arguments mais aussi les objections auxquelles la preuve cosmologique « par le commencement » a dû faire face.
09. Tout ce qui commence à exister a-t-il nécessaire une cause ?
L’idée que « tout ce qui commence à exister ait une cause » constitue le postulat fondamental de la preuve de l’existence de Dieu par le commencement. En effet, si tout ce qui commence a une cause, alors si l’univers a un commencement, il doit avoir une cause, que l’on pourrait identifier à Dieu. Mais certains philosophes, notamment David Hume dans son Traité de la nature Humaine (1740), contestent cette idée. D’après David Hume, on peut très bien imaginer l’apparition d’une chose sans qu’il n’y ait de cause à son apparition. Nous le pouvons, parce que les notions de cause et d’effet sont deux notions distinctes. Il n’y a donc pas de contradiction à soutenir l’une sans l’autre. Mais son argument a été critiqué par Elizabeth Anscombe. En effet, comment savons-nous qu’une chose commence à exister, plutôt qu’elle ne fasse que réapparaître ? Si nous voyons une chose apparaître soudainement, rien ne nous indique qu’elle n’ait pas déjà existé ailleurs antérieurement. Ce qui nous permet d’affirmer qu’une chose commence à exister, c’est que nous en connaissons l’origine, sa cause. La notion de commencement semble donc bien liée à celle de cause. Ensuite, il faut bien admettre que c’est un fait empirique, qu’aucune chose ne commence sans qu’il n’y ait une cause à son origine. Dans la prochaine émission, nous étudierons les preuves d’après lesquelles l’univers a eu un commencement.
10. Comment peut-on prouver que l’univers a eu un commencement ? (1)
Si tout ce qui a un commencement a une cause, alors si l’univers a un commencement, il a également une cause, que l’on pourrait identifier à Dieu. D’où l’enjeu de la question. William Lane Craig, un philosophe contemporain, a donc recensé quelques arguments visant à prouver que l’univers ait eu un commencement. Il y a notamment des arguments scientifiques basés sur l’expansion de l’univers et sur la seconde loi de la thermodynamique (d’après laquelle, grossièrement, l’épuisement de l’énergie est irréversible). D’une part, si l’univers est en expansion, il a dût commencer comme étant un point infimement petit et immensément dense. Cet état initial constitue son commencement. Si l’univers est aujourd’hui en expansion, c’est parce qu’il y a eu un « big bang ». Le big-bang constituerait le commencement de l’univers. D’autre part, si l’univers perd irréversiblement de l’énergie, il faut bien qu’il ait eu un commencement, car si l’univers avait un passé infini, l’énergie devrait déjà être perdue. Si l’on reverse une bouteille contenant une quantité d’eau limité depuis une durée infinie, inévitablement la bouteille d’eau devrait être vide. Il en va de même pour la seconde loi de la thermodynamique appliquée à l’univers. Ces deux arguments scientifiques sont intéressants, mais ils doivent faire face à des critiques et à modèles scientifiques alternatifs. Les arguments les plus indubitables restent donc les arguments logiques que nous étudierons dans la prochaine émission.
11. Comment peut-on prouver que l’univers a eu un commencement ? (2)
Si l’univers a un commencement, il doit avoir une cause, identifiable à Dieu. D’où l’enjeu de la question. William Lane Craig, un philosophe contemporain, a déployé quelques arguments logiques en faveur de cette thèse. Si l’univers n’avait pas eu de commencement, il serait infini, c’est-à-dire que l’on pourrait perpétuellement remontrer dans le temps. La quantité d’événements ayant eu lieu dans l’histoire de l’univers serait infini. Mais une telle chose n’est pas possible, car on ne peut pas produire de l’infini par additions successives. Pour bien le comprendre, il faut distinguer deux types d’infinis : l’infini actuel et l’infini potentiel. L’infini actuel désigne une totalité complète et illimitée. Il est insensible aux additions et aux soustractions : si j’ajoute ou retranche quelque chose à l’infini, il y a toujours le même nombre d’éléments. Tel n’est pas le cas de l’univers : son histoire s’accroît de jours en jours. Il appartient plutôt à la catégorie des infinis potentiels. Ce sont des ensembles finis, mais qui peuvent toujours s’accroître. Pourtant, ils resteront toujours finis : si je prends un tas de sable, que je lui ajoute beaucoup de grains, le nombre de grains restera fini. Il en va de même avec l’univers, dont le passé s’accroît de jours en jours. Il doit donc être fini et il donc avoir eu un commencement. Dans la prochaine émission nous étudierons un deuxième argument logique.
