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Tertullien contre Marcion et Dawkins

Posté : 06 juil.24, 13:24
par ChristianK
Comme déjà vu Dawkins, du fond de son incompétence volontaire puisqu’il avoue ne pas étudier la théologie naturelle (philo) ou religieuse, prenant ces disciplines pour des discours sur les fées, prend l’ancien testament au 1er degré, avec un anthropomorphisme évident :


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1.1)

D. dit que Dieu doit être un modèle alors que dans l’AT il est plein de défauts :

51 (Dieu AT : tyran jaloux, injuste, raciste, infanticide
79 (jalousie maniaque de Dieu vs autres dieux


--D’abord Dieu est Dieu, pas l’homme donc il n’est pas soumis à toutes les règles humaines, il peut tuer (reprendre ce qu’il a prêté) tout homme à tout moment sans que ce soit un crime, ce que l’homme n’a pas le droit de faire. Donc D. raisonne par anthropomorphisme. Pire, pour cette raison, Dieu n’est pas un modèle en tout car l’imiter serait péché d’orgueil, se prendre pour Dieu; il ne faut justement pas l’imiter, en beaucoup de choses.
Idem pour le reste : Jalousie signifie unique fin ultime, prendre pour fin autre chose que Dieu est idolâtrie; De plus jalousie est un terme analogique pour se faire comprendre car Dieu n’a pas de passion. Tyran : tous les pouvoirs sont à lui, c’est tout simplement la nature des choses, il est législateur premier et cause première de la nature humaine. Raciste signifie simplement qu’un peuple ou individu peut avoir une mission particulière, par décret divin.


1.2)

275 (sacrifice D’ abraham est criminel; comme à Nuremberg : obéir aux ordres. Child abuse;
280 (Josué a Jericho comme Hitler en Pologne


--Bizarreries comiques encore une fois anthropomorphiques : Le sacrifice d’Abraham est un test d’obéissance et là est le message; et même s’il avait été exécuté ca n’aurait pas été un crime car Dieu rappelle à lui tous les fils qu’il veut quand il veut, c’est son absolue prérogative, pas celle de l’homme; faut voir les choses sub species aeternitatis.
ET justement, obéir à un ordre divin est par définition juste. D’où justice de Josué dans ce cas particulier; on peut très bien présumer que les gens de Jericho occupaient injustement ce territoire ou étaient criminels d’une autre facon.

286 (Dieu demande à Jésus le sacrifice , Dieu sadomaso donc pervers

--incroyablement incompétent. Le sacrifice est une offrande, éventuellement jusqu’à la mort. Aucun plaisir direct, encore moins sexuel ou sensible , n’est tiré d’une offrande. Seul le plaisir moral d’un devoir accompli dans une circonstance.
Pour la demande d’expiation, c’est simplement la nature des choses, le péché est comme un vol de prérogative qui demande remboursement, rééquilibrage, dé-compense. Dieu ne le demande pas vraiment, ou n’a pas le choix de le demander, comme il ne peut faire de cercles carrés, la nature même du péché exige réparation pour que tout soit rééquilibré, pour le bien même du pécheur (qui répare). Certes le Xt n’avait pas péché, mais il avait nature humaine, et cette nature humaine avait péché, il pouvait ainsi satisfaire pour l’humanité en même temps que servir de modèle d’offrande.

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Si Dawkins avait été compétent, il aurait étudié le caractère extrêmement ancien de ses objections, déjà ^présentes chez Marcion (+160) au 2e siècle, et passées au crible par Tertullien dans Contre Marcion, et il aurait pu prendre comme point de départ de sa critique les réponses de Tertullien (sans parler des réponses de Leibniz à Bayle, d’un caractère plus systématique, bien que moins directement sur ces questions).
L’idée n’est pas que Tertullien est invincible mais que toute étude sérieuse suppose un examen de la status questionis, par simple compétence, pour ne pas redécouvir la lune. Bien des réponses au « nouvel athéisme » (développé dans la suite du 11 sept 2001) soulignent qu’il n’a pas une once de nouveauté (sauf sur certains points précis en biologie, soulevés par certains courants protestants).


