y a-t-il encore un avenir pour les Juifs en France ?
Posté : 22 août05, 02:10
ACTUALITÉ JUIVE N°881 DU 10/03/05
Edito de Serge BENATTAR (rédacteur en chef,originaire d'Algérie)
Nous devons être responsables et laisser de côté nos divergences afin d'organiser des états généraux et réfléchir ensemble au devenir de notre communauté. Aucune tendance
politique ou religieuse, aucune institution si importante soit-elle ne sera épargnée par l'effritement de cette dernière.
Depuis des décennies nous nous persuadions que la communauté juive de France était forte, si l'on peut dire, de plus de 700.000 âmes. Vint alors, en 2002, le rapport comman dité par le Fonds Social Juif Unifié et, désillusion, nous apprenions que la communauté s'était réduite comme une peau de chagrin à 500.000 personnes. En l'espace de 15 ans nous avions perdu près de 200.000 Juifs! Il a y eut quelques départs vers Israël certes, mais le gros des troupes volatilisées se justifiait principalement par une assimilation galopante. A cette allure, se posait déjà la fatidique question: « y a-t-il encore un avenir pour les Juifs en France ? » .Voici, aujourd'hui, un nouveau sondage, toujours réalisé par le même institut « Recherche Evaluation », mais cette fois commandité par AMI (Alyah et Meilleure Intégra- tion), dont les résultats ne manqueront pas d'en étonner plus d'un et qui nous oblige, une nouvelle fois, à nous reposer, avec plus d'acuité, la même question :
« y a-t-il encore un avenir pour les Juifs en France ? ». Cette étude nous apprend que quelque 125.000 Juifs français se sont rendus durant l' année 2004 en vacances en Israël. Nous découvrons par ailleurs que 52% de ces touristes pensent, dans les cinq années à venir, s'y installer. Au regard de ces deux éléments seulement, (d'autres chiffres méritant également que l'on s'y attarde), commençons notre calcul. En préambule, il est impératif de savoir que la communauté juive de France est bipolaire. Une moitié fréquente plus ou moins une synagogue ou participe de près ou de loin à des activités communautaires quelles qu'elles soient, l' autre est carrément « étrangère » et se détache inexorablement de la communauté. Dans une ou deux générations, ce pan entier s'assimilera définitivement. Pour s'en convaincre, il faut savoir que le taux de mariages mixtes atteint aujourd'hui près de 60%. Donc, revenons à nos chiffres. 500.000 Juifs français, la moitié disparaissant d'ici une ou deux décennies, restent 250.000. Nos 125.000 touristes proviennent, sur leur quasi totalité, de ces 250.000 « juifs communautaires » restants. 52% de ces vacanciers pensent réaliser leur Alyah dans les cinq années à venir, disons même dans les dix prochaines annes, soit: 65.000. 250.000 -65.000 restent: 185.000. Je n'évoque même pas encore une nouvelle montée de l'antisémitisme qui grossirait ces 52% en convainquant les quelque 13% d'indecis. Je ne prends pas non plus en considération le fait que les trois quarts des jeunes
de 15 à 18 ans n'envisagent plus leur avenir en France. Dans le meilleur des cas donc, et si ce sondage reflète réellement la réalité, nous serons plus que 185.000 Juifs en France d'ici les 10 prochaines années. 185.000 Juifs qui, pour survivre et se protéger, se ghettoïseront un peu plus, se renfermeront sur eux-mêmes, se radicaliseront. Faut-il s'en réjouir ? Les Sionistes se frotteront les mains, considérant que tout juif doit se réaliser uniquement sur la terre d'Israël, les défenseurs d'une diaspora vivante et forte, prête à soutenir l'Etat hébreu dans tous les domaines s'alarmeront de cette disparition annoncée. 10,15 ans, c'est déjà demain. Jadis, un responsable de l'Agence Juive me disait qu'il fallait «construire en France des synagogues et des édifices communautaires démontables et transportables. Au lieu de cela, vos dirigeants investissent dans le marbre et le luxe ». Etait-il à ce point visionnaire ? Tout doit être repensé, réorganisé. Chaque nouveau bâtiment communautaire que
l'on érigera devra prendre en considération ces données. Nous n'irons pas, de toute façon, en nous accroissant, nous entamerons inexorablement le processus inverse. L'avenir de la communauté juive est plus qu'incertain. Nous devons faire preuve d'imagination et de bon sens.Nous devons être responsables et adultes et laisser de côté nos divergences afin d'organiser des états généraux et réfléchir ensemble au devenir de notre communauté. Aucune tendance politique ou religieuse, aucune institution si importante soit-elle ne sera épargnée par l'effritement de cette dernière. L'avenir de la communauté juive de France résidera dans les aptitudes que nous aurons à ramener le plus grand nombre de ces 250.000 Juifs qui n'ont plus aucun lien avec nous. Et ce n'est pas en s'enfermant dans les yéchivoth, en se gaussant parce que quelques-uns de nos frères opèrent un retour à la tradition, ou en étalant nos divergences au grand jour qu'on les convaincra de « retourner au bercail ». Ce n'est sûrement pas avec du vinaigre que l'on attire les abeilles, et de plus, la ruche n'est pas très attrayante. Les dirigeants toutes tendances confondues, doivent savoir aujourd'hui mettre un peu de miel dans leur vin.