12. Comment peut-on prouver que l’univers a eu un commencement ? (3)
Dans les précédentes émissions, nous avons déjà étudié quelques arguments, de William Lane Craig, en faveur d’un commencement à l’univers. L’enjeu était bien entendu de défendre une des preuves de l’existence de Dieu, à savoir : si toute chose qui commence à une cause, alors si l’univers a un commencement, il doit avoir une cause, identifiable à Dieu. Voici maintenant un dernier argument en faveur d’un commencement. Si l’univers n’avait pas eu de commencement, alors son histoire devrait être infinie. Nous avons déjà différencié un infini actuel, qui est réellement infini, insensible aux additions et soustractions ; et un infini potentiel, qui désigne un ensemble fini que l’on peut toujours accroître mais qui restera toujours fini. Si l’univers n’a pas eu de commencement, le nombre de ses événements passés est un infini actuel. Or le problème est qu’un infini actuel ne peut pas être parcouru. Si je commence à compter jusqu’à l’infini, les chiffres vont devenir de plus en plus grands, mais je n’atteindrais jamais l’infini lui-même. Le problème est le même concernant l’univers : si le passé de l’univers est infini, il n’aurait jamais dû totalement s’écouler, et par conséquent, le présent ne devrait pas exister. Or le présent existe, il faut donc que le passé de l’univers soit fini, et qu’il ait donc eu un commencement. Dans la prochaine émission nous étudierons un dernier argument proposé particulièrement par Sadowsky.
13. Pourquoi une régression à l’infini n’expliquerait-elle pas l’univers ?
Que l’on affirme que Dieu soit la cause première, ou qu’il soit la cause à l’origine de l’univers, dans tous les cas on écarte la possibilité que l’univers ait un passé infini, que l’on puisse infiniment remonter le chaîne des causes dans le temps. Il faut une cause première, une cause à l’origine de l’univers. Pourquoi donc une régression à l’infini ne serait-elle pas possible ? C’est ce que tente d’expliquer James Sadowsky dans un article de 1980, intitulé : « The Cosmological Argument and the Endless Regress ». Si toute cause est elle-même l’effet d’une cause qui lui est antérieure, alors cela soulève le problème des conditions de l’existence de tous les maillons de la chaîne causale. Les maillons antérieurs d’une chaîne sont la condition de l’existence des maillons postérieurs. En écartant l’existence d’un maillon premier et autosuffisant, qui est la condition de l’existence de toute la chaîne causale, alors la condition de l’existence se retrouve indéfiniment repoussée sans jamais être atteinte. Sadowsky donne un exemple éclairant : c’est un peu comme si tout le monde devait demander la permission à quelqu’un d’autre avant de faire quoi que ce soit ; dans ce cas, personne ne pourrait jamais rien faire. Cet exemple illustre bien qu’une régression à l’infini ne permet pas d’atteindre la moindre explication. Dans la prochaine émission, nous nous demanderons si cela suffit à prouver l’existence de Dieu.
