Chronologie et enjeux des 8 conciles bouddhiques
Posté : 13 nov.20, 22:41
Chronologie et enjeux des 8 conciles bouddhiques
Il n’existe pas de liste officielle des conciles bouddhiques, le bouddhisme ne s’incarnant pas dans une institution unique à l'instar de l'Église catholique romaine. Le présent article présente les principaux ; le courant theravada actuel en reconnaît six.
Les conciles bouddhiques anciens sont relatés dans des sources en pali, chinois ou tibétain, postérieures d’au moins deux siècles aux événements. Ces récits ayant pour objectif principal de confirmer l’orthodoxie de l’école à laquelle se rattache le texte, les sources ne concordent pas entièrement. Néanmoins, même si son exactitude peut être mise en doute, l’histoire traditionnelle des conciles reflète des phénomènes probablement réels : assemblées au cours desquelles sont récitées règles monastiques (vinaya) et paroles du Bouddha (dharma) ; dissensions précoces concernant tout d’abord les règles, puis la doctrine ; divisions et schismes, avec en particulier le thème récurrent d’une majorité réformatrice (mahasanghika) se séparant de la minorité orthodoxe et traditionaliste (sthaviravadin) qui la juge hérétique. Parmi les propositions hérétiques, on trouve des assouplissements du vinaya, l’ouverture aux laïques et la remise en cause de la perfection des arhats. (l'équivalent d'un « saint » vivant dans le bouddhisme. Un « méritant », « celui qui a vaincu l'ennemi », l'ultime niveau de la sagesse chez un moine bouddhiste).
D’autre part, les récits de concile servent également à certifier la validité de l’enseignement de l’école et la généalogie religieuse de ses patriarches. Ils relatent la mise par écrit du canon, sous la direction d'auditeurs directs des discours du Bouddha si possible, sans crainte d'invraisemblance. Ainsi, selon certaines sources, les participants les plus éminents du deuxième concile seraient des disciples immédiats de Shakyamuni, ce qui en ferait des prodiges de longévité. Les sources insistent parfois sur un texte particulier qu’elles cherchent à authentifier. La tenue d’un concile peut également être pour un souverain ou un État un moyen d’élever son prestige.
Le premier concile bouddhique
Il aurait eu lieu au ve siècle av. J.-C., un an après la mort du Bouddha, avec pour objectif de pérenniser les règles et la doctrine instaurées par lui. Rassemblant 500, 1 000 ou 3 000 bhikkhus ( : moine), il fut convoqué à Rajagriha (actuelle Rajgir), dans le royaume de Magadha, par le roi Ajatasatru. Le lieu exact est selon les sources la Grotte de Sattapaṇṇi, la Grotte des Kshatrya, le Rocher de Pippala ou Gridhrakûta. Mahakasyapa, premier patriarche, présida ce concile.
La réalité historique de ce concile, comme celle des deux suivants, a été mise en doute dès le xixe siècle. Néanmoins, il est vraisemblable que les bouddhistes furent rapidement confrontés à des dissensions internes concernant les pratiques et la doctrine. Les sources le mentionnant sont essentiellement en pali et en chinois, ces dernières traduites du sanscrit, à l’exception des témoignages de Faxian (moine bouddhiste chinois pèlerin aux Ivème/Vème siècle après JC qui a fourni une des première descriptions de l'Inde) et Xuanzang (moine bouddhiste chinois du VIIème siècle après JC un des plus grands traducteurs de soûtras bouddhique de l'histoire chinoise – c'est lui qui est représenté dans le très classique roman chinois : La pérégrination vers l'Ouest ou Voyage en Occident) .
Les conciles étant relatés avec pour objectif principal de mettre en évidence la légitimité du groupe auteur du texte, il existe des divergences entre les sources. Les disputes concernant les règles monastiques (vinaya) semblent avoir été au départ prépondérantes, avant d’être supplantées par les divergences doctrinales.
Selon certains, c’est lors de ce concile qu’aurait été couché par écrit le Tipitaka, les « trois corbeilles ». Néanmoins les sources pali contiennent également une autre version datant du ier siècle av. J.-C. (concile de Tambapanni) la rédaction du canon.
