Antisémitisme, monarchisme et national-catholicisme
Charles Maurras,
père du
« nationalisme intégral »
Dans l’entre-deux-guerres, en France, l’extrême droite fut très active. Plusieurs organisations incarnaient celle-ci, comme le mouvement monarchiste l’Action française. Son dirigeant de l’époque était Charles Maurras, auteur d’un corpus idéologique proposant un « nationalisme intégral » et un « antisémitisme d’Etat ». Portrait d’un idéologue toujours d’actualité pour ses disciples.
Charles Maurras en 1945 lors de son procès pour collaboration avec les nazis.
Il est né cent ans avant « Mai 68 ». Disparu en 1952, Charles Maurras fut le principal dirigeant du mouvement nationaliste, monarchiste et traditionaliste catholique l'Action française (AF), actif en France depuis 1899. Ecrivain, publiciste et homme politique, il est le père du « nationalisme intégral » et du concept d’« antisémitisme d’Etat ». Charles Maurras influença la fraction la plus conservatrice de la bourgeoisie française catholique de l’entre-deux-guerres.
Singularisées par leur extrémisme, les oeuvres de Maurras furent mises à l'index par le Vatican en 1926, après les pressions exercées par les autorités religieuses françaises. Partisan des dictateurs Mussolini, Franco et Pétain, il fut arrêté en 1944 et condamné l’année suivante, pour collaboration avec les nazis, à la réclusion à vie. Il fut gracié peu de temps avant son décès.
« L’anti-France : Juifs, Protestants, Maçons, Métèques »
Le « complot contre la France » est au centre du corpus idéologique maurrassien. Ce complot est l'oeuvre de l' « anti-France », imagée par ce que Maurras dénommait les « Quatre Etats confédérés : Juifs, Protestants, Maçons, Métèques ». Ces quatre forces antifrançaises formaient, selon lui, le « gouvernement de l'Etranger, à l'intérieur de la France ». Dans les années 1980-1990, Jean-Marie Le Pen, le président du Front national français (FN) dénoncera à son tour les « partis de l'Etranger », c'est-à-dire toutes les formations politiques françaises à l'exception bien entendu du FN, autoproclamé « parti de la France ».
A l’étranger, Charles Maurras va également recevoir un accueil favorable dans certains cercles politiques de l’ultra droite conservatrice. Le dictateur chilien Augusto Pinochet se serait même inspiré de certains de ses préceptes. En Belgique, le « maurrassisme » s’était déjà installé dès les années 1930 (voir notre article à ce sujet : colonne de droite).
![Image](http://www.resistances.be/images/maurras01.jpg)
Leader de l’extrême droite française historique, Charles Maurras fut un des inspirateurs de l’antisémitisme politique. Article sur ce thème publié dans la publication Aventures de l'Histoire – Didro, n° 12, septembre 2002 – Document : RésistanceS. (Cliquez pour agrandir)
Minée par des conflits internes durant l’occupation, l’Action française de Maurras se divisa en trois clans opposés : celui des maurrassiens orthodoxes soutenant le gouvernement de Vichy conduit par le maréchal Pétain, celui des collaborationnistes germanophiles (parmi lesquels se trouvait l’écrivain Robert Brasillach) et celui de ceux qui entrèrent pour finir en résistance contre les nazis. En 1947, l’AF se reconstitua sous le nom de la Restauration nationale (RN). Après le décès de Maurras, en 1952, ses fidèles adeptes se disputeront le contrôle du mouvement. La RN finira par imploser en deux camps antagonistes : le premier s’organisant autour du journal Aspects de la France, le second autour d’une nouvelle publication, La Nation française. Depuis, les pseudopodes de l’Action française poursuivent leurs luttes intestines.
Quant au corpus politique de Charles Maurras, il est toujours exploité par le Front national, les autres partis nationalistes français et les mouvements politico-religieux intégristes nationaux-catholiques
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Manuel ABRAMOWICZ