Témoignage
Posté : 23 mars16, 06:42
Ça faisait longtemps que je voulais écrire ça. Je ne savais pas par où commencer ni comment m'y prendre. Finalement, j'ai décidé d'écrire comme ça me venait, et pour l'instant, tant pis pour les formes.
(Désolé si je ne suis pas dans la bonne section du forum, mais il me semble que ça peut avoir sa place ici.)
J'ai 18 ans, et depuis quelques années, je porte un fardeau qui devient de plus en plus lourd et que j'ai de plus en plus de mal à supporter ; je porte la responsabilité d'un crime dont je suis autant la victime que le coupable : n'être pas croyant.
J'ai grandi dans une foi chrétienne assez stricte. Toute ma famille appartient à un milieu issu du protestantisme, attaché à une lecture très littérale de la Bible. Influence oblige, j'y ai naturellement cru. Je dis « oblige », et je pense que le verbe est tout-à-fait juste, indépendamment de l'expression consacrée, car je ne crois pas qu'il y ait de place pour un quelconque recul durant l'enfance. Aller à l'église tous les dimanches, lire la Bible quotidiennement, en famille comme personnellement, vivre dans un entre-soi presque exclusif ; tout mène à marcher dans les pas de ses parents. Comme me l'a dit un ami de là-bas, avec une curieuse lucidité : « On a un taux d'échec très faible ». Et je suis de ceux qui font monter ce taux. Je ne sais pas vraiment par quels mécanismes j'en suis venu à renoncer à ma foi, mais le fait est que je suis devenu l'opposé absolu de celui que j'aurais dû être. Pour mon malheur.
Cela fait déjà plusieurs années que j'ai commencé à douter, et plusieurs années même que je me considère comme un incroyant. Quand j'ai appris la situation à mes parents, je les ai vus s'effondrer. Mon père s'est contenu, mais quand je suis remonté dans ma chambre, je l'ai entendu éclater en sanglots – pour la première fois. Je crois qu'ils attendaient beaucoup de moi, je devais donner l'impression d'être très pieux. J'ai conscience que je fais pleurer mes parents et mes frères et sœurs. Ils prient tous les jours pour moi. Mais ils attendent quelque chose que je ne peux leur donner. Je sais que jamais plus je ne penserai comme « avant », ce temps lointain où le monde était beau et Dieu m'aimait. Je me sens de plus en plus comme un étranger. J'ai en permanence la sensation de n'être pas à ma place. Mais il ne peuvent pas comprendre ça. Ils ne comprennent pas quelles sont les aspirations d'un ado de 18 ans. Ils ne comprennent pas mon besoin de batailles, d'engagement, et mon besoin d'aimer, puisqu'ils ne comprennent ni les batailles de ce monde, qui ne peuvent être « que » terrestres, ni l'amour simple et pur, sans les contraintes et les stupides rituels du mariage – et ils viennent parler de « contre-nature »...
Alors tous les dimanches, je vais à l'église avec eux. Le soir, j'assiste sagement à la lecture biblique. Je mène une vie rangée, je suis un chemin sans détours. Mais j'avance de plus en plus courbé. Je porte ce fardeau parce qu'on me l'a donné. Ma famille m'aime, et j'aime ma famille. Je souffre de les voir souffrir. Et je souffre d'y être impuissant – mais ce n'est pas moi qui ai voulu cela.
Je vais m'arrêter là, en tout cas pour l'instant. J'aurais voulu faire quelque chose d'un peu mieux, mais ce sera pour plus tard, peut-être. Je ne crois pas que poster ce texte ici va arranger la situation, mais il me fera peut-être me sentir mieux. Pas beaucoup, mais un petit peu.
(Désolé si je ne suis pas dans la bonne section du forum, mais il me semble que ça peut avoir sa place ici.)
J'ai 18 ans, et depuis quelques années, je porte un fardeau qui devient de plus en plus lourd et que j'ai de plus en plus de mal à supporter ; je porte la responsabilité d'un crime dont je suis autant la victime que le coupable : n'être pas croyant.
J'ai grandi dans une foi chrétienne assez stricte. Toute ma famille appartient à un milieu issu du protestantisme, attaché à une lecture très littérale de la Bible. Influence oblige, j'y ai naturellement cru. Je dis « oblige », et je pense que le verbe est tout-à-fait juste, indépendamment de l'expression consacrée, car je ne crois pas qu'il y ait de place pour un quelconque recul durant l'enfance. Aller à l'église tous les dimanches, lire la Bible quotidiennement, en famille comme personnellement, vivre dans un entre-soi presque exclusif ; tout mène à marcher dans les pas de ses parents. Comme me l'a dit un ami de là-bas, avec une curieuse lucidité : « On a un taux d'échec très faible ». Et je suis de ceux qui font monter ce taux. Je ne sais pas vraiment par quels mécanismes j'en suis venu à renoncer à ma foi, mais le fait est que je suis devenu l'opposé absolu de celui que j'aurais dû être. Pour mon malheur.
Cela fait déjà plusieurs années que j'ai commencé à douter, et plusieurs années même que je me considère comme un incroyant. Quand j'ai appris la situation à mes parents, je les ai vus s'effondrer. Mon père s'est contenu, mais quand je suis remonté dans ma chambre, je l'ai entendu éclater en sanglots – pour la première fois. Je crois qu'ils attendaient beaucoup de moi, je devais donner l'impression d'être très pieux. J'ai conscience que je fais pleurer mes parents et mes frères et sœurs. Ils prient tous les jours pour moi. Mais ils attendent quelque chose que je ne peux leur donner. Je sais que jamais plus je ne penserai comme « avant », ce temps lointain où le monde était beau et Dieu m'aimait. Je me sens de plus en plus comme un étranger. J'ai en permanence la sensation de n'être pas à ma place. Mais il ne peuvent pas comprendre ça. Ils ne comprennent pas quelles sont les aspirations d'un ado de 18 ans. Ils ne comprennent pas mon besoin de batailles, d'engagement, et mon besoin d'aimer, puisqu'ils ne comprennent ni les batailles de ce monde, qui ne peuvent être « que » terrestres, ni l'amour simple et pur, sans les contraintes et les stupides rituels du mariage – et ils viennent parler de « contre-nature »...
Alors tous les dimanches, je vais à l'église avec eux. Le soir, j'assiste sagement à la lecture biblique. Je mène une vie rangée, je suis un chemin sans détours. Mais j'avance de plus en plus courbé. Je porte ce fardeau parce qu'on me l'a donné. Ma famille m'aime, et j'aime ma famille. Je souffre de les voir souffrir. Et je souffre d'y être impuissant – mais ce n'est pas moi qui ai voulu cela.
Je vais m'arrêter là, en tout cas pour l'instant. J'aurais voulu faire quelque chose d'un peu mieux, mais ce sera pour plus tard, peut-être. Je ne crois pas que poster ce texte ici va arranger la situation, mais il me fera peut-être me sentir mieux. Pas beaucoup, mais un petit peu.