14. Le commencement de l’univers prouve-t-il l’existence de Dieu ?
Le fait que l’univers ait un commencement implique le fait qu’il ait une cause. Mais cette cause est-elle nécessairement Dieu ? William Lane Craig, dans The Kalam Cosmological Argument (1979), affirme qu’il est possible de le démontrer. La cause créatrice de l’univers créé quelque chose qui n’existe pas antérieurement. Autrement dit, elle créé la matière, l’énergie, mais aussi l’espace et le temps. La cause créatrice transcendante toutes ces réalités. Autrement dit, elle doit être immatérielle, éternelle, et immuable. Elle doit être également immensément puissante, puisqu’elle a créé l’univers à partir de rien. Mais pourquoi la cause créatrice a-t-elle justement créée l’univers ? Il existe deux types d’explications : les explications scientifiques, qui font appel à des processus physiques aveugles, et les explications personnelles, qui impliquent un agent libre opérant des choix. Mais il ne peut pas s’agir d’une explication scientifique, puisque la cause créatrice transcende l’univers, le domaine de la physique. Expliquer le commencement de l’univers par une cause scientifique reviendrait à dire qu’il n’a jamais commencé, ce qui serait contradictoire. Il ne peut donc s’agir que d’un être personnel, qui a librement choisi de créé l’univers. Un être créateur, personnel, puissant, immatériel et éternel, voilà ce que l’on appelle « Dieu ». Le commencement de l’univers implique donc bien l’existence de Dieu. Néanmoins, précise William Lane Craig, cette argumentation s’appuie également sur la preuve téléologique, que nous étudierons bientôt.
15. Si toute chose a une cause, quelle est la cause de Dieu ?
C’est l’objection la plus souvent reprise contre les preuves cosmologiques, quelque soit leur type. Si l’on explique que l’univers est contingent, c’est-à-dire qu’il aurait pu ne pas exister, et qu’il faut donc une cause nécessaire pour expliquer pourquoi celui-ci existe, alors certains critiques demandent : pourquoi Dieu n’aurait-il pas lui-même une cause qui explique son existence ? Si l’on explique que l’univers ne peut avoir un passé infini, qu’il a eu un commencement et donc une cause première, alors certains critiques demandent : pourquoi Dieu n’aurait-il pas lui-même une cause ? Ces deux objections reposent sur une confusion concernant le principe de causalité. Le principe de causalité n’affirme pas que « toute chose a une cause », mais que « tout effet a une cause » ; ce qui n’est pas un effet n’a pas de cause. Dieu n’est pas un effet, il n’a donc pas besoin d’une cause. Il en va de même concernant le principe de raison suffisante. Il affirme que tout ce qui est contingent, c’est-à-dire tout ce qui ne s’explique pas par soi-même, doit avoir une raison extrinsèque qui l’explique. Ce qui n’est pas contingent n’a donc pas besoin d’une explication extrinsèque. Dieu n’est pas contingent, au contraire il est nécessaire, il n’a donc pas besoin d’une explication extrinsèque. L’étude des preuves cosmologiques étant achevée, nous étudierons dans la prochaine émission, un autre type de preuve, les preuves téléologiques.
Qu'en pensez-vous?
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01. Qu’est-ce que la preuve cosmologique ?
La preuve cosmologique est un type de preuve visant à démontrer l’existence de Dieu en partant de l’existence de l’univers. Elle tire son nom de celui-ci, puisque « cosmos » signifie « univers » en grec. D’une manière générale, les preuves cosmologiques s’appuient sur le principe de causalité. Elles commencent par démontrer que l’existence de l’univers est un effet, et dans la mesure où il n’y a pas d’effet sans cause, l’univers doit avoir une cause, identifiée à Dieu. En réalité, il y a deux types différents de preuves cosmologiques. D’une part, il y a la preuve cosmologique par la contingence, qui démontre que l’univers est contingent, c’est-à-dire qu’il aurait pu ne pas exister ou qu’il aurait pu exister d’une autre manière, et qu’il faut donc trouver la raison dans son existence et de sa manière d’être, dans un être nécessaire. D’autre part, il y a la preuve cosmologique du kalam, qui démontre que l’univers ne peut pas avoir un passé infini, qu’il doit donc avoir eu un commencement, or dans la mesure où tout ce qui commence à une cause, il doit y avoir une cause première. La première preuve déduit l’existence d’un être qui soutient l’univers, tandis que la seconde déduit celle d’un être qui est à l’origine de l’univers. Nous étudierons chacune de ces preuves, ainsi que leurs objections, dans les prochaines émissions.
