Une variété est plus simple : l’agnosticisme subjectif, ou personnel, il parle à la 1ere personne et se borne à dire sur un sujet Je ne sais et je ne sais que croire, et il suspend son jugement, par manque d’infos ou d’intérèt. Le Que sais je de Montaigne pourrait exprimer cela.
Plus complexe est l’agnosticisme (ou scepticisme sur un sujet) objectif, doctrinal, catégorique, ou dogmatique, comme on voudra. Là on passe du Je au on ou au il impersonnel : on dit qu’ il est impossible de savoir, ou d’avoir des éléments suffisants pour croire.
Un exemple :
dan26 a écrit :
on se saoule de paroles, "démarches déductives" cela ne veut strictement rien dire , ce ne sont que des arguments (thèses et anti thèses ), des mots rien que des mots . Les arguments (excuses moi de faire simple ), existent dans les deux sens . Pour arriver à dieu, et pour montrer que c'est un produit de l'imaginaire humain.
J’aimerais tirer un exemple général de l’histoire de la philo qui va couvrir à peu près tous les types d’agnosticisme. Tout simplement : la doctrine sceptique n’est pas hors ou au dessus de l’histoire des doctrines, mais n’est rien d’Autre qu’une doctrine de plus, avec ses noms principaux et ses arguments : Pyrrhon, Sextus empiricus, Aenesidème, on peut peut être ajouter le relativiste Protagoras, les sceptiques modérés appelés probabilistes, dont faisait partie Cicéron.
Autrement dit : le scepticisme est une position qui se prétend vraie, contre les autres positions, et les autres positions pensent que le scepticisme est faux. Donc quand est utilisé un des principaux arguments sceptiques , à savoir les contradictions les philosophes, le désaccord entre eux (souvent opposé à l’accord relatif obtenu en sciences empiriques et en maths), il est très important de voir que le sceptique n’est pas au dessus de ces contradictions, il ne fait qu’ajouter un désaccord de plus, une autre doctrine qui contredit les autres! Donc le scepticisme ne peut plus se proclamer vrai et doit se rabattre sur un scepticisme personnel, et admettre qu’une doctrine non sceptique puisse très bien être vraie. La proposition aucune proposition n’est vraie n’a pas de sens. Pour affirmer, il faut toujours admettre du vrai dans les prémisses, donc aussi pour réfuter les doctrines dogmatiques ou non sceptiques.
Il en est de même pour l’agnosticisme, qui est un scepticisme. Il ne faut jamais le voir comme un arbitre au dessus du théisme et de l’athéisme, une erreur très courante, ou on prend l’absence de preuve d’un coté ou de l’autre comme un fait évident, alors que les preuves de Sartre et de Spinoza sont là, lisibles par tous, car pour parler de cette absence il faut avoir au préalable prouver que ces preuves n’en sont pas, et alors on est dans le bain : les preuves contres ces preuves ne sont pas au dessus, mais au même niveau, et elles ne peuvent pas être présupposées valides à l’avance. On peut dire cependant : il n’y a pas de preuves de la vérité de l’athéisme dans la discipline des statistiques agricoles, mais cela vient simplement que ce n’est pas leur domaine. Ou encore il n’y a pas de preuve de labo, idem.
Bref l’agnosticisme doctrinal est une doctrine exactement comme le théisme et l’athéisme.
Cela entraine une autre conséquence : puisque l’agnosticisme est une doctrine qui se prétend vraie, il sera pratiquement impossible pour lui de ne pas inclure de croyances, car il serait très surprenant , a priori, qu’il puisse prouver toutes ses affirmations. Quelque part, il devra se glisser souvent des fondements non démonstratifs dans ses raisonnements, ou en tout cas pas plus démonstratifs que dans les positions adverses. Par exemple, au hasard, si l’agnostique réfute l’athéisme de Sartre en attaquant la théorie de la liberté de ce dernier comme irréaliste, il va se trouver pris jusqu’au cou dans la question très complexe du libre arbitre et à un moment il va souvent se rabattre sur la théorie qui lui parait la plus probable, avec quelque doute, il va pencher pour un libre arbitre limité, ou un déterminisme limité par exemple. Mais seulement pencher, il va croire sur fondement.
C’est pourquoi, logiquement, un agnostique doctrinal est souvent croyant (Mais pas dans le même objet bien sûr).
Incidemment : L’argument du désaccord entre les doctrines, ou les savants, est le contraire de l’argument du consensus, lequel est un argument d’autorité (les auctors sont d’accord); c’est comme un contre-argument d’autorité. Or ce type d’argument n’est pas démonstratif, il relêve de la foi, donc de la croyance. Quand les gens Sont d’Accord on les croit plus facilement, même si ce n’est pas une preuve, dans le cas contraire notre doute augmente, mais ce doute lui-même n’est pas final ni doctrinal, seulement prudentiel.
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« Un des 10 tropes d’Aenésidème (10 AC, il y a 2000 ans)
Les contradictions des philo, et plus largement la diversité des opinions humaines. Sur aucun sujet les hommes ne sont d’accord. Qui a raison? Impossible de trancher, car si l’on donnait son opinion, on ne ferait qu’ajouter un élément de discorde. C’est l’argument le plus simple et le plus frappant. ON le retrouve à toutes les époques de l’histoire
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La contradiction des opinions est un fait indéniable. Que peut on en tirer? Rien. Car d’abord voilà au moins un point sur lequel il n’y a pas contradiction, et cela suffit pour que l’argument croule… Enfin, pour ce qui regarde spécialement les contradictions des philosophes, c’est se tenir à un niveau d’observation très extérieur et très superficiel que de voir seulement l’opposition des systèmes. Sous jacents à la diversité, il y a un petit nombre de principes dans lesquels tous les philosophes communient dès lors qu’ils philosophes, et qu’on peut appeler avec Leibniz philosophia perennis. L’unité est aussi réelle et aussi évidente que la diversité. »
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Spinoza n’avait pas tort de dire que le scepticisme est en principe une secte de muets. Mais comme en fait les sceptiques sont d’intarissables discoureurs, nous retrouvons la contradiction…''