Composition du Tripitaka :
le Vinaya pitaka, qui regroupe les règles monastiques ;
le Sutta pitaka, qui regroupe les discours attribués au Bouddha ;
l' Abhidhamma pitaka, une somme importante de commentaires.
Le deuxième concile bouddhique
Il se serait tenu à Vaisali l'année 100 ou 110 du (après le) parinirvāna de Bouddha (la mort)- soit aux alentours de 380 av. J.-C. -, convoqué par le roi Kalasoka dans le but de condamner dix assouplissements du vinaya adoptés par les moines de la tribu Vriji menés par Vajjiputtaka.
Comme pour les premier et troisième conciles, les sources le concernant ne concordent pas entièrement, certaines proposant qu’il ait eu lieu au milieu du IIIe siècle av. J.-C. sous le règne d’Ashoka, date plus généralement donnée comme celle du troisième concile. D’autres l’ignorent totalement.
Parmi les sites proposés, on trouve les monastères de Valikaramade, Kusumapura, ou Kutagarashala, et même Kusumapura (Pātaliputra). Le nombre des bhikkhus participants est presque toujours de 700. Aucun président n’est cité, mais les dénommés Revata, Sambhuta Shanavasin, Sarvakamin et Kubjita semblent y avoir tenu un rôle prééminent.
La plupart des versions s’accordent sur le fait qu’il s’acheva par la condamnation par les Anciens des dix règles hérétiques, avec, selon la source, une appréciation sévère ou favorable vis-à-vis des réformateurs ; une version se réclamant des mahasanghikas affirme que seule la dernière mesure (accepter de l’or ou de l’argent en aumône) fut rejetée. Les Chroniques cinghalaises Dipavamsa** et Mahavamsa* voient dans cette décision l’origine du schisme entre sthaviravadins (partisans des Anciens) et mahasanghikas (partisans des réformes, plus nombreux), qui devait ultérieurement donner naissance aux dix-huit écoles anciennes.
D'autres sources (Cachemire) situent lors de ce concile l’exposé par Mahadeva des « cinq constatations » réfutant la perfection des arahants ; ignorant la dispute concernant les règles monastiques, elles voient dans l' « hérésie de Mahadeva » l’origine du schisme entre sthaviravadin et mahasanghika.
D'autres sources encore font remonter le schisme au troisième concile.
Selon Xuanzang, ce concile fut également l'occasion d'une remise en forme du Tipitaka.
D'après le Mahavamsa, la cause de cette division du Sangha était un désaccord sur les cinq théories concernant les arahants, qui auraient été mises en avant par Mahādeva, lequel aurait par la suite créé les Mahāsānghikas. Ceux qui auraient rejeté les cinq théories se seraient nommés eux-mêmes Sthaviravādas pour se différencier des Mahāsānghikas. Cependant, le texte de Vasumitra, dont la rédaction est datée aux alentours de 100 ap. J.-C., et qui a été préservé dans ses traductions chinoise et tibétaine, ne mentionne aucune personne appelée Mahādeva. Il donne plutôt une liste de noms bien connus de personnages ayant accepté ou rejeté les cinq théories. Étienne Lamotte a également démontré que l'existence du personnage de "Mahādeva" était une interpolation tardive et sectaire.
Andrew Skilton a suggéré que les problèmes résultant des récits contradictoires sont résolus par le Śariputrapariprcchā des Mahāsāmghikas, lequel est le récit du schisme le plus ancien. D'après ce récit, le concile a été réuni à Pātaliputra pour des raisons ayant trait au vinaya, et la majorité (Mahāsamgha) a refusé d'accepter l'addition de règles supplémentaires au vinaya par les Sthaviras. Ainsi, les Mahāsāmghikas voyaient les Sthaviras comme un groupe séparatiste qui essayait de modifier le vinaya originel.