https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Marcion

https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Tertullien

https://fr.m.wikipedia.org/wiki/Contre_Marcion

On peut trouver le contre Marcion ici :

https://fr.wikisource.org/wiki/%C5%92uv ... n/Livre_II

Je cite le livre II et l’idée que le Dieu de l’AT a des défauts non xtiens, écrit vers 200 AD, contre des objections d’avant 160 (mort de Marcion) :



1) L’anthropomorphisme. Dieu est autre et ses droits (par exemple) sont différents
mais en vertu de ton ignorance, tu le discutes insolemment, que dis-je? lu vas jusqu'à l'accuser, comme si tu avais pénétré les mystères de sa nature. Si tu le connaissais, tu ne le blasphémerais pas; tu ne le réfuterais pas. Tu lui restitues son nom, j'en conviens; mais la vivante substance cachée sous ce nom, mais la grandeur éternelle, appelée Dieu, tu la nies audacieusement, faute de pouvoir |54 embrasser dans les mains une immensité qui cesserait d'être incommensurable, si l'homme en avait la mesure. Il entrevoyait d'avance les cœurs des hérétiques, le prophète Isaïe, quand il s'écriait; « Qui a connu les pensées du Seigneur? à qui a-t-il demandé conseil? qui l'a instruit? les routes de l'intelligence et de la sagesse, qui les lui a ouvertes? » L'apôtre a tenu le même langage: « Ô profondeur des trésors et de la sagesse de Dieu! que ses jugements sont incompréhensibles! » (voilà le juge: ) « que ses voies sont impénétrables! » (voilà la sagesse et la science. ) Science, sagesse que personne ne lui a révélées, à moins qu'il ne les tienne de ces superbes détracteurs qui s'en vont répétant: « Voilà qui est indigne de Dieu! Il convenait à la sagesse de faire autrement! comme si quelqu'un pouvait pénétrer dans les conseils de Dieu, excepté l'Esprit de Dieu! Ceux qu'anime l'esprit du monde, ne reconnaissant point de Dieu dans leur propre sagesse, se sont dit: Nous sommes plus clairvoyants que Dieu. »...
2)Les ordres imposés par Dieu ne sont pas pour son bien à lui d’abord mais pour le bien de l’homme, pour qu’il atteigne sa fin dernière :
Cette loi même que tu blâmes, que tu tortures en injurieuses controverses, c'est encore la bonté qui l'a imposée à l'homme, pour enchaîner l'homme à son Dieu par son propre intérêt. Livré à lui-même et affranchi du joug divin, qu'eût-il semblé? un objet de dégoût pour son maître, un autre animal jeté pêle-mêle parmi ces animaux stupides qui devaient lui obéir, et que Dieu n'abandonne à leurs libres penchants que pour attester le mépris où il les fient. Au lieu de cela l'éternelle Sagesse a voulu que l'homme seul pût se glorifier d'avoir été jugé digne de tenir sa loi de Dieu, et que, créature raisonnable, élevée à l'intelligence et au discernement, il fût contenu par une liberté raisonnable, soumis au monarque qui lui. avait soumis la nature.
3)les punitions divines sont annoncées (révélées), non seulement elles sont justes, mais protectrices, elles éloignent du mal :
Les bienveillantes prévisions de la bonté ne s'arrêtèrent point là. « Le jour où vous mangerez de ce fruit, dit-elle. à nos premiers parents, vous mourrez de mort. » Dernier acte de miséricorde qui leur signalait les funestes conséquences de la transgression, de peur que l'ignorance du péril ne favorisât l'infraction du précepte. Si la promulgation de la loi était marquée au coin de la sagesse, la même sagesse demandait que, pour faire respecter la loi, un châtiment fût assigné à la prévarication. Mais ne l'oublions pas! annoncer d'avance le châtiment, c'était ne pas le vouloir. Reconnais donc la bonté de notre Dieu. Elle se manifeste de toutes parts, dans les œuvres, dans le langage, dans les miséricordes, dans les prévisions, dans les préceptes, dans les avertissements.
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4)Le mal est permis par cohérence avec la liberté, et la prescience n’y change rien :
Si votre dieu est bon, puisqu'il avait la prescience de l'avenir et le pouvoir d'empêcher le mal, pourquoi a-t-il souffert que l'homme, l'homme son image et sa ressemblance, ou plutôt sa substance elle-même par l'origine de son ame, se laissât surprendre par le démon, et infidèle à la loi tombât dans la mort? Si la bonté consistait à ne rien vouloir de pareil, la prescience à ne pas ignorer l'événement, la puissance à l'écarter, jamais ne serait arrivé ce qu'il pouvait advenir avec ces trois conditions de la majesté divine. Puisque cela est arrivé, il est donc certain que la bonté, la prescience, le pouvoir de votre Dieu sont de vaines chimères. La chute eût-elle été possible si Dieu était ce que vous le faites? Elle est arrivée; donc votre Dieu n'a ni bonté, ni prescience, ni pouvoir. »

