A la découverte du texte !
Posté : 13 déc.17, 05:52
Vient un jour dans la vie où s'insinue, même pour de saints livres, la pensée inquiète de ne pas tout comprendre, de pressentir comme un voile persistant entre notre époque, notre culture, notre langue, et toute la singularité de la Palestine du temps de Jésus : autres lieux, autres cultures, autres langues. D'où le désir de s'en rapprocher, en commençant par la langue des évangiles, dite koinè : la langue commune, elle même s'ajoutant à l'hébreu et l'araméen que parlait Jésus. Et là, après un pénible déchiffrement puis après la lecture qui comprend, ô surprise, apparaissent d'épaisses couches de vernis séculaires, de traductions approximatives, voire fausses ou orientées, de concepts mal compris ! Est-ce possible ? Oui, chaque langue a son génie, pas toujours transposable, chaque traducteur a ses a priori, chaque confession ses préférences, et qui croit expliquer qui en fait trahit, fût-ce avec de bonnes intentions !
Quelques exemples :
— è basileia (tou theou) le Royaume (de Dieu) : ce terme grec signifie à la fois royaume, royauté, règne ; quel mot choisir dans les langues vernaculaires ? Eh bien le traducteur fait un choix, mais ne vous le dit pas.
— è basileia entos umôn estin : encore plus difficile, car entos peut signifier parmi ou au-dedans ! On peut donc traduire soit "le Royaume de Dieu est parmi vous" ou encore "la royauté divine est en vous" ou "le royaume de Dieu est à l'intérieur de vous".
— è harmatia : la faute, l'erreur, la déviance du but, idée de la flèche qui manque la cible ; mais St Jérôme, qui demeurera LA référence séculaire en matière de traduction préfère trdauire par peccatum et le français : péché. Ce n'est plus de la traduction, c'est de la théologie, à tort ou à raison.
— o Iesous o nadzôraios : Jésus le nazaréen/ nazôréen (parfois on lit la variante nadzarenos). Adjectif devenu obscur, au point que Matthieu croit bon de citer un passage de l'AT (passage jamais trouvé !) en décodant : "de Nazareth". Hélas, linguistiquement ce n'est pas possible, pas plus que "remuant" n'a pour variante "remutant". Alors ? Dans certains passages, Jésus le nazaréen (titre donné par des esprits impurs) a comme variante : Jésus le Saint de Dieu. On est sans doute en bon chemin. Qu'ont fait les traducteurs durant des siècles ? Ils ont cru bon d'aller dans le sens de Matthieu = de Nazareth. Combien de fois apparaît "de Nazareth" dans tout le NT ? deux fois, pas plus ; combien de fois nazaréen ? une vingtaine de fois !
— pneuma agion epeleusetai epi se (Πνεῦμα ἅγιον ἐπελεύσεται ἐπὶ σέ) : Un saint esprit ou : un esprit saint viendra sur toi : c'est chez Luc, 1,35. Ah? on a un article défini en français et pas d'article en grec (= article indéfini) ? En Luc, 4,1, on lit : Ἰησοῦς δὲ πνεύματος ἁγίου πλήρης : Jésus rempli d'esprit saint, d'un saint esprit, d'un esprit saint : là, on se passe de l'article défini ! En Luc, 9,39, on a aussi pneuma lambanei auton : (πνεῦμα λαμβάνει αὐτόν) : Un esprit le saisit : là aussi, le trdaucteur respecte le grec et ne met pas d'article défini, ni de majuscule. Donc, il faudrait bien traduire : "UN esprit saint viendra sur toi" ; c'est sans doute le Saint-Esprit, ou l'Esprit de Dieu, mais le grec ne le dit pas ainsi, et tout étant en majuscules dans les manuscrits les plus anciens, c'est le traducteur qui chosit de mettre des majuscules — sans le dire au lecteur.
— epiousios : mot qui apparaît dans le Notre Père, hélas, c'est un hapax (il n'apparaît qu'une seule fois), on en ignore le sens. En cherchant bien, on peut penser à : d'aujourd'hui ; de demain ; ou encore "suprasubstantiel", donc spirituel, en jouant sur la décomposition du mot. C'est ce choix que fait Jérôme, puis, changement de traduction : Notre pain de ce jour. Une possibilité parmi d'autres.
— Et la tentation, où Dieu nous induit, nous laisse entrer, nous conduit ? que de tempêtes dans les églises ! Et quel étonnement, quand on voit, là aussi, qu'un choix théologique a été fait par les traducteurs, non remis en question, et pourtant : peirasmos veut dire en premier lieu, fort souvent, : l'épreuve. Oui, on a des épreuves diverses dans la vie. Origène l'emploiera au sens second (possible donc) de : tentation. Mais Origène n'a pas rédigé les évangiles ! Lisons donc simplement et précisément ce que dit Jésus : "Ne nous conduis pas sur le chemin de l'épreuve".
— Et ce "Testament" , qu'est-ce donc, au juste ? C'est la regrettable traduction du grec = diathèke, qui traduit l'hébreu berit : l'alliance, parfois aussi : le contrat, le testament. Le NT, c'est la seconde ou nouvelle alliance, ce n'est pas un testament chez le notaire.
— Et la croix ? Jésus a-t-il porté une énorme croix ? non, il a porté le stauros, qui désigne le pieu ou la croix, le mot n'est pas univoque : Jésus a dû porter la barre transversale, déjà fort lourde, appelée par les Romains le patibulum ; au lieu du supplice, ce stauros est hissé en haut d'un autre avec des cordes, quand le condamné est mort, on redescend la barre.