Les spécialistes s'accordent généralement sur le fait que le différend était bien sur un sujet du vinaya, et ont remarqué que le récit des Mahāsāmghikas est corroboré par les textes de vinaya eux-mêmes, car le vinaya associé aux Sthaviras contient bien plus de règles que celui des Mahāsāmghikas. Cependant, le sens commun suggère que cela pourrait également être dû au fait que les Mahāsāmghikas aient pu abolir ces mêmes règles.
Le troisième concile bouddhique
Le concile de Pātaliputra est connu pour beaucoup comme l’occasion du premier schisme dans l'histoire du bouddhisme(d’autres font remonter le premier schisme au concile de Vaisali). C'est également le premier concile où les disputes concernent essentiellement la doctrine et non les règles monastiques.
Ce concile n'est pas parfaitement connu des historiens. Les textes qui le mentionnent ne sont d'accord ni sur la date exacte (vers 250 av. J.-C. en général), ni sur son déroulement. Les sources du Mahâyâna l’ignorent et passent directement du concile de Vaisali au concile du Cachemire (iie siècle). L'empereur Ashoka semblant avoir eu à cœur de ne pas paraître favoriser une secte aux dépens des autres, il parait peu probable aux historiens qu'il ait pris parti dans les disputes comme le prétendent les sources.
La version historique attachée aux écrits en pâli décrit un concile se déroulant sous le patronage d’Ashoka et sous la direction de son frère le Vénérable Mogalliputta Tissa, convoqué pour mettre fin à des positions hérétiques et se terminant par l'expulsion des fautifs. Pour mieux réfuter les thèses non-orthodoxes, Mogalliputta Tissa aurait rédigé le Kathāvatthu, texte de l’Abhidhamma pitaka clarifiant 216 points théoriques. On pense néanmoins qu’il s’agit d’un légende destinée à accréditer l’ouvrage comme canonique car les sources chinoises n’en parlent pas ; de plus, la sécession des Andhakas, postérieure au concile, y est mentionnée.
Un autre résultat du concile aurait été l’approbation de la doctrine du Vibhajjavada, qui soutient que les premiers pas de la pratique doivent s’appuyer sur l’expérience, l’observation critique et le raisonnement, et non la foi aveugle.
Enfin, l’envoi par Ashoka de neuf missions (Sri Lanka, Kanara, Karnataka, Cachemire, Himalaya, Birmanie, Afghanistan) est également rattachée à ce concile. Celle de Sri Lanka aurait été menée par son propre fils Mahinda qui y diffusa le tripitaka et la doctrine Vibhajjavada.
Le quatrième Concile : theravada (Petit Véhicule ou Véhicule des Anciens) de Tambapanni
Les chroniques cingalaises Dipavamsa et Mahavamsa mentionnent un concile qui se serait tenu vers -29 à Tambapanni (Sri Lanka), convoqué par le roi Vattagamani, avec pour objectif de coucher le canon par écrit. Sous la direction de Maharakkhita, 500 moines transcrivirent les paroles du Bouddha sur des feuilles de palme. La grotte Aloka lena, près de Matale, dans laquelle le travail se serait déroulé, fut décorée au xviiie siècle d’images du Bouddha sur ordre du roi Vijayarajasiha. Ce concile est considéré comme le quatrième par le courant theravada.
Le cinquième Concile mahayana (Grand Véhicule ou Véhicule des Bodhisattvas) du Cachemire
Ce concile, présidé par Vasumitra, aurait eu lieu dans l’Empire kouchan (au Cachemire ou à Jalandhar) sous le règne de Kanishka Ier (127-147). Il fut l’occasion d’une remise en ordre du canon mahayana accompagnée de la traduction en sanscrit des textes rédigés en gandhari, langue vernaculaire locale. Selon la tradition, 500 bhikkhus auraient travaillé pendant douze ans à cette révision. Il est parfois mentionné dans le courant theravada comme le « concile des moines hérétiques ».