02. Qu’est-ce que la preuve cosmologique par « la contingence » ?
C’est une preuve de l’existence de Dieu, formulée notamment par Leibniz (Monadologie, 1714). D’après lui, la réalité est rationnelle. Elle est régie par ce qu’il appelle le « principe de raison suffisante ». D’après ce principe, rien n’est sans raison, toute chose a une explication qui rend compte de son existence et de sa manière d’être. Appliqué à la totalité de l’existence, il conduit à se poser la question suivante : « Pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ? » Pour répondre à cette question, Leibniz distingue deux types de choses : celles qui sont nécessaires et celles qui sont contingentes. Les choses qui sont nécessaires contiennent en elles-mêmes leur propre raison d’être, ce qui fait qu’elles ne peuvent pas être autrement que ce qu’elles sont. Au contraire, les choses contingentes pourraient être différentes, voir même ne pas exister, dans la mesure où elles dépendent d’autres choses. Le fait est que toutes les choses dans l’univers sont contingentes, elles sont relatives à d’autres choses. Mais il n’est pas possible que tout soit contingent, sinon il n’y aurait aucune explication à l’existence de l’univers. Il faut donc qu’il y ait au moins un être nécessaire, qui soit la raison ultime de l’univers. Cet être est identifié à « Dieu ». Cette preuve à fait l’objet de nombreuses discussions, nous les étudierons dans les prochaines émissions.
03. Que vaut le « principe de raison suffisante » ?
D’après le « principe de raison suffisante », rien n’est sans raison, toute chose a une explication à son existence et à sa manière d’être. C’est un principe qui joue un rôle essentiel dans la preuve cosmologique par la contingence, qui déduit l’existence de Dieu de la nécessité d’expliquer l’existence et la nature de l’univers. Certains philosophes remettent donc en question le principe de raison suffisante, afin de contester la valeur de la preuve. C’est le cas par exemple de Kant, dans sa Critique de la Raison Pure (1781), qui dénie toute valeur objective à ce principe, comme à tous les principes de la raison d’ailleurs. D’après lui, il est impossible de savoir si la réalité est rationnelle ou non. Le principe de raison suffisante n’est donc qu’un postulat rationaliste. Dans le même ordre d’idée, dans un célèbre débat radiophonique de 1948, le philosophe Bertrand Russell affirmait que l’univers n’a pas à recevoir d’explication. Ses deux positions irrationalistes sont très étonnantes, et surtout contredites par le fait que ces deux philosophes admettent l’usage de la raison pour d’autres questions. Il est vrai que la raison est indémontrable, puisqu’elle est au fondement de tout raisonnement. Néanmoins, si elle est admise, elle doit être pleinement admise, puisque ses lois ont une valeur universelle. Il serait auto-contradictoire de ne l’admettre que partiellement. Dans la prochaine émission, nous étudierons le caractère contingent de l’univers.
04. L’univers est-il réellement contingent ? (1)
C’est une question fondamentale pour la preuve cosmologique par la contingence, puisqu’elle repose presque entièrement sur cette affirmation. D’après cette preuve, l’univers est contingent, c’est-à-dire qu’il aurait pu ne pas être, ou qu’il aurait pu être autrement. Par conséquent, il faut trouver la raison de son existence et de sa manière d’être hors de lui, dans un être nécessaire, que l’on appelle « Dieu ». Quelques philosophes pourtant doutent du caractère contingent de l’univers. Par exemple, Bertrand Russell, dans un célèbre débat radiophonique de 1948, reconnaissait que les éléments qui composent l’univers sont contingents, mais cela n’implique pas nécessairement que l’univers en tant que totalité le soit également. Par exemple, si toutes les pierres qui constituent un château sont petites, on ne peut pas en conclure que le château lui-même est petit. C’est ce que Russell appelle le « sophisme de la composition ». Mais d’après les défenseurs de la preuve cosmologique, cette analogie est fausse. Elle correspondrait mieux au fait que le château lui-même est un château de pierre, puisqu’il est constitué de pierre. Si l’on revient précisément à la question de la contingence, un ensemble de choses contingentes est-il lui-même contingent ? Evidemment, dans la mesure où une l’existence d’une totalité dépend au moins de ses parties. Par conséquent, l’univers est bien contingent, il lui faut une cause nécessaire. Nous poursuivrons ce débat dans la prochaine émission.
