Anthony Flew et l'athéisme négatif (faible)
Posté : 02 oct.20, 15:01
https://infidels.org/library/modern/cha ... sited.html
Voici un article intéressant sur certaines positions du prof A. Flew car il aborde ce dont il a été question sur le forum : athéisme faible, licornes, fardeau de preuve. Cela tout en cherchant à affiner la position tout en l’orientant vers le problème du sens du mot Dieu.
https://www.dieu.pub/viewtopic.php?f=50&t=58400
https://www.dieu.pub/viewtopic.php?f=50&t=59163
Flew est passé par la suite à un théisme non religieux, le déisme, sans que la structure de sa position précédente soit affectée; il continue à penser que si on n’a pas de fondements ou de preuves pour Dieu on est athée (négatif, ou faible), mais il pense dorénavant qu’on a un fondement, de type finaliste, ordre du monde.
https://en.wikipedia.org/wiki/Antony_Flew
Je résume l’essentiel de cet article un peu long, surtout l’excursus interprétatif sur St Thomas, avec quelques commentaires.
1)Au départ on doit nourrir une présomption d’athéisme, tant que le théisme n’est pas fondé. On n’a pas à fonder une affirmation d’inexistence pour être athée. Pourquoi? Pcq l’athéisme dont il est question n’est pas positif mais négatif, ie.faible. Ceci commande tout le reste.
Donc tout le fardeau de preuve repose sur le théisme, car, tout simplement, le théisme est un théisme fort, il affirme une existence.
Il utilise l’exemple des tribunaux sur le fardeau de preuve sans trop insister sur le fait que c’est purement conventionnel, pas logique.
Tout le ressort de cet athéisme vient de ce qu’il est faible : juste un truc de langage, et l’athéisme fort reste occulté, et pour cause.
Flew, qui reconnait que son sens de l’athéisme peut paraitre inhabituel, curieusement ne voit pas qu’on pourrait aussi avoir un sens inhabituel du théisme pour être complètement logique : le théisme faible, qui n’a pas de fardeau (ne pas croire que Dieu n’existe pas). Si on ajoute ca, toute sa problématique s’effondre, et on ne voit pas comment éviter cet ajout.
2)Il doit traiter de l’agnosticisme car dans sa position tout non théiste est athée, ce qui parait évidemment faux car l’agnostique n’est ni athée ni théiste. IL répond par une distinction :
-L’agnostique est indécis (ou pense que l’indécision est prouvée, s’impose) entre les propositions Dieu existe et Dieu n’existe pas, mais aussi reconnait que les 2 propositions ont un sens (qu’elles ne sont pas comme « le lilala est babubo »)
-alors que l’athée faible ne reconnait pas nécessairement ce sens.
(il prend l’exemple du terme amoral, qui signifie ce qui est étranger à la moralité, pas une indécision entre la moralité et l’immoralité)
Mais alors il y 2 problêmes pour cet athée : s’il reconnait ce sens il n’y a plus de différence avec l’agnosticisme (ma position en fait : l’athéisme faible n’est pas athée mais rien d’autre que l’agnosticisme) et tout l’édifice aboutit à la vérité triviale qu’entre l’agnostique qui n’affirme rien et le théiste, c’est ce dernier qui a le fardeau! So what?
S’il ne reconnait pas ce sens, on a quitté le problême de la preuve du théisme et de l’athéisme pour celui du sens des mots et des concepts et à ce niveau l’idée de l’athéisme faible qui n’a pas de fardeau ne marche plus : l’athée affirme que de tels mots n’ont pas de sens, le théiste affirme le contraire; avec l’affirmation le fardeau athée vient d’être rétabli et l’argument de base de l’athéisme faible vient de tomber, on se retrouve comme avec l’athéisme fort.
3)On apporte l’exemple évidemment fautif des licornes, en commettant l’erreur logique : il n’y a pas de preuve pour elles donc elles n’existent pas (pas de preuve de P donc preuve de non P). Non, si nous croyons, sans savoir démonstrativement, qu’elles n’existent pas, c’est que nous avons certains fondement pour la croyance, le fait qu’elles soient généralement des entités romanesques, dont nous savons inductivement qu’elles n’existent généralement pas; si au lieu de licornes on parle de chevaux à excroissance osseuse de 4 cm sur le front notre tendance à croire à l’inexistence va ramollir (idem si on remplace fées par entité substantielle totalement immatérielle).
4)Pour affiner la position l’auteur bifurque vers le problème de la signification : le non sens ou la contadiction impliquée par la notion ou le mot Dieu et à la fin il dit qu’on rejoint ainsi une forme d’athéisme fort. Normal dans la tradition métaphysique , ou les lois logiques sont aussi des lois de l’être et pour prouver qu’une chose n’existe pas il suffit de prouver qu’elle est métaphysiquement impossible (eg.un cercle carré). Sauf qu’ici les empiristes anglos ne croient pas aux lois de l’être ou que la logique réplique les lois de l’être, c’est pourquoi ils parlent seulement d’incohérence langagière (lois du langage) et donc de « non sens », d’indicible (ce que Wittgenstein appelait la « mystique », au sens non religieux). Mais il y a un problême en ce cas : la proposition Dieu n’existe pas est aussi un non sens! Et on vient de détruire l’athéisme fort…
------------------------------
Il ne s’agit pas ici de résoudre les problêmes du théisme et de l’athéisme mais surtout de montrer qu’ils relèvent de la philo au sens assez complexe du terme. Ce qu’il ne faut pas confondre avec la religion et l’irréligion, comme on le fait souvent.