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Si la pensée éternelle n'avait pas lu dans l'avenir la transgression de la loi qu'elle imposait, elle n'aurait pas placé sous la menace de la mort la transgression et donné ainsi une garantie contre la transgression: or puisqu'il y a en Dieu des attributs qui ne permettent pas qu'aucun mal ait pu, ail dû arriver à l'homme, ...



Mais alors pourquoi placer entre les mains de |61 l'homme une liberté et une puissance qui devaient lui être si fatales? »

Réponse : Afin de mieux attester la réalité du libre arbitre, et la dignité de cette institution par rapport à Dieu, je vais prouver d'abord que Dieu a dû le régler ainsi, en démontrant que cette combinaison était préférable. Ici encore se manifesteront la bonté et la sagesse divines; car ces deux attributs marchent inséparablement unis dans les œuvres de notre Dieu. La sagesse sans la bonté n'est plus la sagesse; la bonté sans la sagesse n'est plus la bonté, si ce n'est peut-être chez le dieu de Marcion, où elle s'allie à l'extravagance, ainsi que nous l'avons reconnu plus haut. Il fallait que Dieu fût connu. Dessein éminemment bon et raisonnable, on ne le contestera point. Un être digne de connaître Dieu était nécessaire: or, quel être plus capable de remplir ce but, que l'image et la ressemblance de Dieu? Voilà encore une conception bonne et honorable assurément. Il fallait donc que « l'image, que la ressemblance de Dieu » fût dotée du libre arbitre et de l'indépendance, caractères augustes qui manifestassent à tous les regards l'image et la ressemblance du Très-Haut.

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Enlevez-lui son libre arbitre; enchaîné au bien par la nécessité, au lieu de s'y porter spontanément, il est assujetti d'autre part, en vertu de l'infirmité de sa nature, aux invasions du mal, toujours esclave, tantôt du mal, tantôt du bien. La plénitude du libre arbitre lui fut donc accordée pour l'un comme pour l'autre, afin que s'appartenant constamment à lui-même, il se maintînt volontairement dans le bien, ou se jetât volontairement dans le mal.

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Que la liberté disparaisse; que l'homme se jette dans le vice, ou s'attache à la vertu indépendamment de sa volonté, par les lois d'une nécessité aveugle, où seraient la justice de la récompense, la justice du châtiment? Tel a été le but de la loi. Loin d'exclure la liberté, elle la confirme,

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Il était donc conséquent que Dieu n'intervînt plus dans la liberté qu'il avait une fois départie à l'homme, c'est-à-dire qu'il renfermât en lui-même la prescience et la toute-puissance par lesquelles il aurait pu empêcher que l'homme, essayant de faire un mauvais usage de sa liberté, ne tombât dans le mal. Intervenir dans celle circonstances c'était anéantir le libre arbitre qu'il lui avait confié avec tant de bonté et de sagesse. Supposons qu'il soit intervenu. Supposons qu'il eût étouffé le libre arbitre, en arrêtant la main prêle à toucher l'arbre fatal, en éloignant l'insidieux serpent de la présence de la femme, n'est-ce pas alors que Marcion se fût écrié: « O maître inconséquent avec lui-même! caractère mobile, infidèle à son œuvre, brisant ce qu'il avait fait! A quoi bon permettre le libre arbitre pour l'enchaîner ensuite?