05. L’univers est-il réellement contingent ? (2)
La preuve cosmologique par la contingence s’appuie sur le fait que l’univers soit contingent pour en déduire l’existence d’un être nécessaire permettant de l’expliquer, à savoir « Dieu ». La contingence de l’univers, cela signifie qu’il aurait pu ne pas être, ou qu’il aurait pu être autrement. En effet, le néant absolu est une possibilité, il n’y a pas de contradiction dans le fait de concevoir une telle chose. Un univers différent est également une possibilité, là encore il n’y a pas de contradiction dans une telle idée. La question est alors : Pourquoi l’univers existe-il ? Pourquoi est-il ainsi plutôt qu’autrement ? On pourrait affirmer que l’univers comme totalité s’explique par chacune de ses parties, et que chacune de ses parties s’expliquent elles-mêmes mutuellement. Mais cela n’explique que sa cohérence, non pas pourquoi il existe et pourquoi est-ce cet univers précisément qui existe. La cohérence interne ne suffit pas : on peut très bien concevoir un univers différent, par exemple par simulation informatique, qui soit absolument cohérent ; et pourtant, cet univers là n’existe pas. La cohérence interne n’explique pas pourquoi c’est précisément cet univers qui existe, alors que d’autres alternatives sont toutes aussi cohérentes. L’univers est donc contingent, il faut qu’il y ait quelque chose, hors de l’univers, qui le détermine à être, lui plutôt qu’une alternative. Nous continuerons à discuter de cette preuve dans la prochaine émission.
06. La preuve par la contingence du monde est-elle auto-contradictoire ?
D’après la preuve par la contingence, l’univers est contingent, c’est-à-dire qu’il aurait pu ne pas exister ou qu’il aurait pu être autrement. Il faut donc trouver son explication dans un être nécessaire, c’est-à-dire qui ne peut pas ne pas exister et qui ne peut pas être autrement. Un tel être est identifié à Dieu. Certains critiques pensent que cette preuve est auto-contradictoire. En effet, si la cause de l’univers est nécessaire, alors l’univers n’est-il pas lui aussi nécessaire ? Et si l’univers est nécessaire, alors le point de départ de la preuve, à savoir que l’univers est contingent, est faux. En réalité, cette critique repose sur une confusion entre la détermination et la nécessité. Lorsqu’on explique exhaustivement la raison d’un effet, on explique ce qui le détermine, quelle est sa cause. Etant donné la cause, l’effet ne pouvait pas être autrement. Néanmoins, il n’est pas nécessaire pour autant, puisqu’il dépend justement de sa cause pour exister. Son existence n’est pas absolue, mais relative à sa cause. Un effet est donc toujours contingent par définition. Pour la même raison, les partisans de cette preuve ajoutent que l’acte créateur est libre. Dieu aurait pu s’abstenir de créer l’univers, mais dans la mesure où il est bon, il a préféré le créer. C’est donc un acte volontaire, donc libre, et déterminé, donc contingent. Nous poursuivrons cette réflexion dans la prochaine émission.
07. La contingence du monde prouve-t-elle l’existence de Dieu ?
La contingence du monde implique l’existence d’un être nécessaire. Mais un être nécessaire est-il forcément Dieu ? C’est la question que pose Kant dans sa Critique de la Raison pure (1781). Mais il répond avec précipitation par la négative, sans avoir auparavant examiné les arguments de Christian Wolff dans sa Theologia naturalis (1728-1754). Voici ses arguments : un être nécessaire n’a besoin d’aucun autre être pour être expliqué. Par conséquent, il est autosuffisant et indépendant. Son existence étant indépendante et autosuffisante, il est éternel. Il est également simple, c’est-à-dire non-composé, sinon il dépendrait de ses parties. Pour la même raison, il est hors de l’espace, puisque l’espace implique des parties. En tout cela, il est radicalement distinct de l’univers. Et dans la mesure où il suffit seul à l’explication de l’univers, il est unique. Mais l’univers étant contingent, il y avait plusieurs alternatives : celle de causer son existence plutôt que de s’abstenir, et celle de causer cet univers-ci, plutôt qu’un autre autrement. La réalisation de cette alternative implique un choix, donc une intelligence et une volonté libre. L’être nécessaire est donc bien ce que l’on appelle « Dieu ». Mais il est vrai que l’on ne sait pas si l’univers créé est infini, ou s’il a un commencement, comme le prétendent les monothéismes. Cette question, c’est l’objet de la preuve que nous étudierons dans la prochaine émission.