Voici un article intéressant sur certaines positions du prof A. Flew car il aborde ce dont il a été question sur le forum : athéisme faible, licornes, fardeau de preuve. Cela tout en cherchant à affiner la position tout en l’orientant vers le problème du sens du mot Dieu.
https://www.dieu.pub/viewtopic.php?f=50&t=58400
https://www.dieu.pub/viewtopic.php?f=50&t=59163
Flew est passé par la suite à un théisme non religieux, le déisme, sans que la structure de sa position précédente soit affectée; il continue à penser que si on n’a pas de fondements ou de preuves pour Dieu on est athée (négatif, ou faible), mais il pense dorénavant qu’on a un fondement, de type finaliste, ordre du monde.
https://en.wikipedia.org/wiki/Antony_Flew
Je résume l’essentiel de cet article un peu long, surtout l’excursus interprétatif sur St Thomas, avec quelques commentaires.
1)Au départ on doit nourrir une présomption d’athéisme, tant que le théisme n’est pas fondé. On n’a pas à fonder une affirmation d’inexistence pour être athée. Pourquoi? Pcq l’athéisme dont il est question n’est pas positif mais négatif, ie.faible. Ceci commande tout le reste.
Donc tout le fardeau de preuve repose sur le théisme, car, tout simplement, le théisme est un théisme fort, il affirme une existence.
Il utilise l’exemple des tribunaux sur le fardeau de preuve sans trop insister sur le fait que c’est purement conventionnel, pas logique.
Tout le ressort de cet athéisme vient de ce qu’il est faible : juste un truc de langage, et l’athéisme fort reste occulté, et pour cause.
Flew, qui reconnait que son sens de l’athéisme peut paraitre inhabituel, curieusement ne voit pas qu’on pourrait aussi avoir un sens inhabituel du théisme pour être complètement logique : le théisme faible, qui n’a pas de fardeau (ne pas croire que Dieu n’existe pas). Si on ajoute ca, toute sa problématique s’effondre, et on ne voit pas comment éviter cet ajout.
2)Il doit traiter de l’agnosticisme car dans sa position tout non théiste est athée, ce qui parait évidemment faux car l’agnostique n’est ni athée ni théiste. IL répond par une distinction :
-L’agnostique est indécis (ou pense que l’indécision est prouvée, s’impose) entre les propositions Dieu existe et Dieu n’existe pas, mais aussi reconnait que les 2 propositions ont un sens (qu’elles ne sont pas comme « le lilala est babubo »)
-alors que l’athée faible ne reconnait pas nécessairement ce sens.
(il prend l’exemple du terme amoral, qui signifie ce qui est étranger à la moralité, pas une indécision entre la moralité et l’immoralité)
Mais alors il y 2 problêmes pour cet athée : s’il reconnait ce sens il n’y a plus de différence avec l’agnosticisme (ma position en fait : l’athéisme faible n’est pas athée mais rien d’autre que l’agnosticisme) et tout l’édifice aboutit à la vérité triviale qu’entre l’agnostique qui n’affirme rien et le théiste, c’est ce dernier qui a le fardeau! So what?
S’il ne reconnait pas ce sens, on a quitté le problême de la preuve du théisme et de l’athéisme pour celui du sens des mots et des concepts et à ce niveau l’idée de l’athéisme faible qui n’a pas de fardeau ne marche plus : l’athée affirme que de tels mots n’ont pas de sens, le théiste affirme le contraire; avec l’affirmation le fardeau athée vient d’être rétabli et l’argument de base de l’athéisme faible vient de tomber, on se retrouve comme avec l’athéisme fort.
3)On apporte l’exemple évidemment fautif des licornes, en commettant l’erreur logique : il n’y a pas de preuve pour elles donc elles n’existent pas (pas de preuve de P donc preuve de non P). Non, si nous croyons, sans savoir démonstrativement, qu’elles n’existent pas, c’est que nous avons certains fondement pour la croyance, le fait qu’elles soient généralement des entités romanesques, dont nous savons inductivement qu’elles n’existent généralement pas; si au lieu de licornes on parle de chevaux à excroissance osseuse de 4 cm sur le front notre tendance à croire à l’inexistence va ramollir (idem si on remplace fées par entité substantielle totalement immatérielle).
4)Pour affiner la position l’auteur bifurque vers le problème de la signification : le non sens ou la contadiction impliquée par la notion ou le mot Dieu et à la fin il dit qu’on rejoint ainsi une forme d’athéisme fort. Normal dans la tradition métaphysique , ou les lois logiques sont aussi des lois de l’être et pour prouver qu’une chose n’existe pas il suffit de prouver qu’elle est métaphysiquement impossible (eg.un cercle carré). Sauf qu’ici les empiristes anglos ne croient pas aux lois de l’être ou que la logique réplique les lois de l’être, c’est pourquoi ils parlent seulement d’incohérence langagière (lois du langage) et donc de « non sens », d’indicible (ce que Wittgenstein appelait la « mystique », au sens non religieux). Mais il y a un problême en ce cas : la proposition Dieu n’existe pas est aussi un non sens! Et on vient de détruire l’athéisme fort…
------------------------------
Il ne s’agit pas ici de résoudre les problêmes du théisme et de l’athéisme mais surtout de montrer qu’ils relèvent de la philo au sens assez complexe du terme. Ce qu’il ne faut pas confondre avec la religion et l’irréligion, comme on le fait souvent.