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Le libre arbitre ne rejettera plus la faute sur l'auteur de qui il émane, mais sur la créature qui en a perverti l'usage. En un mot, quel mal attribuer au Créateur? La prévarication de l'homme? Mais ce qui appartient à celui-ci n'appartient point à Dieu: on ne peut considérer comme auteur du délit celui qui le défend, je n'ai pas dit assez, celui qui le condamne.u

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ON voit ici que les 2 biens , liberté et bon usage de cette liberté doivent être maintenus, bien que distingués : la liberté est un bien, mais davantage instrumental, elle n’a pas pour fin la liberté, mais le bien, la perfection. C’est cette perfection, les vertus, qui est un bien final. Les 2 sont nécessaires pour la nature humaine; les animaux atteignent leurs biens par instinct (appétit sensible), sans liberté, les hommes par volonté (appétit rationnel), qui implique liberté et possibilité de faire le mal. Du point de vue de l’atteinte des fins, la possibilité de faire le mal est moins parfaite, mais du point de vue du moyen de l’Atteinte, elle est infiniment plus parfaite, car autonome, autoperfectionnante.


5)les punitions sont consécutives à la chute : En langage postérieur, Dieu veut le salut de tous de volonté antécédante, la damnation de certains de volonté conséquente :

. La justice, la répression, ou, pour parler le langage des Marcionites, la cruauté n'éclate qu'après sa chute.
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. Ainsi la bonté de Dieu découlant de son essence, avait paru d'abord: la sévérité apparut ensuite, provoquée par le crime. |72 L'une inhérente à la nature, l'autre accidentelle; l'une apanage de la divinité, l'autre accommodée à l'homme; l'une naissant d'elle-même, l'autre née d'une cause. ...

6)Il est incohérent de nier la justice punitive ; la notion de perfection a priorité :
du juge, quoique ton dieu juge et condamne également, ainsi que nous l'avons démontré. Ou bien non! dépouille-le de ses fonctions; voilà que tu en fais un législateur assez frivole et assez inconséquent pour établir des lois dépourvues de sanction et de jugement. Mais n'est-ce pas anéantir Dieu que d'anéantir sa justice? Où en seras-tu réduit? Il te faudra indubitablement accuser la justice qui constitue le juge véritable, ou la ranger parmi les maux, qu'est-ce à dire? transformer l'injustice en bonté...

Encore une fois, pas de bonté sans justice. Tout ce qui est juste est bon....



un Dieu sous lequel le crime dormît en paix? Un Dieu qui fût le jouet du démon? Le Dieu, bon, selon toi, serait celui qui réussirait le mieux à rendre l'homme méchant, puisqu'il lui assurerait l'impunité

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Tant il est vrai que la justice est la plénitude de la divinité, qu'elle manifeste à nos yeux un Dieu parfait, et nous montre dans l'être souverain un père et un maître; un père par sa clémence, un maître par sa loi; un père par son autorité indulgente, un maître par son autorité rigoureuse; un père qu'il faut chérir tendrement, un maître qu'il faut redouter nécessairement; chérir parce qu'il aime mieux la miséricorde que le sacrifice, « redouter parce qu'il a en aversion le péché; chérir parce qu'il aime mieux le repentir du pécheur que sa mort, » redouter parce qu'il repousse les pécheurs impénitents.

Aussi, à côté de ce précepte « Tu aimeras ton Dieu, » la loi a-t-elle ajouté: « Crains le Seigneur! » D'une part, elle s'adressait à la soumission, de l'autre à l'orgueil en révolte.

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7)Il faut distinguer, avec St Thomas, le mal de peine et le mal de faute. Un châtiment qui est mal de peine peut être un bien s’il réprime ou punit justement un mal de faute. :
Abusant d'un terme commun qui confond dans son ambiguïté les deux espèces de maux, et s'applique au péché non moins qu'au châtiment, nos adversaires |76 attribuent ce double mal au Créateur pour le répudier ensuite comme auteur de la prévarication. Pour nous, nous distinguons ici. Séparant, comme il convient, le mal de la contravention d'avec le mal du supplice, le mal de la faute d'avec le mal du châtiment, nous renvoyons à chacun des auteurs ce qui le regarde, au démon la prévarication et la faute, au Dieu créateur le supplice et le châtiment. D'une part œuvre de malignité, de l'autre œuvre de justice. Enfin, des jugements et des rigueurs après la révolte et la transgression, voilà de quels maux le Créateur a entendu parler; mais ce sont des maux inhérents aux attributions du juge.