08. Qu’est-ce que la preuve cosmologique par « le commencement » ?
La preuve cosmologique par le « commencement », que l’on pourrait également appeler « preuve par la cause première » ou « preuve du kalam », puisqu’elle a été particulièrement développée par des penseurs arabes, est un type de preuve de l’existence de Dieu. Comme toutes les preuves cosmologiques, cette preuve particulière part de l’existence de l’univers. Elle établit le fait que cette existence ait eu un commencement pour en déduire l’existence d’une cause. En effet, tout ce qui a un commencement, a une cause. Si donc l’univers a commencé à exister, il doit avoir eu une cause. Cette preuve cosmologique est très différente de l’autre preuve cosmologique, celle par la contingence. La preuve par « la contingence » réclamait simplement une explication à l’existence de l’univers, qu’il ait eu un commencement ou qu’il ait un passé infini, il doit y avoir une raison expliquant pourquoi l’univers existe plutôt qu’il n’y ait rien. La preuve par « le commencement », au contraire, dépend de l’existence d’un commencement à l’univers. Les philosophes, et en particulier les penseurs arabes du kalam, ont proposé quelques arguments reposant sur l’impossibilité d’une régression temporelle à l’infini, qui impliquent la nécessité que l’existence de l’univers ait eu un commencement. Nous étudierons les arguments mais aussi les objections auxquelles la preuve cosmologique « par le commencement » a dû faire face.
09. Tout ce qui commence à exister a-t-il nécessaire une cause ?
L’idée que « tout ce qui commence à exister ait une cause » constitue le postulat fondamental de la preuve de l’existence de Dieu par le commencement. En effet, si tout ce qui commence a une cause, alors si l’univers a un commencement, il doit avoir une cause, que l’on pourrait identifier à Dieu. Mais certains philosophes, notamment David Hume dans son Traité de la nature Humaine (1740), contestent cette idée. D’après David Hume, on peut très bien imaginer l’apparition d’une chose sans qu’il n’y ait de cause à son apparition. Nous le pouvons, parce que les notions de cause et d’effet sont deux notions distinctes. Il n’y a donc pas de contradiction à soutenir l’une sans l’autre. Mais son argument a été critiqué par Elizabeth Anscombe. En effet, comment savons-nous qu’une chose commence à exister, plutôt qu’elle ne fasse que réapparaître ? Si nous voyons une chose apparaître soudainement, rien ne nous indique qu’elle n’ait pas déjà existé ailleurs antérieurement. Ce qui nous permet d’affirmer qu’une chose commence à exister, c’est que nous en connaissons l’origine, sa cause. La notion de commencement semble donc bien liée à celle de cause. Ensuite, il faut bien admettre que c’est un fait empirique, qu’aucune chose ne commence sans qu’il n’y ait une cause à son origine. Dans la prochaine émission, nous étudierons les preuves d’après lesquelles l’univers a eu un commencement.
10. Comment peut-on prouver que l’univers a eu un commencement ? (1)
Si tout ce qui a un commencement a une cause, alors si l’univers a un commencement, il a également une cause, que l’on pourrait identifier à Dieu. D’où l’enjeu de la question. William Lane Craig, un philosophe contemporain, a donc recensé quelques arguments visant à prouver que l’univers ait eu un commencement. Il y a notamment des arguments scientifiques basés sur l’expansion de l’univers et sur la seconde loi de la thermodynamique (d’après laquelle, grossièrement, l’épuisement de l’énergie est irréversible). D’une part, si l’univers est en expansion, il a dût commencer comme étant un point infimement petit et immensément dense. Cet état initial constitue son commencement. Si l’univers est aujourd’hui en expansion, c’est parce qu’il y a eu un « big bang ». Le big-bang constituerait le commencement de l’univers. D’autre part, si l’univers perd irréversiblement de l’énergie, il faut bien qu’il ait eu un commencement, car si l’univers avait un passé infini, l’énergie devrait déjà être perdue. Si l’on reverse une bouteille contenant une quantité d’eau limité depuis une durée infinie, inévitablement la bouteille d’eau devrait être vide. Il en va de même pour la seconde loi de la thermodynamique appliquée à l’univers. Ces deux arguments scientifiques sont intéressants, mais ils doivent faire face à des critiques et à modèles scientifiques alternatifs. Les arguments les plus indubitables restent donc les arguments logiques que nous étudierons dans la prochaine émission.