— Comment Paul (le premier qui écrit sur Jésus, dans les années 50) exprime-t-il la résurrection ? par ce simple verbe : ophtè : il a été vu, il s'est manifesté (vraiment vu, ce n'est pas une illusion !). Cela dit, ni Paul ni Pierre dans les Actes des apôtres ne mentionnent le tombeau.
— Et les miracles ? on traduit par ce mot à la fois dynamis dans les synoptiques : acte de puissance, et "semeion" chez Jean : le signe (qui révèle bien des choses).
Quelques exemples :
— è basileia (tou theou) le Royaume (de Dieu) : ce terme grec signifie à la fois royaume, royauté, règne ; quel mot choisir dans les langues vernaculaires ? Eh bien le traducteur fait un choix, mais ne vous le dit pas.
— è basileia entos umôn estin : encore plus difficile, car entos peut signifier parmi ou au-dedans ! On peut donc traduire soit "le Royaume de Dieu est parmi vous" ou encore "la royauté divine est en vous" ou "le royaume de Dieu est à l'intérieur de vous".
— è harmatia : la faute, l'erreur, la déviance du but, idée de la flèche qui manque la cible ; mais St Jérôme, qui demeurera LA référence séculaire en matière de traduction préfère trdauire par peccatum et le français : péché. Ce n'est plus de la traduction, c'est de la théologie, à tort ou à raison.
— o Iesous o nadzôraios : Jésus le nazaréen/ nazôréen (parfois on lit la variante nadzarenos). Adjectif devenu obscur, au point que Matthieu croit bon de citer un passage de l'AT (passage jamais trouvé !) en décodant : "de Nazareth". Hélas, linguistiquement ce n'est pas possible, pas plus que "remuant" n'a pour variante "remutant". Alors ? Dans certains passages, Jésus le nazaréen (titre donné par des esprits impurs) a comme variante : Jésus le Saint de Dieu. On est sans doute en bon chemin. Qu'ont fait les traducteurs durant des siècles ? Ils ont cru bon d'aller dans le sens de Matthieu = de Nazareth. Combien de fois apparaît "de Nazareth" dans tout le NT ? deux fois, pas plus ; combien de fois nazaréen ? une vingtaine de fois !
— pneuma agion epeleusetai epi se (Πνεῦμα ἅγιον ἐπελεύσεται ἐπὶ σέ) : Un saint esprit ou : un esprit saint viendra sur toi : c'est chez Luc, 1,35. Ah? on a un article défini en français et pas d'article en grec (= article indéfini) ? En Luc, 4,1, on lit : Ἰησοῦς δὲ πνεύματος ἁγίου πλήρης : Jésus rempli d'esprit saint, d'un saint esprit, d'un esprit saint : là, on se passe de l'article défini ! En Luc, 9,39, on a aussi pneuma lambanei auton : (πνεῦμα λαμβάνει αὐτόν) : Un esprit le saisit : là aussi, le trdaucteur respecte le grec et ne met pas d'article défini, ni de majuscule. Donc, il faudrait bien traduire : "UN esprit saint viendra sur toi" ; c'est sans doute le Saint-Esprit, ou l'Esprit de Dieu, mais le grec ne le dit pas ainsi, et tout étant en majuscules dans les manuscrits les plus anciens, c'est le traducteur qui chosit de mettre des majuscules — sans le dire au lecteur.
— epiousios : mot qui apparaît dans le Notre Père, hélas, c'est un hapax (il n'apparaît qu'une seule fois), on en ignore le sens. En cherchant bien, on peut penser à : d'aujourd'hui ; de demain ; ou encore "suprasubstantiel", donc spirituel, en jouant sur la décomposition du mot. C'est ce choix que fait Jérôme, puis, changement de traduction : Notre pain de ce jour. Une possibilité parmi d'autres.
— Et la tentation, où Dieu nous induit, nous laisse entrer, nous conduit ? que de tempêtes dans les églises ! Et quel étonnement, quand on voit, là aussi, qu'un choix théologique a été fait par les traducteurs, non remis en question, et pourtant : peirasmos veut dire en premier lieu, fort souvent, : l'épreuve. Oui, on a des épreuves diverses dans la vie. Origène l'emploiera au sens second (possible donc) de : tentation. Mais Origène n'a pas rédigé les évangiles ! Lisons donc simplement et précisément ce que dit Jésus : "Ne nous conduis pas sur le chemin de l'épreuve".
— Et ce "Testament" , qu'est-ce donc, au juste ? C'est la regrettable traduction du grec = diathèke, qui traduit l'hébreu berit : l'alliance, parfois aussi : le contrat, le testament. Le NT, c'est la seconde ou nouvelle alliance, ce n'est pas un testament chez le notaire.
— Et la croix ? Jésus a-t-il porté une énorme croix ? non, il a porté le stauros, qui désigne le pieu ou la croix, le mot n'est pas univoque : Jésus a dû porter la barre transversale, déjà fort lourde, appelée par les Romains le patibulum ; au lieu du supplice, ce stauros est hissé en haut d'un autre avec des cordes, quand le condamné est mort, on redescend la barre.
— Comment Paul (le premier qui écrit sur Jésus, dans les années 50) exprime-t-il la résurrection ? par ce simple verbe : ophtè : il a été vu, il s'est manifesté (vraiment vu, ce n'est pas une illusion !). Cela dit, ni Paul ni Pierre dans les Actes des apôtres ne mentionnent le tombeau.
— Et les miracles ? on traduit par ce mot à la fois dynamis dans les synoptiques : acte de puissance, et "semeion" chez Jean : le signe (qui révèle bien des choses).