Edito de Serge BENATTAR (rédacteur en chef,originaire d'Algérie)
Nous devons être responsables et laisser de côté nos divergences afin d'organiser des états généraux et réfléchir ensemble au devenir de notre communauté. Aucune tendance
politique ou religieuse, aucune institution si importante soit-elle ne sera épargnée par l'effritement de cette dernière.
Depuis des décennies nous nous persuadions que la communauté juive de France était forte, si l'on peut dire, de plus de 700.000 âmes. Vint alors, en 2002, le rapport comman dité par le Fonds Social Juif Unifié et, désillusion, nous apprenions que la communauté s'était réduite comme une peau de chagrin à 500.000 personnes. En l'espace de 15 ans nous avions perdu près de 200.000 Juifs! Il a y eut quelques départs vers Israël certes, mais le gros des troupes volatilisées se justifiait principalement par une assimilation galopante. A cette allure, se posait déjà la fatidique question: « y a-t-il encore un avenir pour les Juifs en France ? » .Voici, aujourd'hui, un nouveau sondage, toujours réalisé par le même institut « Recherche Evaluation », mais cette fois commandité par AMI (Alyah et Meilleure Intégra- tion), dont les résultats ne manqueront pas d'en étonner plus d'un et qui nous oblige, une nouvelle fois, à nous reposer, avec plus d'acuité, la même question :
« y a-t-il encore un avenir pour les Juifs en France ? ». Cette étude nous apprend que quelque 125.000 Juifs français se sont rendus durant l' année 2004 en vacances en Israël. Nous découvrons par ailleurs que 52% de ces touristes pensent, dans les cinq années à venir, s'y installer. Au regard de ces deux éléments seulement, (d'autres chiffres méritant également que l'on s'y attarde), commençons notre calcul. En préambule, il est impératif de savoir que la communauté juive de France est bipolaire. Une moitié fréquente plus ou moins une synagogue ou participe de près ou de loin à des activités communautaires quelles qu'elles soient, l' autre est carrément « étrangère » et se détache inexorablement de la communauté. Dans une ou deux générations, ce pan entier s'assimilera définitivement. Pour s'en convaincre, il faut savoir que le taux de mariages mixtes atteint aujourd'hui près de 60%. Donc, revenons à nos chiffres. 500.000 Juifs français, la moitié disparaissant d'ici une ou deux décennies, restent 250.000. Nos 125.000 touristes proviennent, sur leur quasi totalité, de ces 250.000 « juifs communautaires » restants. 52% de ces vacanciers pensent réaliser leur Alyah dans les cinq années à venir, disons même dans les dix prochaines annes, soit: 65.000. 250.000 -65.000 restent: 185.000. Je n'évoque même pas encore une nouvelle montée de l'antisémitisme qui grossirait ces 52% en convainquant les quelque 13% d'indecis. Je ne prends pas non plus en considération le fait que les trois quarts des jeunes
de 15 à 18 ans n'envisagent plus leur avenir en France. Dans le meilleur des cas donc, et si ce sondage reflète réellement la réalité, nous serons plus que 185.000 Juifs en France d'ici les 10 prochaines années. 185.000 Juifs qui, pour survivre et se protéger, se ghettoïseront un peu plus, se renfermeront sur eux-mêmes, se radicaliseront. Faut-il s'en réjouir ? Les Sionistes se frotteront les mains, considérant que tout juif doit se réaliser uniquement sur la terre d'Israël, les défenseurs d'une diaspora vivante et forte, prête à soutenir l'Etat hébreu dans tous les domaines s'alarmeront de cette disparition annoncée. 10,15 ans, c'est déjà demain. Jadis, un responsable de l'Agence Juive me disait qu'il fallait «construire en France des synagogues et des édifices communautaires démontables et transportables. Au lieu de cela, vos dirigeants investissent dans le marbre et le luxe ». Etait-il à ce point visionnaire ? Tout doit être repensé, réorganisé. Chaque nouveau bâtiment communautaire que
l'on érigera devra prendre en considération ces données. Nous n'irons pas, de toute façon, en nous accroissant, nous entamerons inexorablement le processus inverse. L'avenir de la communauté juive est plus qu'incertain. Nous devons faire preuve d'imagination et de bon sens.Nous devons être responsables et adultes et laisser de côté nos divergences afin d'organiser des états généraux et réfléchir ensemble au devenir de notre communauté. Aucune tendance politique ou religieuse, aucune institution si importante soit-elle ne sera épargnée par l'effritement de cette dernière. L'avenir de la communauté juive de France résidera dans les aptitudes que nous aurons à ramener le plus grand nombre de ces 250.000 Juifs qui n'ont plus aucun lien avec nous. Et ce n'est pas en s'enfermant dans les yéchivoth, en se gaussant parce que quelques-uns de nos frères opèrent un retour à la tradition, ou en étalant nos divergences au grand jour qu'on les convaincra de « retourner au bercail ». Ce n'est sûrement pas avec du vinaigre que l'on attire les abeilles, et de plus, la ruche n'est pas très attrayante. Les dirigeants toutes tendances confondues, doivent savoir aujourd'hui mettre un peu de miel dans leur vin.