11. Comment peut-on prouver que l’univers a eu un commencement ? (2)
Si l’univers a un commencement, il doit avoir une cause, identifiable à Dieu. D’où l’enjeu de la question. William Lane Craig, un philosophe contemporain, a déployé quelques arguments logiques en faveur de cette thèse. Si l’univers n’avait pas eu de commencement, il serait infini, c’est-à-dire que l’on pourrait perpétuellement remontrer dans le temps. La quantité d’événements ayant eu lieu dans l’histoire de l’univers serait infini. Mais une telle chose n’est pas possible, car on ne peut pas produire de l’infini par additions successives. Pour bien le comprendre, il faut distinguer deux types d’infinis : l’infini actuel et l’infini potentiel. L’infini actuel désigne une totalité complète et illimitée. Il est insensible aux additions et aux soustractions : si j’ajoute ou retranche quelque chose à l’infini, il y a toujours le même nombre d’éléments. Tel n’est pas le cas de l’univers : son histoire s’accroît de jours en jours. Il appartient plutôt à la catégorie des infinis potentiels. Ce sont des ensembles finis, mais qui peuvent toujours s’accroître. Pourtant, ils resteront toujours finis : si je prends un tas de sable, que je lui ajoute beaucoup de grains, le nombre de grains restera fini. Il en va de même avec l’univers, dont le passé s’accroît de jours en jours. Il doit donc être fini et il donc avoir eu un commencement. Dans la prochaine émission nous étudierons un deuxième argument logique.
12. Comment peut-on prouver que l’univers a eu un commencement ? (3)
Dans les précédentes émissions, nous avons déjà étudié quelques arguments, de William Lane Craig, en faveur d’un commencement à l’univers. L’enjeu était bien entendu de défendre une des preuves de l’existence de Dieu, à savoir : si toute chose qui commence à une cause, alors si l’univers a un commencement, il doit avoir une cause, identifiable à Dieu. Voici maintenant un dernier argument en faveur d’un commencement. Si l’univers n’avait pas eu de commencement, alors son histoire devrait être infinie. Nous avons déjà différencié un infini actuel, qui est réellement infini, insensible aux additions et soustractions ; et un infini potentiel, qui désigne un ensemble fini que l’on peut toujours accroître mais qui restera toujours fini. Si l’univers n’a pas eu de commencement, le nombre de ses événements passés est un infini actuel. Or le problème est qu’un infini actuel ne peut pas être parcouru. Si je commence à compter jusqu’à l’infini, les chiffres vont devenir de plus en plus grands, mais je n’atteindrais jamais l’infini lui-même. Le problème est le même concernant l’univers : si le passé de l’univers est infini, il n’aurait jamais dû totalement s’écouler, et par conséquent, le présent ne devrait pas exister. Or le présent existe, il faut donc que le passé de l’univers soit fini, et qu’il ait donc eu un commencement. Dans la prochaine émission nous étudierons un dernier argument proposé particulièrement par Sadowsky.