Le sixième Concile de Lhassa
Des sources chinoises et tibétaines relatent un débat entre partisans du dhyana chinois (chan deviendra le Zen au Japon) « subitiste », menés par Moheyan (Mahayana), et partisans du courant indien gradualiste représentés par Kamalaśīla. Décrit comme un débat en face à face prenant place à proximité de Lhassa, au monastère de Samye, il se serait en fait déroulé par écrit entre 792 et 794, s’achevant sur le choix par le roi du Tibet, Trisong Detsen, de la tradition indienne comme religion officielle et la mise hors la loi de la doctrine de Moheyan. Les partisans de ce dernier se seraient suicidés. Le Thub pa'i dgongs gsal explique le choix du roi par la victoire de Kamalasila, mais la tradition nyingmapa et les sources chinoises prétendent que Moheyan gagna le débat mais fut chassé tout de même. Il est vraisemblable que les motifs politiques prédominèrent, comme dans les rivalités entre Bonpo (la religion tibétaine antérieure au bouddhisme) et bouddhisme. Trisong Detsen aurait déclaré le bouddhisme religion d'État du Tibet en 779 en présence de Padmasambhava et sa parédre (épouse mystique) Yeshe Tsogyal, de Shantarakshita et Vimalamitra, ainsi que de nombreux traducteurs dont Vairotsana.
La légende prétend que les textes chinois furent dissimulés à Samye, et qu’avant de quitter le Tibet, Moheyan s’aperçut qu'il avait oublié une de ses chaussures dans un monastère. Il aurait alors prophétisé : « Lorsque le dharma aura presque entièrement disparu de la terre, il subsistera encore un peu de ma doctrine, juste la taille d’une chaussure. » Cette prophétie sert à expliquer les résurgences d'éléments chan dans le bouddhisme tibétain. Certains moines portent un cordon bleu sur leur habit en signe de respect pour le maître chinois.
Le 7ème Concile : theravada de Mandalay
Cinquième concile theravada, il se tint en Birmanie en 1871 sous le règne du roi Mindon, et fut présidé par les Vénérables Mahathera Jagarabhivamsa, Narindabhidhaja et Mahathera Sumangalasami. Les 2400 participants récitèrent en cinq mois le Tipitaka, confirmant la version intégrale qui venait d’être gravée entre 1860 et 1868 sur 729 plaques de marbre. Ces plaques se trouvent dans autant de petits stûpas de la pagode royale Kuthodaw, une 730e relatant les circonstances de la construction.
Le 8ème Concile : theravada de Rangoon
Le sixième concile theravada débuta le 17 mai 1954 à Kaba Aye, Rangoon, sous le patronage du gouvernement dirigé par le Premier ministre MU Nu. Maha Passana Guha, une grotte artificielle évoquant la grotte Sattapanni, un des sites proposés pour le premier concile, avait été aménagée à cet effet. Les participants venaient de huit pays : Birmanie, Cambodge, Inde, Laos, Népal, Sri lanka, Thaïlande. Comme le précédent, le but était la vérification du Tipitaka, en partie sous forme de questions-réponses sur le dhamma, les premières posées par Maître Mahasi Sayadaw et les secondes offertes par Maître Bhadanta Vicittasarabhivamsa. Après un travail de deux ans, la version corrigée fit l’objet d’une édition (1956) en écriture birmane réunissant 52 traités en 40 volumes (8025 pages au total), qui fut retranscrite ultérieurement en caractères romains, devanagaris, thaï, cingalais, khmers et mongols.
*Le Mahavamsa (sanskrit IAST : Mahāvamśa ; pāli : Mahāvamsa ; litt. la grande chronique) est un texte en langue pāli relatant l'histoire des rois singhalais et tamouls de Ceylan (aujourd'hui Sri Lanka). Il couvre une période qui s'étend de l'avènement du Prince Vijaya en 543 av. J.-C. au règne du roi Mahāsena (277—304 apr. J.-C.). Il relate aussi l'histoire du bouddhisme.
**Le Dīpavaṃsa (litt. chronicle de l'île en langue pâli), est le plus ancien document historique connu de Sri Lanka, censé avoir été rédigé au ive siècle apr. J.-C. Avec le Mahavamsa, il constitue une source de récits de l'histoire ancienne du Sri Lanka et de l'Inde, en particulier de l'histoire du bouddhisme theravāda.