Il est bien vrai que ses sentences deviennent des maux terribles pour ceux qu'elles atteignent: mais, considérées en elles-mêmes, elles sont des biens, parce qu'elles sont l'expression de la justice, la protection de l'innocence, la sanction de la loi, la répression du crime, et sous ce point de vue, elles sont dignes de Dieu.
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8)Tertullien ajoute la notion d’analogie, Dieu n’ayant pas de passions comme la colère (il ne faut pas utiliser le vocabulaire des passions humaines tel quel à Dieu; la notion des noms divins est déjà là:
La sévérité est bonne parce qu'elle est juste; si le juge est bon, il est juste. De même toutes les conséquences qui dérivent d'une juste sévérité sont bonnes, la colère, la jalousie, la rigueur. Elles sont la dette de la sévérité, comme la sévérité est la dette de la justice.

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Mais, ajoutent les hérétiques, échos d'Epicure dans cette occurrence, si votre Dieu est capable de colère, de haine, de jalousie, de vengeance, il est donc changeant et corruptible; il est donc mortel. »

Réponse :
Ces raisonnements n'effraient point des chrétiens qui croient en un Dieu mort et néanmoins vivant éternellement. Insensés les hommes qui mesurent Dieu à la mesure de l'homme, et qui, par là même que les passions annoncent chez nous une nature corrompue, appliquent à la Divinité |79 notre corruption et nos misères. Ne nous laissons pas tromper ici par la ressemblance des mots; mais, distinguons soigneusement les substances! Les sens de Dieu et ceux de l'homme, quoique désignés sous un terme commun, différent autant que leur nature. Ainsi l'on attribue à l'Eternel une main, des pieds, des oreilles, des yeux; mais ces yeux, ces oreilles, cette main, ces pieds seront-ils semblables aux nôtres parce qu'ils portent le même nom? Autant il y a de différence entre le corps de Dieu et celui de l'homme, malgré la communauté du mot membre, autant il y a de différence entre l'ame divine et l'ame humaine, sous cette appellation générale de sentiments, corrupteurs dans l'homme parce que la substance humaine est corruptible, incapables d'altérer l'essence divine parce que celle-ci est incorruptible. C

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9)Les obligations rituelles visent le bien de l’homme :
Quant à ce long, embarrassant et minutieux détail de sacrifices, d'oblations, de cérémonies et de rites divers, personne n'accusera Dieu de l'avoir prescrit pour lui-même, lui qui s'écrie si |83 ouvertement: « Qu'ai-je besoin de la multitude de vos victimes? Qui vous a demandé d'apporter ces offrandes? » Mais admirons encore ici la sagesse de la providence. Ne connaissant que trop la pente du peuple juif vers l'idolâtrie et la prévarication, elle prit soin de l'attacher au culte véritable par un appareil de cérémonies imposantes, aussi propres à frapper les sens que la pompe des superstitions païennes elles-mêmes. Elle voulait qu'à cette pensée: Dieu l'ordonne, cela plaît à Dieu, Israël détournant ses regards des rites idolâtriques, ne cédât jamais à la tentation de se faire des idoles.


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Elle est l'œuvre d'une bonté souveraine, qui travaillait à dompter la rudesse de son peuple, et soumettait, par des rites multipliés et fatigants, une foi novice encore. Nous ne parlons point ici des sens mystiques de cette loi, toute spirituelle, toute prophétique, symbole auguste de l'avenir. Il suffit pour le moment de démontrer que son but naturel étant d'enchaîner l'homme à Dieu, elle ne peut mériter aucun blâme, sinon celui des pervers qui ne veulent pas servir Dieu.