13. Pourquoi une régression à l’infini n’expliquerait-elle pas l’univers ?
Que l’on affirme que Dieu soit la cause première, ou qu’il soit la cause à l’origine de l’univers, dans tous les cas on écarte la possibilité que l’univers ait un passé infini, que l’on puisse infiniment remonter le chaîne des causes dans le temps. Il faut une cause première, une cause à l’origine de l’univers. Pourquoi donc une régression à l’infini ne serait-elle pas possible ? C’est ce que tente d’expliquer James Sadowsky dans un article de 1980, intitulé : « The Cosmological Argument and the Endless Regress ». Si toute cause est elle-même l’effet d’une cause qui lui est antérieure, alors cela soulève le problème des conditions de l’existence de tous les maillons de la chaîne causale. Les maillons antérieurs d’une chaîne sont la condition de l’existence des maillons postérieurs. En écartant l’existence d’un maillon premier et autosuffisant, qui est la condition de l’existence de toute la chaîne causale, alors la condition de l’existence se retrouve indéfiniment repoussée sans jamais être atteinte. Sadowsky donne un exemple éclairant : c’est un peu comme si tout le monde devait demander la permission à quelqu’un d’autre avant de faire quoi que ce soit ; dans ce cas, personne ne pourrait jamais rien faire. Cet exemple illustre bien qu’une régression à l’infini ne permet pas d’atteindre la moindre explication. Dans la prochaine émission, nous nous demanderons si cela suffit à prouver l’existence de Dieu.
14. Le commencement de l’univers prouve-t-il l’existence de Dieu ?
Le fait que l’univers ait un commencement implique le fait qu’il ait une cause. Mais cette cause est-elle nécessairement Dieu ? William Lane Craig, dans The Kalam Cosmological Argument (1979), affirme qu’il est possible de le démontrer. La cause créatrice de l’univers créé quelque chose qui n’existe pas antérieurement. Autrement dit, elle créé la matière, l’énergie, mais aussi l’espace et le temps. La cause créatrice transcendante toutes ces réalités. Autrement dit, elle doit être immatérielle, éternelle, et immuable. Elle doit être également immensément puissante, puisqu’elle a créé l’univers à partir de rien. Mais pourquoi la cause créatrice a-t-elle justement créée l’univers ? Il existe deux types d’explications : les explications scientifiques, qui font appel à des processus physiques aveugles, et les explications personnelles, qui impliquent un agent libre opérant des choix. Mais il ne peut pas s’agir d’une explication scientifique, puisque la cause créatrice transcende l’univers, le domaine de la physique. Expliquer le commencement de l’univers par une cause scientifique reviendrait à dire qu’il n’a jamais commencé, ce qui serait contradictoire. Il ne peut donc s’agir que d’un être personnel, qui a librement choisi de créé l’univers. Un être créateur, personnel, puissant, immatériel et éternel, voilà ce que l’on appelle « Dieu ». Le commencement de l’univers implique donc bien l’existence de Dieu. Néanmoins, précise William Lane Craig, cette argumentation s’appuie également sur la preuve téléologique, que nous étudierons bientôt.
15. Si toute chose a une cause, quelle est la cause de Dieu ?
C’est l’objection la plus souvent reprise contre les preuves cosmologiques, quelque soit leur type. Si l’on explique que l’univers est contingent, c’est-à-dire qu’il aurait pu ne pas exister, et qu’il faut donc une cause nécessaire pour expliquer pourquoi celui-ci existe, alors certains critiques demandent : pourquoi Dieu n’aurait-il pas lui-même une cause qui explique son existence ? Si l’on explique que l’univers ne peut avoir un passé infini, qu’il a eu un commencement et donc une cause première, alors certains critiques demandent : pourquoi Dieu n’aurait-il pas lui-même une cause ? Ces deux objections reposent sur une confusion concernant le principe de causalité. Le principe de causalité n’affirme pas que « toute chose a une cause », mais que « tout effet a une cause » ; ce qui n’est pas un effet n’a pas de cause. Dieu n’est pas un effet, il n’a donc pas besoin d’une cause. Il en va de même concernant le principe de raison suffisante. Il affirme que tout ce qui est contingent, c’est-à-dire tout ce qui ne s’explique pas par soi-même, doit avoir une raison extrinsèque qui l’explique. Ce qui n’est pas contingent n’a donc pas besoin d’une explication extrinsèque. Dieu n’est pas contingent, au contraire il est nécessaire, il n’a donc pas besoin d’une explication extrinsèque. L’étude des preuves cosmologiques étant achevée, nous étudierons dans la prochaine émission, un autre type de preuve, les preuves téléologiques.
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