Il n’existe pas de liste officielle des conciles bouddhiques, le bouddhisme ne s’incarnant pas dans une institution unique à l'instar de l'Église catholique romaine. Le présent article présente les principaux ; le courant theravada actuel en reconnaît six.
Les conciles bouddhiques anciens sont relatés dans des sources en pali, chinois ou tibétain, postérieures d’au moins deux siècles aux événements. Ces récits ayant pour objectif principal de confirmer l’orthodoxie de l’école à laquelle se rattache le texte, les sources ne concordent pas entièrement. Néanmoins, même si son exactitude peut être mise en doute, l’histoire traditionnelle des conciles reflète des phénomènes probablement réels : assemblées au cours desquelles sont récitées règles monastiques (vinaya) et paroles du Bouddha (dharma) ; dissensions précoces concernant tout d’abord les règles, puis la doctrine ; divisions et schismes, avec en particulier le thème récurrent d’une majorité réformatrice (mahasanghika) se séparant de la minorité orthodoxe et traditionaliste (sthaviravadin) qui la juge hérétique. Parmi les propositions hérétiques, on trouve des assouplissements du vinaya, l’ouverture aux laïques et la remise en cause de la perfection des arhats. (l'équivalent d'un « saint » vivant dans le bouddhisme. Un « méritant », « celui qui a vaincu l'ennemi », l'ultime niveau de la sagesse chez un moine bouddhiste).
D’autre part, les récits de concile servent également à certifier la validité de l’enseignement de l’école et la généalogie religieuse de ses patriarches. Ils relatent la mise par écrit du canon, sous la direction d'auditeurs directs des discours du Bouddha si possible, sans crainte d'invraisemblance. Ainsi, selon certaines sources, les participants les plus éminents du deuxième concile seraient des disciples immédiats de Shakyamuni, ce qui en ferait des prodiges de longévité. Les sources insistent parfois sur un texte particulier qu’elles cherchent à authentifier. La tenue d’un concile peut également être pour un souverain ou un État un moyen d’élever son prestige.
Le premier concile bouddhique
Il aurait eu lieu au ve siècle av. J.-C., un an après la mort du Bouddha, avec pour objectif de pérenniser les règles et la doctrine instaurées par lui. Rassemblant 500, 1 000 ou 3 000 bhikkhus ( : moine), il fut convoqué à Rajagriha (actuelle Rajgir), dans le royaume de Magadha, par le roi Ajatasatru. Le lieu exact est selon les sources la Grotte de Sattapaṇṇi, la Grotte des Kshatrya, le Rocher de Pippala ou Gridhrakûta. Mahakasyapa, premier patriarche, présida ce concile.
La réalité historique de ce concile, comme celle des deux suivants, a été mise en doute dès le xixe siècle. Néanmoins, il est vraisemblable que les bouddhistes furent rapidement confrontés à des dissensions internes concernant les pratiques et la doctrine. Les sources le mentionnant sont essentiellement en pali et en chinois, ces dernières traduites du sanscrit, à l’exception des témoignages de Faxian (moine bouddhiste chinois pèlerin aux Ivème/Vème siècle après JC qui a fourni une des première descriptions de l'Inde) et Xuanzang (moine bouddhiste chinois du VIIème siècle après JC un des plus grands traducteurs de soûtras bouddhique de l'histoire chinoise – c'est lui qui est représenté dans le très classique roman chinois : La pérégrination vers l'Ouest ou Voyage en Occident) .
Les conciles étant relatés avec pour objectif principal de mettre en évidence la légitimité du groupe auteur du texte, il existe des divergences entre les sources. Les disputes concernant les règles monastiques (vinaya) semblent avoir été au départ prépondérantes, avant d’être supplantées par les divergences doctrinales.
Selon certains, c’est lors de ce concile qu’aurait été couché par écrit le Tipitaka, les « trois corbeilles ». Néanmoins les sources pali contiennent également une autre version datant du ier siècle av. J.-C. (concile de Tambapanni) la rédaction du canon.