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Nous avons parlé de la bienfaisante sagesse qui avait présidé à l'institution des sacrifices. Ils étaient destinés à éloigner le peuple du paganisme. Que si Dieu rejeta par la suite ces offrandes: « Qu'ai-je besoin de la multitude de vos sacrifices? etc. » il voulait nous faire comprendre qu'il n'avait point à ces cérémonies un intérêt personnel: « Je ne boirai plus désormais, dit-il, le sang des taureaux, » parce qu'ailleurs il avait dit: Le « Dieu éternel n'aura ni faim ni soif. » Il a beau abaisser un regard de complaisance sur les victimes d'Abel, et respirer avec délices les holocaustes de Noë, quelle si grande suavité pouvait-il trouver dans les entrailles d'une génisse, ou quel parfum dans l'odeur des victimes consumées par le feu? Mais l'ame pure et craignant le Seigneur de ceux qui offraient à l'Eternel les dons de sa munificence, voilà quel était son plus délicieux aliment et le parfum de suavité qui montait vers lui. Qu'importaient à sa félicité les sacrifices de l'univers? Il les revendiquait, seulement à titre d'hommages dus à sa majesté. Un client offre à un grand de la terre, ou à un prince qui n'a besoin de rien, un présent quel qu'il soit.

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10) Immutabilité divine contient en elle-même tous les changements futurs des événements, en lien avec la prescience :
Veux-tu l'accuser d'inconstance, à l'égard des personnes, parce qu'il réprouve ceux qu'il avait élus, et d'imprévoyance parce qu'il élit ceux qu'il doit réprouver un jour, comme s'il condamnait ses jugements passés, ou qu'il ignorât ses jugements à venir? ---- Rien de plus conforme à la bonté et à la justice que de rejeter ou d'élire d'après les mérites actuels.


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Mais Dieu ignorait-il ce qui suivrai!? Tu soulèverais l'indignation de tous, si tu imputais l'imprévoyance à un Dieu dont tu proclames la prescience, dès lors que tu admets sa divinité, car la prescience est un attribut essentiel de la divinité. Encore un coup, ce repentir accusait amèrement l'infidélité de Saul. L'élection de ce roi est irréprochable. Donc, les regrets divins sont la condamnation de Saul plutôt que de la divinité.

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La malice, dans ce passage, loin de s'appliquer à la nature du Créateur, en tant que mauvaise, se rapporte à cette même puissance de juge, en vertu de laquelle il disait tout à l'heure: « C'est moi qui crée le mal, » et, « Voilà que je vais répandre sur vous toute espèce de maux. » Mais quels maux? Les peines du péché, et non le péché lui-même. Nous les avons suffisamment justifiées en démontrant qu'elles sont honorables pour le juge. De même que sous leur appellation générique de mal elles ne sont point répréhensibles dans le juge, et à ce titre seul ne prouvent point sa cruauté; de même, il faut encore entendre ici par malice les châtiments que le souverain juge inflige eu vertu de ses fonctions judiciaires, et qui sont conformes à la bonté. C

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Ce principe établit la différence qui sépare le repentir divin d'avec le nôtre. Il n'a pour origine ni l'imprévoyance, ni la légèreté, ni la condamnation d'un bien imprudemment exécuté, ou d'un mal méchamment commis par le Créateur. Quelle en sera donc la nature? Elle resplendit, si vous n'entendez pas le repentir à la manière humaine. On n'y trouvera rien autre qu'un changement de la volonté primitive, admissible et irréprochable dans l'homme, à plus forte raison dans la divinité dont toutes les volontés sont pures. Chez les Grecs, le mot repentir 1 se compose de deux autres qui signifient non pas l'aveu d'un tort, mais le changement d'une volonté qui de la part de Dieu se gouverne d'après les modifications de notre humanité.

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11)L’incarnation n’est pas une imperfection mais une condescendance bienveillante :
Pour en finir d'un mot avec toutes les faiblesses, indignités ou abaissements que vous allez recueillant çà et là, dans le but de décrier le Créateur, je vous opposerai un simple et irrésistible argument. Dieu n'a pu descendre parmi les hommes d'une manière visible, sans prendre les organes et les affections de l'humanité, voile protecteur sous lequel il tempérait les rayons de la majesté divine que n'aurait pu supporter notre faiblesse. Organes, affections indignes de lui, j'en conviens, mais nécessaires à l'homme, et par là même dignes de la divinité, parce que rien n'est si digne de Dieu que le salut de l'homme.