Composition du Tripitaka :
le Vinaya pitaka, qui regroupe les règles monastiques ;
le Sutta pitaka, qui regroupe les discours attribués au Bouddha ;
l' Abhidhamma pitaka, une somme importante de commentaires.
Le deuxième concile bouddhique
Il se serait tenu à Vaisali l'année 100 ou 110 du (après le) parinirvāna de Bouddha (la mort)- soit aux alentours de 380 av. J.-C. -, convoqué par le roi Kalasoka dans le but de condamner dix assouplissements du vinaya adoptés par les moines de la tribu Vriji menés par Vajjiputtaka.
Comme pour les premier et troisième conciles, les sources le concernant ne concordent pas entièrement, certaines proposant qu’il ait eu lieu au milieu du IIIe siècle av. J.-C. sous le règne d’Ashoka, date plus généralement donnée comme celle du troisième concile. D’autres l’ignorent totalement.
Parmi les sites proposés, on trouve les monastères de Valikaramade, Kusumapura, ou Kutagarashala, et même Kusumapura (Pātaliputra). Le nombre des bhikkhus participants est presque toujours de 700. Aucun président n’est cité, mais les dénommés Revata, Sambhuta Shanavasin, Sarvakamin et Kubjita semblent y avoir tenu un rôle prééminent.
La plupart des versions s’accordent sur le fait qu’il s’acheva par la condamnation par les Anciens des dix règles hérétiques, avec, selon la source, une appréciation sévère ou favorable vis-à-vis des réformateurs ; une version se réclamant des mahasanghikas affirme que seule la dernière mesure (accepter de l’or ou de l’argent en aumône) fut rejetée. Les Chroniques cinghalaises Dipavamsa** et Mahavamsa* voient dans cette décision l’origine du schisme entre sthaviravadins (partisans des Anciens) et mahasanghikas (partisans des réformes, plus nombreux), qui devait ultérieurement donner naissance aux dix-huit écoles anciennes.
D'autres sources (Cachemire) situent lors de ce concile l’exposé par Mahadeva des « cinq constatations » réfutant la perfection des arahants ; ignorant la dispute concernant les règles monastiques, elles voient dans l' « hérésie de Mahadeva » l’origine du schisme entre sthaviravadin et mahasanghika.
D'autres sources encore font remonter le schisme au troisième concile.
Selon Xuanzang, ce concile fut également l'occasion d'une remise en forme du Tipitaka.
D'après le Mahavamsa, la cause de cette division du Sangha était un désaccord sur les cinq théories concernant les arahants, qui auraient été mises en avant par Mahādeva, lequel aurait par la suite créé les Mahāsānghikas. Ceux qui auraient rejeté les cinq théories se seraient nommés eux-mêmes Sthaviravādas pour se différencier des Mahāsānghikas. Cependant, le texte de Vasumitra, dont la rédaction est datée aux alentours de 100 ap. J.-C., et qui a été préservé dans ses traductions chinoise et tibétaine, ne mentionne aucune personne appelée Mahādeva. Il donne plutôt une liste de noms bien connus de personnages ayant accepté ou rejeté les cinq théories. Étienne Lamotte a également démontré que l'existence du personnage de "Mahādeva" était une interpolation tardive et sectaire.
Andrew Skilton a suggéré que les problèmes résultant des récits contradictoires sont résolus par le Śariputrapariprcchā des Mahāsāmghikas, lequel est le récit du schisme le plus ancien. D'après ce récit, le concile a été réuni à Pātaliputra pour des raisons ayant trait au vinaya, et la majorité (Mahāsamgha) a refusé d'accepter l'addition de règles supplémentaires au vinaya par les Sthaviras. Ainsi, les Mahāsāmghikas voyaient les Sthaviras comme un groupe séparatiste qui essayait de modifier le vinaya originel.
Les spécialistes s'accordent généralement sur le fait que le différend était bien sur un sujet du vinaya, et ont remarqué que le récit des Mahāsāmghikas est corroboré par les textes de vinaya eux-mêmes, car le vinaya associé aux Sthaviras contient bien plus de règles que celui des Mahāsāmghikas. Cependant, le sens commun suggère que cela pourrait également être dû au fait que les Mahāsāmghikas aient pu abolir ces mêmes règles.
Le troisième concile bouddhique
Le concile de Pātaliputra est connu pour beaucoup comme l’occasion du premier schisme dans l'histoire du bouddhisme(d’autres font remonter le premier schisme au concile de Vaisali). C'est également le premier concile où les disputes concernent essentiellement la doctrine et non les règles monastiques.
Ce concile n'est pas parfaitement connu des historiens. Les textes qui le mentionnent ne sont d'accord ni sur la date exacte (vers 250 av. J.-C. en général), ni sur son déroulement. Les sources du Mahâyâna l’ignorent et passent directement du concile de Vaisali au concile du Cachemire (iie siècle). L'empereur Ashoka semblant avoir eu à cœur de ne pas paraître favoriser une secte aux dépens des autres, il parait peu probable aux historiens qu'il ait pris parti dans les disputes comme le prétendent les sources.
La version historique attachée aux écrits en pâli décrit un concile se déroulant sous le patronage d’Ashoka et sous la direction de son frère le Vénérable Mogalliputta Tissa, convoqué pour mettre fin à des positions hérétiques et se terminant par l'expulsion des fautifs. Pour mieux réfuter les thèses non-orthodoxes, Mogalliputta Tissa aurait rédigé le Kathāvatthu, texte de l’Abhidhamma pitaka clarifiant 216 points théoriques. On pense néanmoins qu’il s’agit d’un légende destinée à accréditer l’ouvrage comme canonique car les sources chinoises n’en parlent pas ; de plus, la sécession des Andhakas, postérieure au concile, y est mentionnée.
Un autre résultat du concile aurait été l’approbation de la doctrine du Vibhajjavada, qui soutient que les premiers pas de la pratique doivent s’appuyer sur l’expérience, l’observation critique et le raisonnement, et non la foi aveugle.
Enfin, l’envoi par Ashoka de neuf missions (Sri Lanka, Kanara, Karnataka, Cachemire, Himalaya, Birmanie, Afghanistan) est également rattachée à ce concile. Celle de Sri Lanka aurait été menée par son propre fils Mahinda qui y diffusa le tripitaka et la doctrine Vibhajjavada.
Le quatrième Concile : theravada (Petit Véhicule ou Véhicule des Anciens) de Tambapanni
Les chroniques cingalaises Dipavamsa et Mahavamsa mentionnent un concile qui se serait tenu vers -29 à Tambapanni (Sri Lanka), convoqué par le roi Vattagamani, avec pour objectif de coucher le canon par écrit. Sous la direction de Maharakkhita, 500 moines transcrivirent les paroles du Bouddha sur des feuilles de palme. La grotte Aloka lena, près de Matale, dans laquelle le travail se serait déroulé, fut décorée au xviiie siècle d’images du Bouddha sur ordre du roi Vijayarajasiha. Ce concile est considéré comme le quatrième par le courant theravada.
Le cinquième Concile mahayana (Grand Véhicule ou Véhicule des Bodhisattvas) du Cachemire
Ce concile, présidé par Vasumitra, aurait eu lieu dans l’Empire kouchan (au Cachemire ou à Jalandhar) sous le règne de Kanishka Ier (127-147). Il fut l’occasion d’une remise en ordre du canon mahayana accompagnée de la traduction en sanscrit des textes rédigés en gandhari, langue vernaculaire locale. Selon la tradition, 500 bhikkhus auraient travaillé pendant douze ans à cette révision. Il est parfois mentionné dans le courant theravada comme le « concile des moines hérétiques ».
Le sixième Concile de Lhassa
Des sources chinoises et tibétaines relatent un débat entre partisans du dhyana chinois (chan deviendra le Zen au Japon) « subitiste », menés par Moheyan (Mahayana), et partisans du courant indien gradualiste représentés par Kamalaśīla. Décrit comme un débat en face à face prenant place à proximité de Lhassa, au monastère de Samye, il se serait en fait déroulé par écrit entre 792 et 794, s’achevant sur le choix par le roi du Tibet, Trisong Detsen, de la tradition indienne comme religion officielle et la mise hors la loi de la doctrine de Moheyan. Les partisans de ce dernier se seraient suicidés. Le Thub pa'i dgongs gsal explique le choix du roi par la victoire de Kamalasila, mais la tradition nyingmapa et les sources chinoises prétendent que Moheyan gagna le débat mais fut chassé tout de même. Il est vraisemblable que les motifs politiques prédominèrent, comme dans les rivalités entre Bonpo (la religion tibétaine antérieure au bouddhisme) et bouddhisme. Trisong Detsen aurait déclaré le bouddhisme religion d'État du Tibet en 779 en présence de Padmasambhava et sa parédre (épouse mystique) Yeshe Tsogyal, de Shantarakshita et Vimalamitra, ainsi que de nombreux traducteurs dont Vairotsana.
La légende prétend que les textes chinois furent dissimulés à Samye, et qu’avant de quitter le Tibet, Moheyan s’aperçut qu'il avait oublié une de ses chaussures dans un monastère. Il aurait alors prophétisé : « Lorsque le dharma aura presque entièrement disparu de la terre, il subsistera encore un peu de ma doctrine, juste la taille d’une chaussure. » Cette prophétie sert à expliquer les résurgences d'éléments chan dans le bouddhisme tibétain. Certains moines portent un cordon bleu sur leur habit en signe de respect pour le maître chinois.
Le 7ème Concile : theravada de Mandalay
Cinquième concile theravada, il se tint en Birmanie en 1871 sous le règne du roi Mindon, et fut présidé par les Vénérables Mahathera Jagarabhivamsa, Narindabhidhaja et Mahathera Sumangalasami. Les 2400 participants récitèrent en cinq mois le Tipitaka, confirmant la version intégrale qui venait d’être gravée entre 1860 et 1868 sur 729 plaques de marbre. Ces plaques se trouvent dans autant de petits stûpas de la pagode royale Kuthodaw, une 730e relatant les circonstances de la construction.
Le 8ème Concile : theravada de Rangoon
Le sixième concile theravada débuta le 17 mai 1954 à Kaba Aye, Rangoon, sous le patronage du gouvernement dirigé par le Premier ministre MU Nu. Maha Passana Guha, une grotte artificielle évoquant la grotte Sattapanni, un des sites proposés pour le premier concile, avait été aménagée à cet effet. Les participants venaient de huit pays : Birmanie, Cambodge, Inde, Laos, Népal, Sri lanka, Thaïlande. Comme le précédent, le but était la vérification du Tipitaka, en partie sous forme de questions-réponses sur le dhamma, les premières posées par Maître Mahasi Sayadaw et les secondes offertes par Maître Bhadanta Vicittasarabhivamsa. Après un travail de deux ans, la version corrigée fit l’objet d’une édition (1956) en écriture birmane réunissant 52 traités en 40 volumes (8025 pages au total), qui fut retranscrite ultérieurement en caractères romains, devanagaris, thaï, cingalais, khmers et mongols.
*Le Mahavamsa (sanskrit IAST : Mahāvamśa ; pāli : Mahāvamsa ; litt. la grande chronique) est un texte en langue pāli relatant l'histoire des rois singhalais et tamouls de Ceylan (aujourd'hui Sri Lanka). Il couvre une période qui s'étend de l'avènement du Prince Vijaya en 543 av. J.-C. au règne du roi Mahāsena (277—304 apr. J.-C.). Il relate aussi l'histoire du bouddhisme.
**Le Dīpavaṃsa (litt. chronicle de l'île en langue pâli), est le plus ancien document historique connu de Sri Lanka, censé avoir été rédigé au ive siècle apr. J.-C. Avec le Mahavamsa, il constitue une source de récits de l'histoire ancienne du Sri Lanka et de l'Inde, en particulier de l'histoire du bouddhisme theravāda.